Le blé, céréale incontournable et arme diplomatique, au cœur de la crise alimentaire

Épis de blé (AFP)
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Publié le Mardi 05 juillet 2022

Le blé, céréale incontournable et arme diplomatique, au cœur de la crise alimentaire

  • Dans la foulée de l'invasion russe, le cours du blé a grimpé jusqu'à plus de 400 euros la tonne en mai sur le marché européen, le double de l'été dernier
  • Les famines ne sont «jamais liées à la production alimentaire», «elles sont toujours causées par des problèmes d'accès», soulignait récemment Arif Husain, économiste en chef du Programme alimentaire mondial (PAM)

PARIS : Fruit des climats tempérés et facteur de paix quand il abonde, le blé est devenu en quelques mois une arme diplomatique dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine : retour sur les raisons d'une crise majeure qui menace la sécurité alimentaire de millions d'humains.

Plus de 200 millions de personnes souffrent d'une faim aiguë dans le monde selon l'ONU, qui craint de nouveaux «ouragans de famines» sous l'effet de la hausse des prix alimentaires, vertigineuse depuis le début du conflit.

Pourquoi le blé est-il irremplaçable ?

Sous forme de semoule, de farine ou de pain, «le blé, tout le monde en mange, mais tout le monde n'est pas capable d'en produire», résume l'économiste français Bruno Parmentier, auteur de «Nourrir l'humanité».

Aujourd'hui, seule une dizaine de pays produisent assez de blé tendre pour pouvoir en exporter : la Chine, premier producteur mondial, en importe des quantités pour nourrir 1,4 milliard d'habitants, les grands exportateurs se retrouvant en Russie, aux États-Unis, au Canada, en Australie et en Ukraine.

Consommé par des milliards d'humains et largement subventionné par les États, le blé est «la céréale majeure de la sécurité alimentaire mondiale», souligne Sébastien Abis, chercheur associé à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) à Paris. Le maïs, davantage produit, est «avant tout utilisé pour l'alimentation animale ou des besoins industriels».

Une situation déjà tendue

Les prix des céréales étaient déjà très élevés avant la guerre : le cours du blé est monté sur tous les marchés dès l'automne 2021 et s'est maintenu à de hauts niveaux à la faveur de la reprise économique post-Covid.

Plusieurs facteurs expliquaient cette courbe ascendante : la flambée des coûts de l'énergie qui a suivi la trajectoire des hydrocarbures, des engrais azotés (fabriqués à partir du gaz et dont le prix a triplé en un an), des transports (congestion des ports, manque de main d'œuvre...) et la météo, avec notamment une récolte catastrophique au Canada, sous un dôme de chaleur écrasant l'été dernier.

Pourquoi le déclenchement de la guerre a-t-il précipité les choses ?

Dans la foulée de l'invasion russe, le 24 février 2022, le prix du blé a battu des records : le cours a grimpé jusqu'à plus de 400 euros la tonne en mai sur le marché européen, le double de l'été dernier.

Cette hausse est insoutenable pour les plus pauvres, notamment la trentaine de pays qui dépendent «au moins à 30% de l'Ukraine et de la Russie» pour leurs importations, souligne la FAO.

Ces deux pays, historiquement des greniers à blé de l'Europe, représentaient 30% du total des exportations mondiales de la céréale. Ces dernières années, leur production n'a cessé d'augmenter, la Russie prenant la tête des pays exportateurs, tandis que l'Ukraine était en passe de s'arroger la troisième place.

Leur poids sur le marché a pesé lourd dans «la dynamique de la peur» qui s'est imposée dans les premiers mois du conflit, relève Edward de Saint-Denis, du cabinet de courtage en matières premières Plantureux & Associés.

Quelles conséquences pour l'Ukraine ?

La fermeture de la mer d'Azov et le blocus des ports ukrainiens de la mer Noire ont immédiatement privé les marchés de plus de 25 millions de tonnes de graines (tous produits confondus), bloquées dans les fermes ou les silos des installations portuaires.

En dépit d'énormes efforts pour évacuer ces produits par la route et le rail, les exportations sont restées six fois moins importantes que par la mer.

Jusqu'à la lisière des zones de front, les fermiers sont finalement parvenus à semer. Les récoltes s'annoncent en repli de 40% pour le blé et de 30% pour le maïs, selon les estimations de la principale association de producteurs et exportateurs d'Ukraine.

Le blé, une arme de guerre ?

«En temps de guerre, les grands pays producteurs tiennent littéralement le sort des autres entre leurs mains», affirme Bruno Parmentier, parce qu'«aucun gouvernement ne peut se permettre de laisser sa capitale avoir faim».

Mais les famines ne sont «jamais liées à la production alimentaire», «elles sont toujours causées par des problèmes d'accès», soulignait récemment Arif Husain, économiste en chef du Programme alimentaire mondial (PAM).

Alors que le conflit s'enlisait, des négociations se sont engagées début juin à la demande de l'ONU, sous l'égide de la Turquie, pour mettre en place des «corridors maritimes sécurisés» permettant d'exporter les stocks ukrainiens. En vain.

Moscou demandait la levée au moins partielle des sanctions occidentales, accusées d'aggraver la crise alimentaire. Une demande qualifiée de «chantage» par le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken début juin.

La solution aurait pu consister, pour les pays qui avaient des réserves, à remettre des grains sur le marché. Mais l'essentiel des stocks sont en Chine, qui ne les revend jamais, et l'Inde, qui s'était engagée à vendre plus par solidarité avec les pays les plus dépendants, a brutalement fait marche arrière : frappée par une canicule dévastatrice, elle a imposé un embargo temporaire sur ses exportations – ce qui a encore dopé les cours.

La Russie, elle, dont la récolte de blé s'annonce extraordinaire cette année, «continue de vendre à certains pays, notamment au Moyen-Orient, qui en échange ne voteront pas contre elle à l'ONU», relève un observateur des marchés. «Elle distille aussi son gaz et ses engrais, qui sont de puissants leviers diplomatiques.»

Quelles solutions ?

À court terme, la solution viendra des nouvelles récoltes, qui s'annoncent «plutôt bonnes» en Amérique, en Europe ou en Australie. La récolte 2022 de blé est prévue à 775 millions de tonnes, selon le ministère américain de l'Agriculture.

Les cours, qui étaient montés très haut pour des raisons géopolitiques, redescendent ces dernières semaines pour plusieurs raisons : le début des récoltes, l'intégration par les marchés de la situation en Ukraine, et la crainte d'une récession économique, explique Edward de Saint-Denis.

À moyen terme, «il faut faire en sorte qu'on ait plus de denrées produites et transformées localement», plaide Elisabeth Claverie de Saint-Martin, patronne du Cirad, organisme français de recherche agronomique et de coopération internationale pour le développement, au cours d'une conférence.

«L'Afrique agricole couvre 80% de ses besoins. Il faut maintenant généraliser les transitions agroécologiques, pour faire face au dérèglement climatique, et soutenir ces transitions qui doivent être économiquement soutenables», dit-elle, rappelant que notre système agroalimentaire ne l'est pas : entre le gaspillage dans le nord et les problèmes de transport et de chaîne du froid dans le sud, «30% de ce qui est produit dans le monde n'est jamais consommé».


Au moins neuf morts dans l'accident d'un avion-cargo aux États-Unis

Au moins neuf personnes sont mortes dans l'accident d'un avion-cargo qui s'est écrasé mardi peu après son décollage de Louisville, dans le centre-est des Etats-Unis, a annoncé mercredi le gouverneur du Kentucky. (AFP)
Au moins neuf personnes sont mortes dans l'accident d'un avion-cargo qui s'est écrasé mardi peu après son décollage de Louisville, dans le centre-est des Etats-Unis, a annoncé mercredi le gouverneur du Kentucky. (AFP)
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  • "Kentucky, d'autres nouvelles déchirantes nous parviennent de Louisville. Le nombre de victimes s'élève désormais à au moins 9, et pourrait encore augmenter. En ce moment, ces familles ont besoin de prières, d'amour et de soutien"
  • L'accident a également fait au moins 11 blessés. Le gouverneur de l'Etat tiendra une conférence de presse à 11H30, heure locale (16H30 GMT)

WASHINGTON: Au moins neuf personnes sont mortes dans l'accident d'un avion-cargo qui s'est écrasé mardi peu après son décollage de Louisville, dans le centre-est des Etats-Unis, a annoncé mercredi le gouverneur du Kentucky.

"Kentucky, d'autres nouvelles déchirantes nous parviennent de Louisville. Le nombre de victimes s'élève désormais à au moins 9, et pourrait encore augmenter. En ce moment, ces familles ont besoin de prières, d'amour et de soutien", a écrit sur X le gouverneur de l'Etat, Andy Beshear.

L'accident a également fait au moins 11 blessés. Le gouverneur de l'Etat tiendra une conférence de presse à 11H30, heure locale (16H30 GMT).

Le vol UPS 2976, qui devait rejoindre Hawaï, "s'est écrasé vers 17H15 heure locale" (22H15 GMT) mardi, selon le régulateur américain de l'aviation, la FAA. L'appareil était un McDonnell Douglas MD-11.

L'avion avait "trois membres d'équipage à son bord", a déclaré dans un communiqué le transporteur UPS, dont le siège de la division aérienne est installé à Louisville.

L'appareil aurait percuté "de manière assez directe" une installation de recyclage de pétrole, a précisé le gouverneur.

Une vidéo amateur partagée par la chaîne locale WLKY montre le moteur gauche de l'avion en feu tandis que l'appareil rase le sol en tentant de décoller de la piste, avant visiblement d'exploser plus loin, provoquant un large panache de fumée noire.

L'appareil a terminé sa course à près de 5 km de l'aéroport, selon la police.

Des images aériennes de télévisions locales montraient aussi, peu après le crash, un large brasier s'étalant sur plusieurs centaines de mètres de long dans une zone de hangars et de parkings, avec les gyrophares des équipes de secours à proximité.

Les vols, annulés mardi soir, ont été rétablis à l'aéroport international Mohamed-Ali de Louisville, a annoncé mercredi matin sur X le maire de la ville, Craig Greenberg.

UPS a annoncé mercredi via un communiqué suspendre toutes les opérations de tri des colis sur place, pour la deuxième journée consécutive.

Louisville sert de principal hub aérien américain pour UPS, selon une fiche d'information de l'entreprise.

Paralysie budgétaire 

Les enquêteurs de l'Agence américaine de sécurité des transports (NTSB) doivent arriver mercredi sur place.

L'accident de mardi intervient au moment où les conséquences de la paralysie budgétaire, due à un désaccord entre républicains et démocrates au Congrès, se font particulièrement ressentir dans le domaine du transport aérien.

Depuis plusieurs semaines, des pénuries de contrôleurs aériens - qui travaillent depuis le 1er octobre sans être payés - entraînent retards et annulations de vols à travers le pays.

Si la paralysie budgétaire se prolonge au-delà de cette semaine, l'espace aérien américain pourrait même être partiellement fermé, a mis en garde mardi le ministre des Transports, Sean Duffy.

UPS Airlines, la division aérienne du groupe américain de messagerie et de livraison de colis, opérait début septembre une flotte d'environ 500 avions de transport de marchandises, dont 27 MD-11, l'appareil impliqué dans l'accident de mardi.

Le dernier accident aérien majeur aux Etats-Unis s'est produit le 29 janvier dernier à proximité de l'aéroport Ronald-Reagan de Washington, quand un hélicoptère militaire est entré en collision avec un avion de ligne sur le point d'atterrir, tuant 67 personnes au total.


Mamdani élu maire de New York, soirée de revers pour Trump

Le socialiste Zohran Mamdani a remporté mardi la mairie de New York au terme d'une soirée d'élections locales dans lesquelles Donald Trump a essuyé plusieurs revers, un message de défiance à un an des élections de mi-mandat. (AFP)
Le socialiste Zohran Mamdani a remporté mardi la mairie de New York au terme d'une soirée d'élections locales dans lesquelles Donald Trump a essuyé plusieurs revers, un message de défiance à un an des élections de mi-mandat. (AFP)
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  • L'élu local de 34 ans, opposant résolu au président américain, a largement devancé son principal adversaire, l'ancien gouverneur de l'Etat, le centriste Andrew Cuomo, selon les projections de plusieurs médias
  • Zohran Mamdani deviendra le 1er janvier le premier maire musulman de la plus grande ville des Etats-Unis

NEW YORK: Le socialiste Zohran Mamdani a remporté mardi la mairie de New York au terme d'une soirée d'élections locales dans lesquelles Donald Trump a essuyé plusieurs revers, un message de défiance à un an des élections de mi-mandat.

L'élu local de 34 ans, opposant résolu au président américain, a largement devancé son principal adversaire, l'ancien gouverneur de l'Etat, le centriste Andrew Cuomo, selon les projections de plusieurs médias.

Zohran Mamdani deviendra le 1er janvier le premier maire musulman de la plus grande ville des Etats-Unis.

Sa victoire a été accueillie par des cris de joie et parfois les larmes de ses partisans réunis dans une grande salle rococo des années 1920 du centre de Brooklyn.

"En cette période d'obscurité politique, New York sera la lumière", leur a lancé le jeune élu, ajoutant que la ville pouvait "montrer à une nation trahie par Donald Trump comment le vaincre".

L'ancien président démocrate Bill Clinton, dont M. Cuomo a fait partie de l'administration, a souhaité au vainqueur de "transformer l'élan de (sa) campagne" pour construire "un New York meilleur, plus juste et plus abordable".

"L'avenir s'annonce un peu meilleur", a commenté pour sa part Barack Obama, évoquant les différentes victoires démocrates de la soirée.

Participation record 

Donald Trump, qui a fait de Zohran Mamdani l'une de ses nouvelles bêtes noires, a lui aussi rapidement réagi. Dans un message publié sur son réseau Truth Social, il a cité des "sondeurs" anonymes affirmant que les défaites républicaines étaient dues à la paralysie budgétaire -- le  "shutdown" -- et au fait que son propre nom ne figurait pas sur les bulletins de vote.

Plus tôt dans la journée, il avait appelé les électeurs juifs à faire barrage au candidat, militant de la cause palestinienne. En réponse, Zohran Mamdani s'est de nouveau engagé, dans son discours de victoire, à "bâtir une mairie qui (...) ne faiblira pas dans la lutte contre le fléau de l'antisémitisme".

Vainqueur surprise de la primaire démocrate en juin, l'élu du Queens à l'Assemblée de l'Etat de New York n'a jamais, depuis lors, quitté la tête des sondages, même après le retrait de la course du maire sortant Eric Adams, qui a également appelé à le battre en ralliant Andrew Cuomo.

Signe de l'engouement pour le scrutin, avant la fermeture des bureaux de vote à 21H00, plus de deux millions d'électeurs s'étaient rendus aux urnes, la plus importante participation depuis près de 60 ans.

Né en Ouganda dans une famille d'intellectuels d'origine indienne, arrivé aux Etats-Unis à sept ans et naturalisé en 2018, Zohran Mamdani a fait de la lutte contre la vie chère le coeur de sa campagne.

Si Donald Trump l'a qualifié de "communiste", ses propositions -- encadrement des loyers, bus et crèches gratuits -- relèvent plutôt de la social-démocratie.

Autres victoires démocrates 

Très populaire auprès des jeunes, le futur maire a également ramené à lui de nombreuses personnes qui s'étaient éloignées de la politique, "des électeurs frustrés par le status quo, en quête de nouvelles personnalités", selon le politologue Costas Panagopoulos.

"Si Zohran Mamdani devient maire, Trump n'en fera qu'une bouchée", a prédit Andrew Cuomo avant le verdict mardi, insistant, comme il l'a fait durant toute la campagne, sur l'inexpérience de son adversaire.

Plusieurs fois, le président républicain a promis de mettre des bâtons dans les roues du jeune candidat démocrate s'il était élu, en s'opposant au besoin au versement de certaines subventions fédérales à la ville.

Voisin de New York, l'Etat du New Jersey a choisi la démocrate Mikie Sherrill contre l'homme d'affaires républicain Jack Ciattarelli. L'Etat a longtemps été considéré comme un bastion démocrate. Mais à la dernière présidentielle, Donald Trump y avait considérablement réduit l'écart.

Plus au sud sur la côte est, la Virginie a élu la première femme à sa tête, la démocrate Abigail Spanberger, battant la républicaine Winsome Earle-Sears.

Enfin, les Californiens ont approuvé un texte visant à redécouper leur carte électorale en faveur des démocrates, qui cherchent à compenser ce qu'ont fait au Texas les républicains sous la pression de Donald Trump.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".