Chili: le projet de Constitution consacre de nouveaux «droits sociaux»

Photo publiée par la présidence chilienne montrant le président chilien Gabriel Boric au palais présidentiel de La Moneda à Santiago, le 27 avril 2022. PHOTO AFP / PRÉSIDENCE CHILIENNE / XIMENA NAVARRO
Photo publiée par la présidence chilienne montrant le président chilien Gabriel Boric au palais présidentiel de La Moneda à Santiago, le 27 avril 2022. PHOTO AFP / PRÉSIDENCE CHILIENNE / XIMENA NAVARRO
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Publié le Samedi 14 mai 2022

Chili: le projet de Constitution consacre de nouveaux «droits sociaux»

  • Fin 2019, la rédaction d'une nouvelle Loi fondamentale avait constitué une porte de sortie politique au soulèvement social sans précédent qui avait secoué le pays de 19 millions d'habitants pour réclamer plus de justice sociale
  • A la clé, l'objectif de remplacer la Constitution votée pendant la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990) et considérée par beaucoup comme un frein à toute réforme sociale de fond

SANTIAGO DU CHILI : Après plus de dix mois de travaux, l'Assemblée constituante du Chili présentera officiellement lundi son projet de nouvelle Constitution, un texte qui consacre un "catalogue de droits sociaux" totalement inédit dans ce pays sud-américain régi pendant des décennies par des politiques ultralibérales.

Fin 2019, la rédaction d'une nouvelle Loi fondamentale avait constitué une porte de sortie politique au soulèvement social sans précédent qui avait secoué le pays de 19 millions d'habitants pour réclamer plus de justice sociale. 

A la clé, l'objectif de remplacer la Constitution votée pendant la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990) et considérée par beaucoup comme un frein à toute réforme sociale de fond.

"Le principe de la Constitution de 1980 était de consacrer des solutions privées à des problèmes publics. Elle était hostile à l'action de l'Etat dans l'économie et pour allouer des droits sociaux", rappelle à l'AFP Javier Couso, avocat constitutionnaliste et professeur à l'Université Diego Portales.

Résultat: le Chili est un des pays les plus inégalitaire d'Amérique latine, et le patrimoine des plus riches en 2021 a représenté 16,1% du Produit intérieur brut (PIB) du pays, selon la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (Cepalc).

Le projet constitutionnel, dont la version finale sera remise le 5 juillet au nouveau président de gauche, Gabriel Boric, avant d'être soumis à un référendum obligatoire début septembre, consacre désormais dans son premier article les principales revendications des manifestants.

"Le Chili est un Etat social et démocratique de droit. Il est plurinational, interculturel et écologique. Il se constitue comme une République solidaire, sa démocratie est paritaire et il reconnaît comme valeurs intrinsèques et inaliénables la dignité, la libérté, l'égalité substantielle des êtres humains et leur relation indissoluble avec la nature". 

D'ici début juillet, une Commission d'harmonisation révisera les quelque 400 articles votés par les 154 Constitutants, en majorité des citoyens indépendants, pour veiller à la cohérence de la forme, mais sans toucher au fond. 

Retraites, eau, IVG

Après des mois de débats parfois enflammés, et le vote article par article à la majorité des deux tiers, plusieurs propositions ont finalement été laissées de côté: possibilité de deux mandats présidentiels successifs, référendum révocatoire, perte d'autonomie de la Banque centrale ou nationalisation des mines...

"Rien de ce que (le texte) contient sort de la norme internationale" et "n'est pas dans d'autres Constitutions" à l'étranger, souligne auprès de l'AFP Tomas Jordan, avocat constitutionnaliste. 

Fortes revendications de la rue, le droit à une santé et une éducation publiques de qualité, à un logement et à une retraite dignes figurent en bonne place dans le texte.

Il prévoit ainsi la création d'un système national de santé public et universel. Parallèlement, un système de Sécurité sociale doit permettre une réforme du système des retraites avec notamment une contribution non seulement des travailleurs, mais aussi des employeurs. 

Dans les années 1980, le Chili avait été un pays pionnier pour la mise en place d'un système de pension par capitalisation individuelle qui a plongé de nombreux retraités dans la pauvreté. 

"Toutes les personnes ont droit à l'éducation" rappelle aussi le projet qui prévoit un "système national d'éducation" dans un pays où le fossé reste grand entre établissements privés et publics où de nombreux élèves déplorent des "salles de classe en mauvais état" et un "manque de professeurs".

Le texte renforce aussi l'autonomie de la justice et reconnaît "les systèmes juridiques des peuples autochtones" dont la compétence restera toutefois déterminée par la loi. Il propose également de remplacer le Sénat par une Chambre des régions. 

En matière d'environnement, sujet très présent dans les débats, la nouvelle Constitution "garantit à tous le droit à une eau et à des installations d'assainissement suffisantes, saines, acceptables et abordables" et interdit que l'eau soit privatisée comme c'est le cas actuellement. 

Actuellement, "le Chili est le seul pays au monde dont la Constitution consacre le droit à la propriété privée de l'eau", rappelle Rodrigo Espinoza, analyste économique à l'université Diego Portales. 

Enfin, si le texte ne mentionne pas le mot "avortement", il prévoit que l'Etat fournisse "les conditions d'une interruption volontaire de grossesse" dans un pays où celle-ci n'est autorisée qu'en cas de danger pour la vie de la mère, de l'enfant, ou de viol.


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Frappes ukrainiennes sur les raffineries et forte demande: en Russie, l'essence devient chère

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
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  • Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde
  • A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro)

MOSCOU: "Doucement mais sûrement": Oleg fait le plein d'essence à Moscou et vitupère contre la hausse des prix nourrie par une demande accrue et les frappes ukrainiennes contre les infrastructures pétrolières, secteur clé de l'économie russe que les Occidentaux veulent sanctionner.

"Tout le monde l'a remarqué", tonne Oleg, retraité de 62 ans: les prix des carburants vont crescendo à la pompe. Au 1er septembre, l'essence au détail coûtait 6,7% de plus que fin 2024, selon Rosstat, l'agence nationale des statistiques.

Ce renchérissement s'inscrit dans un contexte de hausse générale des prix, avec une inflation annuelle qui a été de 8,14% en août, à l'heure où la Russie intensifie l'offensive qu'elle a lancée en 2022 en Ukraine.

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg.

Et depuis le début de l'été, les réseaux sociaux sont saturés de vidéos montrant des files d'attente devant les stations-service de l'Extrême-Orient russe, en Crimée - région que la Russie a annexée au détriment de Kiev en 2014 -, et dans certaines régions du sud proches de l'Ukraine, pour cause de pénurie.

Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde.

Raffineries frappées 

A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro). Ce prix, qui reste bien inférieur à ceux affichés dans de nombreux pays européens, surprend le consommateur russe, habitué à ne pas payer cher l'essence et au revenu moyen moindre.

Artiom, un Moscovite qui ne souhaite pas donner son nom de famille, observe cette augmentation "depuis le début de l'année". "Pour des personnes ordinaires, 300 ou 400 roubles en plus par plein (3 à 4 euros, ndlr), cela commence à être sensible", dit-il.

Sur le site Gazeta.ru, Igor Iouchkov, analyste au Fonds national de sécurité énergétique, met en avant l'augmentation d'"environ 16%" du droit d'accise (impôt indirect) depuis le 1er janvier et la baisse de subsides versés aux compagnies pétrolières.

Car, comme l'explique à l'AFP Sergueï Teriochkine, expert en questions énergétiques, "plus les subventions sont faibles, plus la rentabilité est faible", ce qui pousse les pétroliers à "répercuter" ces pertes sur les prix au détail.

La demande a, elle, été dopée par les départs en vacances et les engins agricoles.

Restent - surtout - les frappes contre les raffineries et dépôts de pétrole que l'Ukraine a multipliées afin de toucher Moscou au portefeuille et d'entraver sa capacité à financer son offensive.

"Les frappes ont ciblé de grandes raffineries dans la partie européenne de la Russie", notamment dans les régions de Samara, Riazan, Volgograd et Rostov, énumère Alexandre Kots, journaliste russe spécialiste des questions militaires, sur Telegram.

"Ce n'est rien!" 

L'une de ces attaques, à la mi-août, a touché la raffinerie de Syzran, dans la région de Samara, selon l'état-major ukrainien. Le complexe se trouve à plus de 800 km de la frontière ukrainienne. Il est présenté par Kiev comme le "plus important du système Rosneft", géant russe des hydrocarbures.

Moscou n'a pas quantifié l'impact de ces frappes, mais dans le journal Kommersant, l'analyste Maxime Diatchenko parle d'une baisse de la production "de près de 10%" depuis le début de l'année.

"C'est rien!", assure Alexandre, un homme d'affaires moscovite, après avoir rempli le réservoir de sa berline allemande. "Une frappe, deux frappes, trois frappes, ça n'est rien pour le marché en général ou pour les prix".

"Le pays a besoin d'argent. L'augmentation du prix de l'essence, c'est une façon d'augmenter le revenu de l'Etat", estime de son côté Vladimir, un Moscovite de 50 ans.

Pour tenter de stabiliser la situation, Moscou a prolongé une interdiction d'"exporter de l’essence pour les automobiles" jusque fin octobre.

La Russie reste par ailleurs un exportateur majeur de pétrole brut, des exportations que les Occidentaux entendent étouffer pour tarir une des principales sources de financement de l'offensive russe en Ukraine, pays qui compte l'Union européenne comme principale alliée.