«Inertie», «atonie»: début de quinquennat sans souffle pour Macron II

Le président français Emmanuel Macron pendant une déclaration commune avec le président moldave après leur rencontre à l'Élysée, à Paris, le 19 mai 2022. (AFP).
Le président français Emmanuel Macron pendant une déclaration commune avec le président moldave après leur rencontre à l'Élysée, à Paris, le 19 mai 2022. (AFP).
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Publié le Dimanche 29 mai 2022

«Inertie», «atonie»: début de quinquennat sans souffle pour Macron II

  • Si plusieurs déplacements ont ponctué la fin de son premier mandat, le président a surtout depuis beaucoup consulté pour mettre sa majorité en ordre de bataille en vue des législatives des 12 et 19 juin
  • La guerre en Ukraine a aussi continué à occuper une place importante dans son agenda, tout comme l'Europe avec un discours ambitieux sur l'avenir du projet européen le 9 mai à Strasbourg

PARIS : "Inertie" dénoncée par les oppositions, attente jusque dans son camp: cinq semaines après sa réélection, Emmanuel Macron reste étonnamment en retrait, loin de son image de président pressé et de l'élan habituel d'une majorité en campagne.

Si plusieurs déplacements ont ponctué la fin de son premier mandat, le président a surtout depuis beaucoup consulté pour mettre sa majorité en ordre de bataille en vue des législatives des 12 et 19 juin et préparer son action future.

La guerre en Ukraine a aussi continué à occuper une place importante dans son agenda, tout comme l'Europe avec un discours ambitieux sur l'avenir du projet européen le 9 mai à Strasbourg.

Après un discret weekend de l'Ascension, ponctué d'échanges téléphoniques internationaux, à sa résidence de Brégançon dans le Var, le chef de l'Etat reprendra le chemin de Bruxelles pour un sommet européen lundi et mardi, puis des déplacements de terrain dans l'Hexagone, indique-t-on dans son entourage, en récusant tout immobilisme.

Pour sa part, le président de l'institut Elabe, Bernard Sananès, se dit "surpris du décalage entre la volonté qui a été celle d'Emmanuel Macron avant la présidentielle de gouverner jusqu’au dernier moment, et l’impression aujourd'hui qu'au premier moment, ça tarde à redémarrer".

A la différence de François Mitterrand ou Jacques Chirac, il n'a certes pas été réélu au terme d'une cohabitation, et son second quinquennat s'inscrit donc assez naturellement dans la continuité du premier.

«Peupler le vide»

"Mais on ne sent pas cette impulsion nouvelle et on voit bien que les Français sont assez critiques", souligne Bernard Sananès, interrogé par l'AFP.

La nomination d'un nouveau gouvernement, censé donner le tempo, a pris quatre semaines après la victoire à la présidentielle, autre temps long inédit, laissant Jean-Luc Mélenchon et son union de la gauche quasi seuls sur le devant de la scène.

Le président a sans doute voulu jouer la montre afin de ne pas exposer trop tôt la nouvelle équipe avant les législatives, estiment des experts.

"Ca permet de ne pas donner prise à un certain nombre d'attaques, de peupler le vide, et d'avoir ensuite un effet de souffle" avec l'annonce du nouveau gouvernement, explique à l'AFP Benjamin Morel, maîtres de conférences à l'université Paris 2. 

Mais dans cette "période d'atonie relative", cette perspective s'est réduite "comme peau de chagrin", considère-t-il. 

Le gouvernement d'Elisabeth Borne, dont tous les poids lourds étaient déjà présents à l'Acte I, a été largement perçu comme celui du changement dans la continuité.

Il suscite peu l'enthousiasme des Français, qui se disent mécontents à 58% de sa composition, selon un sondage Ifop-Fiducial pour Sud-Radio publié vendredi.

«Vacance du pouvoir»

La plupart des nouveaux ministres ne sont pas connus, et, le plus souvent, leur nomination est perçue comme une mauvaise plutôt qu’une bonne décision, d'après une enquête Odoxa - Backbone Consulting réalisée pour Le Figaro.

A deux semaines des législatives, cette atonie inquiète dans la majorité. "Il n’y a pas de lead (direction, ndlr) politique", se désole une source parlementaire à La République en marche (LREM), en appelant à "muscler le jeu".

Les accusations de viol contre le nouveau ministre des Solidarités Damien Abad, prise de guerre LR destinée à capter l'électorat de droite, ont aussi jeté un froid.

Abad, "ça pollue tout, surtout la séquence de Borne", relève la source parlementaire, même si le parquet de Paris a fait savoir qu'il n'ouvrait pas d'enquête préliminaire "en l'état".

L'absence de "dynamique" se répercute dans les intentions de vote qui prédisent au camp du président une majorité se resserrant (295 à 335 sièges sur 577 selon un sondage OpinionWay pour Les Echos du 25 mai).

En attendant, l'opposition se frotte les mains. En campagne samedi à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), Marine Le Pen (RN) a pointé "un sentiment de vacance du pouvoir".

"Tout ça est extrêmement lent, alors même que la situation de nombre de Français est critique et urgente" en matière de pouvoir d'achat, a-t-elle lancé. 

Macron est "inerte", "son gouvernement est assez éteint", renchérit le centriste Jean-Christophe Lagarde (UDI), allié des Républicains.


Les députés approuvent la mise en place d'une taxe de deux euros pour les «petits colis»

L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits. (AFP)
L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits. (AFP)
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  • La mesure a suscité de vifs débats, le Rassemblement national dénonçant une "taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes"
  • Ces discussions interviennent alors que la plateforme de commerce en ligne d'origine chinoise Shein est sous le feu des critiques, accusée de vendre de nombreux produits non conformes et illicites

PARIS: L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits.

208 députés contre 87 ont approuvé cette mesure proposée par le gouvernement dans le cadre de l'examen en première lecture du budget de l'Etat. Le RN a voté contre, la gauche, la coalition gouvernementale et le groupe ciottiste UDR, allié de Marine Le Pen, pour.

La mesure a suscité de vifs débats, le Rassemblement national dénonçant une "taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes", quand la ministre Amélie de Montchalin (Comptes publics) a défendu une "redevance" destinée à contrôler des produits souvent "dangereux".

Ces discussions interviennent alors que la plateforme de commerce en ligne d'origine chinoise Shein est sous le feu des critiques, accusée de vendre de nombreux produits non conformes et illicites.

"Ce n'est pas une taxe pour empêcher la concurrence déloyale chinoise, c'est une taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes", a dénoncé le député Jean-Philippe Tanguy (RN).

"Faire croire aux Français qu'en taxant les petits colis, vous arriverez à augmenter de manière spectaculaire le nombre de contrôles, c'est se moquer du monde", a renchéri la présidente du groupe, Marine Le Pen, soulignant que "l'année dernière, 0,125 % de colis ont été vérifiés".

La France insoumise s'est également dite soucieuse des répercussions de la taxe sur les consommateurs, exigeant pour les protéger que les plateformes soient taxées directement et non les colis, et menaçant de voter contre la mesure.

Le gouvernement a déposé un amendement destiné à répondre à cette préoccupation, permettant que la taxe soit payée via "le tuyau de la TVA", qui est "alimenté par les plateformes". Cela a convaincu LFI de soutenir la proposition gouvernementale.

La taxe devrait rapporter environ 500 millions d'euros, destinés selon Mme de Montchalin à financer l'achat de scanners pour contrôler les colis et embaucher des douaniers.

Elle s'est félicitée que la France mette en oeuvre la taxe "dès le 1er janvier", comme la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, neuf mois plus tôt que les autres pays de l'UE.

"Ceux qui ce soir ne voteront pas cette taxe (...) n'ont pas choisi la France, ils n'ont pas choisi nos commerçants, ils auront choisi la Chine et sa submersion", a-t-elle tonné.

Elle a par ailleurs rappelé que les ministres des Finances de l'Union européenne se sont accordés la semaine dernière pour supprimer l'exonération de droits de douane dont bénéficient ces petits colis.

Juste avant minuit, les députés ont en revanche supprimé un autre article du projet de loi, visant à fiscaliser l'ensemble des produits à fumer, avec ou sans tabac ou nicotine.

"Nous sommes 700. 000 personnes à avoir réussi à arrêter de fumer grâce à la cigarette électronique", une alternative efficace pour "sauver des vies" qui est "bien moins dangereuse que la cigarette", a argumenté le député Renaissance Pierre Cazeneuve. Parmi elles, de nombreux députés, dont lui-même.


Macron fustige les «bourgeois des centres-villes» qui financent «parfois» le narcotrafic

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  • Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international"
  • La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic

PARIS: Le président Emmanuel Macron a estimé mercredi lors du Conseil des ministres que ce sont "parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants", selon des propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors de son compte-rendu.

Le chef de l'État a appuyé "l'importance d'une politique de prévention et de sensibilisation puisque, je reprends ses mots, +c'est parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants+", a précisé Maud Bregeon, ajoutant: "on ne peut pas déplorer d'un côté les morts et de l'autre continuer à consommer le soir en rentrant du travail".

Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international". La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic.

 


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).