Les victimes non reconnues des attentats du 13 novembre 2015 en France

Les réactions des accusés sont maintes fois restées inaudibles. Leurs expressions imperceptibles. (Photo, AFP)
Les réactions des accusés sont maintes fois restées inaudibles. Leurs expressions imperceptibles. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 26 juin 2022

Les victimes non reconnues des attentats du 13 novembre 2015 en France

Les réactions des accusés sont maintes fois restées inaudibles. Leurs expressions imperceptibles. (Photo, AFP)
  • Guillaume V., rescapé du Bataclan, avait 31 ans. Il s'est suicidé en 2017 dans une clinique psychiatrique où il était hospitalisé pour délire hypocondriaque et dépression sévère
  • «Le terrorisme ne l'a pas tué le 13 novembre 2015, le terrorisme l'a tué à petit feu», avait soutenu sa mère dans une lettre lue devant la cour

PARIS: Les attentats jihadistes du 13 novembre 2015, les plus meurtriers ayant jamais frappé la France, ont officiellement fait 130 morts, mais de nombreux avocats parlent de 132 victimes. 

Depuis les attaques, deux rescapés souffrant de stress post-traumatique ont mis fin à leur jour. 

Pour leur famille et leurs avocats le décès de ces deux jeunes gens est lié au traumatisme du 13-Novembre, et ils doivent être comptabilisés au côté des morts de la salle de spectacles du Bataclan (90), des terrasses de cafés et restaurants (39) et des abords du Stade de France (1). 

Au cours de son réquisitoire, l'avocat général Nicolas le Bris n'a pas hésité à stigmatiser le « cauchemar du 13-Novembre qui a fait 132 morts ». 

Guillaume V. et France-Élodie B. seront-ils officiellement considérés comme les 131e et 132e victimes des attentats du 13-Novembre ? C'est à la cour d'assises spéciale présidée par Jean-Louis Périès d'apporter une réponse définitive. 

« Les balles invisibles »  

Guillaume V., rescapé du Bataclan, avait 31 ans. Il s'est suicidé en 2017 dans une clinique psychiatrique où il était hospitalisé pour délire hypocondriaque et dépression sévère. 

« Guillaume n'a pas reçu de balles dans le corps, mais des balles invisibles, qui l'ont tué, doucement mais sûrement », avait témoigné son père Alain en octobre devant la cour. 

« Guillaume détestait la violence, mais elle l'a rattrapé le soir du 13 novembre (...). Notre fils qui aimait tant la vie a été envahi et débordé par ce stress post-traumatique, au point de mettre fin à ses jours le 19 novembre 2017 », a raconté le septuagénaire. 

Le lendemain de l'attentat, Guillaume avait confié à ses parents: « Ma vie ne sera jamais plus la même ». 

Comme nombre de rescapés, Guillaume a souffert d'un syndrome de stress post-traumatique et de ce que les experts appellent « la culpabilité du survivant ». Son état s'est aggravé à partir de juillet 2017. »Le stress post-traumatique s’est transformé en délire hypocondriaque et dépression majeure », avait dit Alain. 

Malgré l'amour des siens, les soins des médecins, son état psychique s'est inexorablement dégradé. 

Le 13 novembre 2016, Guillaume a parlé pour la première fois des attentats. « Je n'oublierai jamais le bruit des mitraillettes », a-t-il dit en pleurant. « C'était la première fois qu'il nous reparlait de ces attentats. Ça a duré 30 secondes, et il s'est refermé », a dit son père. 

En juillet 2017, les crises d'angoisse de Guillaume s'accélèrent. Il est hospitalisé en psychiatrie en août. Personne ne pourra empêcher son suicide le 19 novembre 2017, six jours après le deuxième anniversaire des attentats. 

« Guillaume s'est suicidé non pas parce qu'il était faible, mais parce qu'il avait été blessé sur le plan psychiatrique. Guillaume ne voulait pas arrêter de vivre, il voulait arrêter de souffrir », avait déclaré son frère Christophe venu également témoigner. 

« Le terrorisme ne l'a pas tué le 13 novembre 2015, le terrorisme l'a tué à petit feu », avait soutenu sa mère dans une lettre lue devant la cour. 

Séquelles aggravées par le procès 

France-Élodie B. avait survécu à la fusillade à la terrasse du Carillon, le bar en bas de chez elle. Mais elle n'avait pas surmonté sa détresse. Cette mère de deux enfants a mis fin à ses jours le 6 novembre 2021, en plein procès du 13-Novembre. Elle avait 35 ans. 

« Depuis les attentats, France-Élodie B. conservait des séquelles psychologiques considérables. Elle n'a jamais réussi à surmonter ce retentissement psychologique et l'ouverture du procès en septembre a aggravé ses séquelles », a expliqué pudiquement à la cour son avocat, Me Pierre Thevenet. 

La détresse psychologique dont souffrait la jeune femme l'avait contrainte à abandonner son travail et lui avait valu d'être indemnisée par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme (FGTI). 

Comme Guillaume et des centaines d'autres rescapés elle était suivie sur le plan psychologique mais la douleur est devenue insupportable. 

« Je vous demande d'accepter la constitution de partie civile pour les quatre proches (ses deux enfants mineurs et ses deux parents, ndlr) de Mme France-Élodie B., 132e victime des attentats du 13-Novembre », avait dit à la cour Me Thevenet. 

Procès des attentats du 13 novembre en France: les moments marquants de près de dix mois d'audience

Des récits de victimes éprouvants, un principal accusé qui pleure et s'excuse, quelques images diffusées. Voici les moments marquants des près de dix mois d'audience du procès « historique » à Paris des attentats jihadistes du 13 novembre 2015, avant le verdict attendu mercredi. 

Le récit collectif des rescapés 

Jamais une audience criminelle n'avait autant laissé place à la parole des victimes. Une place en deux temps, au début et à la fin du procès, ce qui est sans précédent. 

Au total, environ 400 parties civiles sur les plus de 2 500 constituées - rescapés et proches des 130 victimes décédées - ont défilé à la barre pour raconter « leur 13-Novembre » et reconstituer pièce par pièce le puzzle des attaques jihadistes et de leurs vies brisées. 

De ces histoires singulières est né le récit collectif de l'insouciance perdue, la culpabilité intacte et la difficile voire impossible reconstruction. 

A l'automne, puis début mai, un même rituel s'est installé: un micro qu'on règle, des feuilles que l'on pose devant soi, la voix qui tremble, et à la fin de longues accolades avec d'autres parties civiles. 

Pas d'images « inutilement choquantes » 

Il aura fallu attendre près de sept mois d'audience pour que soient finalement diffusés le son et les images de l'attaque du Bataclan. Et une partie seulement. « Pas d'images inutilement choquantes », avait dit la cour. 

Cette précaution rarissime aux assises tranche avec le procès des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher, où la brutalité avait surgi sans ménagement sur grand écran. 

Quelques plans larges des tueries sur les terrasses parisiennes et des explosions au Stade de France ont été projetés au début du procès, rien pour le Bataclan. Il y eut aussi des vidéos de propagande du groupe Etat islamique, mais expurgées des scènes les plus atroces. 

Cette « aseptisation » fait débat, y compris au sein des associations de victimes. 

Le 1er avril, la cour d'assises spéciale de Paris a finalement fait droit à la demande répétée de l'une d'elles, Life for Paris. 

Elle diffuse alors une trentaine de photos et des extraits d'un enregistrement sonore. Le silence est lourd quand, dans la salle, résonne la ferveur du concert des Eagles of Death Metal, brusquement interrompu par les tirs des kalachnikov, les cris de peur et les hurlements de douleur. 

Un procès sur écrans plats 

Un bloc de 45 mètres de long pour 15 mètres de large, 550 places: bâtie de toutes pièces pour ce procès dans l'historique palais de justice de Paris, sur l'île de la Cité, la salle d'audience est lumineuse, moderne et... gigantesque. 

Depuis l'ouverture du procès, le 8 septembre, les cous se tordent depuis les bancs de bois pour tenter d'apercevoir, à travers une forêt de robes noires, la cour, les avocats généraux, les accusés et le principal d'entre eux, Salah Abdeslam, placé tout au bout d'un long box vitré. 

Les réactions des accusés sont maintes fois restées inaudibles. Leurs expressions imperceptibles. 

Pour suivre les débats ne sont souvent restés que les écrans plats disséminés dans les rangées. 

« Le planning, le planning » 

« Ca va durer neuf mois », « il va falloir vous armer de patience », lançait Jean-Louis Périès à un Salah Abdeslam réclamant le micro au cinquième jour du procès et vitupérant dans son box: « c'est quand qu'on aura la parole ? »  

Pour cette audience criminelle inédite par sa durée, qui a paru s'éterniser, le président a opté pour un séquençage qui n'a pas facilité la fluidité des débats. 

Les accusés n'auront été interrogés pour la première fois sur le fond du dossier que quatre mois après l'ouverture du procès, après les parties civiles, de nombreux témoins dits « de contexte » et une série d'enquêteurs français et belges. 

Et gare à celui qui s'aventurait sur une période des faits sortie du calendrier prévu, « saucissonné » en plusieurs phases: avant août 2015, d'août à début novembre, de début novembre au 13-Novembre, après les attentats... 

Un « manque de souplesse », diront certains, une obsession « gestionnaire » du planning, fustigeront d'autres. 

La Covid, hôte tenace 

La Covid s'est invité tardivement au procès, début 2022, mais de manière tenace: à quatre reprises, l'audience a été suspendue pendant une semaine, repoussant d'un mois la fin prévue de l'audience. 

Au total, six des onze accusés comparaissant détenus, serrés dans le box, ont été atteints par le Covid. 

Les trois avocats généraux l'ont aussi contracté, l'un d'eux lors des explications très attendues de Salah Abdeslam sur sa soirée du 13-Novembre. Loin de la salle, il a envoyé ses questions par messages à ses collègues. 

« Le seul participant connecté » 

L'absence physique à la barre et l'anonymat des enquêteurs belges cités comme témoins a fait l'objet d'un bras de fer entre la cour et les avocats de la défense. 

Elle a entraîné une « grève du box » de plusieurs accusés, l'un d'eux, le Suédois Osama Krayem, s'absentant même pendant plusieurs mois. Ce refus de comparaître a institué une pause rituelle à chaque début d'audience, le temps que les sommations d'usage par huissier lui soient faites. 

Lors des auditions menées depuis le parquet fédéral belge, les connexions avec Bruxelles ont viré au mauvais gag, entre réponses fuyantes des policiers et couacs techniques récurrents. 

« Ah ben, il est parti », désespère Me Olivia Ronen, l'une des avocates de Salah Abdeslam, un jour où elle presse de questions un enquêteur. Son visage a disparu des écrans, remplacé par un message et une voix de robot: « vous êtes le seul participant connecté ». 

« Bonjour M. le président » 

On n'avait pas vu une telle affluence et effervescence au procès depuis son ouverture: l'ambiance est solennelle ce 10 novembre quand l'ancien président François Hollande s'avance à la barre. C'est la première fois qu'un ex chef de l'Etat témoigne aux assises. 

« Bonjour Monsieur le président », lui dit Jean-Louis Périès. « Bonjour Monsieur le président », répond le témoin, sourire en coin. Rires dans la salle. 

François Hollande ne prononcera pas le nom du principal accusé et ne regardera pas le box, mais ses mots sonnent comme une réponse à ceux de Salah Abdeslam, qui avait affirmé qu'il « n'y avait rien de personnel » dans les attaques. « Ce groupe nous a frappés non pas pour nos modes d'action à l'étranger mais pour nos modes de vie ici-même », martèle François Hollande. « On nous a fait la guerre, nous avons répondu ». 

Les larmes d'Abdeslam 

Est-ce la même personne ? « Combattant » autoproclamé du groupe Etat islamique au premier jour du procès, Salah Abdeslam verse des larmes lors de son dernier interrogatoire en avril et présente ses excuses »à toutes les victimes ». 

« Cette histoire du 13-Novembre s'est écrite avec le sang des victimes. C'est leur histoire, et moi j'en ai fait partie. Elles sont liées à moi et moi à elles », déclare-t-il la voix tremblante. 

« Je vous demande de me pardonner. Je sais que la haine subsiste (...) je vous demande aujourd'hui de me détester avec modération ». 

Auparavant, il a raconté pour la première fois qu'il avait pour mission de se faire exploser dans un bar du XVIIIe arrondissement de Paris mais qu'il y avait renoncé par « humanité ». A-t-il dit la vérité? Une autre thèse voudrait qu'il ait tenté d'actionner le gilet, mais qu'il était défectueux.


Droit du travail: le gouvernement se donne jusqu'en septembre pour cadrer la négociation

Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
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  • Le gouvernement lance des négociations larges sur le droit du travail et l’assurance chômage, avec une lettre de cadrage attendue la semaine prochaine
  • Parmi les mesures envisagées : monétisation de la cinquième semaine de congés, suppression de deux jours fériés, lutte contre les temps partiels subis et assouplissement des CDD et intérim

PARIS: Le ministère du Travail a indiqué vendredi que la feuille de route de la négociation sur le droit du travail, avec notamment la possible monétisation de la cinquième semaine de congés payés, serait envoyée en septembre pour poursuivre "la concertation préalable".

Plaidant qu'"il faut travailler plus", le Premier ministre François Bayrou avait souhaité le 15 juillet que les partenaires sociaux ouvrent des négociations sur une nouvelle réforme de l'assurance chômage et sur le droit du travail pour participer à l'effort budgétaire.

Le ministère doit adresser "dans le courant de la semaine prochaine" la "lettre de cadrage" fixant le cadre de la négociation d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage avec des discussions prévues "jusqu’à la mi-novembre", ainsi que le document d'orientation concernant la suppression de deux jours fériés pour une négociation qui doit durer "jusqu’à la fin du mois de septembre".

Mais les autres mesures ayant trait à "la modernisation du marché du travail et la qualité du travail" feront l'objet d'un document d'orientation à la rentrée. Outre la monétisation de la cinquième semaine de congés payés, il s'agit notamment de lutter contre les temps partiels subis, de "fluidifier" le marché du travail avec des assouplissements sur les CDD et les contrats d'intérim ou encore de dispositions sur l’indemnisation des arrêts maladie.

"Un envoi en septembre plutôt que début août répond à une demande de certains des partenaires sociaux de pouvoir poursuivre la concertation préalable à l’envoi de ce document d’orientation", a expliqué le ministère, ajoutant que cela "permettra de continuer à recueillir leurs avis, leurs idées et leurs priorités pour enrichir ce document".

Le calendrier de cette négociation doit s'étendre "sur plusieurs mois, au minimum jusqu’à la fin de l’année 2025", selon la même source.


Paris salue la conférence de New York et poursuit l’initiative avec Riyad

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
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  • Paris et Riyad poussent pour une reconnaissance collective de l’État palestinien
  • La France appelle à un cessez-le-feu, la levée du blocus et le désarmement du Hamas

PARIS: Sur fond de crise humanitaire d’une cruauté inqualifiable dans la bande de Gaza, le président Emmanuel Macron a annoncé une opération de largage de vivres conduite par la France, avec le soutien de la Jordanie, des Émirats arabes unis et de l’Allemagne.

« Face à l’urgence absolue, nous venons de conduire une opération de largage de vivres à Gaza », a déclaré le chef de l’État sur X, en remerciant les partenaires impliqués et saluant l’engagement des forces armées françaises.

Mais, de son point de vue, ces largages restent insuffisants : « Il faut qu’Israël ouvre un plein accès humanitaire », a-t-il insisté, réitérant l’exigence française d’une levée immédiate du blocus des aides.

Au-delà de la réponse d’urgence, Paris entend porter une initiative diplomatique structurante : la conférence internationale co-présidée à New York par la France et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en posant un cadre politique ambitieux.

Cette conférence, tenue en l’absence des États-Unis et d’Israël, a réuni plus de 40 ministres et 120 participants, aboutissant à l’adoption d’un plan d’action en 42 points.

Malgré les réticences et le scepticisme ambiants, elle a permis l’émergence d’une dynamique inédite vers la reconnaissance de l’État palestinien et un processus de paix régional.

Le plan d’action validé à New York constitue désormais un socle politique partagé entre acteurs européens, puissances arabes, Union européenne et Ligue arabe.

Ce texte appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, à l’acheminement massif de l’aide humanitaire, mais surtout à la mise en œuvre concrète de la solution à deux États.

Il prévoit notamment un processus progressif de désarmement du Hamas, condition indispensable à la stabilisation durable de la région.

Pour la France, ce texte marque une rupture avec l’impasse diplomatique des dernières décennies et propose pour la première fois un mécanisme concerté de démilitarisation et de réintégration de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne.

Le document évoque même la possibilité de confier les armes du Hamas à une tierce partie sous supervision internationale, afin de garantir qu’elles ne soient plus utilisées.

Ce volet, essentiel pour Israël, est aussi le fruit d’un consensus entre les États arabes partenaires, y compris ceux perçus comme proches du Hamas.

Sur le front politique, Paris se réjouit de l’effet de levier de la conférence : peu après, plusieurs pays — Portugal, Royaume‑Uni, Canada — ont annoncé leur volonté de reconnaître l’État palestinien, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Une coalition de volontaires est en train de se constituer : quinze États, aux côtés de la Ligue arabe et de l’Union européenne, ont d’ores et déjà signé une déclaration commune en ce sens.

La France espère ensuite entraîner d’autres partenaires européens, notamment l’Allemagne. « Nous continuons à travailler en E3 avec nos partenaires allemands et britanniques », indique une source haut placée.

Si Berlin reste prudent, des signes d’évolution apparaissent dans les récentes déclarations de sa ministre des Affaires étrangères. Paris entend maintenir ces échanges diplomatiques jusqu’à septembre.

Contrairement aux critiques israéliennes et américaines, la France affirme que cette dynamique de reconnaissance ne constitue pas un obstacle à la paix, mais un levier pour la relancer.

Le président Macron estime que cette reconnaissance, inscrite dans un cadre politique exigeant — avec une gouvernance palestinienne réformée et un désarmement du Hamas — peut rebâtir les conditions d’une solution durable.

Les ruptures des négociations avec le Hamas sont antérieures aux annonces de Paris, souligne-t-on à l’Élysée, et ne peuvent donc pas lui être imputées.

La reconnaissance collective envisagée en septembre serait également un signal fort en direction des modérés palestiniens, en particulier l’Autorité palestinienne, qui s’est engagée début juin à respecter une série d’exigences posées par la communauté internationale en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Un des apports majeurs de la conférence de New York est l’introduction formelle de la question du désarmement du Hamas dans un cadre diplomatique multilatéral.

Jusqu’ici marginalisée ou qualifiée d’irréaliste, cette exigence est clairement codifiée dans le plan d’action. Des discussions sont en cours, y compris sur l’exil éventuel de certains cadres du mouvement auprès d’États tiers.

Le Hamas n’a pas accepté ces conditions, mais le message politique est clair : son isolement au sein du monde arabe s’accentue et sa marge de manœuvre se rétrécit.

Face à cette dynamique, Israël et l’administration américaine ont haussé le ton, estimant qu’une reconnaissance unilatérale de la Palestine constituerait une « insulte » aux victimes israéliennes du 7 octobre.

Le président américain Donald Trump a même imposé des sanctions ciblées contre certains membres de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, en contradiction avec les efforts en cours pour renforcer cette autorité.

La position américaine révèle un décalage croissant avec une partie de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels, en raison de son soutien inconditionnel à Israël, malgré l’ampleur des pertes civiles à Gaza et la persistance de la colonisation en Cisjordanie.

Cet état de fait suscite déjà des interrogations en Europe, où des pays comme la Suède exigent, par exemple, le gel de la partie commerciale de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

La France, de son côté, entend poursuivre cette dynamique au-delà de la conférence de New York. Un sommet est prévu les 21 et 22 septembre, juste avant l’Assemblée générale de l’ONU, pour réunir les États prêts à reconnaître collectivement la Palestine et à faire vivre ce nouveau cadre politique.

« Il s’agit d’une coalition inédite, qui repose sur un équilibre entre exigences sécuritaires et reconnaissance des droits politiques du peuple palestinien », souligne-t-on à Paris.

En réaffirmant l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat, la levée du blocus humanitaire, la libération des otages, mais aussi le désarmement du Hamas et la mise en place d’un État palestinien souverain, la France, de concert avec l’Arabie saoudite, tente de reconstruire une architecture de paix.


La défiance à l'égard de Macron et de Bayrou au plus haut, selon un sondage Paris, France

Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
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  • La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat
  • Le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi

PARIS: La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat, tandis que le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi.

Près des trois quarts des Français interrogés (73%) affirment ne pas faire confiance au chef de l'Etat et la moitié (49%) va jusqu'à "ne pas lui faire du tout confiance", le niveau le plus élevé atteint de son second mandat, qu'il n'a dépassé qu'une seule fois depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 au plus fort de la crise des gilets jaunes en décembre 2018.

Selon le sondage, seuls 21% des Français font confiance à Emmanuel Macron, soit un point de moins qu'en juin et 6 de perdus par rapport à mars.

Pour François Bayrou, qui a présenté à la mi-juillet les mesures d'économie prévues par le gouvernement dans son projet de budget pour l'année prochaine, la chute se poursuit avec seulement 12% des Français qui disent lui faire confiance, soit un nouveau record d'impopularité (-2 points).

La défiance à l'égard du chef du gouvernement a progressé, avec 80% des Français (+5 points en un mois) qui disent ne pas lui faire confiance et 56% qui affirment ne pas lui faire "du tout" confiance, soit un bond de 9 points depuis juin.

Au classement des personnalités, le RN Jordan Bardella conserve la première place avec 39% des Français (+3 points) qui ont une image positive de lui, devant l'ancien Premier ministre Edouard Philippe (37%) et Marine Le Pen (35%).

A gauche, le mieux classé est l'ancien président François Hollande qui s'installe en huitième position grâce à un bond de 6 points en un mois.

Sondage réalisé par internet les 29 et 30 juillet auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Marge d'erreur entre 1,4 et 3,1 points.