Irlande du Nord: Londres lance la révision unilatérale du statut post-Brexit

«Nous sommes très clairs sur le fait que nous agissons de manière légale», a néanmoins assuré la cheffe de la diplomatie Liz Truss à la télévision. (AFP)
«Nous sommes très clairs sur le fait que nous agissons de manière légale», a néanmoins assuré la cheffe de la diplomatie Liz Truss à la télévision. (AFP)
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Publié le Lundi 13 juin 2022

Irlande du Nord: Londres lance la révision unilatérale du statut post-Brexit

  • Alors que l'UE a menacé le gouvernement britannique d'actions en justice, Londres estime ne plus pouvoir attendre vu la paralysie politique causée par le protocole nord-irlandais dans la province britannique
  • Si le texte n'a pas été complètement appliqué, il complique les approvisionnements et horripile la communauté unioniste, qui estime que la place de la province au sein du Royaume-Uni est menacée

LONDRES: Après des mois d'impasse, le gouvernement britannique est passé à l'action lundi en présentant au Parlement son projet de loi qui remet en cause le statut post-Brexit de l'Irlande du Nord, au risque de représailles des Européens qui jugent le texte illégal.

Alors que l'UE a menacé le gouvernement britannique d'actions en justice, estimant que son initiative nuisait à "la confiance mutuelle", Londres estime ne plus pouvoir attendre vu la paralysie politique causée par le protocole nord-irlandais dans la province britannique.

Après avoir menacé d'outrepasser purement et simplement ce traité international qu'il a négocié et signé, le gouvernement de Boris Johnson a choisi de légiférer pour le modifier unilatéralement.

"Nous sommes très clairs sur le fait que nous agissons de manière légale", a néanmoins assuré la cheffe de la diplomatie Liz Truss à la télévision.

S'il est adopté, ce qui pourrait prendre des mois, le texte "va mettre fin à cette situation intenable où la population d'Irlande du Nord est traitée différemment du reste du Royaume-Uni, va protéger la suprématie de nos tribunaux et notre intégrité territoriale", a-t-elle expliqué dans un communiqué, défendant une "solution raisonnable".

Elle a répété que Londres restait ouvert à une solution négociée, mais à condition que l'UE accepte de "changer le protocole" et non seulement l'aménager comme c'est le cas actuellement.

Le protocole vise à protéger le marché unique européen après le Brexit sans provoquer le retour d'une démarcation physique entre la province britannique et la République d'Irlande, membre de l'Union européenne, ce qui pourrait remettre en cause la paix.

Pour résoudre cette quadrature du cercle, le gouvernement de Boris Johnson avait accepté que l'Irlande du Nord reste de facto au sein du marché européen, instaurant une frontière douanière en mer d'Irlande, avec contrôles et paperasse.

Colère unioniste

Si le texte n'a pas été complètement appliqué, il complique les approvisionnements et horripile la communauté unioniste, qui estime que la place de la province au sein du Royaume-Uni est menacée.

Alors que le principal parti unioniste, le DUP, bloque depuis plusieurs mois la formation de tout exécutif local, le gouvernement de Londres avait annoncé mi-mai sa volonté de légiférer.

Concrètement, le gouvernement britannique veut que les marchandises circulant et restant au sein du Royaume-Uni passent par un "canal vert", les libérant de démarches administratives. Les marchandises destinées à l'UE resteront, elles, soumises à l'ensemble des vérifications et contrôles appliqués en vertu du droit européen.

Selon le projet de loi, la province pourra bénéficier des mêmes aides d'Etat que le reste du Royaume-Uni et les contentieux se règleront devant un mécanisme d'arbitrage indépendant et non plus devant la Cour de justice européenne, point de discorde majeur entre Londres et Bruxelles.

«Ajustements»

"Franchement c'est une série assez triviale d'ajustements", a relativisé Boris Johnson sur la radio LBC, assurant que le projet était légal. "Notre engagement primordial en tant que pays porte sur l'Accord du Vendredi saint", signé en 1998 pour mettre fin à trois décennies de violences entre unionistes, surtout protestants, et républicains, à majorité catholique, faisant 3 500 morts.

Liz Truss s'est expliquée en appelant lundi le vice-président de la Commission européenne Maros Sefcovic, son homologue irlandais, Simon Coveney, puis le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, alors que l'administration de Joe Biden, aux origines irlandaises, s'est montré très critique.

M. Sefcovic a assuré que l'UE avait proposé des "solutions", regrettant "une action unilatérale portant atteinte à la confiance mutuelle". M. Coveney, avec qui l'appel a duré à peine 12 minutes, a reproché à Londres de "ne pas avoir engagé de négociations significatives".

A Belfast, malgré le projet de loi, le DUP refuse toujours de participer à un nouveau gouvernement à Belfast, censé être dirigé pour la première fois par les républicains du Sinn Fein après leur victoire aux élections locales du 5 mai.

Le dirigeant du DUP, Jeffrey Donaldson, a salué "un pas important" mais a dit vouloir voir le projet de loi progresser au Parlement avant de se prononcer.

Dans une lettre commune, des élus de partis représentant la majorité de l'Assemblée locale (dont le Sinn Fein) ont dit "rejeter dans les termes les plus forts possibles" la loi britannique. Pour eux, "s'il n'est pas idéal, le protocole représente la seule protection disponible" contre les effets du Brexit mais aussi "un avantage économique" avec "un accès à deux marché majeurs".


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.