Rapport sur les minorités: une enquête d'Arab News sur les Druzes

Cette confession, enracinée dans l'islam mais inspirée de nombreuses sources, dont le Coran, est née au Caire au début du XIe siècle sous le règne du sixième calife fatimide chiite ismaélien, Al-Hakim bi-Amr Allah. (Photo, AN)
Cette confession, enracinée dans l'islam mais inspirée de nombreuses sources, dont le Coran, est née au Caire au début du XIe siècle sous le règne du sixième calife fatimide chiite ismaélien, Al-Hakim bi-Amr Allah. (Photo, AN)
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Publié le Mardi 12 juillet 2022

Rapport sur les minorités: une enquête d'Arab News sur les Druzes

  • La communauté druze et les lecteurs d'Arab News ont fait remarquer que la publication du reportage suggérait l'émergence d'une culture d'ouverture et de tolérance religieuse
  • La série de dossiers sur les minorités reflète la volonté d'Arab News, journal fondé en 1975, d'être «la voix d'une région en mutation»

LONDRES: Dans son dernier rapport multimédia sur les minorités, Arab News raconte une histoire fascinante intitulée «Les Druzes: les grands survivants». Il s’agit en effet de l'une des confessions les plus mystérieuses et les moins bien connues du Moyen-Orient.

La série propose également «Le miracle copte», «Les Arabes oubliés d'Iran», «Les Juifs du Liban», et «Non pardonnés». La dernière enquête relate l'histoire du clan Al-Ghofran, persécuté dans le Golfe.

Les histoires révélées à travers ces récits sont toujours fascinantes. Elles montrent que de nombreuses communautés qui connaissent aujourd'hui un climat de tension ont souvent vécu en harmonie avec leurs voisins dans le passé. Elles offrent également de précieux renseignements sur des communautés souvent méconnues.

Prenons l'exemple des Druzes. Cette confession, enracinée dans l'islam mais inspirée de nombreuses sources, dont le Coran, est née au Caire au début du XIe siècle sous le règne du sixième calife fatimide chiite ismaélien, Al-Hakim bi-Amr Allah.

Au début, la foi était accessible aux nouveaux venus. Ses adeptes la prêchaient librement et ils cherchaient des convertis. Cependant, en raison de la disparition mystérieuse d'Al-Hakim, en 1021, le califat fatimide s'est retourné contre les Druzes, qui ont été contraints à la clandestinité et se sont dispersés dans toute la région.

En 1043, confrontés à une persécution généralisée, ils ont définitivement interdit toute présence étrangère dans leurs rangs et ont ainsi abandonné le prosélytisme au profit de la discrétion dans un souci de survie.

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La foi druze est enracinée dans l'islam mais s'inspire de nombreuses sources. (Photo, AFP)

Cette confidentialité est maintenue jusqu'à ce jour, même parmi les fidèles, dont la plupart ne sont pas autorisés à accéder aux écritures ni aux pratiques les plus secrètes de la religion.

Aujourd'hui, les Druzes vivent dans leurs bastions traditionnels situés dans les montagnes du Liban, de la Syrie et de la Palestine, là où leurs ancêtres ont trouvé refuge il y a mille ans.

Bien qu'ils aient réussi à s'intégrer et à se montrer loyaux envers tous les pays dans lesquels ils se sont installés, les Druzes sont confrontés à un avenir incertain.

Étant donné qu'ils ne constituent qu'une minorité, ils sont particulièrement vulnérables aux bouleversements politiques et sociaux qui caractérisent désormais une bonne partie du Moyen-Orient.

Comme la foi n'est pas ouverte aux nouveaux arrivants et que ses adeptes sont de plus en plus nombreux à émigrer pour refaire leur vie en Occident (où beaucoup épousent des personnes d'une autre confession), on craint que le nombre de Druzes ne diminue au point que la religion en vienne à disparaître.

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Les Druzes se trouvent dans leurs bastions traditionnels de montagne au Liban, en Syrie et en Palestine. (Photo, AFP)

La communauté druze et les lecteurs d'Arab News ont apprécié ce dossier et ils ont fait remarquer que sa publication suggérait l'émergence d'une culture d'ouverture et de tolérance religieuse.

«Le monde a changé», commente un internaute sur Twitter après la publication du reportage sur les Druzes.

«Le journal anglophone saoudien réalise une série de documentaires sur divers groupes et sectes. Il y a même un épisode sur les Druzes. Cela n'aurait jamais été possible auparavant.»

«C'est un document bien écrit et qui présente parfaitement les Druzes. Il fournit des informations sur leurs origines, les défis auxquels ils ont été confrontés au cours des siècles et l'avenir incertain qui les attend. Je le recommande vivement», confie un autre internaute, de nationalité libanaise.

Hussein Ibish, chercheur résident principal à l'Institut des États arabes du Golfe, à Washington, écrit sur Twitter: «L'article d'Arab News intitulé “Les Druzes: les grands survivants” est excellent. On n'aurait jamais lu un tel papier dans un journal saoudien, même anglophone, avant ces deux dernières années. C'est encore un petit exemple d'une très grande transformation qui avance à grands pas.»

Lors d'une récente visite au bureau d'Arab News à Riyad, Deborah Lipstadt, envoyée spéciale des États-Unis chargée de surveiller et de combattre l'antisémitisme, a fait l'éloge de la série de reportages consacrés aux minorités.

L'ambassadrice Lipstadt dirige les efforts diplomatiques des États-Unis pour lutter contre l'antisémitisme dans le monde.

Elle a participé à une table ronde avec les journalistes et rédacteurs en chef d'Arab News et a été informée des efforts que déploie le journal pour lutter contre les discours de haine et promouvoir la tolérance religieuse.

«J'ai vu une partie du travail qu’[Arab News a] réalisé: les couvertures, le rapport sur les juifs du Liban... Vous mettez la salutation hébraïque pour la nouvelle année, “Shana Tova”, en première page. C'est inimaginable», souligne-t-elle.

«Mon pays n’est pas parfait, le vôtre ne l’est pas non plus. Nous avons un long chemin à faire, mais ce que j’ai vu ici, à Arab News, est sans aucun doute un bon début.»

Le reportage intitulé «Les juifs du Liban», publié en 2020, s'intéresse de près à l'un des groupes religieux et ethniques qui contribuent à la riche tapisserie culturelle du Moyen-Orient.

«La haine d'un groupe engendre celle d'un autre: ce sont les mêmes principes dans chaque préjugé, qu'il s'agisse de racisme, d'antisémitisme ou de haine contre les musulmans», indique Lipstadt.

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Une famille juive libanaise réunie lors d'un mariage à Beyrouth. (Communauté juive libanaise)

C'est justement pour contrer ces préjugés, en racontant les histoires vraies et souvent inspirantes des minorités de la région, qu'Arab News a lancé en 2019 sa série de reportages sur les minorités.

La série a suscité des réactions positives dans la région, et même au-delà. Elle reflète la volonté d'Arab News, journal fondé en 1975, d'être «la voix d'une région en mutation».

Le rapport «Les juifs du Liban» montre comment la communauté juive du pays, autrefois florissante, a presque disparu après la guerre des Six Jours, en 1967, lorsqu'une alliance d'États arabes, dont la Syrie, la Jordanie et l'Égypte, a été vaincue par Israël.

Comme le rapporte Arab News, «dans les années 1950 et 1960, il y avait seize synagogues au Liban et elles étaient toujours bondées». En réalité, le Liban est le seul pays du monde arabe où le nombre de juifs a augmenté après la déclaration d'indépendance d'Israël et la première guerre israélo-arabe, en 1948.

«Mais la guerre de 1967 et l'effroyable guerre civile qui a suivi ont progressivement fait fuir les juifs libanais.»

À la veille de la guerre, le Liban comptait environ sept mille juifs. En 2020, comme l'indique Arab News, il en comptait moins de trente.

Le reportage, qui comprend des entretiens avec des juifs dont les familles ont vécu au Liban, rappelle que le quartier juif de Beyrouth a été fondé en 1800 par la famille Levy, venue de Bagdad. 

Au mois de janvier, Arab News a publié un rapport sur les Arabes ahwaziz d'Iran, une communauté qui a subi des persécutions et une discrimination culturelle au cours du siècle qui a suivi la perte de son autonomie.

Pendant des siècles, les tribus arabes ont régné sur une vaste étendue de terre dans l'ouest de l'Iran actuel. Al-Ahwaz s'étendait au Nord, sur plus de 600 km, le long de la rive orientale de Chatt el-Arab et sur l’ensemble du littoral oriental du Golfe, jusqu'au détroit d'Ormuz, au Sud. 

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Les Arabes d'Ahwaz restent la minorité la plus persécutée d'Iran. (Photo fournie)

Mais, après avoir perdu le soutien de l'Empire britannique, qui avait initialement séduit ses dirigeants en vue d'accéder à ses vastes ressources pétrolières inexploitées, la région arabe est aussitôt tombée sous le joug de Téhéran.

En une décennie, le nom «Arabistan» a été rayé de la carte et les Arabes ahwazis d'Iran ont été victimes d'une oppression brutale qui se poursuit encore aujourd'hui.

Au mois d’avril, Arab News a publié un nouveau reportage sur les minorités; il se concentre cette fois la communauté chrétienne copte d'Égypte.

«Le miracle copte» raconte comment l'église chrétienne historique d'Égypte a non seulement survécu, mais prospéré dans le pays et à l'étranger.

Le document porte principalement sur l'histoire extraordinaire de l'Église copte orthodoxe d'Alexandrie, qui s'est séparée du reste de la chrétienté au Ve siècle, conséquence d’un désaccord fondamental sur la nature de la divinité du Christ.

Fondée dans la grande ville d'Alexandrie par l'évangéliste Marc autour de l'an 60 après J.-C., l'Église a connu des siècles de bouleversements.

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Le pape copte orthodoxe Tawadros II, à gauche, dirige la messe de Pâques à la cathédrale Saint-Marc du Caire, en Égypte, le 11 avril 2015. (Agence Anadolu/Getty Images)

Après la montée de l'islam et la conquête de l'Égypte, au VIIe siècle, les Coptes ont été assez bien traités au cours des siècles, bien qu'il y ait eu des périodes de persécution.

Depuis les années 1970, de nombreux coptes, poussés par la peur ou par des pressions économiques, ont émigré en Occident en quête d'un nouvel avenir, trouvant notamment refuge aux États-Unis, au Canada, en Australie et au Royaume-Uni.

Partout où elles se sont établies, les communautés coptes et leurs églises se sont épanouies; elles entretiennent des relations étroites avec l'Égypte et la religion.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Cisjordanie: des soldats israéliens tuent deux Palestiniens apparement en train de se rendre

Un homme marche dans la rue, devant un appartement détruit au lendemain d'une opération militaire israélienne au cours de laquelle un tireur palestinien a été tué, dans la ville de Naplouse, occupée par Israël, dans le nord de la Cisjordanie, le 25 novembre 2025. (AFP)
Un homme marche dans la rue, devant un appartement détruit au lendemain d'une opération militaire israélienne au cours de laquelle un tireur palestinien a été tué, dans la ville de Naplouse, occupée par Israël, dans le nord de la Cisjordanie, le 25 novembre 2025. (AFP)
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  • Deux Palestiniens ont été tués lors d’une opération israélienne à Jénine, une scène filmée sous plusieurs angles: l’Autorité palestinienne parle d’« exécution sommaire », tandis qu’Israël affirme que les forces ont agi face à une menace

Jénine, Territoires palestiniens: L'armée et la police israéliennes ont annoncé jeudi examiner les circonstances dans lesquelles deux Palestiniens ont été abattus lors d'une opération conjointe de leurs forces alors qu'ils étaient apparemment en train de se rendre à Jénine, dans le nord de la Cisjordanie occupée.

La scène a été filmée sous plusieurs angles, notamment par un journaliste de l'AFP, dans cette ville bastion de groupes armés palestiniens.

L'Autorité palestinienne a identifié les Palestiniens tués comme Montasser Billah Mahmoud Abdullah, 26 ans, et Youssef Ali Assassa, 37 ans, dénoncé les faits comme une "exécution sommaire" et accusé les forces israéliennes de "crime de guerre documenté et complet".

Le ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, figure de l'extrême droite, a dit apporter son "soutien total aux gardes-frontières et aux soldats de l'armée qui ont ouvert le feu sur des terroristes recherchés sortis d'un bâtiment à Jénine".

Des vidéos ayant largement circulé sur les médias sociaux montrent deux hommes sortir d'un bâtiment cerné par des soldats israéliens, les bras en l'air. On les voit ensuite se coucher à terre devant les soldats avant d'être redirigés vers l'intérieur du bâtiment. Des coups de feu retentissent. Les deux hommes gisent au sol.

Les images tournées par le JRI de l'AFP montrent les deux hommes sortir du bâtiment puis y rentrer avant les coups de feu. Un immeuble placé entre le journaliste et la scène obstrue une partie de l'image. On voit ensuite des soldats évacuer un cadavre.

- "Les terroristes doivent mourir !" -

Une fois la nuit tombée, un photographe de l'AFP a vu des Palestiniens nettoyer les lieux. Des flaques de sang maculaient encore le sol.

Dans un communiqué commun, l'armée et la police (dont dépend l'unité des gardes-frontières) indiquent que leurs forces ont procédé dans la soirée "à l'arrestation de deux individus recherchés pour des actes terroristes, notamment des jets d'explosifs et des tirs sur les forces de sécurité".

"Après leur sortie [du bâtiment où ils étaient cernés], des tirs ont été dirigés vers les suspects", ajoute l'armée, précisant que "l'incident est en cours d'examen".

Le mouvement islamiste palestinien Hamas a dénoncé dans un communiqué une "exécution de sang-froid".

"Les soldats ont agi exactement comme on l'attend", a estimé de son côté M. Ben Gvir. "Les terroristes doivent mourir!" a-t-il écrit sur son compte X.

Citant une source au sein des gardes-frontières, le journal de gauche Haaretz a indiqué qu'une enquête préliminaire mentionnait d'ores et déjà qu'un des deux hommes tués avait tenté de se relever après avoir été au sol et fait un "mouvement suspect", qui a décidé les policiers et les soldats à tirer.

- "Déshumanisation" -

"L'exécution documentée aujourd'hui est le résultat d'un processus accéléré de déshumanisation des Palestiniens et de l'abandon total de leurs droits par le régime israélien", a estimé B'Tselem, organisation israélienne de défense des droits de l'Homme dans les Territoires palestiniens occupés.

"Il est du devoir de la communauté internationale de mettre fin à l'impunité d'Israël et de traduire en justice les responsables de la planification et de l'exécution de sa politique criminelle contre le peuple palestinien", ajoute l'ONG.

Les violences ont explosé en Cisjordanie depuis le début de la guerre de Gaza, déclenchée le 7 octobre 2023 par une attaque sans précédent du Hamas sur le sud d'Israël.

Elles n'ont pas cessé avec la trêve fragile en vigueur à Gaza depuis le 10 octobre. Mercredi, l'armée israélienne a annoncé le lancement d'une nouvelle opération contre les groupes armés palestinien dans le nord de la Cisjordanie.

Depuis le 7-Octobre, plus d'un millier de Palestiniens, parmi lesquels de nombreux combattants, mais aussi beaucoup de civils, ont été tués en Cisjordanie par des soldats ou des colons israéliens, selon un décompte de l'AFP à partir de données de l'Autorité palestinienne.

Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, au moins 44 Israéliens, parmi lesquels des civils et des soldats, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens.


Israël frappe à nouveau le sud du Liban, un an après le cessez-le-feu

L'armée israélienne a déclaré avoir mené jeudi une série de frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, la dernière en date malgré le cessez-le-feu conclu il y a un an avec le groupe militant. (X/@fadwa_aliahmad)
L'armée israélienne a déclaré avoir mené jeudi une série de frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, la dernière en date malgré le cessez-le-feu conclu il y a un an avec le groupe militant. (X/@fadwa_aliahmad)
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  • L’armée israélienne a mené de nouvelles frappes dans le sud du Liban, ciblant des infrastructures et des sites d’armes du Hezbollah, malgré un cessez-le-feu en vigueur depuis un an
  • Le gouvernement libanais est accusé par Israël et les États-Unis de tarder à démanteler la présence militaire du Hezbollah dans la zone frontalière, tandis que Beyrouth dément toute faute et rejette les accusations israéliennes

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi avoir mené de nouvelles frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, au moment où elle intensifie ses attaques sur le territoire libanais malgré un cessez-le-feu avec le mouvement pro-iranien qu'elle accuse de chercher à se réarmer.

"Il y a peu, l'armée israélienne a frappé et démantelé des infrastructures terroristes du Hezbollah dans plusieurs zones dans le sud du Liban", écrit l'armée dans un communiqué.

"Dans le cadre de ces frappes, l'armée a visé plusieurs sites de lancement où des armes du Hezbollah étaient stockées", ajoute le communiqué, qui précise que les frappes ont également touché des "postes militaires utilisés par des membres du Hezbollah pour mener des attaques terroristes".

L'agence de presse d'Etat libanaise ANI a annoncé une série de "raids aériens israéliens sur Al-Mahmoudiya et Al-Jarmak dans la région de Jezzine."

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, signé il y a un an jour pour jour, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Mercredi, le ministre israélien de la Défense Israël Katz avait averti qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré M. Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

La Présidence libanaise a publié mercredi une déclaration du président Joseph Aoun qui "a rejeté les allégations israéliennes qui portent atteinte au rôle de l'armée et remettent en question son travail sur le terrain, notant que ces allégations ne reposent sur aucune preuve tangible."


Un an après le cessez-le-feu au Liban, la paix reste fragile alors que les violations israéliennes se multiplient

Cette frappe est la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième à avoir lieu sans avertissement préalable. (Photo d'archive: AFP)
Cette frappe est la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième à avoir lieu sans avertissement préalable. (Photo d'archive: AFP)
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  • Le cessez-le-feu demeure extrêmement fragile : plus de 5 000 violations israéliennes, une frappe majeure à Beyrouth et un risque réel d’escalade malgré les appels internationaux à la retenue
  • Le Sud-Liban vit une crise humanitaire profonde, avec des villages détruits, jusqu’à 70 000 déplacés et une population abandonnée entre l’État libanais et le Hezbollah

BEYROUTH : Alors que le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah s'apprête à entrer dans sa deuxième année vendredi, les signaux d'alarme retentissent plus fort que jamais quant au risque d’une reprise du conflit au Liban.

L’assassinat dimanche dernier de Haytham Ali Tabatabai, chef militaire du Hezbollah et deuxième figure la plus puissante du mouvement après le secrétaire général Naim Qassem, lors d’une attaque audacieuse dans la banlieue sud de Beyrouth, a brisé les espoirs d’une stabilité durable.

La réponse du Hezbollah — qu’elle prenne la forme d’une action militaire ou d’un simple blâme diplomatique, comme certains cadres l’ont laissé entendre — pourrait déterminer si le cessez-le-feu survivra.

Cette frappe représente la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième menée sans avertissement préalable.

Les registres officiels font état de 5 350 violations israéliennes du cessez-le-feu en douze mois. Ces violations ont coûté la vie à plus de 340 personnes — principalement des combattants et commandants du Hezbollah, mais aussi des civils, dont des enfants et des femmes — et ont blessé plus de 650 autres.

Dans une escalade notable, les forces israéliennes ont frappé pour la première fois Aïn Al-Héloué, un camp de réfugiés palestiniens.

Les violations répertoriées comprennent 2 198 incursions terrestres, 2 983 opérations aériennes et 169 violations maritimes.

Les forces de maintien de la paix de l’ONU dressent un tableau encore plus sombre, rapportant plus de 7 500 violations aériennes et environ 2 500 violations terrestres au nord de la Ligne bleue depuis l’accord de l’an dernier, ainsi que la découverte et la saisie de plus de 360 caches d’armes abandonnées, remises à l’armée libanaise.

La stratégie d’Israël s’apparente à une campagne d’usure progressive contre le Hezbollah, visant à réduire systématiquement ses capacités tandis que l’armée libanaise s’emploie à désarmer le groupe au sud du fleuve Litani.

L’armée affirme avoir rempli plus de 80 % de ce mandat, avec une échéance fixée à la fin de l’année avant que les opérations ne s’étendent vers le nord — une zone dans laquelle le Hezbollah refuse catégoriquement de rendre ses armes, estimant que la décision revient aux dirigeants politiques libanais.

Le conflit lui-même a porté de lourds coups au Hezbollah, décimant ses rangs et infligeant des pertes catastrophiques à ses stocks d’armement. Mais le plus inquiétant est peut-être l’empiètement physique d’Israël sur le territoire libanais.

Les observateurs de l’ONU ont documenté la construction par l’armée israélienne de murs en T en béton près de la Ligne bleue. Des relevés confirment que ces barrières s’enfoncent dans le territoire libanais au sud-ouest de Yaroun, isolant plus de 4 000 m² de terres libanaises. Des constructions similaires sont apparues au sud-est de la même ville ces dernières semaines.

Plus largement, les forces israéliennes contrôlent cinq positions réparties sur 135 km de territoire libanais — des Fermes de Chebaa à Ras Al-Naqoura — situées 500 à 1 000 mètres au-delà de la Ligne bleue.

L’ONU a exigé des enquêtes rapides et impartiales sur les opérations militaires israéliennes, en particulier la frappe contre le camp de réfugiés palestiniens, évoquant des violations potentielles du droit international humanitaire et appelant à la reddition de comptes.

Vingt ressortissants libanais croupissent dans les prisons israéliennes, principalement à Ofer, parmi lesquels dix membres du Hezbollah capturés lors de combats près d’Aïta Al-Chaab, un officier de marine enlevé lors d’un raid commando, et neuf civils. Leurs familles n’ont reçu aucune information officielle du Comité international de la Croix-Rouge sur leurs conditions ou leur état de santé.

Une source officielle libanaise a estimé que « la libération des détenus fait partie des termes de l’accord de cessez-le-feu, tout comme le retrait des territoires occupés, et le Liban ne détient aucun prisonnier israélien en échange. »

La politique de la terre brûlée menée par Israël dans les villages frontaliers s’est poursuivie, les attaques visant toute tentative de reconstruction. La Banque mondiale estime le coût des travaux à environ 11 milliards de dollars.

« Entre 10 et 15 villages ont été complètement rayés de la carte », affirme Tarek Mazraani, ingénieur à Houla et coordinateur du « Rassemblement des villages frontaliers du Sud ».

Mazraani estime que 65 000 à 70 000 personnes restent déplacées de leurs maisons et de leurs villages détruits.

« Ceux qui sont revenus sont ceux qui ne peuvent littéralement aller nulle part ailleurs, principalement des personnes âgées vivant au milieu des décombres, exposées quotidiennement à l’horreur des bombardements et aux couvre-feux, sans aucun hôpital pour les soigner », a-t-il déclaré à Arab News.

Toute personne souhaitant enterrer un proche doit obtenir l’autorisation de la FINUL, qui informe ensuite Israël pour permettre l’inhumation.

« Malgré cela, l’armée israélienne bombarde à chaque fois les abords du cortège funéraire », ajoute Mazraani.

Il précise que les déplacés ont loué des logements à Nabatiyé, Tyr, Saïda, Iqlim Al-Kharroub, dans la banlieue sud de Beyrouth et au Mont-Liban. La plupart sont agriculteurs, mais on compte aussi des enseignants, des ingénieurs, des travailleurs indépendants et des membres des forces de sécurité.

« Depuis la fin de la guerre, ces gens sont laissés sans aucun soutien officiel ou partisan. L’un des habitants les plus riches de la région, qui a tout perdu, travaille désormais comme livreur », dit-il.

Les personnes déplacées sont prises entre l'État parallèle du Hezbollah et l'État libanais : « Tout le monde exploite leur tragédie, même au sein de notre propre communauté du sud. Les loyers sont extrêmement élevés et nous ne nous sentons jamais chez nous. »

L’un d’eux, qui souhaite rester anonyme, explique : « Ceux qui ne sont affiliés à aucun parti sont loin de la politique. Notre seule préoccupation est d’assurer notre subsistance et une couverture financière en cas d’hospitalisation. Nous nous sentons orphelins et abandonnés, surtout quand une institution du Hezbollah nous dit qu’elle n’a plus d’argent. »

Il ajoute : « Les habitants des zones détruites paient le prix fort. Certains en veulent au Hezbollah pour la guerre et les milliers de morts qu’elle a entraînés, tandis que d’autres craignent que l’autre camp se réjouisse de notre malheur sans jamais nous rassurer. »

Les attentes libanaises face aux menaces israéliennes de relancer la guerre — sapant l’accord de cessez-le-feu négocié par la France et les États-Unis et dont les termes ressemblent fortement aux points principaux de la résolution 1701 — restent contradictoires.

Certains observateurs politiques jugent ces menaces « exagérées », tandis que d’autres estiment qu’« une frappe est inévitable mais n’aboutira pas à une guerre totale ; elle vise à pousser le Liban à négocier ».

Plus tôt ce mois-ci, le président libanais Joseph Aoun a déclaré : « Le Liban n’a pas d’autre choix que de négocier, et le langage de la négociation est plus important que celui de la guerre. »

Le Premier ministre Nawaf Salam l’a confirmé, exprimant son espoir d’un « soutien américain à une solution diplomatique ».

Pour l’heure, cependant, des négociations directes entre le Liban et Israël restent totalement exclues.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com