Kaboul-Paris: un an d'exfiltrations de réfugiés sous les talibans

Sur cette photo d'archive prise le 23 août 2021 Des réfugiés attendent dans un centre d'évacuation après avoir quitté Kaboul dans le cadre de l'opération "Apagan" sur la base aérienne militaire française 104 d'Al Dhafra, près d'Abu Dhabi. (AFP)
Sur cette photo d'archive prise le 23 août 2021 Des réfugiés attendent dans un centre d'évacuation après avoir quitté Kaboul dans le cadre de l'opération "Apagan" sur la base aérienne militaire française 104 d'Al Dhafra, près d'Abu Dhabi. (AFP)
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Publié le Mercredi 10 août 2022

Kaboul-Paris: un an d'exfiltrations de réfugiés sous les talibans

  • Depuis août 2021, 4 340 personnes, dont 4 105 Afghans, ont ainsi bénéficié des «opérations de rapatriement et d'évacuation», indique le ministère de l'Intérieur
  • Depuis janvier, l'association en a pris en charge 700

PARIS: Un an après la prise de pouvoir des talibans en Afghanistan, les délicates évacuations vers la France se poursuivent à bas bruit depuis Kaboul et posent de nouveaux défis, dans l'ombre de la crise des réfugiés ukrainiens.

Cela a commencé par des vols organisés à la hâte dans le chaos de l'aéroport de capitale afghane, au moment où les talibans ont pris Kaboul le 15 août 2021. Après les quelques milliers de personnes vite exfiltrées vers Paris dans les premiers jours, l'opération "Apagan" s'est discrètement muée en "Apagan II" puis "III" pour continuer d'acheminer par grappes les candidats à l'exil, essentiellement via les Emirats arabes unis.

Depuis août 2021, 4.340 personnes, dont 4.105 Afghans, ont ainsi bénéficié des "opérations de rapatriement et d'évacuation", indique le ministère de l'Intérieur à l'AFP.

"Celles-ci se poursuivent pour mettre en protection des Afghans particulièrement menacés et signalés par le ministère des Affaires étrangères", poursuit-on Place Beauvau.

"La France continue d'accueillir avec rapidité et efficacité ces personnes", résume Delphine Rouilleault, directrice générale de France terre d'asile, association qui héberge et accompagne ces réfugiés depuis un an.

Depuis janvier, l'association en a pris en charge 700.

«Afghanistan oubliée»

Mais rapidement, la France a été épinglée par de nombreuses ONG pour une différence de traitement réservé aux Afghans et aux Ukrainiens, auxquels la France a accordé comme tout le reste de l'Europe un accueil et une protection inconditionnels depuis le déclenchement de la guerre avec la Russie en février.

Le souvenir des propos d'Emmanuel Macron, qui avait appelé en août 2021 à se "protéger contre les flux migratoires irréguliers" générés par l'arrivée au pouvoir des talibans, ont cristallisé le sentiment d'un "deux poids deux mesures" dans le tissu associatif.

"L'Afghanistan a été trop vite oubliée", estime aujourd'hui Reza Jafari, président de l'association Enfants d'Afghanistan. "Les Afghans ont été obligés de fuir comme les Ukrainiens. Quand j'entends qu'il faut plutôt accueillir les Ukrainiens parce que leurs voitures ressemblent aux nôtres ou parce que les Ukrainiennes sont blondes aux yeux bleus, ça me heurte. Je me suis dit +est-ce que les droits de l'Homme sont vraiment universels?+".

Dans la pratique, organiser simultanément l'accueil et l'hébergement des évacués afghans et des déplacés ukrainiens, dont quelque 100.000 sont arrivés en France en quelques mois, a relevé du "défi", pour que "l'un ne se fasse pas au détriment de l'autre", convient Didier Leschi, patron de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii).

A l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), l'agence qui délivre le statut de réfugié, 2.844 personnes évacuées ont déposé une demande. Parmi elles, 2.510 ont déjà obtenu une réponse, dont 2.472 positives, détaille le ministère de l'Intérieur.

«Cas problématiques»

Il s'agit pour l'essentiel de l'élite du pays, magistrats, journalistes, artistes ou cadres de l'administration.

Le ministère des Affaires étrangères "a globalement bien vu les profils qu'il fallait évacuer" et les "cas problématiques ne sont que des unités", souligne-t-on à l'Ofpra.

Les dossiers qui restent à instruire sont "les plus compliqués", concernant notamment les membres de "l'appareil sécuritaire" du pouvoir déchu, confie une source proche du dossier. "On fait passer deux entretiens désormais. On doit savoir si telle brigade de police a commis des exactions à l'époque", illustre-t-elle.

La question de l'intégration des réfugiés afghans, pour beaucoup encore en hébergement précaire, sera une question majeure des prochains mois.

Mais dans l'immédiat, "la problématique, c'est surtout ceux qu'on n'a pas évacués", poursuit la source proche du dossier.

"Tous les défenseurs des droits n'ont pas été mis en sécurité. J'ai des centaines de dossiers, dont des militantes féministes qui pour certaines ont été arrêtées (par les talibans) et dont on est sans nouvelles", abonde Reza Jafari, qui a placé de nombreuses activistes sur les listes d'évacuation en août dernier.

En France, où les Afghans constituent le premier contingent des demandeurs d'asile (plus de 16.000 en 2021), les expulsions vers Kaboul font l'objet d'un moratoire depuis un an.

Par souci de cohérence, le sort des Afghans qui continuent d'arriver en France hors évacuations doit lui aussi être revu, reprend Delphine Rouilleault, de France terre d'asile. Si l'on évacue des Afghans d'un côté, résume-t-elle, "ne pas attribuer le statut de réfugié à (d'autres) est un peu compliqué à comprendre".


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».