Une journée avec un député libanais de l’opposition: Ibrahim Mneimné

Le député libanais indépendant, Ibrahim Mneimné, pose lors d'une séance photo en studio à sa résidence à Beyrouth le 03 juin 2022. (Photo de Joseph EID / AFP)
Le député libanais indépendant, Ibrahim Mneimné, pose lors d'une séance photo en studio à sa résidence à Beyrouth le 03 juin 2022. (Photo de Joseph EID / AFP)
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Publié le Vendredi 02 septembre 2022

Une journée avec un député libanais de l’opposition: Ibrahim Mneimné

  • Mneimné a fait son entrée au Parlement à l’issue des dernières élections législatives en réalisant une percée spectaculaire dans la 2e circonscription de Beyrouth
  • Son mandat est clairement défini par ses électeurs: agir pour le changement, et faire de la politique selon sa propre méthode

BEYROUTH: Suivre le député Ibrahim Mneimné dans son activité pendant une journée relève de l’épreuve d’endurance. C’est désormais son quotidien depuis son élection lors des législatives de mai dernier.

Malgré la densité de son agenda, l’homme est serein, bienveillant, mais surtout ferme. Il restera égal à lui-même tout au long de cette journée menée au pas de charge jusque tard dans la soirée. Rendez-vous est pris à 9h du matin dans son appartement situé dans le quartier de Sanayeh, à l’ouest de Beyrouth. Il reçoit dans son salon, qui lui sert de bureau en attendant la rénovation des bureaux octroyés aux députés dans l’enceinte du Parlement.

Ce matin, il se trouve en compagnie de deux de ses collaborateurs: Sarah Mahmoud, chargée de son planning, et Mohammed Farida, son conseiller économique. L’échange est direct et simple, il porte sur les différentes étapes de la journée, notamment une réunion de la Commission parlementaire des Finances dont il est membre.

Après le café préparé par Mneimné lui-même et la mise au point avec les collaborateurs, cap sur le siège du Parlement. Dans ce haut lieu de la corruption qui ronge le Liban, il est aux premières loges pour témoigner des magouilles et marchandages conçus par les caciques de la classe politique pour continuer à prospérer dans un pays exsangue et en état d’effondrement politique, économique, social et sanitaire.

Alors oui, forcément, il a fallu du temps à Mneimné, porte-voix du soulèvement populaire de 2019, pour s’habituer à l’idée que sa place est dans ce Parlement, le siège de son travail.

Mneimné a fait son entrée au Parlement à l’issue des élections législatives en réalisant une percée spectaculaire dans la deuxième circonscription de Beyrouth. Contre toute attente, cet urbaniste de 46 ans soutenu par le groupe «Beyrouth résiste» s’est imposé, raflant la mise dans un fief traditionnellement acquis au Courant du Futur, parti de l’ancien Premier ministre Saad Hariri.

Son mandat est clairement défini par ses électeurs: agir pour le changement et faire de la politique selon sa propre méthode. Sarah Mahmoud, qui a renoncé à son métier d’enseignante pour travailler à ses côtés, confie à Arab News en français avec une admiration non contenue que l’action du parlementaire consiste «à faire face au système de la corruption et à dénoncer la classe politique en se focalisant sur les intérêts des Libanais».

Mohammed Farida, économiste et candidat aux législatives de 2022, a de son côté choisi de se retirer à la faveur de Mneimné, avec qui il travaille depuis. Il se dit séduit par la méthode. «Il est aux antipodes des politiciens libanais inféodés à des chefs communautaires coupés du peuple et de ses problèmes.» Selon lui, cette méthode «va prouver aux Libanais que le changement est possible et qu’il est temps d’agir pour transformer le Liban et en faire un pays qui nous ressemble».

Cette méthode, qui consiste à rester au contact et à l’écoute de la population a pris forme au fil des années. Né à Djeddah, en Arabie saoudite, où travaillait son père architecte, et dont il suivra la voie professionnelle, il est rentré au Liban en 1993 pour étudier l’architecture à l’Université arabe de Beyrouth.

Quelque temps plus tard, dans le sillage de l’ancien Premier ministre défunt, Rafic Hariri, il s’intéresse au processus de reconstruction de Beyrouth et au renouveau économique du Liban. En 1995, il souhaite prendre part activement à l’action de ce courant politique, mais au bout de deux réunions, choisit de se retirer. «J’ai eu le sentiment de contribuer à une action qui ne me ressemblait pas», explique-t-il. Ce n’est que beaucoup plus tard, pendant la crise des ordures déclenchée en 2015 et la campagne des élections municipales de 2016, qu’il s’est rapproché du groupe Beirut Madinati. «Là, j’ai eu le sentiment que j’ai trouvé ce que je cherchais», raconte-t-il.

Avant, il suivait assidûment la vie politique du pays, mais ne sentait pas qu’il y avait pour lui un rôle à jouer. «J’ai toujours été quelqu’un qui aime le changement, un réformiste, même dans la pratique de ma profession», soutient-il. La vue de Beyrouth inondée par les déchets a été un déclencheur pour Mneimné, qui a pris conscience de son désir de changement et du rôle qui lui incombait en tant qu’architecte et urbaniste.

Il a ainsi présidé la liste de Beirut Madinati aux municipales de 2016, qui a récolté environ 40% des voix face à la liste du «système». Le scrutin a certes été une défaite, mais une défaite honorable. Il n’était plus question pour lui de reculer au regard de la dégradation de la situation du pays et de la mainmise acharnée de la classe politique.

En 2018, il participe aux élections législatives comme candidat du groupe Kulluna Beirut. Il s’agit pour lui d’une occasion de mettre en évidence «notre identité politique et nos positions face à l’ensemble de la classe politique libanaise toutes tendances confondues», indique-t-il. Les contours de cette identité sont simples: instaurer un État laïque, des réformes politiques, concentrer les armes dans les mains de l’armée libanaise, assurer l’indépendance de la justice et assurer la souveraineté du Liban.

Une identité claire, mais en somme impossible à mettre en œuvre en raison du communautarisme institutionnalisé et profondément enraciné dans les esprits.

Depuis sa percée électorale spectaculaire, l’homme assure qu’il n’a pas changé. «Mes valeurs humaines restent identiques, tout comme mon désir de proximité avec les gens. Mon mode de vie reste ce qu’il a toujours été.» Le seul changement, peut-être, est dû au grand nombre de ses électeurs. «Cela a renforcé ma confiance dans notre capacité de changement et m’a donné la force pour aller de l’avant dans mon discours politique», dans le calme, le respect et le refus du populisme.
En témoigne la tournée effectuée ce jour-là dans le quartier populaire de Aïcha Bakkar, où il est chaleureusement accueilli et interpellé sur différents sujets.

À la suite de ce bain de foule, Mneimné, toujours pimpant, endosse une veste: il est fin prêt à assister à une réunion avec des experts économiques avant de se diriger dans la banlieue de Mansourieh, située sur les hauteurs de Beyrouth, pour une interview télévisée.

Pour l’instant, son équipe composée essentiellement de bénévoles tient le coup, mais qu’en sera-t-il sur le long terme? Mneimné le concède. «Oui, j’essaye avec l’aide de jeunes qui travaillent à mes côtés de créer une entité.»

Son but: alléger les tâches de l’équipe, mais surtout «sans se laisser circonscrire dans un cadre communautaire étriqué» qui ne dépasse pas la circonscription qu’il représente. Il tente d’élargir la portée de ses idées et actions aux différentes régions libanaises et de construire un large maillage. Il veut ratisser au-delà de sa circonscription pour consolider sa base en dehors de sa communauté et du socle électoral qui l’a porté au Parlement. Ce désir s’exprime à travers la rencontre organisée en début de soirée sur les escaliers du quartier Gemmayzeh à Beyrouth est, où il est essentiellement interrogé sur le poids des 13 députés dans la présidentielle d’octobre prochain.

Même si le président libanais n’est pas élu au suffrage universel, Mneimné estime qu’il faudra créer une dynamique populaire autour de cette échéance, ajoutant qu’elle devra peser sur le choix des députés. Ce futur président devra à ses yeux être «un patriote doté d’une vision réformiste,  être accepté par tous les Libanais, privilégier les intérêts nationaux tout en apaisant les relations avec les forces régionales et internationales». Le président doit être «conscient de son rôle comme élément d’équilibre entre les institutions de l’État», souligne-t-il.

À l’issue de cette journée intense, Mneimné admet qu’il ne consacre que très peu de temps à sa vie familiale. Son épouse et ses trois filles, des jumelles âgées de 15 ans et une cadette de 13 ans, souhaiteraient passer plus de temps avec lui, mais «elles sont heureuses et fières de ce que nous essayons de faire pour le pays», affirme le nouveau député.

 


Un an après la chute d’Assad, les Syriens affichent un fort soutien à al-Chareh

Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
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  • Un sondage révèle un optimisme croissant et un large soutien aux progrès du gouvernement après la chute d’Assad
  • L’Arabie saoudite apparaît comme le pays étranger le plus populaire, Trump reçoit également un soutien marqué

LONDRES : Alors que les Syriens ont célébré cette semaine le premier anniversaire de la chute de Bachar Al-Assad, une enquête menée dans le pays révèle un soutien massif au nouveau président et place l’Arabie saoudite comme principal partenaire international apprécié.

L’ancien président avait fui le pays le 8 décembre 2024, après une offensive éclair de l’opposition jusqu’à Damas, mettant fin à 14 ans de guerre civile.

La campagne était menée par Ahmad al-Chareh, aujourd’hui président du pays, qui s’efforce de stabiliser la Syrie et de rétablir des relations avec ses partenaires internationaux.

Ces efforts ont été salués dans un sondage récemment publié, montrant que 81 % des personnes interrogées ont confiance dans le président et 71 % dans le gouvernement national.

Les institutions clés bénéficient également d’un fort soutien : plus de 70 % pour l’armée et 62 % pour les tribunaux et le système judiciaire.

L’enquête a été menée en octobre et novembre par Arab Barometer, un réseau de recherche américain à but non lucratif.

Plus de 1 200 adultes sélectionnés aléatoirement ont été interrogés en personne à travers le pays sur une large gamme de sujets, notamment la performance du gouvernement, l’économie et la sécurité.

Le large soutien exprimé envers al-Chareh atteint un niveau enviable pour de nombreux gouvernements occidentaux, alors même que la Syrie fait face à de profondes difficultés.

Le coût de la reconstruction dépasse les 200 milliards de dollars selon la Banque mondiale, l’économie est dévastée et le pays connaît encore des épisodes de violence sectaire.

Al-Chareh s’efforce de mettre fin à l’isolement international de la Syrie, cherchant l’appui de pays de la région et obtenant un allègement des sanctions américaines.

Un soutien clé est venu d’Arabie saoudite, qui a offert une aide politique et économique. Le sondage place le Royaume comme le pays étranger le plus populaire, avec 90 % d’opinions favorables.

Le Qatar recueille lui aussi une forte popularité (plus de 80 %), suivi de la Turquie (73 %).

La majorité des personnes interrogées — 66 % — expriment également une opinion favorable envers les États-Unis, saluant la décision du président Donald Trump d’assouplir les sanctions et l’impact attendu sur leur vie quotidienne.

Après sa rencontre avec al-Chareh à Washington le mois dernier, Trump a annoncé une suspension partielle des sanctions, après en avoir déjà assoupli plusieurs volets.

Le sondage montre que 61 % des Syriens ont une opinion positive de Trump — un niveau supérieur à celui observé dans une grande partie du Moyen-Orient.

En revanche, l’enthousiasme est bien moindre concernant les efforts américains pour normaliser les relations entre la Syrie et Israël.

Seuls 14 % soutiennent cette démarche, et à peine 4 % disent avoir une opinion favorable d’Israël.

Lors du chaos provoqué par la chute d’Assad, l’armée israélienne a occupé de nouveaux territoires dans le sud de la Syrie et a mené de fréquentes attaques au cours de l’année écoulée.

Plus de 90 % des Syriens considèrent l’occupation israélienne des territoires palestiniens et les frappes contre l’Iran, le Liban et la Syrie comme des menaces critiques pour leur sécurité.

Dans Foreign Policy, Salma Al-Shami et Michael Robbins (Arab Barometer) écrivent que les résultats de l’enquête donnent des raisons d’être optimiste.

« Nous avons constaté que la population est pleine d’espoir, favorable à la démocratie et ouverte à l’aide étrangère », disent-ils. « Elle approuve et fait confiance à son gouvernement actuel. »

Mais ils notent aussi plusieurs sources d’inquiétude, notamment l’état de l’économie et la sécurité interne.

Le soutien au gouvernement chute nettement dans les régions majoritairement alaouites.

La dynastie Assad, au pouvoir pendant plus de 50 ans, était issue de la minorité alaouite, dont les membres occupaient de nombreux postes clés.

L’économie reste la principale préoccupation : seuls 17 % se disent satisfaits de sa performance, et beaucoup s’inquiètent de l’inflation, du chômage et de la pauvreté.

Quelque 86 % déclarent que leurs revenus ne couvrent pas leurs dépenses, et 65 % affirment avoir eu du mal à acheter de la nourriture le mois précédent.

La sécurité préoccupe aussi : 74 % soutiennent les efforts du gouvernement pour collecter les armes des groupes armés et 63 % considèrent l’enlèvement comme une menace critique.

À l’occasion de l’anniversaire de la chute d’Assad, lundi, al-Chareh a affirmé que le gouvernement œuvrait à construire une Syrie forte, à consolider sa stabilité et à préserver sa souveraineté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël mène une série de frappes contre le Hezbollah au Liban

Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
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  • Israël a frappé vendredi plusieurs sites du Hezbollah au sud et à l’est du Liban, ciblant notamment un camp d’entraînement de sa force d’élite al-Radwan, malgré le cessez-le-feu conclu en novembre 2024
  • Ces raids interviennent alors que l’armée libanaise doit achever le démantèlement des infrastructures militaires du Hezbollah le long de la frontière israélienne d’ici le 31 décembre

BEYROUTH: Israël a mené une série de frappes aériennes contre le sud et l'est du Liban vendredi matin, selon les médias officiels, l'armée israélienne affirmant viser des objectifs du Hezbollah pro-iranien dont un camp d'entrainement.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe islamiste libanais, Israël continue de mener des attaques régulières contre le Hezbollah, l'accusant de se réarmer.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani), les raids de vendredi, qualifiés en partie de "violents", ont visé une dizaine de lieux, certains situés à une trentaine de km de la frontière avec Israël.

Dans un communiqué, l'armée israélienne a affirmé avoir "frappé un complexe d'entrainement" de la force d'élite du Hezbollah, al-Radwan, où des membres de la formation chiite apprenaient "l'utilisation de différents types d'armes", devant servir dans "des attentats terroristes".

L'armée israélienne a également "frappé des infrastructures militaires supplémentaires du Hezbollah dans plusieurs régions du sud du Liban", a-t-elle ajouté.

L'aviation israélienne avait déjà visé certains des mêmes sites en début de semaine.

Ces frappes interviennent alors que l'armée libanaise doit achever le démantèlement le 31 décembre des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord, conformément à l'accord de cessez-le-feu.

Les zones visées vendredi se trouvent pour la plupart au nord du fleuve.

Le Hezbollah a été très affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe.


Pluies diluviennes et vents puissants ajoutent au chaos qui frappe Gaza

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
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  • A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre
  • Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza

GAZA: Pelle à la main, des Palestiniens portant des sandales en plastique et des pulls fins creusent des tranchées autour de leurs tentes dans le quartier de Zeitoun, à Gaza-ville, rempart dérisoire face aux pluies torrentielles qui s'abattent depuis des heures.

Dès mercredi soir, la tempête Byron a balayé le territoire palestinien, bordé par la mer Méditerranée, inondant les campements de fortune et ajoutant à la détresse de la population, déplacée en masse depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le 7 octobre 2023.

A Zeitoun, le campement planté au milieu des décombres a des allures cauchemardesques, sous un ciel chargé de gros nuages gris et blancs.

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes.

Accroupis sur des briques posées dans la boue, un groupe d'enfants mangent à même des faitouts en métal devant l'ouverture d'un petit abri en plastique, en regardant le ciel s'abattre sur le quartier.

"Nous ne savions pas où aller" 

A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre.

"La nuit dernière a été terrible pour nous et pour nos enfants à cause des fortes pluies et du froid, les enfants ont été trempés, les couvertures et les matelas aussi. Nous ne savions pas où aller", raconte à l'AFP Souad Mouslim, qui vit sous une tente avec sa famille.

"Donnez-nous une tente décente, des couvertures pour nos enfants, des vêtements à porter, je le jure, ils ont les pieds nus, ils n'ont pas de chaussures", implore-t-elle.

"Jusqu'à quand allons-nous rester comme ça? C'est injuste", dit-elle en élevant la voix pour couvrir le bruit des gouttes frappant la toile.

Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza.

Le territoire connait généralement un épisode de fortes pluies en fin d'automne et en hiver, mais la dévastation massive due à la guerre l'a rendu plus vulnérable.

"La situation est désespérée", résume Chourouk Mouslim, une déplacée originaire de Beit Lahia, dans le nord de Gaza, elle aussi sous une tente à al-Zawaida.

"Nous ne pouvons même pas sortir pour allumer un feu" pour cuisiner ou se chauffer, déplore-t-elle, avant d'ajouter qu'elle n'a de toutes les manières ni bois, ni gaz.

Dans ce territoire dont les frontières sont fermées, où l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante selon l'ONU, malgré l'entrée en vigueur d'une trêve le 10 octobre, les pénuries empêchent une population déjà démunie de faire face à ce nouveau problème.

Lointaine reconstruction 

Sous les tentes, les plus chanceux bâchent le sol ou le recouvrent de briques pour empêcher que le sable humide ne détrempe leurs affaires. Dans les zones où le bitume n'a pas été arraché, des bulldozers continuent de déblayer les décombres des bâtiments détruits.

Beaucoup de gens restent debout, à l'entrée des abris, plutôt que de s'asseoir une surface mouillée.

"La tempête a eu un impact grave sur la population, des bâtiments se sont effondrés et une grande partie des infrastructures étant détruite, elles ne permettent plus d'absorber cet important volume de pluie", note Mahmoud Bassal, le porte-parole de la Défense civile de Gaza.

Cette organisation, qui dispense des premiers secours sous l'autorité du Hamas, a affirmé que la tempête avait causé la mort d'une personne, écrasée par un mur ayant cédé. Elle a ajouté que ses équipes étaient intervenues après l'effondrement partiel de trois maisons durant les fortes pluies.

La Défense civile a averti les habitants restés dans des logements partiellement détruits ou fragilisés par les bombardements qu'ils se mettaient en danger.

"Les tentes, c'est inacceptable", estime M. Bassal, "ce qui doit être fourni maintenant, ce sont des abris qu'on peut déplacer, équipés de panneaux solaires, avec deux pièces, une salle de bain et toutes les installations nécessaires pour les habitants. Seulement à ce moment-là, la reconstruction pourra commencer".