Liban: des élections prometteuses pour un peuple épuisé?

Des proches de pompiers libanais décédés lors de l'explosion de Beyrouth en 2020 assistent à une messe chrétienne maronite au port de Beyrouth, la capitale du Liban, le 4 août 2021 (Photo, AFP).
Des proches de pompiers libanais décédés lors de l'explosion de Beyrouth en 2020 assistent à une messe chrétienne maronite au port de Beyrouth, la capitale du Liban, le 4 août 2021 (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 15 mai 2022

Liban: des élections prometteuses pour un peuple épuisé?

  • De nombreux Libanais pourraient décider de s’abstenir de voter en raison de la flambée des prix du carburant
  • Le Liban est en proie à la faim et se trouve affecté par une crise économique caractérisée par une inflation galopante

BEYROUTH: Le 15 mai, le jour des élections législatives, de nombreux Libanais pourraient décider de s’abstenir de voter en raison de la flambée des prix du carburant qui fait de chaque déplacement un luxe que beaucoup d’entre eux ne peuvent se permettre.

Enfoncé dans ses crises économiques successives, le gouvernement libanais a en effet décidé de lever les subventions des carburants de manière progressive à partir de novembre 2021. Conséquence de cette décision, la population libanaise se paupérise de plus en plus et se trouve incapable de subvenir à ses besoins les plus élémentaires.

«Je ne ferai pas un trajet de deux heures pour offrir une seconde chance aux personnalités qui nous ont appauvris», affirme Samar* à Arab News en français.

Ce dernier habite à Jounieh, une ville du Kesrouan, dans le Mont-Liban. Elle est originaire d’Akkar, un district situé à 90 kilomètres de Jounieh. Avec la flambée des prix du carburant au Liban, ce trajet demande trois bidons d’essence, ce qui représente 1 500 000 livres libanaises (LL) – soit 936 euros – selon le tableau des prix de carburants délivré par le ministère libanais de l’Énergie mercredi dernier.

Pourtant, tous ne partagent pas la même vision des choses.

«Je suis prête à verser tout mon salaire pour me déplacer et voter pour de nouvelles figures d’opposition, pour les personnes qui ont été avec nous, dans les rues, lors de la révolution du 17-Octobre. Ceux-là méritent une chance!», s’exclame ainsi Brigitte*, une autre citoyenne interrogée par Arab News en français.

Les figures de l'opposition au Liban se préparent pour les élections législatives malgré leurs faibles chances de réussite, alors que les crises ont estompé la ferveur révolutionnaire qui avait secoué le pays à la fin de l’année 2019.

Le Liban est en proie à la faim et se trouve affecté par une crise économique caractérisée par une inflation galopante. La monnaie nationale libanaise a vu sa valeur fondre de près de 90% depuis 2019. Le salaire minimum mensuel, de 675 000 LL (421 euros), ne vaut guère plus de 25 dollars au marché noir (1 dollar = 0,95 euro). Environ 80% de la population vit désormais en dessous du seuil de pauvreté, selon l'ONU.

Selon un rapport d'Oxfam publié au mois d’avril, seuls 54% des quelque 4 670 personnes interrogées ont déclaré vouloir voter. Mais près de 50% de celles qui voteront ont précisé qu'elles choisiraient un candidat indépendant. En outre, parmi celles qui ont déclaré ne pas vouloir voter, plus de la moitié ont estimé qu'il n'y avait aucun candidat prometteur, selon Oxfam.

«Celui qui paie le plus»

La loi électorale prévoit que le vote doit se faire dans le lieu d’origine, et non sur le lieu de résidence. En pleine crise économique, de nombreux Libanais devront donc se rendre dimanche dans des villages pour glisser leur bulletin dans l’urne. Mais quel politicien mérite ce sacrifice?

La corruption étant un secret de Polichinelle au Liban, il est de notoriété publique que, depuis des décennies, les candidats au pouvoir ont versé des montants «choquants» aux électeurs pour que ces derniers votent en leur faveur, quelle que soit la longueur du trajet qu’ils devaient faire.

«J’irai voter, à tout prix. J’ai même sollicité auprès de mon médecin traitant un rapport médical officiel pour expliquer au chauffeur du bus ma situation médicale et pour qu’il marque plusieurs arrêts au cours du trajet», affirme Khouloud* à Arab News en français.

D’ailleurs, des sources informées affirment que les politiciens assurent que les électeurs disposeront de bus pour les conduire jusqu’à leur village.

Au Mont-Liban, ces sources confirment que chaque vote «coûte» entre 100 et 1 000 dollars; cela varie en fonction de la fortune du candidat en lice. Le taux de change atteint les 27 000 LL (près de 17 euros) pour 1 dollar sur le marché noir. «2 700 000 LL [1 688 euros], quand même, c’est un salaire de deux mois!», s’exclame Majed* à Arab News en français.

Les tarifs des carburants routiers au Liban sont désormais tellement élevés que les citoyens doivent débourser leur salaire pour faire le plein. Le bidon de 20 litres a dépassé les 507 000 LL (317 euros). Ces chiffres dépassent les précédents records, selon la dernière grille officielle des tarifs. Lorsqu’on sait que le salaire minimum au Liban est de 675 000 LL (422 euros), c’est peu dire que l’argent électoral arrive à point nommé pour de nombreux citoyens au Liban…

La majorité des partis libanais ont distribué des coupons d'essence aux électeurs, en particulier dans les régions rurales, pour s'assurer que la hausse des prix du carburant ne dissuaderait pas les gens de voter, écrit le site Al Markaziyah.

L’enjeu de ces élections est de savoir si, malgré cette crise sans précédent, les Libanais du Liban parviendront à faire abstraction des pressions et de l’argent électoral pour procéder à un renouvellement des élites. La «vague» de changements amorcée par les Libanais expatriés pourra-t-elle trouver écho au Liban?

Il faut noter que près de 130 000 expatriés libanais sur les 225 000 inscrits à l'étranger ont pris part aux élections qui ont eu lieu vendredi et dimanche dans cinquante-huit pays, selon les données préliminaires du ministère.

Aux Émirats arabes unis, la file d'attente devant les consulats et les ambassades du Liban s'est étendue sur près de deux kilomètres, ce qui n'a pas découragé des électeurs qui ont patienté sous des températures avoisinant les 45°C. «Je veux voter à tout prix, j’attendrai ici jusqu’au lundi matin. Ce qui importe, c’est d’“arracher” la classe politique au pouvoir qui nous a emportés ici, loin de nos parents», insiste Léa*, une Libanaise qui réside à Dubaï.

«Nous avons pris les rues pendant des nuits et des mois en 2019 afin de montrer nos intentions contre cette élite politique corrompue; cela ne nous fatigue pas d'attendre une seule journée pour un vrai changement», déclarent Hani* et Johnny* à Arab News en français.

À Dubaï et à Abu Dhabi, les jeunes Libanais sont eux-mêmes les révolutionnaires du 17 octobre 2019. Ils votent tous dans l’espoir de revenir dans un pays qui leur assure une vie digne.

Il s'agit des premières élections depuis le soulèvement populaire qui, en octobre 2019, a mené des milliers de Libanais dans la rue pour exiger le départ d'une classe politique accusée de corruption et d'incompétence.

* Les prénoms ont été modifiés.

Le 17 octobre 2019, la colère prend d’assaut les rues libanaises

Le 17 octobre 2019, dans un pays miné par les crises à répétition, la colère des Libanais explose après l'annonce par le gouvernement d'une taxe sur les appels effectués via l'application WhatsApp. Le gouvernement renonce vite à cette mesure, sans apaiser les manifestants pour autant.

La mobilisation culmine avec, certains jours, des centaines de milliers de manifestants qui réclament le départ de la classe dirigeante, accusée de corruption et d'incompétence.

Des slogans ont été créés à travers l’ensemble du Liban pour réclamer ses besoins très élémentaires: «Je veux vivre, je veux respirer», «Je veux trouver un travail au Liban», «Je veux du pain et du bonheur», «Je veux profiter de mes droits de femme», «Je veux de l'électricité, de l'eau et des infrastructures» , «Je veux un meilleur pays pour mes petits-enfants», «Je veux pouvoir m’exprimer sans être arrêté», «Je veux qu’on me restitue l’argent qu’on m’a volé».


Israël appelle à des évacuations dans deux villages du sud du Liban en prévision de frappes

L'armée israélienne a ordonné à deux villages du sud du Liban d'évacuer les bâtiments situés à proximité de ce qu'elle qualifie de sites du Hezbollah, alors que les tensions entre Israël et les groupes militants s'intensifient. (AFP)
L'armée israélienne a ordonné à deux villages du sud du Liban d'évacuer les bâtiments situés à proximité de ce qu'elle qualifie de sites du Hezbollah, alors que les tensions entre Israël et les groupes militants s'intensifient. (AFP)
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  • L’armée israélienne a appelé les habitants de Deir Kifa et Chahour à évacuer, affirmant que des infrastructures militaires du Hezbollah s’y trouvent et annonçant des frappes imminentes
  • Malgré le cessez-le-feu de novembre 2024, Israël poursuit des attaques ciblées au Liban avec le soutien tacite des États-Unis, accusant le Hezbollah de reconstruire ses capacités militaire

JERUSALEM: L'armée israélienne a appelé mercredi la population à évacuer les zones de bâtiments abritant selon elle des installations militaires du mouvement islamiste libanais Hezbollah dans deux villages du sud du Liban, annonçant son intention de les frapper sous peu.

"Les forces [israéliennes] attaqueront prochainement des infrastructures militaires appartenant au groupe terroriste Hezbollah dans différentes zones du sud du Liban, en réponse aux tentatives illégales de l'organisation de se rétablir dans la région", annonce le colonel Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne dans un message en arabe sur X.

L'officier appelle précisément la population à évacuer sans tarder les alentours de deux bâtiments dont il précise, cartes à l'appui, la localisation dans les villages de Deir Kifa et Chahour.

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur en novembre 2024, à l'issue de plus d'un an d'hostilités entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener, avec l'aval tacite des Etats-Unis, des attaques régulières au Liban contre ce qu'elle présente comme des membres ou des installations du mouvement chiite, qu'elle accuse de chercher à reconstituer ses capacités militaires.

Le Hezbollah, allié de la République islamique d'Iran - ennemi juré d'Israël, a été très affaibli par la dernière guerre avec Israël, et Washington a accru la pression ces dernières semaines sur les autorités libanaises pour qu'elles obtienne son désarment, ce que le mouvement islamiste refuse pour l'heure.


L'Arabie saoudite et les États-Unis signent des accords pour approfondir leur partenariat stratégique

La réunion a été coprésidée par le président Trump et le prince héritier Mohammed, en présence de hauts responsables saoudiens et américains. (AFP)
La réunion a été coprésidée par le président Trump et le prince héritier Mohammed, en présence de hauts responsables saoudiens et américains. (AFP)
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  • Lors de la réunion à la Maison Blanche, les deux parties ont passé en revue les relations bilatérales et discuté des efforts conjoints pour faire progresser leurs partenariats stratégiques
  • Elles ont également abordé les développements régionaux et internationaux, ainsi que les moyens de renforcer la sécurité et la stabilité régionales et mondiales

RIYAD: L'Arabie saoudite et les États-Unis ont signé mardi un certain nombre d'accords visant à renforcer leurs liens stratégiques, à l'occasion de la visite du prince héritier Mohammed bin Salman à la Maison Blanche.

Lui et le président américain Donald Trump ont signé des accords sur la défense stratégique, l'intelligence artificielle, l'énergie nucléaire, les métaux critiques, les investissements saoudiens, le partenariat financier et économique, l'éducation et la formation, et les normes de sécurité des véhicules.

Lors de la réunion à la Maison Blanche, les deux parties ont passé en revue les relations bilatérales et discuté des efforts conjoints pour faire progresser leurs partenariats stratégiques.

Elles ont également abordé les développements régionaux et internationaux, ainsi que les moyens de renforcer la sécurité et la stabilité régionales et mondiales.

La réunion était coprésidée par M. Trump et le prince héritier, et de hauts responsables saoudiens et américains y ont assisté.

L'accord de défense affirme que les deux pays sont des partenaires de sécurité capables de travailler ensemble pour faire face aux défis et menaces régionaux et internationaux, a rapporté l'agence de presse saoudienne.

Il approfondit la coordination de la défense à long terme, améliore les capacités de dissuasion et la préparation, et soutient le développement et l'intégration des capacités de défense entre les deux pays, a ajouté l'agence de presse saoudienne.

Le ministre saoudien de la défense, le prince Khalid bin Salman, a déclaré que l'accord "souligne l'engagement ferme des deux nations à approfondir leur partenariat stratégique, à renforcer la sécurité régionale et à faire progresser la paix et la stabilité dans le monde".

L'ambassadrice saoudienne aux États-Unis, la princesse Reema bint Bandar, a déclaré que les "accords stimuleront les investissements dans les deux pays, généreront des opportunités d'emploi pour les Saoudiens et les Américains, et renforceront notre engagement commun en faveur de la sécurité régionale et mondiale".

Un peu plus tôt, dans le bureau ovale, M. Trump a accueilli chaleureusement le prince héritier, qui a annoncé que les investissements américains du Royaume seraient portés à près de 1 000 milliards de dollars, contre une promesse de 600 milliards de dollars annoncée par Riyad au début de l'année.

"Aujourd'hui est un moment très important de notre histoire", a déclaré le prince héritier. "Il y a beaucoup de choses sur lesquelles nous travaillons pour l'avenir.


Un mort et trois blessés dans une attaque près de colonies en Cisjordanie

Une attaque a fait un mort et trois blessés mardi près de colonies israéliennes dans le sud de la Cisjordanie occupée, ont annoncé les services de secours israéliens et l'armée israélienne. (AFP)
Une attaque a fait un mort et trois blessés mardi près de colonies israéliennes dans le sud de la Cisjordanie occupée, ont annoncé les services de secours israéliens et l'armée israélienne. (AFP)
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  • L'attaque a eu lieu au carrefour du Goush Etzion, situé à l'entrée de colonies israéliennes, sur la route entre les villes palestiniennes de Bethléem et Hébron
  • La victime a été identifiée comme Aaron Cohen, un habitant de la colonie de Kyriat Arba, au sud du lieu de l'attaque, selon un communiqué de la mairie

TERRITOIRES PALESTINIENS: Une attaque a fait un mort et trois blessés mardi près de colonies israéliennes dans le sud de la Cisjordanie occupée, ont annoncé les services de secours israéliens et l'armée israélienne.

L'attaque a eu lieu au carrefour du Goush Etzion, situé à l'entrée de colonies israéliennes, sur la route entre les villes palestiniennes de Bethléem et Hébron, dans le sud de la Cisjordanie occupée. Cet endroit a été le théâtre de plusieurs attaques anti-israéliennes depuis fin 2015.

Le Magen David Adom (MDA), équivalent israélien de la Croix-Rouge, a annoncé le décès d'un homme d'une trentaine d'années.

La victime a été identifiée comme Aaron Cohen, un habitant de la colonie de Kyriat Arba, au sud du lieu de l'attaque, selon un communiqué de la mairie.

Le MDA a également déclaré que ses services avaient évacué dans des hôpitaux de Jérusalem trois autres personnes, dont un adolescent de 15 ans "présentant des plaies profondes" et une femme d'environ 40 ans.

L'hôpital Hadassah de Jérusalem a précisé dans un communiqué que la femme, "blessée par balle", avait été hospitalisée dans un état grave.

Selon des médias locaux, elle aurait été blessée durant l'attaque par un tir de soldats visant les assaillants.

L'armée israélienne a précisé que ses "soldats ont éliminé deux terroristes sur place" et que des explosifs ont été "découverts" dans leur véhicule. "Les soldats de l'armée israélienne procèdent à des fouilles et ont mis en place des barrages routiers encerclant la zone", a-t-elle précisé.

L'Autorité générale des affaires civiles palestiniennes a identifié les assaillants comme Imran al-Atrash et Walid Sabbarna, tous les deux âgés de 18 ans et originaires de la région d'Hébron.

"Il s'agit de la deuxième attaque au carrefour du Goush Etzion en un an qui se solde par de graves conséquences", a déclaré à la presse Yaron Rosental, président du conseil régional du Goush Etzion, un bloc de colonies dans la zone du lieu de l'attaque.

Violences records 

Plus de 500.000 Israéliens vivent aujourd'hui en Cisjordanie dans des colonies que l'ONU juge illégales au regard du droit international, au milieu de quelque trois millions de Palestiniens.

"Avec l'armée, nous ferons également payer un prix très élevé aux terroristes et à tout leur entourage, et nous renforcerons également la colonisation", a ajouté M. Rosental.

La veille, des colons extrémistes avaient attaqué le village palestinien de Jabaa, près de Bethléem, après que les forces de sécurité israéliennes ont fait démolir et évacuer l'avant-poste de colonisation juive dit de Tzour Misgavi, dans le bloc de colonies du Goush Etzion.

Les mouvements palestiniens du Hamas et du Jihad islamique, considérés comme des organisations terroristes par les Etats-Unis, l'Union européenne, et Israël, ont salué l'attaque dans des communiqués distincts.

Les violences ont explosé en Cisjordanie depuis le début de la guerre à Gaza déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël.

Selon des données officielles israéliennes, au moins 43 Israéliens, civils et soldats, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens.

Dans le même temps, au moins 1.006 Palestiniens, combattants et civils, y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon un décompte de l'AFP à partir de données de l'Autorité palestinienne.

Ces violences n'ont pas cessé avec la trêve en vigueur à Gaza depuis le 10 octobre. Selon l'ONU, la Cisjordanie a d'ailleurs connu en octobre un pic inédit de violences en près de deux décennies.