Téhéran ferme la frontière avec le Pakistan sur fond de répression sanglante dans la ville iranienne voisine

Un responsable de l'Agence fédérale d'investigation du Pakistan a confié à Arab News que les autorités iraniennes avaient bouclé le poste-frontière de Taftan. (Archive/AFP).
Un responsable de l'Agence fédérale d'investigation du Pakistan a confié à Arab News que les autorités iraniennes avaient bouclé le poste-frontière de Taftan. (Archive/AFP).
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Publié le Lundi 03 octobre 2022

Téhéran ferme la frontière avec le Pakistan sur fond de répression sanglante dans la ville iranienne voisine

  • Les médias d'État iraniens estiment à cinq le nombre de morts parmi les membres du Corps des gardiens de la révolution islamique et du groupe Basiji à Zahedan
  • Les journalistes et militants locaux rapportent que les forces de sécurité iraniennes ont abattu cinquante manifestants, voire davantage

QUETTA: Dimanche dernier, l'Iran a bloqué l’un des principaux points de passage avec le Pakistan. Cette décision intervient après les troubles meurtriers et la répression exercée contre les manifestants dans la ville de Zahedan, située à proximité de la frontière, dans le sud-est de l'Iran.

La violence a déferlé sur la capitale du Sistan-et-Baloutchistan, une province d'Iran, pendant la prière du vendredi. En effet, les fidèles réunis dans la mosquée Makki de la ville ont appelé à protester contre le viol d'une fille de 15 ans commis, semble-t-il, par un commandant militaire local.

Le chef des services de renseignements du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) dans la province, Ali Mousavi, a été abattu lors des affrontements de vendredi. C’est de l’hôpital que sa mort a été annoncée.

C'est le groupe militant Jaish al-Adl qui a revendiqué cet assassinat. Cette organisation se présente comme un mouvement de lutte pour l'indépendance de la province du Sistan-et-Baloutchistan. Son objectif est de défendre les droits des Baloutches, qui constituent le principal groupe ethnique de la province.

Un responsable de l'Agence fédérale d'investigation du Pakistan a confié à Arab News que les autorités iraniennes avaient bouclé le poste-frontière de Taftan, à quelque 90 km de Zahedan. «Ils interdisent la circulation du Pakistan vers l'Iran», explique-t-il sous couvert d'anonymat.

«Samedi, ils ont autorisé sept cent quatre-vingts personnes parmi lesquelles figuraient des étrangers qui voulaient se rendre au Pakistan. Ils ont toutefois complètement interrompu toutes sortes d'échanges commerciaux et de mouvements de personnes dès dimanche.»

Sardarzada Oumair Mohammed Hassani, qui occupait auparavant le poste de conseiller du ministre en chef de la province du Baloutchistan, au Pakistan, estime que la fermeture de la frontière affectera l'Iran lui-même dans la mesure où l'approvisionnement en nourriture de l'Iran transite par le Pakistan.

«La fermeture de la frontière par les forces iraniennes est une décision défavorable aux intérêts de leur pays», affirme-t-il ainsi à Arab News. Il souligne en outre qu'il n'est plus favorable au renforcement des liens entre le Pakistan et l'Iran, une position qu'il défendait auparavant; il pense en effet que les meurtres perpétrés à Zahedan nuisent aux Baloutches qui vivent du côté du Pakistan.

«Les tribus baloutches vivent des deux côtés de la frontière», explique Hassani. «Les brutalités commises ces derniers temps par les forces iraniennes à l'encontre des habitants de Zahedan ont nourri un sentiment d'indignation et de colère parmi les Baloutches.»

Les dernières photos de la ville montrent des gens porter des morts et des blessés parmi les manifestants au milieu de tirs nourris. Selon l'administration du Sistan-et-Baloutchistan, le bilan des affrontements s'élève à dix-neuf morts. Ce nombre s'élèverait à cinquante personnes, voire davantage, si l'on se fie aux informations fournies par les journalistes présents dans la province et par les militants.

«Les médias de la province de Zahedan estiment à cinquante le nombre de morts. En effet, la majorité des blessés abattus par les forces iraniennes préfèrent être soignés à leur domicile, et non dans les hôpitaux, pour ne pas être appréhendés par les forces iraniennes», explique à Arab News Asif Bourhanzaï, journaliste à Taftan.

Selon le Baloch Activists Campaign (la Campagne des activistes baloutches, groupe basé à Londres, NDLR), le bilan des affrontements s’élève à cinquante-huit morts et deux cent soixante-dix blessés, voire plus.

Les moyens de communication ont été interrompus à Zahedan et dans ses environs pendant le week-end. Dimanche dernier, les services des réseaux mobiles ont été partiellement rétablis, sans toutefois que l'accès à Internet ne soit à nouveau disponible.

L'agence de presse iranienne Mehr a publié dimanche un rapport dans lequel elle estime à cinq le nombre de membres du CGRI et du groupe de volontaires connu sous le nom de «Basiji» tués à Zahedan.

Leur mort et celle du chef des services de renseignements du CGRI de la province ont entraîné une recrudescence des manifestations antigouvernementales qui ont éclaté à la mi-septembre. Ces dernières ont été motivées par la mort d'une femme, Masha Amini (22 ans), qui était détenue par la police des mœurs iranienne.

Le chef du CGRI, le général Hossein Salami, a juré de venger la mort de ses militaires.

«Venger la mort des martyrs du Corps des gardiens de la révolution islamique, des Basiji et des victimes du crime perpétré en ce vendredi sanglant à Zahedan fait partie de nos priorités», a-t-il annoncé selon l’Irna, l'agence de presse officielle de l'Iran.

Les manifestations qui se poursuivent dans l’ensemble du pays représentent la plus vaste opposition au gouvernement iranien depuis plus de dix ans.

Elles se sont étendues aux provinces iraniennes, qui sont au nombre de trente et un. Les minorités ethniques et religieuses se sont jointes à ce mouvement en dépit de la réaction brutale des autorités.

Si l'on tient compte des décès survenus au Sistan-et-Baloutchistan, le nombre de personnes tuées au cours des manifestations dépasse probablement la barre des cent victimes.

Vendredi, l'organisation Iran Human Rights, dont le siège se trouve en Norvège, a évalué a quatre-vingt-trois, voire davantage, le nombre de morts. De nombreuses autres personnes ont été blessées et des milliers d’individus arrêtés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.