TotalEnergies visé par une plainte pour complicité de crimes de guerre en Ukraine

Un réservoir de stockage de carburant est photographié sur le site de la raffinerie Total Energies, à Donges, dans l'ouest de la France, le 12 octobre 2022. (AFP)
Un réservoir de stockage de carburant est photographié sur le site de la raffinerie Total Energies, à Donges, dans l'ouest de la France, le 12 octobre 2022. (AFP)
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Publié le Vendredi 14 octobre 2022

TotalEnergies visé par une plainte pour complicité de crimes de guerre en Ukraine

  • La plainte rappelle que TotalEnergies détenait jusqu'à septembre 49% de la coentreprise Terneftegaz, qui exploite le gisement de Termokarstovoïe, dans le Grand Nord russe
  • Le géant français de l'énergie a dénoncé des accusations «outrancières», «diffamatoires» et «infondées»

PARIS: Une plainte pour complicité de crimes de guerre a été déposée à Paris contre TotalEnergies, accusé d'avoir continué à exploiter un gisement en Russie et permis la fabrication de carburant utilisé in fine par des avions russes engagés dans le conflit en Ukraine, ce que le groupe conteste.

Cette plainte a été déposée jeudi auprès du procureur national antiterroriste, compétent pour les crimes de guerre, par l'association basée à Bordeaux Darwin Climax Coalition, qui dit oeuvrer pour la protection des droits humains et la défense des populations touchées par la prédation industrielle, et l'association ukrainienne Razom we stand, qui appelle à imposer un embargo sur les importations d'énergie fossile de Russie.

Sollicité par l'AFP, le géant français de l'énergie a dénoncé des accusations "outrancières", "diffamatoires" et "infondées".

La plainte, dont l'AFP a eu connaissance, rappelle que TotalEnergies détenait jusqu'à septembre 49% de la coentreprise Terneftegaz, qui exploite le gisement de Termokarstovoïe, dans le Grand Nord russe. Les 51% restants étaient détenus par le groupe russe Novatek, numéro deux du gaz russe, dont TotalEnergies est par ailleurs actionnaire à hauteur de 19,4%.

Or, selon un article du Monde paru le 24 août qui se basait sur plusieurs documents et une enquête de l'ONG Global Witness, le champ gazier de Termokarstovoïe a fourni du condensat de gaz à une raffinerie proche d'Omsk en Sibérie, qui en a fait du carburant, lequel a ensuite été expédié pour alimenter les avions russes engagés dans le conflit en Ukraine au moins jusqu'en juillet dernier.

Après la publication de l'article du Monde, le géant français de l'énergie, déjà critiqué pour son maintien en Russie, avait assuré qu'il ne produisait "pas de kérosène pour l'armée russe". Deux jours plus tard, il avait indiqué s'être accordé le 18 juillet pour céder ses 49% dans Terneftegaz à Novatek. Cette vente a été finalisée en septembre.

Frappes aériennes 

Selon les plaignants, "en continuant d'exploiter le gisement de Termokarstovoïe" après l'invasion russe en Ukraine, lancée le 24 février, TotalEnergies a "contribué à fournir au gouvernement russe les moyens nécessaires à la commission des crimes de guerre" dans ce pays, où l'armée russe a notamment lancé des frappes aériennes contre des civils.

"Le carburant, indispensable aux opérations militaires aériennes, a donc indirectement servi à la Russie pour perpétrer les bombardements contre la population civile, qui ont conduit au décès d’au moins 5.587 personnes et en ont blessé 7.890", estiment les plaignants.

Ces derniers estiment par ailleurs que TotalEnergies ne pouvait ignorer les forts liens d'influence entre Novatek et le régime russe: l'oligarque Guennadi Timtchenko, un proche de Vladimir Poutine, a dû quitter en mars le conseil d'administration du groupe, étant visé par des sanctions européennes. Leonid Mikhelson, directeur général de Novatek, est pour sa part visé par des sanctions britanniques.

"TotalEnergies réfute catégoriquement l’ensemble des allégations infondées de Global Witness, publiées par le journal Le Monde en août dernier", a rappelé vendredi le groupe, affirmant que les condensats instables produits par Terneftegaz avaient été "exportés à l'étranger" et n'avaient donc pas pu être utilisés par l'armée russe comme carburant pour ses avions.

"Être +complice de crimes de guerre+ c'est fournir une aide directe à un Etat ou à une organisation criminelle auteurs des crimes", a par ailleurs estimé TotalEnergies. "Ces accusations sont une insulte à l'intégrité de nos équipes".

La plainte souligne de son côté "l’évolution juridique de la notion de complicité, revenant à considérer que les grands acteurs privés (et publics) peuvent être poursuivis (...) même si la preuve n’est pas rapportée qu’ils partagent le dessein de l’auteur principal", en l'occurrence de l'armée russe.

"La justice ne peut plus être aveugle face au concours indirect mais essentiel que des multinationales apportent à l'effort de guerre ou aux bénéfices considérables que continuent à tirer des multinationales après l'invasion de l'Ukraine", ont commenté auprès de l'AFP les avocats des associations, Mes William Bourdon, Vincent Brengarth et Henri Thulliez.

"La France ne peut à la fois condamner l'invasion et rester inactive face aux comportements qui l'entretiennent", ont-ils ajouté.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.