Les négociations sur les fermes de Chebaa, peut-être le début d'un nouveau chapitre dans la région

Les casques bleus espagnols de l’ONU effectuent des patrouilles dans les fermes de Chebaa entre le Liban et Israël, qui surplombent le village divisé de Ghajar, le 24 février 2015. (Photo AP)
Les casques bleus espagnols de l’ONU effectuent des patrouilles dans les fermes de Chebaa entre le Liban et Israël, qui surplombent le village divisé de Ghajar, le 24 février 2015. (Photo AP)
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Publié le Lundi 02 novembre 2020

Les négociations sur les fermes de Chebaa, peut-être le début d'un nouveau chapitre dans la région

  • Malgré toutes ces tensions, il existe une réelle chance de négociations de paix entre Israël, la Syrie et le Liban
  • Les accords d’Abraham ont provoqué un vrai changement dans la dynamique de la région

En 2000, l’ancien Premier ministre israélien Ehud Barak a unilatéralement retiré les forces israéliennes du Liban. C’est également durant cette période qu’Israël et la Syrie ont commencé des négociations directes sous les auspices du président américain Bill Clinton.

Comme c’était le cas lors des négociations sous le mandat de Hafez Assad, la Syrie recherchait des accords et des projets régionaux, entre autres, afin de garder le Liban sous son influence. Le Liban était donc un élément principal des pourparlers. Le retrait d’Israël fut considéré comme une victoire pour le Hezbollah et comme le véritable début du contrôle qu’il exerce sur le Liban aujourd’hui. Cependant, un détail technique planté par le régime syrien a rendu ce retrait incomplet – les fermes contestées de Chebaa. Ce territoire est perdu entre les souverainetés syrienne et libanaise, ce qui lie tous les futurs accords avec Israël au Liban et à la Syrie.

C’est une région qui change constamment mais qui reste essentiellement la même. C’est une région où, si nous voulons fermer un dossier, nous devons en ouvrir un autre. Il est difficile de déterminer si Assad souhaitait gagner du temps et de l’influence en prétendant s’engager dans ces négociations ou s’il recherchait véritablement un accord qui ferait de la Syrie un pays stable et économiquement ouvert. Mais une chose est sûre: cela a permis à son régime de profiter du Liban et de l’exploiter, avec la complicité des élites locales.

Aujourd’hui, l’équilibre au Moyen-Orient est différent. Pour commencer, Bachar al-Assad ne semble pas être maître de son propre pays, et il semble encore moins capable d’instaurer la paix au Liban et en Syrie. Comme nous le savons tous, il y a une dominance iranienne et une présence militaire du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI), ainsi que des unités du Hezbollah, sur le territoire syrien, même si cela s’équilibre, dans une certaine mesure, avec l’influence russe. Au Nord, la Turquie est devenue un point de pression sur le régime syrien. Au Liban, le Hezbollah est le véritable maître et ne répond qu’à Téhéran sur le plan logistique, tout en se coordonnant avec le régime syrien qu’il a aidé à se maintenir en place.

Malgré tout, les accords d’Abraham ont provoqué un vrai changement dans la dynamique de la région. À mon avis, cette dynamique est positive: elle montre que la région arabe est ouverte à des relations pacifiques et mutuellement bénéfiques avec tous les pays, à condition qu’ils choisissent de coopérer, de ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures ou de menacer la stabilité. La même chose pourrait donc s'appliquer à l'Iran et à la Turquie. Les accords d'Abraham sont le symbole d’un changement et d’un mouvement positif vers les pays arabes à la recherche de leur intérêt national, du bien-être de leurs citoyens et d'un refus de se laisser guider par des idéologies supranationales. C'est un signe de maturité qui, on l’espère, atteindra tous les pays de la région.

Bizarrement, il semble que la Turquie – qui entretient des relations bilatérales avec Israël, qui est membre de l'Otan et qui procède à des échanges commerciaux avec Tel Aviv – soit plus farouchement opposée à ces nouveaux accords de paix que l'Iran et même le régime syrien qui a choisi de se taire.

Il est également très intéressant d’observer l’arrivée constante de nouveaux acteurs au Moyen-Orient, ce qui le rend semblable à un jeu vidéo avec des niveaux interminables. Nous sommes habitués – lorsque nous essayons de comprendre ce qui se passe dans la région et d’élaborer des scénarios éventuels – à prendre en compte les intérêts iraniens et leur impact sur l’équilibre géopolitique régional. Il semble maintenant que nous devrons faire de même avec la Turquie.

Le silence de la Syrie sur les accords d’Abraham a conduit à des spéculations sur les nouvelles négociations israélo-syriennes, d’autant que les pourparlers entre le Liban et Israël sur leur frontière maritime ont commencé. Nous sommes tous conscients que la Méditerranée orientale est un dossier important impliquant non seulement Israël et le Liban, mais aussi Chypre, la Grèce, la Turquie, l'Union européenne (UE) et l'Otan. Il porte également sur l’importance de l’approvisionnement énergétique de l’Europe, qui est un thème commun à tout accord en Syrie et au Liban. Malgré toutes ces tensions, il existe une réelle chance de négociations de paix entre Israël, la Syrie et le Liban.

Un élément clé dans tout accord du côté israélien est de garantir à 100 % la sécurité aux frontières libanaise et syrienne. Cela voudrait dire: pas de CGRI en Syrie, pas de menaces du Hezbollah et pas de missiles pointés sur le pays. Cela signifierait aussi la résolution du problème des fermes de Chebaa, qui lie le Liban et la Syrie à un accord commun. Du côté syrien, un accord devrait assurer que le régime reste au pouvoir, ce qui signifie également un soulagement économique et d'importants projets d'investissement.

La déclaration de Bachar al-Assad selon laquelle Israël devrait se retirer du plateau occupé du Golan pour entamer les pourparlers est une autre façon de dire qu’il n’est pas opposé à des négociations sous certaines conditions qui pourraient même changer. Par exemple, le plateau du Golan pourrait devenir une zone d’investissement internationale – il y a toujours des solutions.

La plupart des analyses ont lié la capacité de Bachar al-Assad à faire la paix à sa capacité à se défaire de l’influence iranienne dans son pays. Elles affirment que, pour cela, il a besoin du soutien de la Russie ainsi que des pays arabes. Toutefois, lorsque ces analyses évoquent Damas qui utilise la Russie pour tirer parti de la présence et de l'influence iraniennes afin de parvenir à un accord de paix, elles supposent que Téhéran ne veut pas, ou encore arrêterait, une négociation de paix.

Il faudrait également se demander ce que la Russie gagnerait des négociations entre la Syrie, le Liban et Israël. Moscou est-il prêt à supprimer, en peu de temps, la présence iranienne en Syrie et à faire face à l’instabilité que cela pourrait entraîner, en particulier avec les actions de la Turquie dans le Nord ? De plus, il semble que les États-Unis ne pourraient ou ne voudraient pas leur donner grand-chose en échange de la conclusion de cet accord.

Je pense que, cette fois-ci, ce n’est pas la Russie mais l’Iran qui sera plus désireux de conclure un accord ou du moins de montrer sa volonté de s’engager dans des pourparlers indirects suivis de négociations directes. La Russie pourrait également soutenir cela. Avec l'entrée incessante de nouveaux acteurs, les Iraniens commencent à être dominés et ils le savent. L’économie iranienne souffre énormément, et, que ses dirigeants l’admettent ou non, le régime est soumis à une pression intérieure extrême. Si le soutien aux négociations syro-libano-israéliennes peut apporter un certain soulagement à cette pression, cette fois Téhéran le fera. Ce serait également un bon moyen pour l’Iran d’évoquer de nouveau l’accord sur le nucléaire, sous un angle différent. Le dossier Syrie-Liban constituerait pour les Iraniens le terrain idéal pour clore son chapitre actuel et en commencer un nouveau.

Cette manœuvre iranienne potentielle indiquerait que l’esprit de Hafez al-Assad s'est déplacé à Téhéran, tandis que son fils Bachar est devenu l'équivalent d'un chef de guerre libanais des années 1980: toujours capable de survivre en analysant les changements géopolitiques, mais incapable de faire une vraie différence. Cela en dit long sur le prix à payer par les deux pays arabes, mais aussi sur les profondeurs dans lesquelles l'élite politique libanaise – le Hezbollah y compris –  a sombré.

  • Khaled Abou Zahr est PDG d'Eurabia, une société de médias et de technologie. Il est également le rédacteur en chef d'Al-Watan Al-Arabi. 

NDLR : Les opinions exprimées dans cette rubrique par leurs auteurs sont personnelles, et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d’Arab News.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Vision 2030: le Cabinet remercie les agences impliquées

Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
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  • Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne
  • Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne

RIYAD: Le Conseil des ministres a salué les efforts des agences gouvernementales ayant contribué aux avancées réalisées dans le cadre de la Vision saoudienne 2030, alors que le Royaume se rapproche de l’atteinte de ses objectifs clés, a rapporté mardi l’Agence de presse saoudienne (SPA).

D’après le rapport annuel 2024 de la Vision, 93% des principaux indicateurs de performance ont été entièrement ou partiellement atteints depuis le lancement de l’initiative il y a neuf ans.

Le ministre des Médias, Salman al-Dosari, a précisé que le cabinet avait discuté de la troisième et dernière phase de la Vision 2030, qui débutera en 2026. Cette phase visera à pérenniser l’impact des transformations déjà engagées tout en exploitant de nouvelles opportunités de croissance.

Le Conseil des ministres a également salué le don généreux d’un milliard de riyals saoudiens (266,6 millions de dollars; 1 dollar = 0,88 euro) effectué par le prince héritier Mohammed ben Salmane, destiné à soutenir des projets de logement pour les bénéficiaires saoudiens éligibles et les familles dans le besoin.

Le cabinet a souligné que ce don illustre l’engagement constant du prince héritier à améliorer la qualité de vie des citoyens, ainsi que son intérêt soutenu pour le secteur du logement et les initiatives visant à offrir des logements décents aux familles méritantes à travers le Royaume.

Le prince Mohammed a également informé le Conseil de sa rencontre avec le roi Abdallah II de Jordanie, ainsi que de ses échanges avec le Premier ministre indien Narendra Modi.

Le cabinet a salué les résultats de la deuxième réunion du Conseil de partenariat stratégique saoudo-indien, soulignant le développement continu des relations économiques, commerciales et d’investissement entre les deux pays.

Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne, conformément aux résolutions de la légitimité internationale, à l'initiative de paix arabe et à la création d'un État palestinien indépendant le long des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne et a renouvelé son appel aux institutions financières régionales et internationales pour qu'elles reprennent et étendent leurs opérations dans le pays.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.