Japon: la fondatrice de l'Armée rouge japonaise libre après 20 ans de prison

La fondatrice de l'Armée rouge du Japon, Fusako Shigenobu (à gauche), est photographiée au moment de sa libération de prison, entourée de sa fille May Shigenobu (à droite), à Tokyo, le 28 mai 2022. (AFP).
La fondatrice de l'Armée rouge du Japon, Fusako Shigenobu (à gauche), est photographiée au moment de sa libération de prison, entourée de sa fille May Shigenobu (à droite), à Tokyo, le 28 mai 2022. (AFP).
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Publié le Samedi 28 mai 2022

Japon: la fondatrice de l'Armée rouge japonaise libre après 20 ans de prison

  • Mme Shigenobu a quitté samedi la prison où elle était détenue à Tokyo à bord d'une voiture noire en compagnie de sa fille
  • Une trentaine de ses soutiens étaient présents, portant une banderole où l'on pouvait lire «On aime Fusako», ainsi qu'une centaine de journalistes

TOKYO : Fusako Shigenobu, la fondatrice de l'Armée rouge japonaise (ARJ), un mouvement ayant semé la terreur dans les années 1970-80 au nom de la cause palestinienne, a été libérée samedi après avoir purgé une peine de 20 ans de prison au Japon.

Agée aujourd'hui de 76 ans, celle qui était autrefois surnommée la "reine rouge" ou "l'impératrice de la terreur" avait été arrêtée en 2000 dans son pays natal, où elle était rentrée clandestinement après avoir vécu trente ans au Proche-Orient. Elle avait proclamé la dissolution de l'ARJ depuis sa cellule de prison en 2001.

Mme Shigenobu a quitté samedi la prison où elle était détenue à Tokyo à bord d'une voiture noire en compagnie de sa fille. Une trentaine de ses soutiens étaient présents, portant une banderole où l'on pouvait lire "On aime Fusako", ainsi qu'une centaine de journalistes.

"Cela remonte à un demi-siècle, mais notre combat, avec notamment des prises d'otages, a fait souffrir des innocents", a déclaré Fusako Shigenobu quelques minutes plus tard. "Je présente mes excuses" pour cela, a-t-elle ajouté.

Cette figure de l'extrême-gauche qui prônait la révolution mondiale via la lutte armée avait été condamnée en 2006 au Japon à vingt ans de réclusion criminelle pour avoir organisé une prise d'otages à l'ambassade de France aux Pays-Bas en 1974, qui avait duré une centaine d'heures. 

Cette prise d'otages à laquelle Fusako Shigenobu n'avait pas directement participé avait fait plusieurs blessés parmi la police et forcé la France à libérer un membre de l'ARJ.

Massacre en Israël

Pendant ces événements à La Haye, une attaque à la grenade dans le Drugstore Publicis à Paris avait fait deux morts et 34 blessés. Ilich Ramirez Sanchez, dit Carlos, a été de nouveau condamné à la perpétuité en septembre 2021 pour cet attentat.

L'ARJ était proche du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), dont Carlos était devenu l'un des bras armés en Europe.

Fusako Shigenobu est aussi soupçonnée d'avoir planifié la tuerie à l'aéroport de Lod-Tel Aviv (Israël) par un commando de l'ARJ en 1972, une opération-suicide avec mitraillettes et grenades qui avait fait 26 morts et près de 80 blessés parmi les civils.

Née à Tokyo en 1945, Fusako Shigenobu était devenue une militante d'extrême gauche presque par hasard en 1965, en étant invitée à un sit-in en pleine ébullition estudiantine au Japon contre la guerre du Vietnam et le traité de sécurité nippo-américain.

La jeune femme se radicalise rapidement, prenant quelques années plus tard la direction de la branche internationaliste d'un éphémère groupuscule révolutionnaire japonais puis fondant en 1971 l'ARJ au Liban, où elle est accueillie par le FPLP.

Regrets en prison

"Au départ, je n'étais pas particulièrement pro-Arabe ni hostile à Israël. Mais (à l'époque, NDLR) la cause palestinienne résonnait en nous, jeunes gens qui étions opposés à la guerre du Vietnam et avides de justice sociale", a-t-elle raconté dans un livre dédié à sa fille unique, née en 1973 au Liban d'une liaison avec un militant du FPLP. 

May Shigenobu vit depuis 2001 au Japon. Elle avait pris d'emblée la défense de sa mère et l'a soutenue tout au long de sa détention.

Sans avoir jamais reconnu son implication dans la prise d'otages de La Haye, Fusako Shigenobu avait exprimé en prison des regrets sur la lutte armée pour atteindre ses idéaux révolutionnaires.

"Nos espoirs n'ont pas été comblés et cela s'est terminé de façon horrible", avait-elle ainsi confié dans une lettre au Japan Times en 2017.

"Je pense que les Japonais sont à présent encore plus apathiques sur les questions politiques qu'ils ne l'étaient autrefois (...) et je pense que mes actions et celles d'autres (révolutionnaires nippons, NDLR) ont contribué à cela", avait-elle aussi estimé.

Jusqu'à la fin des années 1980 l'ARJ a mené des prises d'otages, des détournements d'avions, des braquages de banques et des attaques contre des ambassades en Asie et en Europe. Déchirée par des querelles internes, l'organisation avait progressivement perdu de son influence, jusqu'à son autodissolution en 2001.

La police japonaise continue de rechercher sept anciens membres de l'ARJ dont Kozo Okamoto, le seul survivant des auteurs du massacre à l'aéroport de Lod-Tel Aviv il y a 50 ans et qui a obtenu l'asile politique au Liban.


La BBC doit «se battre» pour défendre son journalisme, dit le DG sortant

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
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  • Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public
  • Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump

LONDRES: La BBC doit "se battre" pour défendre son journalisme, a déclaré mardi le directeur général sortant de la BBC, Tim Davie, alors que le groupe public britannique est menacé de plainte en diffamation par Donald Trump.

Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public, rapportés par la chaîne BBC News.

Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump, le 6 janvier 2021, qui donnait l'impression que le président sortant incitait explicitement ses partisans à une action violente contre le Congrès.

"Nous avons fait une erreur, et il y a eu un manquement à nos règles éditoriales", a reconnu Tim Davie, expliquant qu'il avait assumé sa "part de responsabilité" en démissionnant.

Il n'a toutefois pas mentionné directement la menace d'action en justice lancée par Donald Trump, ni la date de son départ effectif, lors de cette visioconférence avec le président de la BBC, Samir Shah.

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC".

"Mais nous nous en sortirons", et "nous devons nous battre pour défendre notre journalisme", a-t-il insisté.

"Nous sommes une organisation unique et précieuse, et je vois la liberté de la presse mise à rude épreuve, je vois son instrumentalisation", a-t-il encore ajouté.


Le président allemand demande à son homologue algérien de gracier l'écrivain Boualem Sansal

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
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  • "Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays"
  • Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...)"

BERLIN: Le président allemand a exhorté lundi son homologue algérien à gracier l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, emprisonné depuis un an en Algérie et au coeur d'une grave crise diplomatique entre Alger et Paris.

Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...) et de son état de santé fragile".

"Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays", a estimé le président allemand, dans un communiqué.

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs.

Selon des spécialistes à Alger, le fait que la présidence et la télévision publique reprennent les éléments de langage du président allemand peut être perçu comme un signe positif.

Mais aucune indication n'a été donnée quant au calendrier de la prise de décision par le président algérien.

Dans une longue interview accordée en septembre dernier, le président Abdelmadjid Tebboune avait par ailleurs évoqué la possibilité de se rendre en Allemagne fin 2025 ou début 2026.

Arrêté à Alger le 16 novembre 2024, le romancier et essayiste franco-algérien Boualem Sansal a été condamné en appel en juillet à cinq ans de réclusion pour avoir notamment déclaré que l'Algérie avait hérité sous la colonisation française de territoires appartenant jusque-là au Maroc.

Jeudi, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, avait souligné que la France menait un "dialogue exigeant" avec Alger pour obtenir la libération de Boualem Sansal.

L'affaire s'inscrit dans un contexte d'hostilité entre Paris et Alger, qui sont empêtrés depuis plus d'un an dans une crise diplomatique sans précédent qui s'est traduite par des expulsions de fonctionnaires de part et d'autre, le rappel des ambassadeurs des deux pays et des restrictions sur les porteurs de visas diplomatiques.


La BBC, dans l'oeil du cyclone, sommée de s'expliquer

Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
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  • La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire
  • La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès

LONDRES: Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump.

La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire de son magazine d'information phare, "Panorama", diffusé en octobre 2024, une semaine avant la présidentielle américaine.

La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès pour se "battre comme des diables".

Or, dans la phrase originale, M. Trump disait: "Nous allons marcher vers le Capitole et nous allons encourager nos courageux sénateurs et représentants et représentantes au Congrès". L'expression "se battre comme des diables" correspondait à un autre passage du discours.

Face à la polémique grandissante, son directeur général, Tim Davie, et la patronne de la chaîne d'information du groupe BBC News, Deborah Turness, ont annoncé dimanche leur démission, qui fait la Une des journaux lundi.

Le président américain a dénoncé les "journalistes corrompus" et "malhonnêtes" de la BBC, sur son réseau Truth Social.

Le président du conseil d'administration du groupe, Samir Shah, doit s'excuser et s'expliquer dans une réponse écrite aux questions de la commission parlementaire sur la culture sur cette affaire, et sur d'autres accusations de partialité sur la couverture de la guerre à Gaza.

"La BBC doit répondre à de graves questions concernant ses normes éditoriales et la manière dont la direction gère les problèmes", a jugé la présidente de la commission, Caroline Dinenage, estimant que le groupe public "se devait d'être exemplaire" face à la montée de la désinformation.

Lundi, la patronne démissionnaire de BBC News a de nouveau assuré qu'il n'y avait "pas de partialité institutionnelle" sur la chaîne, qui a produit le programme mis en accusation.

 

- "Violation des règles" -

 

La classe politique a quasi unanimement critiqué la BBC pour sa gestion de l'affaire, qui tombe d'autant plus mal que le groupe audiovisuel doit renégocier d'ici fin 2027 son nouveau contrat de mission avec le gouvernement.

La cheffe de l'opposition, Kemi Badenoch, a déploré "un catalogue de graves défaillances". Le chef du parti d'extrême droite Reform UK, Nigel Farage, a appelé à "un changement de fond en comble" du groupe public.

La BBC tire une grande part de ses ressources de la redevance annuelle (174,50 livres, soit 198 euros), payée par 22,8 millions de foyers, soit 3,8 milliards de livres.

Samir Shah a dit espérer que le futur directeur général du groupe, dont la nomination pourrait prendre plusieurs mois, "façonnerait positivement" le prochain contrat de mission. la ministre de la Culture, Lisa Nandy, qui a qualifié la situation d'"extrêmement grave", a affirmé que le futur contrat aiderait la BBC à "garantir son rôle" auprès du public.

Le chef du parti libéral démocrate (centriste), Ed Davey, a appelé le Premier ministre Keir Starmer, et la classe politique en général, à défendre la BBC face à Donald Trump et la sphère Maga. "Il est facile de voir pourquoi Trump veut détruire la première source d'information dans le monde. Nous ne pouvons pas le laisser faire", a-t-il prévenu sur la plateforme X.

Le Telegraph a eu connaissance d'une note interne rédigée par l'ancien conseiller indépendant du comité des normes éditoriales de la BBC, Michael Prescott, dans laquelle il suggérait que des erreurs avaient été commises dans le montage. Il affirme que les responsables chargés des normes éditoriales du groupe auprès de qui il a soulevé le problème ont nié toute violation des règles.

En octobre, le régulateur des médias avait épinglé la BBC pour avoir "enfreint les règles de diffusion" à propos d'un reportage à Gaza dans lequel le narrateur principal, un enfant, était le fils d'un haut responsable du mouvement islamiste palestinien Hamas.