En France, le séisme d'une extrême droite légitimée

Le Pen a annoncé, au passage, qu'elle ne «reprendrait pas la tête» de son parti, pour se consacrer à la présidence du futur groupe RN à l'Assemblée nationale. (AFP)
Le Pen a annoncé, au passage, qu'elle ne «reprendrait pas la tête» de son parti, pour se consacrer à la présidence du futur groupe RN à l'Assemblée nationale. (AFP)
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Publié le Lundi 20 juin 2022

En France, le séisme d'une extrême droite légitimée

  • Pour l'expert Pascal Perrineau, «le RN, peu à peu, devient un parti qui a des racines locales (...) Il est devenu le porte-parole incontesté des fractures sociales et territoriales»
  • «On voyait que, élection après élection, Marine Le Pen progressait au premier tour comme au deuxième tour. Mais à ce niveau-là, c'est du jamais vu», relève Jean-Daniel Lévy, de l'institut Harris Interactive

PARIS: Le parti d'extrême droite de Marine Le Pen a brisé le plafond de verre lors des élections législatives en France dimanche, devenant le premier parti d'opposition et acquérant une légitimité qui lui a toujours fait défaut.

"Il y a une modification profonde du rapport des Français à l'égard du Rassemblement national (RN)", le parti de Mme Le Pen, relève Jean-Daniel Lévy, de l'institut Harris Interactive.

"On voyait que, élection après élection, Marine Le Pen progressait au premier tour comme au deuxième tour. Mais à ce niveau-là, c'est du jamais vu", dit-il à l'AFPTV.

Démentant tous les sondages qui le créditaient de 20 à 50 sièges, le RN fait une entrée en force à l'Assemblée nationale, avec 89 députés contre 8 élus dans l'ancienne législature en 2017, devançant la France insoumise (LFI, opposition de gauche radicale) qui obtient 72 sièges.

Le RN revendique ainsi d'être le "premier parti d'opposition" à la chambre basse du Parlement et, pour un parti endetté, il pourra compter sur une nouvelle manne financière.

Les moments forts du FN, devenu RN, depuis l'arrivée de Marine Le Pen à sa tête

En plus de dix ans à la tête du Front national (FN), puis du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen a conduit le parti d'extrême-droite à plusieurs succès électoraux, jusqu'à la percée historique des législatives.

2011-2014, les années fastes 

Marine Le Pen accède facilement le 16 janvier 2011 à la tête du parti cofondé par son père en 1972, face à Bruno Gollnisch.

A l'élection présidentielle de 2012, elle arrive en troisième position à 17,9%. Marion Maréchal, sa nièce, et l'avocat Gilbert Collard entrent au Palais Bourbon, mais Mme Le Pen est battue de peu à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais).

Sur le front idéologique, Marine Le Pen tente sans relâche de polir l'image d'un parti secoué à répétition par les dérapages de son père Jean-Marie, joignant dans son discours des problématiques sociales aux thèmes habituels de l'immigration et de la sécurité.

Après les municipales de mars 2014, où le FN remporte onze mairies, le parti remporte une victoire historique - près de 25% des voix - aux élections européennes de mai, loin devant l'UMP et le PS.

2014: père et fille, rien ne va plus 

Quand Jean-Marie Le Pen, président d'honneur du parti, s'en prend en juin 2014 à des artistes qui ont pris position contre le FN, Marine Le Pen condamne la "faute politique" de son père.

Aux cantonales de mars 2015, le FN arrive en tête dans 43 départements. Mais M. Le Pen contrarie encore la volonté de sa fille de "dédiaboliser" l'image du parti en répétant ses propos sur les chambres à gaz "détail" de l'Histoire ou en défendant le maréchal Pétain.

Le 20 août 2015, Jean-Marie Le Pen, 87 ans, est exclu du FN.

Père et fille finiront toutefois par éviter les éclats publics.

2017: Le FN au second tour 

En avril 2017, Marine Le Pen se qualifie pour le second tour de l'élection présidentielle avec 21% des voix, puis s'incline - après un débat télévisé qu'elle reconnaîtra "raté" - avec un score de 33% face à Emmanuel Macron.

Fin juin, elle est mise en examen dans une enquête sur les assistants parlementaires d'eurodéputés de son parti.

Aux législatives, le FN envoie huit députés, dont Mme Le Pen, au Palais Bourbon.

En septembre, Florian Philippot, jusque là fidèle vice-président du FN, reproche au parti de ne plus faire de la sortie de l'euro sa priorité, et claque la porte.

Le FN progresse aux élections sénatoriales, mais ne compte que deux élus.

2018: le FN devient RN 

En janvier 2018, le bureau politique du FN acte la suppression du poste de président d'honneur encore occupé par Jean-Marie Le Pen.

Réélue pour un troisième mandat, sa fille veut symboliser la "mue" du FN en un "parti de gouvernement" susceptible de nouer des alliances : il devient le Rassemblement national (RN).

En juin, la justice européenne confirme que Marine Le Pen doit rembourser près de 300 000 euros au Parlement européen pour l'emploi douteux d'une assistante parlementaire et une subvention publique au FN est saisie. Mme Le Pen dénonce un "assassinat politique".

Sa mise en examen est requalifiée en octobre en "détournement de fonds publics", passible de dix ans de prison et d'un million d'euros d'amende.

2019: en tête aux européennes 

Le 26 mai 2019, le RN arrive en tête des élections européennes (23,31%), devant la liste soutenue par le président Macron. Renforcé dans ses terres de conquête, il attire des cadres LR, mais recule ensuite aux municipales et aux régionales.

En septembre 2021, Marine Le Pen cède les rênes du RN à Jordan Bardella pour se consacrer à la campagne présidentielle. Son rival à l'extrême-droite, Eric Zemmour, lui ravit des figures du parti, comme Stéphane Ravier, Gilbert Collard, Nicolas Bay et même sa nièce Marion Maréchal.

2022: record de 89 députés 

Le 10 avril 2022, Marine Le Pen se qualifie à nouveau pour le second tour de la présidentielle face à Emmanuel Macron avec 23,15% des votes, mais s'incline finalement avec 41,5% des suffrages. Jamais l'extrême droite ne s'est approchée à ce point du pouvoir sous la Ve République.

Au second tour des législatives le 19 juin, le RN réalise une percée historique et obtient 89 députés, surpassant le précédent record réalisé grâce à la proportionnelle en 1986 (35 députés) et devenant le premier parti d'opposition devant La France insoumise.

Sans scrutin proportionnel et sans alliances, le mouvement obtient un groupe trois fois plus nombreux que celui qu'avait présidé son père Jean-Marie Le Pen de 1986 à 1988 avec 35 députés.

"C'est une avancée fulgurante", résume le politologue Jean-Yves Camus, avec une implantation du RN "non seulement dans les régions traditionnellement bonnes" pour lui, comme dans le nord et le sud-est de la France, mais aussi dans "des zones de très grand péri-urbain de Paris" ou "des départements enclavés, désindustrialisés, oubliés".

Porte-parole des fractures 

Pour un autre expert, Pascal Perrineau, "le RN, peu à peu, devient un parti qui a des racines locales (...) Il est devenu le porte-parole incontesté des fractures sociales et territoriales", dit-il dans le journal Le Parisien.

La finaliste de la présidentielle en 2017 et en avril dernier (41,6% des suffrages), battue les deux fois par Emmanuel Macron, s'est dite lundi la première "surprise".

"C'est vrai qu'on a été surpris agréablement par la mobilisation de nos compatriotes et par ce souhait que l'immigration, que l'insécurité, que la lutte contre l'islamisme ne disparaissent pas de l'Assemblée nationale", a affirmé Mme Le Pen, elle-même largement réélue dimanche soir dans son fief du nord de la France, à Hénin-Beaumont.

Elle a annoncé, au passage, qu'elle ne "reprendrait pas la tête" de son parti, pour se consacrer à la présidence du futur groupe RN à l'Assemblée nationale.

Le mouvement n'a pas attendu longtemps pour afficher ses nouvelles ambitions, en revendiquant la présidence de la puissante commission des Finances de l'Assemblée. Le poste, revendiqué aussi par la gauche, revient traditionnellement depuis 2007 au groupe d'opposition le plus important.

Question symbole, c'est un élu du RN, José Gonzalez, 79 ans et doyen d'âge, qui ouvrira mardi 28 juin la nouvelle législature.

«Dédiabolisation»

Sur le front idéologique, Marine Le Pen s'est délestée des dérapages antisémites et de l'héritage de son père, Jean-Marie Le Pen, qui fête ses 94 ans lundi: elle a opéré la mue du mouvement, poli sans relâche l'image du parti y compris en changeant le nom, et joignant dans son discours des problématiques sociales aux thèmes habituels de l'immigration et de la sécurité.

Ce faisant, elle a brisé le "front républicain" qui avait permis pendant des décennies en France de faire barrage à l'extrême droite, désormais banalisée.

Pour Gilles Ivaldi, spécialiste du programme économique du RN au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) sur la radio franceinfo, il y a trois explications: une campagne du RN "discrète et furtive, mais sur une thématique qui était au cœur des préoccupations des Français: le pouvoir d'achat", une "stratégie de dédiabolisation du RN qui n'a jamais eu autant d'effet", et des cadres "qui sont parvenus à s'ancrer localement".

"C'est le résultat d'une très longue implantation, avec des élus de la génération Marine Le Pen, venus pour elle et par elle, mais aussi des gens qui battent la campagne depuis très longtemps", abonde Jean-Yves Camus.

Il note aussi que les catégories populaires voient en Emmanuel Macron le champion du "mondialisme", soit le "coupable de la mondialisation" dont elles s'estiment victimes.

Comme le souligne Steven Forti, dans la revue Le Grand Continent, ce phénomène de légitimisation de l'extrême droite est à mettre en relief sur le plan européen.

"Aujourd'hui, il est clair que l'extrême droite a atteint le premier objectif: elle s'est normalisée et démarginalisée, elle a au moins partiellement gagné la bataille culturelle et elle ultra-droitise le débat public. C'est déjà une réalité dans tous les pays occidentaux", écrit-il.


Pour le Noël des armées, Macron fait cette année le choix des Emirats

La ministre française de la Défense, Catherine Vautrin, quitte le palais présidentiel de l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 17 décembre 2025. (AFP)
La ministre française de la Défense, Catherine Vautrin, quitte le palais présidentiel de l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 17 décembre 2025. (AFP)
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  • En se rendant aux Émirats arabes unis pour le Noël des armées, Emmanuel Macron adresse un message de soutien aux militaires français tout en réaffirmant l’engagement stratégique de la France dans une région marquée par de fortes tensions géopolitiques
  • Ce déplacement met en lumière la solidité du partenariat de défense franco-émirien, pilier de la présence militaire française dans le Golfe et vecteur de stabilité régionale

En choisissant les Émirats arabes unis pour célébrer, les 21 et 22 décembre, le traditionnel Noël des armées françaises, le président Emmanuel Macron a voulu adresser un message clair à ses militaires engagés loin de leurs familles, mais aussi aux partenaires de la France dans une région marquée par de fortes turbulences géopolitiques.

Ce déplacement présidentiel, à la fois militaire et diplomatique, illustre la solidité d’un partenariat stratégique noué de longue date entre Paris et Abou Dhabi.

Comme le veut la tradition, le président de la République partagera un moment privilégié avec les forces françaises déployées sur place, après une séquence bilatérale avec les autorités émiriennes.

Selon le palais de l’Élysée, Emmanuel Macron se rendra directement auprès des militaires : il dînera avec eux, avant de consacrer la matinée suivante à des échanges de terrain et à des démonstrations opérationnelles, au plus près de la réalité de leur engagement en période de fêtes.

Si le choix des Émirats arabes unis n’a rien d’anodin, c’est parce que la région concentre aujourd’hui un grand nombre de crises majeures : conflits persistants au Moyen-Orient, tensions maritimes affectant le commerce mondial, instabilité chronique de plusieurs États.

Un déplacement stratégique dans une région sous tension

Le Golfe est devenu un carrefour stratégique où se croisent enjeux sécuritaires, diplomatiques et économiques et, en s’y rendant, le chef de l’État entend rappeler que la France demeure un acteur militaire et diplomatique engagé à l’échelle mondiale.

Mais ce déplacement est aussi l’occasion d’incarner la relation de confiance qui lie Paris et Abou Dhabi depuis plus de trente ans.

Le partenariat de défense franco-émirien, formalisé et renforcé par un accord signé en 2009, s’est progressivement imposé comme l’un des piliers de la présence française dans la région. Il repose sur une coopération étroite, une interopérabilité accrue des forces et un partage d’objectifs communs en matière de stabilité régionale.

Les Émirats arabes unis accueillent en effet un dispositif militaire français structurant. À Abou Dhabi se trouve un état-major interarmées, à la tête duquel est placé un amiral commandant à la fois les Forces françaises aux Émirats arabes unis (FFAU) et les forces françaises déployées dans l’océan Indien.

Cette implantation est complétée par une base navale française, ainsi que par une base aérienne située à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de la capitale, où sont notamment stationnés des avions de combat Rafale.

À environ 70 kilomètres à l’ouest d’Abou Dhabi, dans une zone désertique, est également déployé le 5ᵉ régiment de cuirassiers, équipé de matériels de dernière génération, dont des chars Leclerc et des véhicules blindés de combat.

C’est sur ce site que se déroulera l’essentiel de la séquence militaire du déplacement présidentiel, avec une démonstration interarmées illustrant les capacités opérationnelles françaises.

Au total, près de 900 militaires français sont stationnés aux Émirats arabes unis. Ils jouent un rôle clé dans plusieurs opérations majeures.

Un partenariat militaire franco-émirien au cœur de la présence française dans le Golfe

Les moyens aériens basés aux Émirats contribuent notamment à l’opération Chammal de lutte contre le terrorisme, tandis que les capacités maritimes participent à l’opération européenne Aspides, destinée à sécuriser le trafic international en mer Rouge, récemment menacé par des attaques visant la navigation commerciale.

Au-delà de la dimension opérationnelle, la présence française aux Émirats arabes unis constitue un symbole fort de coopération stratégique et traduit la volonté partagée de renforcer la stabilité régionale, de sécuriser les grandes routes maritimes internationales et de soutenir les efforts de paix dans des zones fragilisées comme l’Irak, le Yémen, la Libye ou encore le Soudan.

Tous ces sujets pourraient être abordés lors des échanges entre le président français et le président émirien, Cheikh Mohamed ben Zayed.

En se rendant auprès des forces françaises à Noël, accompagné de la ministre des Armées, Emmanuel Macron entend surtout témoigner de son attachement personnel aux militaires engagés loin de la métropole.

Le message qu’il veut leur adresser est autant humain que politique, puisqu’il s’agit d’exprimer la reconnaissance de leur engagement et d’affirmer la crédibilité militaire française.

Dans un contexte international tendu, le choix des Émirats arabes unis pour le Noël des armées apparaît ainsi comme un signal fort : celui d’une France fidèle à ses alliances, pleinement investie dans la sécurité internationale et consciente que sa présence militaire est indissociable de relations diplomatiques durables et de partenariats stratégiques solides.


Municipales à Paris: vers un accord historique à gauche dès le premier tour

A  Paris, socialistes, écologistes et communistes s'apprêtent à sceller pour la première fois leur union dès le premier tour des municipales, derrière l'ex-premier adjoint socialiste Emmanuel Grégoire. Une alliance arrachée au terme de négociations délicates, mais réclamée sur le terrain face à une droite revigorée autour de Rachida Dati. (AFP)
A Paris, socialistes, écologistes et communistes s'apprêtent à sceller pour la première fois leur union dès le premier tour des municipales, derrière l'ex-premier adjoint socialiste Emmanuel Grégoire. Une alliance arrachée au terme de négociations délicates, mais réclamée sur le terrain face à une droite revigorée autour de Rachida Dati. (AFP)
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  • Depuis 09H00 ce mercredi, les écologistes parisiens sont invités à voter pour cet accord afin de faire "une liste commune, une union très très large de toutes les forces de gauche qui le souhaitent. C'est nouveau, c'est vraiment quelque chose d'historique
  • Si socialistes et écologistes gouvernent ensemble la capitale depuis 2001, ils n'avaient encore jamais mené campagne commune dès le premier tour

PARIS: A Paris, socialistes, écologistes et communistes s'apprêtent à sceller pour la première fois leur union dès le premier tour des municipales, derrière l'ex-premier adjoint socialiste Emmanuel Grégoire. Une alliance arrachée au terme de négociations délicates, mais réclamée sur le terrain face à une droite revigorée autour de Rachida Dati.

Depuis 09H00 ce mercredi, les écologistes parisiens sont invités à voter pour cet accord afin de faire "une liste commune, une union très très large de toutes les forces de gauche qui le souhaitent. C'est nouveau, c'est vraiment quelque chose d'historique pour nous", a déclaré sur franceinfo le candidat écologiste David Belliard.

Si socialistes et écologistes gouvernent ensemble la capitale depuis 2001, ils n'avaient encore jamais mené campagne commune dès le premier tour.

Cet accord, qui prévoit le désistement de David Belliard et de son homologue communiste Ian Brossat, sera soumis au vote des trois formations politiques, dont les 2.500 adhérents écologistes.

"Ce soir, dans la nuit, on connaîtra la réponse et (...) dès demain (jeudi) moi je suis prêt, dans toutes les configurations, à continuer la campagne", a ajouté M. Belliard, disant souhaiter "bousculer cette élection en faisant quelque chose d'historique".

"Quand une droite extrémisée menace, nous avons le devoir d'unir nos forces", a posté sur X Ian Brossat.

Interrogé sur la possibilité d'une union au second tour avec LFI, David Belliard s'est dit favorable à une "candidature unique à gauche".

"On est dans une élection difficile, dans laquelle il y a des enjeux (...) énormes pour Paris (...)  Et nous avons face à nous une droite qui est une droite populiste, affairiste, qui aujourd'hui est très brutale", a-t-il souligné.

Selon l'accord consulté par l'AFP, les partenaires s'engagent "à tout faire pour qu'il n'y ait qu'une seule liste de gauche au second tour", excluant toute alliance avec le candidat Horizons soutenu par Renaissance Pierre-Yves Bournazel.

"Parfois douloureux" 

Initialement annoncée pour octobre, cette alliance, qui devrait également associer Place publique et possiblement L'Après (ex-LFI), est le fruit de plus de trois mois de tractations serrées.

"Si un accord historique comme celui-ci n'avait jamais été réalisé auparavant c'est d'abord parce que c'est difficile et parfois douloureux. Cela implique que certains sortent des listes", a glissé une source socialiste.

Les discussions achoppaient notamment sur la place des écologistes en lice pour le Conseil de Paris dans un contexte de changement de mode de scrutin. Cette réforme est vivement critiquée par l'exécutif sortant, qui y voit une manoeuvre visant à faire gagner la droite.

Selon l'accord, 36 écologistes seraient éligibles contre 28 élus actuellement.

Source de profondes crispations chez les militants socialistes, les écologistes ont également obtenu que David Belliard soit tête de liste dans le XIe arrondissement, où fut élu Léon Blum et où l'est l'actuelle maire socialiste Anne Hidalgo. Une troisième mairie verte en plus de celles du XIIe et du XIVe qu'ils administrent déjà.

"C'est une révolution du point de vue de la gouvernance car il prévoit un meilleur partage entre les différents membres de cette alliance au sein de laquelle personne n'aura la majorité seul", souffle un cadre écologiste.

Revendiquant leur rôle central dans la transformation de l'espace public, de l'essor des pistes cyclables aux "rues aux écoles", les écologistes conditionnaient de fait leur retrait à l'obtention de concessions significatives.

L'accord prévoit également un renforcement des pouvoirs des maires d'arrondissement.

Parmi les "marqueurs communs" figurent notamment la revalorisation du périscolaire, un service de garde d'enfant universel, l'objectif de 40% de logement public (dont 30% de logement social), ou encore la poursuite de la piétonnisation et du verdissement de la ville.

Parmi les points de divergence, on trouve l'avenir du Parc des Princes.

"C'est un rassemblement historique qui a un coût très important pour les socialistes", a reconnu une source à gauche, pour qui les écologistes en sortiront "renforcés" alors qu'ils "reculent partout en France".

"Avec cette liste d'union il y aura un effet vote utile (...) Ca va forcément ouvrir une dynamique", estime-t-on de même source.

A l'instar de Paris, la plupart des grandes villes dirigées par la gauche ont franchi le pas d'une alliance dès le premier tour.

 

 


Crise de la dermatose en France : les vétérinaires cibles de menaces

La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins, selon les termes utilisés par l'Ordre des vétérinaires, institution professionnelle chargée d'encadrer la profession. (AFP)
La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins, selon les termes utilisés par l'Ordre des vétérinaires, institution professionnelle chargée d'encadrer la profession. (AFP)
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  • La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins
  • "Il a essayé de péter ma vitre (de voiture) avec son poing", a raconté à l'AFP une vétérinaire libérale exerçant dans la Savoie (est), qui a requis l'anonymat à la suite de cet incident avec des éleveurs

PARIS: "Vétérinaires = assassins", cliniques taguées "vétos = collabos"... "On a le droit à tout", déplore David Quint, président du Syndicat français des vétérinaires libéraux, qui témoigne du malaise dans la profession, en première ligne dans la gestion de l'épizootie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins, selon les termes utilisés par l'Ordre des vétérinaires, institution professionnelle chargée d'encadrer la profession.

"Il a essayé de péter ma vitre (de voiture) avec son poing", a raconté à l'AFP une vétérinaire libérale exerçant dans la Savoie (est), qui a requis l'anonymat à la suite de cet incident avec des éleveurs.

Durant l'été, elle a été mandatée pour abattre un cheptel dans une exploitation. "Deux voitures se sont garées au milieu de la route comme des cowboys pour nous bloquer le passage et on nous a demandé si nous étions +fiers de ce que nous avions fait+, mon confrère et moi", se souvient-elle.

"Ils étaient quatre, c'était stressant, j'ai appelé la gendarmerie et porté plainte le soir même", rapporte la vétérinaire.

"Pris en étau" 

"On est pris en étau entre la souffrance du monde agricole d'un côté et le fait de devoir faire notre métier de l'autre", a regretté auprès de l'AFP Jean-Yves Gauchot, président de la Fédération des syndicats vétérinaires.

Lundi, le vétérinaire a reçu cette menace: "dans un autre temps, votre tête aurait fini au bout d'une pique", après s'être exprimé sur la chaîne d'information BFMTV, une première en 35 années d'expérience.

Une enquête a été ouverte mardi par le parquet de Bergerac (sud-ouest) pour menaces de mort après la plainte du praticien.

"Il ne faut pas laisser passer", défend-il, appelant ses confrères à porter plainte en cas de menaces.

Il n'y a "rien qui justifie que l'on menace quelqu'un de mort", a réagi mardi David Quint, lors d'une conférence de presse de l'Ordre des vétérinaires et de plusieurs organisations syndicales, qualifiant ces intimidations d'"inacceptables".

La stratégie gouvernementale de lutte contre cette maladie animale très contagieuse, non transmissible à l'homme mais qui peut toucher très durement le cheptel, prévoit l'abattage systématique d'un troupeau dès la détection d'un cas, ce qui cristallise les tensions d'une partie des agriculteurs, notamment de la Coordination rurale (deuxième syndicat) et de la Confédération paysanne (3e).

"N'allez pas trop loin sinon vous n'aurez plus de vétérinaires !", a mis en garde le président du Conseil national de l'Ordre, Jacques Guérin, interrogé par l'AFP en marge de la conférence.

Droit de retrait ? 

Face à la pression qui a "monté d'un cran", il a appelé les vétérinaires à faire valoir leur droit de retrait "si les conditions ne réunissent pas leur sécurité et celle de leurs proches".

Cela signifie qu'un vétérinaire habilité et mandaté par une préfecture pour abattre un élevage pourrait refuser sa tâche, tout en argumentant les raisons auprès du préfet, explique l'Ordre, qui ne soutiendra toutefois pas les clauses de retrait "de principe".

Le standard de l'Ordre des vétérinaires est "submergé d'appels de personnes complotistes, antivax, anti-tout, qui déversent des tombereaux de bêtises à l'encontre de la profession. Cela finit par impacter fortement le moral des vétérinaires", déplorait son président il y a quelques jours auprès de l'AFP.

"C'est inadmissible de s'en prendre aux vétérinaires", a réagi auprès de l'AFP Stéphane Galais, porte-parole de la Confédération paysanne, arguant que la "responsabilité du climat de défiance" est à "aller chercher du côté du ministère de l'Agriculture".

La Coordination rurale, syndicat concurrent, "condamne" également "toutes les menaces" envers les vétérinaires, selon François Walraet, secrétaire général du syndicat, joint par l'AFP.

"Ce sont nos partenaires (...) Ce n'est pas à eux qu'il faut s'adresser si on veut que le protocole évolue", abonde-t-il.

Les mesures actuelles sont "absolument ce qu'il faut faire" pour éradiquer ce "virus extrêmement résistant dans les milieux extérieurs", insiste par ailleurs la présidente de l'association de vétérinaires SNGTV, Stéphanie Philizot.