L'Assemblée vote la suppression de la redevance, au cours d'un week-end électrique

Le sous-ministre français des Comptes publics Gabriel Attal (à droite) et la secrétaire d'État française à la Jeunesse Sarah El Hairy (à gauche) arrivent pour assister au défilé militaire du 14 juillet sur l'avenue des Champs-Élysées à Paris le 14 juillet 2022. (Photo de Bertrand GUAY/AFP)
Le sous-ministre français des Comptes publics Gabriel Attal (à droite) et la secrétaire d'État française à la Jeunesse Sarah El Hairy (à gauche) arrivent pour assister au défilé militaire du 14 juillet sur l'avenue des Champs-Élysées à Paris le 14 juillet 2022. (Photo de Bertrand GUAY/AFP)
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Publié le Samedi 23 juillet 2022

L'Assemblée vote la suppression de la redevance, au cours d'un week-end électrique

  • Lors de cette séance souvent agitée, Attal a exprimé son attachement à «un audiovisuel public fort», tout en qualifiant «d'obsolète» cette redevance basée sur la possession d'un téléviseur à l'heure des tablettes et autres smartphones
  • Les principales objections sont venues des rangs de la Nupes

PARIS: L'Assemblée nationale a voté samedi matin la suppression de la redevance audiovisuelle dans le cadre du soutien au pouvoir d'achat et rejeté in extremis une taxe sur les "superprofits" des gands groupes, mais doit encore déminer des points très débattus comme la remise carburant et la renationalisation d'EDF.

La suppression de la redevance qui finance l'audiovisuel public, une promesse du président Macron, suscite de nombreuses inquiétudes sur l'indépendance et le financement à venir des médias concernés.

Elle a été votée par 170 voix contre 57 lors de l'examen en première lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2022 (PLFR). LR et RN ont voté pour et l'alliance de gauche Nupes à l'unanimité contre.

Des amendements de la majorité et de LR ont été adoptés pour affecter "une fraction" de la TVA, pour un montant d'environ 3,7 milliards d'euros, dans le but de répondre aux inquiétudes sur le financement de ce secteur.

Lors de cette séance souvent agitée, le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a exprimé son attachement à "un audiovisuel public fort", tout en qualifiant "d'obsolète" cette redevance basée sur la possession d'un téléviseur à l'heure des tablettes et autres smartphones. La redevance est actuellement fixée à 138 euros par an en métropole.

Les principales objections sont venues des rangs de la Nupes.

Pour Inaki Echaniz (PS), cette suppression est une "mauvaise idée" qui va nuire à un financement stable. Alexis Corbière (LFI) a souligné que garantir "l'indépendance de l'audiovisuel public est une condition de la démocratie".

La ministre de la Culture Rima Abdul Malak a en revanche fait valoir que "ce n'est pas la redevance qui garantit l'indépendance" mais l'Arcom (ex-CSA), l'instance qui nomme les dirigeants de l'audiovisuel public.

La gauche a également accusé le gouvernement de s'inspirer de l'extrême droite pour à terme démanteler l'audiovisuel public. "Zemmour et Mme Le Pen l'avaient demandé, M. Macron l'aura fait", a lancé le communiste Stéphane Peu.

Mme Le Pen a toutefois estimé que "le projet du gouvernement n'a rien à voir avec ce que nous voulons faire", à savoir une "privatisation" en bonne et due forme.

Après quatre jours de débats houleux sur le projet de loi en faveur du pouvoir d'achat, les députés sont aux prises depuis vendredi, via le PLFR, avec le deuxième volet des mesures destinées à contrer les effets de l'inflation.

La discussion doit se poursuivre jusqu'à samedi soir, voire dimanche ou lundi.

Le camp présidentiel, privé de majorité absolue, doit fréquemment chercher des appuis au coup par coup face aux assauts parfois conjugués des oppositions.

 

L'Assemblée rejette de peu une taxe sur les superprofits

L'Assemblée nationale a rejeté de peu samedi l'idée d'une taxe sur les "superprofits" ou "bénéfices exceptionnels" des grandes multinationales de transport de marchandises ou pétrolières, malgré les protestations de la gauche et du RN.

Les votes ont été très serrés (96 pour, 114 contre) pour rejeter des amendements principalement issus des rangs de l'alliance de gauche Nupes mais aussi du Rassemblement national.

Quatre députés de la majorité se sont abstenus, parmi lesquels Sacha Houlié et Caroline Janvier, qui avaient défendu le principe de cette taxe. Un de leur collègue d'Horizons a voté pour.

Les députés de l'opposition souhaitaient une "taxe exceptionnelle de 25% sur les superprofits" des différentes sociétés, pétrolières et gazières, de transport maritime ou les concessionnaires d'autoroute.

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a critiqué le principe d'une taxe, de "l'emphase idéologique", selon lui, et salué les gestes opportuns de TotalEnergies et de la CMA CGM. Les géants de l'énergie et du transport maritime ont proposé vendredi une remise à la pompe de 20 centimes pour l'un et une réduction des taux de fret de 750 euros par conteneur de 40 pieds pour l'autre.

Des députés de la majorité avaient déposé des amendements pour proposer cette taxe, retirés suite aux annonces des deux géants internationaux.

La majorité a pu compter sur l'appui des Républicains sur ce texte. "Notre ADN, c'est de taxer moins", a déclaré Véronique Louwagie.

"Oui, la pression de l'Assemblée nationale sur Total et sur CMA CGM a été efficace et je remercie tous les parlementaires, tous bancs confondus", s'est réjoui Bruno Le Maire, pour qui la contribution volontaire des deux groupes rend "plus d'argent aux Français".

Des propos qui ont déclenché l'ire de la gauche. "Le peuple français est en train de souffrir quand Total est en train de se gaver", a tancé la cheffe de file des Insoumis Mathilde Panot.

"Vous vous refusez à une mesure légitime et qui se répand autour de nous", a déploré la socialiste Christine Pires Beaune, citant les cas de l'Espagne, la Grande-Bretagne ou l'Italie qui ont adopté des taxes exceptionnelles sur les "superprofits".

"Fut un temps, dans cet hémicycle au début de la IIIe République, où les grands patrons siégeaient directement pour défendre leurs intérêts, ça avait le mérite de la transparence, maintenant ils sont ministres", a attaqué le RN Jean-Philippe Tanguy, parlant de "numéro indécent" entre "lobbying et la défense de la macronie".

Exit la taxe sur les superprofits 

L'appui de LR, espéré pour faire adopter ce projet de budget sans devoir compter sur les voix du RN, s'est matérialisé par le rejet de la taxe sur les superprofits in extremis, a 18 voix près.

Mais quatre députés de la majorité se sont abstenus, parmi lesquels Sacha Houlié et Caroline Janvier, qui avaient défendus le principe de cette taxe. Un de leur collègue d'Horizons a voté pour.

Le ministre de l'Economie a quant à lui critiqué le principe d'une taxe - de "l'emphase idéologique", selon lui - et appelé la majorité à la "cohérence" avant le vote.

Il a salué les gestes opportuns de l'énergéticien Total et du transporteur maritime CMA-CGM vendredi de proposer une remise à la pompe de 20 centimes pour l'un et une réduction des taux de fret de 750 euros par conteneurs de 40 pied pour l'autre.

L'alliance de gauche Nupes a critiqué un geste "insuffisant" et déploré le refus du gouvernement citant les cas de l'Espagne, la Grande-Bretagne ou l'Italie qui ont adopté des taxes exceptionnelles sur les "superprofits".

Le RN Jean-Philippe Tanguy a évoqué un "numéro indécent" entre "lobbying et la défense de la Macronie".

Outre la suppression de la redevance, le budget rectificatif comprend la poursuite du bouclier tarifaire sur l'énergie ou la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires.

Deux points vont être particulièrement scrutés: les mesures retenues sur les carburants, à un niveau de prix particulièrement élevé depuis plusieurs mois, et le financement de l'OPA pour renationaliser EDF.

Sur les carburants, l'exécutif et LR ont cherché cette semaine un accord pour relever l'aide de l'Etat, actuellement à 18 centimes le litre.

Concernant EDF, il s'agit du premier étage d'une OPA à 9,7 milliards d'euros destinée à sortir le groupe de son ornière financière et industrielle et qui doit aboutir fin octobre notamment.

Cette renationalisation intervient alors que l'énergéticien, lourdement endetté, vit un épisode critique: l'Etat entend faire de lui le "bras armé" du verdissement de sa politique énergétique et de la conquête d'une plus grande souveraineté en la matière.


France: le cimentier Lafarge jugé à partir de mardi pour financement du terrorisme

Une multinationale en procès, dans une affaire inédite: le groupe français Lafarge et d'anciens hauts responsables comparaissent à partir de mardi à Paris, soupçonnés d'avoir payé des groupes jihadistes, dont l'État islamique (EI), en Syrie jusqu'en 2014 dans le but d'y maintenir l'activité d'une cimenterie. (AFP)
Une multinationale en procès, dans une affaire inédite: le groupe français Lafarge et d'anciens hauts responsables comparaissent à partir de mardi à Paris, soupçonnés d'avoir payé des groupes jihadistes, dont l'État islamique (EI), en Syrie jusqu'en 2014 dans le but d'y maintenir l'activité d'une cimenterie. (AFP)
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  • Aux côtés de Lafarge, avalé en 2015 par le groupe suisse Holcim, seront jugés au tribunal correctionnel de Paris l'ancien PDG du cimentier, Bruno Lafont, cinq ex-responsables de la chaîne opérationnelle ou de la chaîne de sûreté et deux intermédiaires
  • Dans ce dossier, ils devront répondre de financement d'entreprise terroriste et, pour certains, de non-respect de sanctions financières internationales

PARIS: Une multinationale en procès, dans une affaire inédite: le groupe français Lafarge et d'anciens hauts responsables comparaissent à partir de mardi à Paris, soupçonnés d'avoir payé des groupes jihadistes, dont l'État islamique (EI), en Syrie jusqu'en 2014 dans le but d'y maintenir l'activité d'une cimenterie.

Aux côtés de Lafarge, avalé en 2015 par le groupe suisse Holcim, seront jugés au tribunal correctionnel de Paris l'ancien PDG du cimentier, Bruno Lafont, cinq ex-responsables de la chaîne opérationnelle ou de la chaîne de sûreté et deux intermédiaires syriens, dont l'un est visé par un mandat d'arrêt international et devrait donc être absent au procès.

Dans ce dossier, ils devront répondre de financement d'entreprise terroriste et, pour certains, de non-respect de sanctions financières internationales.

Le groupe français est soupçonné d'avoir versé en 2013 et 2014, via sa filiale syrienne Lafarge Cement Syria (LCS), plusieurs millions d'euros à des groupes rebelles jihadistes dont certains, comme l'EI et Jabhat al-Nosra, ont été classés comme "terroristes", afin de maintenir l'activité d'une cimenterie à Jalabiya, dans le nord du pays.

La société avait investi 680 millions d'euros dans ce site, dont la construction a été achevée en 2010.

Plaintes 

Alors que les autres multinationales avaient quitté le pays en 2012, Lafarge n'a évacué cette année-là que ses employés de nationalité étrangère, et maintenu l'activité de ses salariés syriens jusqu'en septembre 2014, date à laquelle l'EI a pris le contrôle de l'usine.

Dans ce laps de temps, LCS aurait rémunéré des intermédiaires pour s'approvisionner en matières premières auprès de l'EI et d'autres groupes, et pour que ces derniers facilitent la circulation des employés et des marchandises.

L'information judiciaire avait été ouverte à Paris en 2017 après plusieurs révélations médiatiques et deux plaintes en 2016, une du ministère de l'Économie pour violation d'embargo, et l'autre de plusieurs associations et de onze anciens salariés de LCS pour financement du terrorisme.

Le nouveau groupe, issu de la fusion de 2015, qui a toujours pris soin de dire qu'il n'avait rien à voir avec les faits antérieurs à cette opération, avait entretemps lancé une enquête interne.

Confiée aux cabinets d'avocats américain Baker McKenzie et français Darrois, elle avait conclu en 2017 à des "violations du code de conduite des affaires de Lafarge".

Et en octobre 2022, Lafarge SA avait plaidé coupable aux États-Unis d'avoir versé à l'EI et Jabhat Al-Nosra près de 6 millions de dollars, et accepté d'y payer une sanction financière de 778 millions de dollars.

Une décision dénoncée par plusieurs prévenus du dossier français, à commencer par Bruno Lafont, qui conteste avoir été informé des paiements aux groupes terroristes.

Plus de 200 parties civiles 

Selon ses avocats, ce plaider-coupable, sur lequel s'appuient en partie les juges d'instruction français dans leur ordonnance, "est une atteinte criante à la présomption d'innocence, qui jette en pâture les anciens cadres de Lafarge" et avait "pour objectif de préserver les intérêts économiques d'un grand groupe".

Pour la défense de l'ex-PDG, le procès qui s'ouvre permettra d'"éclaircir" plusieurs "zones d'ombre du dossier", comme le rôle des services de renseignement français.

Les magistrats instructeurs ont estimé que si des remontées d'informations avaient eu lieu entre les responsables sûreté de Lafarge et les services secrets sur la situation autour du site, cela ne démontrait "absolument pas la validation par l'Etat français des pratiques de financement d'entités terroristes mises en place par Lafarge en Syrie".

Au total, 241 parties civiles se sont à ce jour constituées dans ce dossier. "Plus de dix ans après les faits, les anciens salariés syriens pourront enfin témoigner de ce qu'ils ont enduré: les passages de check-points, les enlèvements et la menace permanente planant sur leurs vies", souligne Anna Kiefer, de l'ONG Sherpa.

Lafarge encourt jusqu'à 1,125 million d'euros d'amende pour le financement du terrorisme. Pour la violation d'embargo, l'amende encourue est nettement plus lourde, allant jusqu'à 10 fois le montant de l'infraction qui sera retenu in fine par la justice.

Un autre volet de ce dossier est toujours à l'instruction, le groupe ayant aussi été inculpé pour complicité de crimes contre l'humanité en Syrie et en Irak.


Gérald Darmanin visé par une plainte d'avocats pour son soutien implicite à Sarkozy

Ce collectif d'une trentaine d'avocats se dit dans sa plainte, portée par Me Jérôme Karsenti, "particulièrement indigné par les déclarations du garde des Sceaux" faisant part "publiquement de sa compassion à l'égard de M. Sarkozy en soulignant les liens personnels qu'ils entretiennent". (AFP)
Ce collectif d'une trentaine d'avocats se dit dans sa plainte, portée par Me Jérôme Karsenti, "particulièrement indigné par les déclarations du garde des Sceaux" faisant part "publiquement de sa compassion à l'égard de M. Sarkozy en soulignant les liens personnels qu'ils entretiennent". (AFP)
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  • Le garde des Sceaux a rencontré mercredi à la prison de la Santé à Paris l'ancien président de la République, un de ses mentors en politique
  • Mais la plainte des avocats est née bien avant, juste après des déclarations de M. Darmanin sur France Inter le 20 octobre, à la veille de l'incarcération de M. Sarkozy

PARIS: Ils accusent Gérald Darmanin de "prendre position": un collectif d'avocats a porté plainte auprès de la Cour de justice de la République (CJR) contre le ministre de la Justice pour son soutien implicite à Nicolas Sarkozy, à qui il a rendu visite en prison.

Le garde des Sceaux a rencontré mercredi à la prison de la Santé à Paris l'ancien président de la République, un de ses mentors en politique.

Mais la plainte des avocats est née bien avant, juste après des déclarations de M. Darmanin sur France Inter le 20 octobre, à la veille de l'incarcération de M. Sarkozy.

En confiant ce jour-là sa "tristesse" après la condamnation de M. Sarkozy et en annonçant lui rendre prochainement visite en prison, ce qu'il a fait depuis, M. Darmanin a "nécessairement pris position dans une entreprise dont il a un pouvoir d'administration", stipule la plainte que l'AFP a pu consulter.

M. Darmanin indiquait qu'il irait "voir en prison" M. Sarkozy pour s'inquiéter "de ses conditions de sécurité". Et d'ajouter: "J'ai beaucoup de tristesse pour le président Sarkozy", "l'homme que je suis, j'ai été son collaborateur, ne peut pas être insensible à la détresse d'un homme".

Ce collectif d'une trentaine d'avocats se dit dans sa plainte, portée par Me Jérôme Karsenti, "particulièrement indigné par les déclarations du garde des Sceaux" faisant part "publiquement de sa compassion à l'égard de M. Sarkozy en soulignant les liens personnels qu'ils entretiennent".

En "s'exprimant publiquement quant à sa volonté de rendre visite à M. Sarkozy en détention" ainsi "qu'en lui apportant implicitement son soutien", M. Darmanin a "nécessairement pris position" dans une entreprise dont il a aussi "un pouvoir de surveillance en tant que supérieur hiérarchique du parquet", déroulent les plaignants.

Juridiquement, ce collectif d'avocats porte plainte contre M. Darmanin pour "prise illégale d'intérêts", via une jurisprudence considérant que "l'intérêt" peut "être moral et plus précisément amical".

"Préjudice" 

"Il ne fait pas de doute que cet intérêt est de nature à compromettre l'impartialité et l'objectivité de M. Darmanin qui, en tant que ministre de la Justice, ne peut prendre position de cette manière dans une affaire pendante", argumentent les avocats.

Condamné le 25 septembre à cinq ans d'emprisonnement dans le dossier libyen pour association de malfaiteurs, l'ancien président a depuis déposé une demande de remise en liberté, que la justice doit examiner dans les prochaines semaines, avant son procès en appel en 2026.

Les propos de M. Darmanin sur France Inter avaient déjà ému la magistrature. Le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, y avait vu un "risque d'obstacle à la sérénité" et donc "d'atteinte à l'indépendance des magistrats".

"S'assurer de la sécurité d'un ancien président de la République en prison, fait sans précédent, n'atteint en rien à l'indépendance des magistrats mais relève du devoir de vigilance du chef d'administration que je suis", s'était déjà défendu M. Darmanin sur X.

Pour le collectif d'avocats, "les déclarations" du ministre de la Justice, "suivies" de sa "visite rendue à la prison de la Santé", sont "susceptibles de mettre à mal la confiance que les justiciables ont dans la justice et leurs auxiliaires", que sont notamment les avocats.

Les "agissements" de M. Darmanin leur causent "ainsi un préjudice d'exercice et d'image qui rend nécessaire le dépôt de cette plainte auprès de la commission des requêtes" de la CJR, peut-on encore lire dans la plainte.

La CJR est la seule juridiction habilitée à poursuivre et juger les membres du gouvernement pour les crimes et délits commis dans l'exercice de leurs fonctions.


Zucman, patrimoine et retraites, "journée majeure" vendredi à l'Assemblée

Des députés assistent à l'examen des textes par la "niche parlementaire" du groupe d'extrême droite Rassemblement national, à l'Assemblée nationale, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 30 octobre 2025. (AFP)
Des députés assistent à l'examen des textes par la "niche parlementaire" du groupe d'extrême droite Rassemblement national, à l'Assemblée nationale, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée nationale débat d’une taxation du patrimoine, au cœur d’un bras de fer entre le gouvernement et le PS, qui menace de censure en cas de refus d’imposer les très hauts patrimoines
  • En parallèle, la suspension de la réforme des retraites est examinée en commission, condition posée par le PS pour éviter une crise politique majeure, mais son adoption reste incertaine

PARIS: Deux gros morceaux pour le prix d'un: les députés débattent vendredi dans l'hémicycle de taxation du patrimoine, sur fond d'ultimatum du PS pour davantage de "justice fiscale", et une partie des parlementaires doivent se prononcer en commission sur la suspension de la réforme des retraites, autre clé d'une non-censure.

Dès 9H00, les députés rouvriront les débats sur le projet de budget de l'Etat, avec la question sensible de la fiscalité du patrimoine et la désormais fameuse taxe Zucman, après avoir approuvé ces derniers jours plusieurs taxes sur les grandes entreprises ou les géants des technologies.

Signe de l'importance du moment, le Premier ministre Sébastien Lecornu devrait se rendre à l'Assemblée dans la journée pour participer aux débats, selon son entourage, alors que le PS menace de censurer en cas de refus du gouvernement d'imposer les hauts patrimoines.

"La journée est majeure", souligne un ministre.

Au menu notamment, une taxe proposée par le gouvernement sur certaines holdings, des sociétés qui détiennent des participations dans d'autres entreprises, et qui fait débat dans son propre camp.

Puis viendront des propositions de tous bords. Le Rassemblement national et le MoDem proposeront par exemple leurs versions d'un impôt sur la fortune. La gauche défendra entre autres l'instauration de la taxe de l'économiste Gabriel Zucman, impôt minimum de 2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros.

- "Troisième voie" -

Les socialistes proposeront en sus leur version de compromis au camp gouvernemental: 3% à partir de 10 millions d'euros, mais en excluant les entreprises innovantes et familiales.

Philippe Brun (PS), négociateur pour son groupe sur le budget, estime son rendement à "15 milliards", une estimation nettement rehaussée pour cette Zucman bis par rapport à de précédents calculs.

Mais elle peine à convaincre le reste de la gauche. "On n'a jamais été contre voter des amendements de repli" mais "c'est une taxe passoire", estime Eric Coquerel, président LFI de la commission des Finances.

Et l'horizon paraît bouché face à une levée de boucliers au centre et au RN.

"On est contre toutes les versions", assume Sylvain Maillard (Renaissance). Zucman, c'est "non, ni light ni hard ni rien du tout", a martelé Marine Le Pen, patronne du RN. Quant à Sébastien Lecornu, il a estimé jeudi qu'"il ne faudrait pas que des impôts improvisés créent des faillites certaines" d'entreprises.

De quoi susciter le pessimisme : "Zucman ça passe pas, l'amendement (de repli) non plus", pensent séparément deux députés PS.

Pour autant, certains imaginent en cas d'échec un autre chemin, comme un amendement du gouvernement lors de la séance qui viendrait réconcilier plusieurs camps.

"Si cela rapporte autant que la taxe Zucman, nous le regardons", a affirmé jeudi le patron des députés PS Boris Vallaud. S'il y a une "troisième voie, au gouvernement de la proposer".

- Suspense sur les retraites ? -

Dans l'ombre de l'hémicycle, la commission des Affaires sociales examinera toute la journée le budget de la Sécurité sociale. Les enjeux sont moindres puisque les députés repartiront dans l'hémicycle, la semaine prochaine, de la copie initiale du gouvernement.

Plusieurs points chauds seront abordés: gel des prestations sociales, montant prévu des dépenses de l'Assurance maladie, etc... Mais le vote attendu sera celui sur la suspension de la réforme des retraites, autre condition de la non-censure du PS à laquelle le Premier ministre a consenti.

S'il existe une majorité à l'Assemblée pour abroger purement et simplement la réforme, le sort de cet article en commission est incertain.

LR et Horizons (le parti d'Edouard Philippe) proposeront sa suppression, et pourraient être soutenus par des macronistes. Le RN devrait voter pour selon une source au groupe, tout comme les socialistes.

Mais les Insoumis ne voteront pas l'article en commission, simple "report de la hausse de l'âge légal de départ", argue Hadrien Clouet. Les écologistes l'envisagent aussi et décideront vendredi: "Hélas Macron a raison, c'est un décalage et non pas une suspension, qui quelque part entérine les 64 ans", souligne Danielle Simonnet.