Dans l'Arctique canadien, les traditions inuites remèdes contre la dépression des jeunes

Annie Kootoo, 22 ans, prépare du saumon à Iqaluit, Nunavut, Canada, le 27 juillet 2022. (Photo par Anne-Sophie THILL / AFP)
Annie Kootoo, 22 ans, prépare du saumon à Iqaluit, Nunavut, Canada, le 27 juillet 2022. (Photo par Anne-Sophie THILL / AFP)
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Publié le Samedi 24 septembre 2022

Dans l'Arctique canadien, les traditions inuites remèdes contre la dépression des jeunes

  • Au cœur des camps, financés par le gouvernement du territoire du Nunavut, «la culture inuite, l'adaptation aux changements climatiques» et «la question de la santé mentale»
  • Les Inuits sont hantés par le souvenir des pensionnats qu'ils ont été forcés de fréquenter pendant des décennies, jusque dans les années 1990

IQALUIT, Canada : Découper le poisson est tout un art, tout comme savoir allumer un feu ou construire un igloo: dans le Grand Nord canadien, un chasseur tente de reconnecter de jeunes Inuits à leur culture, pour leur permettre de garder la tête hors de l'eau.

Ils sont une dizaine d'adolescents et de jeunes adultes agglutinés autour de la solide carrure d'Alex Flaherty. Ils ne veulent manquer aucun des gestes précis de leur instructeur quand il découpe le poisson, ou qu'il allume le feu.

«Le changement est si rapide aujourd'hui que nous perdons notre culture, elle est en train de disparaître», et les plus jeunes perdent pied, raconte le trentenaire, casquette vert kaki enfoncée sur la tête.

En trois ans, il a emmené des centaines d'adolescents marcher, camper et chasser dans l'immensité de la toundra.

Au cœur des camps, financés par le gouvernement du territoire du Nunavut, «la culture inuite, l'adaptation aux changements climatiques» et «la question de la santé mentale».

Les participants ont généralement entre 12 et 20 ans car «c'est à ce moment-là qu'ils ont besoin d'aide, quand ils sont adolescents», ajoute le responsable de l'organisation Polar Outfitting.

L'une des clés est d'être dehors: l'été, ils arpentent les collines au sol rocailleux qui encadrent Iqaluit, ville isolée de 7.000 personnes, principalement des autochtones, accessible uniquement en avion.

Mais ils apprennent aussi à fabriquer un filet de pêche, à attraper de l'omble chevalier, à naviguer, à survivre dans les conditions extrêmes de ce territoire de l'Arctique canadien où il n'y a que quelques heures d'ensoleillement en hiver.

L'hiver, ils pêchent sur la glace, construisent des igloos...

- «En parler pour guérir» -

Cheveux mi-longs, noirs, séparés par une raie au milieu, Annie Kootoo, 22 ans, la plus âgée du groupe, se félicite de ressentir de «l'excitation, du bonheur» après cette dizaine de jours.

«J'ai été dehors, j'ai fait de nombreuses activités que je ne fais pas d'habitude, ça a été très bénéfique pour mon moral», confie cette jeune mère de deux enfants.

Même sentiment de bien-être pour Chris Laisa, 14 ans. «C'était marrant, j'ai appris à retirer la peau d'un poisson, à le préparer, c'est ce que je voulais», raconte l'adolescent, lunettes orange fluo sur les yeux et timide sourire aux lèvres.

«Il ne s'agit pas que de pêcher. Cela permet de s'aérer l'esprit, d'être dehors, de partager avec les autres», estime Alex Flaherty.

Au Nunavut, où l'âge moyen de la population est de 28 ans, la jeunesse est confrontée à d'importants problèmes sociaux - abus sexuels, violences, alcoolisme - en partie liés aux traumatismes intergénérationnels.

Comme de nombreuses communautés autochtones, les Inuits sont hantés par le souvenir des pensionnats qu'ils ont été forcés de fréquenter pendant des décennies, jusque dans les années 1990.

Les abus et la maltraitance y étaient monnaie courante, le gouvernement canadien a reconnu «un génocide culturel».

Les séquelles de cet héritage sont plus prononcées dans cette région où vivent nombre de rescapés de ces pensionnats, selon un rapport.

Et le taux de suicide est beaucoup plus élevé pour les Inuits du Nunavut (76,6 pour 100.000 habitants en 2020) qu'en moyenne ailleurs au Canada (10,1), selon Statistiques Canada.

Face à ce fléau, Camilla Sehti, responsable en santé mentale et toxicomanie au sein du gouvernement du Nunavut, mise elle aussi sur des initiatives visant à «reconnecter les gens à leur culture».

«La colonisation a eu un impact énorme sur ce territoire et sur la capacité des gens à se sentir connectés à eux-mêmes», explique-t-elle.

Après avoir perdu sa meilleure amie, il y a deux ans, Minnie Akeeagok, 18 ans, multiplie les messages de prévention sur les réseaux sociaux.

«Je connais au moins cinq personnes avec des problèmes de dépression ou qui se sont suicidées...», lâche la jeune fille au tatouage traditionnel inuit sur le bras.

«On a besoin de plus de ressources, de plus d'accès aux soins au Nunavut», dénonce celle qui veut maintenant s'engager dans ce domaine auprès des communautés isolées de la région.

Car comme elle le rappelle, hors des villes, la situation est encore plus problématique.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com