Gorbatchev, l'homme qui a anéanti l'URSS malgré lui

Sur cette photo d'archive prise le 15 mars 1990, le premier président soviétique Mikhaïl Gorbatchev pose solennellement alors qu'il prête serment au Congrès des députés, à Moscou. (AFP)
Sur cette photo d'archive prise le 15 mars 1990, le premier président soviétique Mikhaïl Gorbatchev pose solennellement alors qu'il prête serment au Congrès des députés, à Moscou. (AFP)
Short Url
Publié le Mercredi 31 août 2022

Gorbatchev, l'homme qui a anéanti l'URSS malgré lui

  • Son décès intervient en pleine offensive de l'actuel président russe Vladimir Poutine en Ukraine, lancée le 24 février et dénoncée en Occident comme une résurgence de l'impérialisme russe
  • Simple fils de paysan, Mikhaïl Gorbatchev a effectué un parcours classique d'apparatchik pour devenir à 54 ans, le 11 mars 1985, le numéro un d'un empire soviétique alors exsangue sur le plan économique

MOSCOU: Communiste, Mikhaïl Gorbatchev n'imaginait sans doute pas qu'il changerait la face du monde en devenant le fossoyeur involontaire de l'URSS, source d'un immense respect en Occident mais d'une amertume certaine en Russie.

Mardi, il est décédé d'une "grave et longue maladie" à l'âge de 91 ans en Russie, a indiqué l'Hôpital clinique central où il était soigné.

Son décès intervient en pleine offensive de l'actuel président russe Vladimir Poutine en Ukraine, lancée le 24 février et dénoncée en Occident comme une résurgence de l'impérialisme russe.

Simple fils de paysan, Mikhaïl Gorbatchev a effectué un parcours classique d'apparatchik pour devenir à 54 ans, le 11 mars 1985, le numéro un d'un empire soviétique alors exsangue sur le plan économique et qui était empêtré dans une guerre sans fin en Afghanistan.

Sa jeunesse le distingue. En moins de trois ans, depuis le décès de Léonid Brejnev en 1982, le PC soviétique a connu deux secrétaires généraux vieillissants qui sont morts à ce poste, Iouri Andropov et Konstantin Tchernenko.

Conscient que la crise guette, M. Gorbatchev lance une libéralisation baptisée la "perestroïka" (restructuration) et la "glasnost" (transparence) pour réformer le système soviétique et réduire l'influence des vieux caciques du parti.

Des millions de Soviétiques découvrent alors des libertés inédites, mais aussi les pénuries, le chaos économique et les révoltes nationalistes qui sonneront le glas de l'URSS, ce que nombre de ses compatriotes ne pardonneront jamais à cet homme au front marqué d'une tache de vin.

"Bien sûr, j'ai des regrets, de grosses erreurs ont été commises", avait-il déclaré en janvier 2011.

Car sous son mandat, les dérives n'ont pas manqué: l'entrée des chars soviétiques en Lituanie, la répression de manifestants pacifiques en Géorgie, ou la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, en 1986, passée sous silence pendant des jours, contribuant à la contamination de centaines de milliers de personnes.

Hommage à l'homme de paix en Occident, sobres «condoléances» à Moscou

La mort mardi soir à 91 ans de Mikhaïl Gorbatchev, dernier dirigeant de l'URSS, a suscité de vibrants hommages en Occident, où son rôle crucial pour mettre fin à la Guerre froide et son combat pour la paix ont été salués, prenant un relief particulier six mois après l'invasion russe en Ukraine.

L'émotion des réactions occidentales contraste avec la sobriété du président russe Vladimir Poutine qui a exprimé "ses profondes condoléances" et qui "enverra (mercredi) dans la matinée un télégramme de condoléances à la famille et aux proches" de l'ancien dirigeant, selon le porte-parole du Kremlin.

Dans un communiqué, le président américain Joe Biden a salué en Mikhaïl Gorbatchev un "leader rare". Ses actes furent ceux d'un dirigeant ayant assez d'"imagination pour voir qu'un autre avenir était possible et le courage de risquer toute sa carrière pour y parvenir. Le résultat fut un monde plus sûr et davantage de liberté pour des millions de personnes", a dit M. Biden.

Pour le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, "le monde a perdu un immense dirigeant mondial, engagé envers le multilatéralisme, et défenseur infatigable de la paix".

Le chef de l'ONU a salué, dans un communiqué, "un homme d'Etat unique qui a changé le cours de l'histoire" et fait "plus que n'importe qui pour provoquer de façon pacifique la fin de la Guerre froide".

La Chine a salué le rôle du dernier dirigeant soviétique au rapprochement entre Pékin et Moscou, après trois décennies de rupture.

"M. Gorbatchev a contribué de manière positive à la normalisation des relations entre la Chine et l'Union soviétique", a indiqué devant la presse un porte-parole de la diplomatie chinoise, Zhao Lijian.

Rêve «en ruines»

"Les réformes historiques de Mikhaïl Gorbatchev ont conduit à la dissolution de l'Union soviétique, contribué à mettre fin à la guerre froide et ouvert la possibilité d'un partenariat entre la Russie et l'Otan", a déclaré le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg sur Twitter. "Sa vision d'un monde meilleur reste un exemple".

Le président allemand Frank-Walter Steinmeier a rendu hommage au dernier dirigeant soviétique en le remerciant "pour sa contribution décisive à l'unité allemande" et son "courage pour l'ouverture démocratique et la construction de ponts entre l'Est et l'Ouest".

Ce rêve est "en ruine, brisé par l'attaque brutale de la Russie contre l'Ukraine", a-t-il ajouté.

"Il est mort à une époque où non seulement la démocratie a échoué en Russie, mais où la Russie et le président russe (Vladimir) Poutine ont creusé de nouveaux fossés en Europe et ont lancé une terrible guerre contre un pays voisin, l'Ukraine", a déclaré Le chancelier allemand Olaf Scholz, rendant hommage à M. Gorbatchev, qualifié de "réformateur courageux".

"J'ai toujours admiré le courage et l'intégrité dont il a fait preuve pour mettre fin à la Guerre froide", a également indiqué dans un tweet le Premier ministre britannique Boris Johnson. "A l'heure de l'agression de (Vladimir) Poutine en Ukraine, son engagement inlassable pour l'ouverture de la société soviétique reste un exemple pour nous tous", a-t-il insisté.

Pour Emmanuel Macron, Mikhaïl Gorbatchev était un "homme de paix dont les choix ont ouvert un chemin de liberté aux Russes. Son engagement pour la paix en Europe a changé notre histoire commune", a souligné le président français dans un tweet.

«Faire tomber le rideau de fer»

Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez a qualifié sur Twitter Mikhaïl Gorbatchev "d'homme, qui de par ses décisions, a contribué d’une façon décisive à mettre fin à la Guerre froide et à faire de l'Europe et du monde un lieu avec plus de paix et de liberté".

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a salué sur Twitter "un dirigeant digne de confiance et respecté" qui "a joué un rôle crucial pour mettre fin à la guerre froide et faire tomber le rideau de fer. Il a ouvert la voie à une Europe libre", a-t-elle souligné.

Mikhaïl Gorbatchev était "une des figures les plus extraordinaires du XXe siècle. C'était un leader courageux et visionnaire, qui a façonné notre monde d'une manière que l'on pensait inimaginable", pour le président israélien Isaac Herzog.

L'ex-chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, proche de Vladimir Poutine, a salué sur son compte Twitter "un champion de la démocratie", "un homme qui a changé l'histoire du XXe siècle".

"Sa clairvoyance et son jugement serein nous manqueront, surtout dans ces heures difficiles de la politique internationale", a-t-il ajouté.

Pour l'ancien président colombien et Nobel de la paix 2016, Juan Manuel Santos, Mikhaïl Gorbatchev - qui a lui-même reçu ce Nobel en 1990 - était "un champion de la paix". "Le monde a besoin de beaucoup plus de leaders comme lui", a-t-il écrit dans un tweet.

Un héritage controversé 

A l'Ouest, que ce soit le chancelier allemand Helmut Kohl ou le président américain Ronald Reagan, les grands du monde capitaliste sont fascinés par ce nouvel interlocuteur ouvert à la négociation.

"J'aime bien M. Gorbatchev, c'est un homme avec qui l'on peut traiter", a ainsi dit de lui la Première ministre britannique Margaret Thatcher.

Accord de désarmement nucléaire, refus d'intervenir militairement pour défendre le rideau de fer, retrait de l'Armée rouge d'Afghanistan: le numéro un soviétique est décidément différent.

Ce respect ne disparaîtra jamais en Occident en raison de sa retenue lorsque le mur de Berlin et les régimes communistes de Tchécoslovaquie, de Hongrie et de Pologne s'écroulent. Il sera récompensé d'un prix Nobel de la paix en 1990.

"Les évènements les plus importants du XXe siècle furent l'émancipation de la femme et la libération de la Russie" par celui qu'on surnomme "Gorbi", avait souligné le dirigeant israélien Shimon Peres, autre lauréat du Nobel.

Mais pour les Russes, M. Gorbatchev a détruit le statut de grande puissance de leur patrie, et ils n'ont que dédain pour ce piètre orateur à l'accent traînant de sa région natale de Stavropol (sud).

Sa chute, d'ailleurs, a des airs d'humiliation.

En juin 1991, lorsque Boris Eltsine est élu au suffrage universel président de la Russie soviétique, M. Gorbatchev tente de sauver l'URSS en proposant une autonomie interne élargie.

Le projet capote le 19 août 1991, lorsque la ligne dure du Parti communiste tente un putsch contre lui, mais c'est l'ennemi juré de M. Gorbatchev, Boris Eltsine, qui sera le héros de la résistance à ce coup d'Etat manqué.

Déjà mourante, l'URSS disparaît en décembre lorsque la Russie, le Bélarus et l'Ukraine proclament que l'Union soviétique "n'existe plus". Mikhaïl Gorbatchev démissionne le 25 décembre.

"Homme politique spontané qui n'a jamais réfléchi aux conséquences, Gorbatchev a voulu tout changer sans rien changer sur le fond", résume l'historienne Irina Karatsouba.

"Le socialisme à visage humain a fait long feu quand les prix du pétrole ont dégringolé, et la Guerre froide a été perdue. On s'interrogera encore longtemps sur l'énigme Gorbatchev: sur ce qui dépendait et ne dépendait pas de lui", analyse-t-elle.

Le seul accès de sympathie qu'auront pour lui les Russes est en 1999, après le décès d'une leucémie de son épouse Raïssa Gorbatcheva: contrairement aux habitudes russes, Mikhaïl Gorbatchev n'hésitait jamais à manifester publiquement son amour pour cette femme élégante.

Un dirigeant «positif»

Pour l'écrivain et photographe Iouri Rost, M. Gorbatchev fut "le dirigeant le plus positif" de Russie car il a cherché à en faire un pays suscitant le "respect" plutôt que la "peur".

Rien ne prédestinait pourtant "Gorbi" à ce destin hors du commun.

Après avoir grandi dans "un bled où il n'y avait ni électricité, ni radio", ce conducteur de moissonneuse-batteuse monte à 19 ans à Moscou, prenant "pour la première fois un train" pour aller à l'université, racontait-il.

Pendant ses études de droit, il s’engage dans le mouvement étudiant du PC, les Komsomols. De retour à Stavropol, il travaille à plein temps dans cette organisation et fait une ascension rapide à travers la structure locale du Parti communiste.

Il est alors remarqué par le chef du KGB, Iouri Andropov. Ce dernier fait monter Mikhaïl Gorbatchev à Moscou en 1978 où il intègre le Comité central, l'instance dirigeante du PC, avant de devenir le dernier dirigeant de l'Union soviétique.

Depuis qu'il a quitté le pouvoir, M. Gorbatchev s'était reconverti en héraut de la cause environnementale et avait créé la Fondation Gorbatchev, dédiée aux études socio-économiques. En 1996, il s'était présenté à la présidentielle contre Boris Eltsine, mais n'avait obtenu que 0,5% des voix.

De plus en plus discret ces dernières années alors que sa santé déclinait, il a reconnu certains torts. Un temps virulent contre Vladimir Poutine, disant en 2011 sa "honte" de l'avoir soutenu au tournant des années 2000, il dirige de plus en plus ses critiques contre les Occidentaux à partir de l'annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée en 2014 par la Russie et multiplie les avertissements face à l'avènement d'une nouvelle Guerre froide.

En février 2019, il dénonce dans une tribune la décision américaine de se retirer du traité INF sur les armes de portée intermédiaire, qu'il avait signé avec Ronald Reagan en 1987, comme un signe du "désir des Etats-Unis de se libérer de toutes contraintes dans le domaine de l'armement (et) d'atteindre une supériorité militaire absolue".

Avant son décès, il ne s'était pas exprimé publiquement sur l'offensive massive du Kremlin en Ukraine.


L’Ambassade du Maroc à Tokyo célèbre le 26e anniversaire de l’intronisation du Roi Mohammed VI

L’Ambassade du Maroc à Tokyo a célébré 26 ans de règne de Mohammed VI, mettant en avant les réformes, l’essor économique et l’ouverture du Royaume. (Photo: ANJ)
L’Ambassade du Maroc à Tokyo a célébré 26 ans de règne de Mohammed VI, mettant en avant les réformes, l’essor économique et l’ouverture du Royaume. (Photo: ANJ)
Lors de la célébration du 26e anniversaire de l’intronisation du Roi Mohammed VI à Tokyo, l’Ambassadeur Bouhlal a mis en avant les réformes du Royaume, son rôle croissant en tant que hub régional et ses avancées dans les secteurs de l’énergie, de l’industrie et du tourisme. (Photo: ANJ)
Lors de la célébration du 26e anniversaire de l’intronisation du Roi Mohammed VI à Tokyo, l’Ambassadeur Bouhlal a mis en avant les réformes du Royaume, son rôle croissant en tant que hub régional et ses avancées dans les secteurs de l’énergie, de l’industrie et du tourisme. (Photo: ANJ)
Le ministre japonais KIUCHI Minoru a salué la stabilité et l’ouverture du Maroc, soulignant l’intérêt croissant des investisseurs japonais pour un pays devenu un partenaire stratégique en Afrique. (Photo: ANJ)
Le ministre japonais KIUCHI Minoru a salué la stabilité et l’ouverture du Maroc, soulignant l’intérêt croissant des investisseurs japonais pour un pays devenu un partenaire stratégique en Afrique. (Photo: ANJ)
Short Url
  • L’Ambassade du Maroc à Tokyo a célébré 26 ans de règne de Mohammed VI, mettant en avant les réformes, l’essor économique et l’ouverture du Royaume
  • Le Japon a salué la stabilité du Maroc et le renforcement des liens économiques bilatéraux

TOKYO : L’Ambassade du Royaume du Maroc à Tokyo a célébré mercredi le 26e anniversaire de l’intronisation du Roi Mohammed VI.

L’événement a rassemblé des parlementaires éminents, des personnalités politiques japonaises, des diplomates, des chefs d’entreprise ainsi que des responsables gouvernementaux, conférant à la célébration une dimension solennelle et prestigieuse.

L’Ambassadeur Rachad Bouhlal a accueilli les invités en soulignant les réformes visionnaires et cohérentes menées par le Roi Mohammed VI tout au long de ses 25 années de règne. Ces réformes ont largement contribué à faire du Maroc « un pays moderne, ouvert et inclusif », tout en favorisant son développement économique et social, le positionnant comme un modèle pour d'autres nations.

L’Ambassadeur a également adressé ses salutations à l’Empereur et l’Impératrice du Japon, à la Famille impériale ainsi qu’au Gouvernement et au peuple japonais.

Il a mis en avant le rôle du Maroc en tant que hub régional d’investissement et d’innovation, notamment dans les secteurs industriel et des infrastructures. Il a notamment cité le port de Tanger-Med, aujourd’hui le plus grand port de la Méditerranée, ainsi que l’expansion de la ligne à grande vitesse Al Boraq, première du genre en Afrique.

L’Ambassadeur Bouhlal a souligné que le Maroc figure parmi les premiers pays africains à adopter les énergies renouvelables, ce qui lui permet d’attirer des industries à forte valeur ajoutée. Il a précisé que le Royaume est désormais le premier constructeur de voitures particulières en Afrique, avec un rôle déterminant joué par les entreprises japonaises reconnues pour leur expertise technologique, renforçant ainsi les liens économiques entre les deux pays.

Par ailleurs, le Maroc et le Japon ont signé un mémorandum d’entente pour la promotion de l’investissement et du commerce. Selon les données du tourisme international des Nations unies, le Maroc a accueilli 17,4 millions de touristes en 2024, soit une hausse de 20 % par rapport à 2023, ce qui en fait la première destination touristique du continent africain.

Le ministre japonais de la Sécurité économique, KIUCHI Minoru, a salué les avancées du Maroc sous le leadership du Roi Mohammed VI. Il a exprimé l’admiration du Japon pour les réformes marocaines en faveur de la modernisation et de la justice sociale. Le ministre a souligné que la stabilité politique et l’ouverture du Royaume en font un partenaire de confiance, attirant un nombre croissant d’investissements japonais.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.jp


L'écrivain israélien David Grossman qualifie de "génocide" la situation à Gaza

Des Palestiniens reçoivent de la soupe de lentilles dans un point de distribution de nourriture dans la ville de Gaza, le 1er août 2025. (AFP)
Des Palestiniens reçoivent de la soupe de lentilles dans un point de distribution de nourriture dans la ville de Gaza, le 1er août 2025. (AFP)
Short Url
  • Le célèbre écrivain israélien David Grossman a qualifié de "génocide" la manière dont son pays mène la guerre dans la bande de Gaza
  • Allant à contre-courant du gouvernement israélien, M. Grossman affirme rester "désespérément fidèle" à l'idée de deux Etats, la Palestine et Israël

ROME: Le célèbre écrivain israélien David Grossman a qualifié de "génocide" la manière dont son pays mène la guerre dans la bande de Gaza, affirmant en avoir "le cœur brisé", dans une interview publiée vendredi dans le quotidien italien La Repubblica.

"J'ai refusé pendant des années d'utiliser ce terme: "génocide". Mais maintenant je ne peux pas m'empêcher de l'utiliser, après ce que j'ai lu dans les journaux, après les images que j'ai vu et après avoir parlé avec des personnes qui y ont été", dit-il.

"Je veux parler comme une personne qui a fait tout ce qu'elle pouvait pour ne pas en arriver à qualifier Israël d'Etat génocidaire", assure-t-il.

"Et maintenant, avec une douleur immense et le cœur brisé, je dois constater ce c'est ce qui se passe devant mes yeux. "Génocide". C'est un mot avalanche: une fois que tu l'as prononcé, il ne fait que grossir, comme une avalanche. Et il apporte encore plus de destruction et de souffrance", ajoute M. Grossman dont les œuvres ont été traduites en de nombreuses langues, dont le français, l'anglais ou l'italien.

Interrogé sur ce qu'il pensait en lisant les chiffres sur les morts à Gaza, il a répondu: "je me sens mal".

"Mettre ensemble les mots +Israël+ et +famine+, le faire en partant de notre histoire, de notre supposée sensibilité aux souffrances de l'humanité, de la responsabilité morale que nous avons toujours dit avoir envers chaque être humain et non seulement envers les juifs... tout ça c'est dévastateur", poursuit M. Grossman.

Allant à contre-courant du gouvernement israélien, M. Grossman affirme rester "désespérément fidèle" à l'idée de deux Etats, la Palestine et Israël, "principalement parce que je ne vois pas d'alternative", saluant dans ce contexte la volonté du président français Emmanuel Macron de reconnaître en septembre l'Etat palestinien.

"Je pense que c'est une bonne idée et je ne comprends pas l'hystérie avec laquelle elle a été accueillie en Israël", dit-il.

"Il est clair qu'il faudra avoir des conditions précises: pas d'armes. Et la garantie d'élections transparentes dont sera exclu quiconque pense à utiliser la violence contre Israël", a conclu l'écrivain.


L'émissaire de Trump promet davantage d'aides humanitaires après une visite à Gaza

Des Palestiniens de Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, se précipitent vers un avion effectuant un largage d'aide au-dessus du territoire palestinien assiégé par Israël, le 1er août 2025. (AFP)
Des Palestiniens de Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, se précipitent vers un avion effectuant un largage d'aide au-dessus du territoire palestinien assiégé par Israël, le 1er août 2025. (AFP)
Short Url
  • L'émissaire américain Steve Witkoff a effectué vendredi une visite dans la bande de Gaza dévastée par la guerre, promettant d'y augmenter l'aide humanitaire
  • L'ONG Human Rights Watch (HRW) a fustigé le système de distribution d'aide mis en place par Israël et les Etats-Unis via la Fondation humanitaire à Gaza (GHF), devenu selon elle un "piège mortel" pour les Gazaouis

Gaza, Territoires palestiniens: L'émissaire américain Steve Witkoff a effectué vendredi une visite dans la bande de Gaza dévastée par la guerre, promettant d'y augmenter l'aide humanitaire, au moment où la pression s'accentue sur Israël face aux pertes humaines dans le territoire palestinien affamé.

En amont de cette visite de l'émissaire du président Donald Trump, l'ONG Human Rights Watch (HRW) a fustigé le système de distribution d'aide mis en place par Israël et les Etats-Unis via la Fondation humanitaire à Gaza (GHF), devenu selon elle un "piège mortel" pour les Gazaouis.

Après près de 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque sanglante du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, la bande de Gaza assiégée par Israël est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire.

Entretemps, les bombardements et tirs israéliens ont continué dans le territoire palestinien, où la Défense civile a fait état de 22 Palestiniens tués, dont huit qui attendaient de l'aide.

"Qu'ont fait nos fils et nos filles? Qu'ont fait les enfants pour mériter cette famine? Ayez pitié de nous!", se lamente la sexagénaire Yasmine al-Farra à l'hôpital Nasser de Khan Younès (sud), où elle pleure son fils tué.

Steve Witkoff et l'ambassadeur américain en Israël, Mike Huckabee, ont visité dans la matinée un centre de la GHF "afin de connaître la vérité sur les sites d'aide", a indiqué M. Huckabee.

- "Nourrir les gens" -

M. Witkoff a ensuite précisé sur X que leur visite, de "plus de cinq heures", avait pour but "de fournir à @POTUS (le président Trump) une compréhension claire de la situation humanitaire et d'élaborer un plan visant à livrer de la nourriture et une aide médicale aux habitants de Gaza".

Selon le site américain Axios, M. Trump a déclaré travailler sur un plan à Gaza "pour nourrir les gens".

La GHF a lancé ses opérations fin mai, après près de trois mois de total blocus humanitaire imposé par Israël, écartant le système d'aide mis en place par l'ONU.

Depuis, 1.373 Palestiniens qui attendaient de l'aide ont été tués à Gaza, dont 859 près des sites de la GHF, une organisation au financement opaque, "la plupart" par l'armée israélienne, a affirmé l'ONU.

Dans un rapport, HRW a dénoncé un système humanitaire "militarisé" qui a provoqué selon l'ONG des "bains de sang". Elle a qualifié de "crimes de guerre" les "meurtres de Palestiniens en quête de nourriture, par les forces israéliennes".

L'armée israélienne, sollicitée par l'AFP, a dit examiner les rapports faisant état de victimes civiles près des zones de distribution d'aides.

Depuis une semaine, des avions de plusieurs pays ont largué des vivres à Gaza. Les autorités israéliennes ont annoncé que plus de 200 camions d'aide avaient été distribués jeudi par les organisations internationales.

Les agences internationales jugent ces aides insuffisantes et selon l'ONU 6.000 camions attendent le feu vert israélien pour entrer à Gaza.

- Vidéo d'un otage -

M. Witkoff, qui s'était rendu à Gaza en janvier, a rencontré jeudi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, sous pression à la fois en Israël pour tenir ses engagements à détruire le Hamas et libérer les Israéliens kidnappés le 7-Octobre, et à l'étranger pour faire taire les armes à Gaza.

L'attaque du 7-Octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles. Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 49 sont toujours otages à Gaza, dont 27 ont été déclarées mortes par l'armée.

L'offensive de représailles lancée par Israël à Gaza, a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza, jugées fiables par l'ONU.

Vendredi, le Hamas a diffusé une vidéo d'un otage israélien, identifié par les médias israéliens comme Evyatar David, 24 ans. L'otage y apparaît amaigri et visiblement affaibli, détenu dans un tunnel.

L'AFP n'a pas pu déterminer l'authenticité de la vidéo, ni la date de son enregistrement.

Dans un rapport d'enquête publié vendredi, la chaîne publique britannique BBC a affirmé avoir recueilli des témoignages de membres du personnel médical, de groupes de défense des droits humains et de témoins sur plus de 160 enfants touchés par balle pendant la guerre à Gaza. Elle a ajouté que 95 avaient été touchés à la tête ou à la poitrine et que, selon des témoins, 57 d'entre eux auraient été visés par l'armée israélienne.

Interrogée à ce sujet, l'armée israélienne a déclaré que "toute atteinte intentionnelle aux civils, et en particulier aux enfants, est strictement interdite" par l'armée israélienne et le droit international.