Boycott des produits français : le Qatar prend position, la France réplique

Depuis samedi soir, les produits fabriqués en France ont été retirés des étals des supermarchés à Doha et l'Université du Qatar a reporté indéfiniment la semaine culturelle française, invoquant «un abus délibéré de l'islam et de ses symboles» (AFP)
Depuis samedi soir, les produits fabriqués en France ont été retirés des étals des supermarchés à Doha et l'Université du Qatar a reporté indéfiniment la semaine culturelle française, invoquant «un abus délibéré de l'islam et de ses symboles» (AFP)
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Publié le Vendredi 30 octobre 2020

Boycott des produits français : le Qatar prend position, la France réplique

  • La Turquie et le Qatar ont lancé un appel au boycott des produits français en réaction aux déclarations d’Emmanuel Macron sur les caricatures de Charlie Hebdo
  • Des élus demandent la remise en cause d’une convention fiscale avantageuse signée en 2008 entre la France et le Qatar

PARIS: « La liberté, nous la chérissons ; l'égalité, nous la garantissons ; la fraternité, nous la vivons avec intensité. Rien ne nous fera reculer, jamais » ces quelques mots écrits et partagés par le président de la République française s’inscrivent dans un climat de tensions entre la France et certains pays musulmans.

En réponse à la décapitation du professeur Samuel Paty par un musulman radical tchétchène, la France endeuillée a mis un point d’honneur à défendre la liberté d’expression : une valeur pionnière de la République, et emblématique des mœurs françaises. Ainsi, lors de son discours en hommage au professeur victime de l’acte terroriste, le président Emmanuel Macron a promis que la France ne renoncerait aucunement aux caricatures.

Cette déclaration a particulièrement suscité la colère de la Turquie et du Qatar.

Climat diplomatique hostile

Alors que les relations entre la Turquie et la France n’étaient déjà pas au beau fixe, il règne désormais un climat diplomatique hostile. En effet le président turc Recep Tayyip Erdogan a tenu des propos haineux à l’encontre d’Emmanuel Macron qu’il a traité de « fou », jugeant qu’il devrait « subir des examens (mentaux) ». 

« Tout comme en France certains disent ʺn'achetez pas les marques turquesʺ, je m'adresse d'ici à ma nation : surtout ne prêtez pas attention aux marques françaises, ne les achetez pas », a déclaré M. Erdogan dans un discours à Ankara.

Malgré les liens économiques entretenus entre le Qatar et l’Hexagone, la péninsule princière a, elle  aussi, rejoint le mouvement anti-français. Depuis samedi soir, les produits fabriqués en France ont été retirés des étals des supermarchés à Doha et l'université du Qatar a reporté indéfiniment la semaine culturelle française, invoquant « un abus délibéré de l'islam et de ses symboles ».

Selon Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, un boycott de la part de la France ne serait pas envisageable : « Ne répondons pas à la bêtise par la bêtise [...]. Il n'est pas question de boycotter qui que ce soit, il est question de s'en tenir à nos valeurs républicaines. »

Cette « provocation » a toutefois suscité l’indignation de certaines figures politiques françaises, remettant en question des accords bilatéraux passés entre les deux pays. 

Le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, a décrété que ces « appels au boycott sont sans aucun objet et doivent cesser immédiatement, de même que toutes les attaques dirigées contre la France, instrumentalisées par une minorité radicale ».

La sénatrice Nathalie Goulet a quant à elle appelé à interdire la chaine Qatarie « Al Jazeera » qui diffuserait « un discours de haine et de violence », et à vite « revoir la convention fiscale très avantageuse signée avec ce pays, pour lequel la France est un paradis fiscal ». La présidente du Front national, Marine le Pen, a également proposé de « suspendre les conventions fiscales ultra favorables de la France vis-à-vis des Qataris » afin de « faire respecter la France et de répondre à ces indignes intimidations et rétorsions ». 

L’économie mise au défi

La convention fiscale évoquée a été signée en 2008 entre les deux pays. Cet accord permet aux investisseurs qataris d’échapper à l’impôt sur les plus-values immobilières et sur la fortune, durant les cinq premières années de résidence en France. Un privilège très avantageux compte tenu des investissements massifs du Qatar vers la France, estimés à plus de 35 milliards d’euros.

L’implication du Qatar dans l’économie française a par ailleurs fait couler beaucoup d’encre et secouée l’opinion publique à travers le « Qatar Bashing ».

Certains économistes accusent le Qatar « d’acheter la France », puisque le pays a investi de « façon opaque en maintenant le flou sur l’identité des actionnaires » dans des symboles français, tels que le club de football du « Paris Saint Germain », les magasins « Le Printemps », la chaîne TV BeIn Sport, et de l’immobilier de luxe par le biais de son fonds souverain « Qatar Investment Authority (QIA) ». Un fonds souverain qui s’est vu décerner une note de 5/10 par la Linaburg-Maduell Transparency Index, une note identique à celle des fonds souverains iraniens et chinois.

Un positionnement politico-religieux ambigu

Le Qatar étant un État foncièrement très fragile, ces investissements lui permettent de se diversifier dans le but de pallier ses manques. L’émirat princier a des opinions politiques qui divergent des positions de l’Arabie saoudite ou des Émirats arabes unis. Ces deux pays n’entretiennent plus de relations diplomatiques avec le Qatar depuis 2017, l’accusant de « soutenir le terrorisme » et de « porter préjudice à la paix et à la stabilité » dans la région.

Le Qatar abrite en effet l'ancien chef du Hamas, Khaled Meshaal, ainsi que le chef spirituel (non-officiel) mais très influent de la confrérie des Frères musulmans Yusuf al-Qaradawi, et finance via l’ONG « Qatar Charity », des actions discrètes de prosélytisme en Europe.

Cette prise de position contre le pays des droits de l'homme n’est pas partagée par tous les pays musulmans. D’autant plus que la ministre française de la Culture Roselyne Bachelot a clairement expliqué que la France ne luttait pas « contre les musulmans » mais contre « l'islamisme et le terrorisme ».

 


Dermatose: Lecornu demande «une accélération de la stratégie vaccinale», va recevoir les syndicats

Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
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  • Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence
  • Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français"

PARIS: Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet.

Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence. Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français", appelant à "garantir" une "disponibilité des doses" de vaccins "plus forte".

Il a également demandé un "état des lieux des contrôles sur les transports interdits d'animaux", "un plan d’accompagnement pour les petits élevages" ainsi qu'"un plan de repeuplement adapté à l’Occitanie".


Ultime vote sur le budget de la Sécurité sociale à l'Assemblée

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée devrait adopter définitivement le budget de la Sécurité sociale 2026, fruit de compromis, malgré une majorité introuvable et sans 49.3
  • Le budget de l’État reste très incertain : déficit visé à 5% du PIB, fortes divergences sur les recettes, CMP à haut risque

PARIS: Sauf surprise, l'Assemblée nationale devrait définitivement adopter mardi le budget de la Sécurité sociale pour 2026, un succès arraché à force de concessions par Sébastien Lecornu, qui risque toutefois de ne pas réussir le même pari pour le budget de l'Etat, à l'issue bien plus incertaine.

Alors qu'approche la date butoir du 31 décembre, l'heure est aux dernières tractations pour les parlementaires, au terme de longues semaines de débats. Tous les yeux sont désormais braqués sur le projet de loi de finances (PLF), avec des négociations décisives jusqu'au week-end.

Il y a une semaine pourtant, beaucoup doutaient d'une possible adoption du premier des deux textes budgétaires, la loi de financement de la Sécurité sociale, qui doit notamment acter la suspension de la réforme des retraites.

Pour le PS, qui a érigé cette mesure en condition de sa non-censure, l'étape doit marquer le succès de sa stratégie de négociation avec l'exécutif, à rebours du reste de la gauche. Et pour le Premier ministre, elle couronnerait au moins temporairement sa méthode du compromis.

Après un dernier passage express au Sénat vendredi, le texte revient mardi dans l'hémicycle, où les députés devront renouveler le scrutin serré de la semaine dernière (247 voix contre 234), à haut risque en l'absence de majorité et de 49.3.

Les socialistes, quoique dans l'opposition, avaient consenti à massivement voter pour. Hésitant jusqu'au dernier moment à voter contre, les Ecologistes s'étaient en majorité abstenus. Et malgré les consignes d'abstention de leur parti, 18 députés LR et 9 Horizons l'avaient soutenu.

Au gouvernement, une issue semblable est attendue mardi, même s'il "faut veiller à ce qu'il n'y ait pas de démobilisation" dans l'hémicycle, concède un ministre.

Les syndicats FO et CGT ont appelé à des rassemblements devant l'Assemblée, critiquant notamment la limitation de la durée des arrêts maladie, ou une taxe sur les mutuelles dont ils craignent la répercussion sur les cotisations.

Le texte prévoit par ailleurs la création d'un nouveau congé de naissance, ou d'un "réseau France santé" voulu par M. Lecornu pour l'accès aux soins.

Le gouvernement a vu sa copie profondément remaniée par les députés, qui ont supprimé le gel des pensions de retraite et minima sociaux, et contraint l'exécutif à renoncer à doubler les franchises médicales.

Le déficit anticipé pour la Sécurité sociale est de 19,4 milliards d'euros en 2026 (contre 23 milliards en 2025). Mais au prix de transferts de 4,5 milliards d'euros des caisses de l'Etat vers celles de la Sécu.

- Négociations députés-sénateurs -

Des transferts qui contribuent à compliquer l'équation pour le budget de l'Etat, où ils doivent être compensés.

La copie du budget de l'Etat adoptée lundi au Sénat, qui a peiné à trouver des économies significatives dans les dépenses, porterait le déficit à 5,3% du PIB. Or le gouvernement a placé l'objectif à 5%.

Une commission mixte paritaire (CMP) réunissant sept députés et sept sénateurs doit tenter de trouver un accord vendredi et possiblement samedi, une opération périlleuse au vu des divergences entre les deux chambres.

L'Assemblée avait massivement rejeté le texte en première lecture.

Les négociations avant et pendant la CMP porteront notamment sur la question des recettes, alors que les socialistes réclament des mesures de justice fiscale, quand la droite se montre intransigeante dans son refus de nouveaux prélèvements.

"Il ne pourra pas y avoir d'accord sur un budget qui augmenterait considérablement les impôts et ne réduirait pas significativement la dette", insiste le chef des Républicains Bruno Retailleau.

Même si l'ancien socle commun, majoritaire au sein de la CMP, trouve un accord, il faudra encore qu'il puisse être adopté la semaine prochaine à l'Assemblée.

Et ce alors que les socialistes promettent cette fois de s'abstenir au mieux, et les Écologistes de voter contre.

Autres possibilités: utiliser le 49.3 en s'assurant d'une non-censure dans la foulée -- comme le plaident l'ancienne Première ministre Élisabeth Borne ou l'ex-président François Hollande -- ou se résoudre à une loi spéciale, avec une reprise des négociations en janvier.

Une dernière option loin de remporter l'enthousiasme général.

"Il faut que ça s'arrête cette séquence budgétaire", estime un cadre socialiste. "On connaît toutes les données du problème. Si le compromis est possible, alors il faut qu'il ait lieu maintenant."


Le musée du Louvre resté fermé lundi en raison d'une grève

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.  Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron. Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
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  • Les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public
  • Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR"

PARIS: Le musée du Louvre à Paris est resté fermé lundi en raison d'une "grève reconductible" de ses agents, une nouvelle épreuve pour une institution dans la tourmente depuis le spectaculaire cambriolage du 19 octobre et la mise à nu de ses dysfonctionnements.

A 9H00 (8H00 GMT), les portes du musée sont restées closes devant une file de visiteurs, puis la direction a annoncé la fermeture pour "toute la journée".

"Je suis vraiment déçu, le Louvre était la raison principale de notre venue à Paris, parce que nous voulions voir Mona Lisa", le célèbre tableau de La Joconde de Léonard de Vinci, a déclaré à l'AFP Minsoo Kim, 37, Coréen, en lune de miel.

"C'est normal qu'ils fassent grève s'ils ont besoin de meilleures conditions de travail. Bien sûr, en tant que touriste, ce n'est pas génial d'être ici et que le musée soit fermé, mais nous avons réussi à reporter notre visite, donc ça n'est pas un problème", a estimé de son côté Patricia, une touriste brésilienne qui n'a pas souhaité donner son nom.

Un peu plus tôt, les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public.

Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR".

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.

Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture.

"Nous avons eu quelques avancées en matière de rémunération, mais cela reste insuffisant et nous attendons une proposition écrite du ministère - certainement mardi - pour nous prononcer", a déclaré à l'AFP Alexis Fritche, du syndicat CFDT-Culture, à l'issue de deux heures de réunion.

Selon lui, "pas d'avancée" non plus sur les emplois: "On nous annonce 28 postes pour la surveillance, mais ils proviennent de redéploiements".

A l'issue de l'AG, le délégué du syndicat CGT Christian Galani avait rappelé que la filière accueil et surveillance avait "perdu 200 équivalents temps plein en l'espace de 15 ans, alors que la fréquentation a augmenté de moitié".

Une prochaine AG est prévue mercredi à 9H00 locales, le mardi étant le jour de fermeture hebdomadaire du Louvre.

Conflit social et réorganisation 

"On est en colère", "nous ne sommes pas d'accord avec la manière dont Le Louvre a été géré", a dit devant la presse Elise Muller, agente de surveillance du syndicat Sud Culture.

Valérie Baud, représentante CFDT, s'était félicitée d'un mouvement "interprofessionnel", regroupant métiers de la "conservation, agents d'accueil et de surveillance, professions support, juristes, graphistes".

En parallèle de ce conflit social, le musée doit faire face à une réorganisation à marche forcée et continuer de répondre aux interrogations sur les failles qui ont permis à un commando de s'emparer de huit joyaux de la Couronne, toujours introuvables.

Fragilisée, la présidente du Louvre, Laurence des Cars, devra travailler en tandem avec Philippe Jost, le haut fonctionnaire chargé du chantier de reconstruction de Notre-Dame, à qui la ministre française de la Culture Rachida Dati a confié vendredi la mission de "réorganiser en profondeur le musée".

Audition de la présidente mercredi 

"Des mesures indispensables sont à prendre, bien au-delà de la sûreté et de la sécurité", a déclaré Mme Dati.

"Toute réflexion sur l'avenir du Louvre ne saurait se limiter à une approche technico-organisationnelle", avait réagi la CFDT.

Le ministère de la Culture a précisé que la mission de M. Jost serait menée en janvier et février et que ses recommandations étaient attendues "fin février".

Des sénateurs vont par ailleurs poursuivre leur quête de réponses sur les dysfonctionnements du musée.

Mardi, ils doivent entendre pour la première fois l'ancien président du Louvre Jean-Luc Martinez, destinataire pendant son double mandat (2013-2021) de deux audits alarmants peu suivis d'effets.

Mercredi, ce sera Mme des Cars, à la tête du musée depuis fin 2021, pour comprendre notamment comment ces deux audits n'ont été découverts par l'actuelle direction qu'après le casse du 19 octobre.