Tuerie de Chevaline: dix ans d'enquête, des pistes et des questions

Sur cette photo d'archive prise le 6 septembre 2012, un véhicule de la gendarmerie française roule sur la route "Combe d'Ire" dans le village alpin français de Chevaline, où trois personnes ont été retrouvées abattues dans une voiture, et un cycliste retrouvé mort à proximité. (AFP)
Sur cette photo d'archive prise le 6 septembre 2012, un véhicule de la gendarmerie française roule sur la route "Combe d'Ire" dans le village alpin français de Chevaline, où trois personnes ont été retrouvées abattues dans une voiture, et un cycliste retrouvé mort à proximité. (AFP)
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Publié le Samedi 27 août 2022

Tuerie de Chevaline: dix ans d'enquête, des pistes et des questions

  • Le 5 septembre 2012, un cycliste britannique, Brett Martin, aperçoit sur une route forestière sur les hauteurs d'Annecy, dans les Alpes, un vélo de course couché à terre, une BMW, moteur en marche, et une petite fille en sang
  • L'enquête montrera que Saad al-Hilli, un ingénieur de 50 ans, sa femme, 47 ans, sa belle-mère, 74 ans, viennent d'être tués à bout portant, avec Sylvain Mollier, un ouvrier de la région de 45 ans en balade sur la route

CHEVALINE: Différend familial ? Règlement de comptes ? Affaire d'espionnage industriel ? Dix ans plus tard, le meurtre d'une famille britannique d'origine irakienne et d'un cycliste français en France, connu sous le nom de "tuerie de Chevaline", reste une énigme, malgré des milliers d'heures d'enquête et des centaines d'auditions.

Les enquêteurs ont fait "tout ce qu'il était humainement possible de faire, mais tant que l'ADN ne mène nulle part et qu'il n'y a aucun témoin visuel, c'est le crime parfait", constate une source proche du dossier.

Le 5 septembre 2012, un cycliste britannique, Brett Martin, aperçoit sur une route forestière sur les hauteurs d'Annecy, dans les Alpes, un vélo de course couché à terre, une BMW, moteur en marche, et une petite fille en sang, qui titube puis s'effondre. Pensant d'abord à un accident de la route, il voit ensuite dans la voiture "beaucoup de sang et des têtes trouées par des impacts de balles".

L'enquête montrera que Saad al-Hilli, un ingénieur de 50 ans, sa femme Iqbal, 47 ans, sa belle-mère Suhaila al-Allaf, 74 ans, une Suédoise d'origine irakienne, viennent d'être tués à bout portant, avec Sylvain Mollier, un ouvrier de la région de 45 ans en balade sur la route.

Seules ont survécu les deux fillettes du couple, alors âgées de quatre et sept ans. Zainab, l'aînée, a été blessée à l'épaule par une balle, assommée et laissée pour morte. Zeena, blottie aux pieds de sa mère à l'arrière de la voiture, n'a rien vu.

Un «méchant» aguerri 

Dix ans plus tard, le "méchant" décrit par la petite Zainab à sa sortie d'hôpital n'a pas été identifié et son mobile reste mystérieux. On ne sait pas s'il a agi seul.

Décrit par les enquêteurs comme un homme "aguerri", "très expérimenté", ou comme un "tueur à gages low-cost venu des Balkans", le tueur a tiré 21 fois en quelques minutes, 17 balles ont atteint leur cible. L'arme, un Luger P06 de calibre 7,65 parabellum, un modèle ancien utilisé dans l'armée suisse, n'a jamais été retrouvée.

En dix ans, magistrats et gendarmes se sont succédé et les effectifs assignés à l'enquête ont fondu, passant d'une centaine les premiers mois à trois temps plein en 2022.

Ce massacre d'une "sauvagerie inouïe" a généré une enquête "particulièrement complexe", comme l'avait dit le procureur de la République de l'époque, Éric Maillaud. En février dernier, la procureure Line Bonnet, la troisième sur l'affaire, se disait toujours persuadée des chances d'aboutir "grâce aux preuves scientifiques", même si les différentes pistes ressemblent à des impasses.

Zaïd al-Hilli, le frère aîné de Saad, a été rapidement soupçonné en raison d'un différend sur l'héritage paternel, mais il a un alibi.

Il a été interpellé par deux fois, en 2013 et 2014 en Angleterre, puis relâché faute de preuves. Il n'a jamais cessé de clamer son innocence en critiquant les méthodes de la police française.

L'enquête a établi qu'un conflit "violent" sur l'héritage paternel, portant sur trois à cinq millions d'euros en biens et en immeubles, opposait les deux frères. Décédé en 2011 en Espagne, le père al-Hilli, un industriel, avait laissé deux projets de testaments contradictoires. L'un déshéritait complètement Saad, l'autre établissait un partage équitable.

La famille al-Hilli a fui l'Irak de Saddam Hussein dans les années 70, en abandonnant ses biens à Bagdad. Ces racines dans un pays qui a connu une guerre civile sanglante ont soulevé des questions, sans réponse à ce jour.

La thèse de l'espionnage industriel a été explorée, Saad travaillant pour une entreprise anglaise spécialisée dans les satellites civils (météo, surveillance des cultures). Sans résultat.

Les investigations ont montré que le quinquagénaire avait "en sa possession beaucoup plus de données que son seul emploi ne le justifiait", toutefois "sans grande valeur marchande".

Un passé surprenant

Le passé d'Iqbal, l'épouse de Saad, a été aussi passé au crible et les enquêteurs ont trouvé "des choses surprenantes". Dont un premier mariage aux États-Unis avec un chirurgien-dentiste américain de 13 ans son aîné. Cet homme, James T., est mort à Natchez (Mississippi) le 5 septembre 2012, le jour de la tuerie de Chevaline. Cause officielle de son décès : crise cardiaque.

Les hypothèses d'un tueur isolé agissant de son propre chef ou d'un tireur fou qui se serait posté sur la route isolée ont également été envisagées.

Et les recherches menées autour d'un mystérieux motard aperçu par des témoins près du lieu de la fusillade n'ont rien donné. Identifié après des mois de silence, cet entrepreneur de la région lyonnaise sans casier judiciaire affirme n'avoir rien vu et ne se souvenir de rien.


Présidentielle: Le Pen «annoncera sa décision» après son procès en appel, sans attendre la cassation

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  • Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été
  • Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi

PARIS: Candidate déclarée à la prochaine présidentielle malgré son inéligibilité, Marine Le Pen affirme qu'elle ne se présentera "évidemment pas" si sa peine est confirmée en appel et qu'elle "annoncera donc (sa) décision" dans la foulée, sans attendre une éventuelle cassation.

Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été. Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi.

Condamnée en première instance - dans l'affaire des assistants parlementaires européens - à une peine d'inéligibilité de cinq ans avec application immédiate, la triple candidate à l'élection présidentielle admet qu'elle ne pourra "évidemment pas" se représenter une quatrième fois si cette peine devait être confirmée en appel.

"Je prendrai ma décision de me présenter ou non lors du rendu de l'arrêt de la cour d'appel", ajoute-t-elle, évacuant l'hypothèse d'un suspense prolongé en cas de pourvoi en cassation. "On ne sait pas quand une telle décision serait rendue et on ne peut pas se lancer dans une campagne présidentielle au dernier moment", explique-t-elle.

Son second procès étant programmé du 13 janvier au 12 février 2026, avec un délibéré attendu quatre mois plus tard, "j'annoncerai donc ma décision cet été", précise celle qui s'était hissée au second tour en 2017 et en 2022 face à Emmanuel Macron.

Un calendrier choisi aussi "pour ne pas hypothéquer la candidature de Jordan Bardella dans le cas où il devrait y aller", souligne-t-elle, confirmant ainsi le statut de dauphin du jeune président du parti à la flamme.


Macron au Brésil, pour évoquer une "relation transatlantique réimaginée"

Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron est arrivé à Salvador de Bahia pour promouvoir une « relation transatlantique réimaginée » entre l’Amérique du Sud, l’Afrique et la France, à travers la culture, la mémoire et la jeunesse
  • Cette visite s’inscrit dans une refondation des liens franco-africains, marquée par la reconnaissance de l’esclavage, la restitution d’objets coloniaux et la préparation du sommet Afrique–France à Nairobi en 2026

SALVADOR: Emmanuel Macron est arrivé mercredi à Salvador de Bahia, au Brésil, pour plaider en faveur d'une "relation transatlantique réimaginée" associant Amérique du Sud et Afrique, avant de participer à un sommet climat à Belem, a indiqué l'Elysée.

Le président français doit participer à l'ouverture du festival "Notre futur – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique", qui réunit "les jeunesses et les nouvelles voix des sociétés civiles brésiliennes, africaines et françaises", a expliqué la présidence.

Il s'agit d'un "temps fort de la saison culturelle France-Brésil" qui a scandé l'année 2025.

La capitale de l'Etat de Bahia, dans le nord-est du pays, fut l'un des points d'arrivée majeurs des esclaves africains déportés. Elle est aujourd'hui le foyer vibrant de la culture afro-brésilienne.

Cette étape vise donc "à célébrer et à travailler avec Brasilia à une relation transatlantique réimaginée", associant les "partenaires africains", selon la présidence française.

Emmanuel Macron doit aussi visiter une galerie dédiée au photographe et anthropologue français Pierre Fatumbi Verger (1902-1996), et la Maison du Bénin, où il découvrira l'exposition "Je suis un fleuve noir".

Pour Paris, "cette visite à Bahia s'inscrit dans la politique de refondation et de renouvellement de notre relation avec l'Afrique", au moment où les relations entre la France et ses anciennes colonies africaines sont souvent distendues, voire glaciales comme au Sahel.

La culture est un point fort de cette "refondation", fait-on valoir dans l'entourage du président français, qui a enclenché une démarche de restitution des "objets volés pendant l'époque coloniale".

Autre volet: "la reconnaissance de l'esclavage", qui sera aussi mise en avant à Salvador, point de débarquement "d'un très grand nombre d'esclaves, qui venaient notamment de tout le golfe du Bénin et notamment du port de Cotonou", a fait valoir une conseillère présidentielle.

"Bahia, c'est un point d'étape. On se donne rendez-vous également à Nairobi en mai, pour le nouveau sommet Afrique-France qu'on organise pour la première fois dans un pays anglophone", a souligné l'Elysée.

Jeudi, Emmanuel Macron se rendra à Belem, en Amazonie brésilienne, pour prononcer un discours au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement réunis par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva avant le début de la COP30, conférence de l'ONU sur le climat.

Il terminera sa tournée vendredi à Mexico où il sera accueilli par la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum, un an après sa prise de fonctions.


Premières heures de semi-liberté pour Kohler et Paris à l'ambassade de France à Téhéran

Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL
  • Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris

PARIS: Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France.

"Je les ai trouvés très heureux, très soulagés tous les deux par cette libération", a raconté mercredi matin sur la radio France Inter l'ambassadeur de France à Téhéran Pierre Cochard, qui est allé les chercher mardi à la sortie de la prison d'Evine, de sinistre réputation.

Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL.

Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris.

A Soultz (Haut-Rhin, est de la France) où a grandi Cécile Kohler, dont le portrait orne la façade de la mairie, les habitants racontaient leur soulagement. "On est impatients qu'elle revienne, on espère que l'Iran ne va pas la retenir", confiait l'un d'eux, Mathieu Taquard.

Mardi soir, les parents ont pu parler par téléphone à leur fille: "Elle disait qu'elle était en forme, et qu'elle avait hâte de revenir", a résumé à l'AFP le maire de Soultz, Marcello Rotolo.

L'ambassadeur a donné quelques éléments sur le déroulé de leur libération.

"On s'est rendus à la prison d'Evine, qui est au nord de Téhéran. L'ambassade se trouve plutôt au centre, donc il y a un trajet important. On s'est présentés, il y avait plusieurs portes à franchir, une barrière. Cela a pris un peu de temps, en coordination avec les autorités iraniennes", a-t-il expliqué. "Les grands portes de la prison d'Evine se sont ouvertes, et on a pu croiser le regard de Cécile et Jacques", qui "avaient été informés à la dernière minute" de leur sortie.

"C'est évidemment un moment qu'on n'oublie pas", a-t-il dit. "Les premiers mots, c'étaient des larmes, des sourires mêlés de larmes. On est restés quelques instants ensemble et puis ensuite on est montés dans la voiture" pour gagner l'abri de l'ambassade, où ils sont protégés par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, en espérant pouvoir quitter rapidement l'Iran.

Iranienne à l'ambassade 

Les autorités iraniennes, qui les accusent d'espionnage, considèrent qu'ils sont en "libération conditionnelle", "libérés sous caution" et "placés sous surveillance jusqu'à la prochaine étape judiciaire".

"Nous n'allons ménager aucun effort pour obtenir leur retour en France dans les meilleurs délais", a promis le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.

Professeure de lettres de 41 ans, et enseignant retraité de 72 ans, Cécile Kohler et Jacques Paris ont été arrêtés le 7 mai 2022, au dernier jour d'un voyage touristique en Iran.

Considérés comme des "otages d'Etat" par la France, qui à l'instar d'autres pays occidentaux accuse Téhéran de capturer des étrangers sur son sol pour négocier ensuite leur libération, ils étaient les deux derniers Français détenus sur le sol iranien.

Lourdement sanctionné par de nombreux membres de la communauté internationale, notamment pour ses activités nucléaires, l'Iran détiendrait selon des sources diplomatiques au moins une vingtaine d'Occidentaux qu'il pourrait utiliser comme levier pour obtenir la libération de certains de ses ressortissants à l'étranger ou obtenir des gages politiques.

Dans le cas de Cécile Kohler et Jacques Paris, Téhéran avait rendu publique en septembre la possibilité d'un accord de libération en échange de Mahdieh Esfandiari, une Iranienne arrêtée en France en février, accusée d'avoir fait la promotion du terrorisme sur les réseaux sociaux.

Téhéran semble afficher sa volonté de mettre en parallèle les deux dossiers, le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi annonçant mercredi matin que Mme Esfandiari, sous contrôle judiciaire depuis octobre dans l'attente de son procès en janvier, se trouvait désormais à l'ambassade d'Iran et "nous espérons qu'elle rentrera quand son procès sera achevé".

Les autorités françaises n'ont pas commenté cette annonce qui pourrait avoir des conséquences sur la date à laquelle les deux Français pourront quitter l'Iran.

L'élargissement de Cécile Kohler et Jacques Paris pourrait ouvrir la voie à un apaisement des relations entre l'Iran et la France. "Lorsqu'ils seront sur le territoire français, effectivement, cela ouvrira une possibilité de renouer des relations normales avec ce pays", a estimé M. Cochard.