Iran: pas de répit dans les manifestations, malgré un appel des Gardiens de la révolution

Rassemblement dans la ville de Shiraz, dans le sud du pays, le 28 octobre 2022, pour dénoncer une fusillade de masse dans un sanctuaire clé qui a tué plus d'une douzaine de fidèles. (Photo de l'agence de presse Tasnim / AFP)
Rassemblement dans la ville de Shiraz, dans le sud du pays, le 28 octobre 2022, pour dénoncer une fusillade de masse dans un sanctuaire clé qui a tué plus d'une douzaine de fidèles. (Photo de l'agence de presse Tasnim / AFP)
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Publié le Samedi 29 octobre 2022

Iran: pas de répit dans les manifestations, malgré un appel des Gardiens de la révolution

  • Samedi matin, des habitants de Chiraz ont rendu un dernier hommage aux victimes de l'attentat, scandant des slogans contre les Etats-Unis, Israël et le Royaume-Uni, qui selon eux étaient «derrière les émeutes»
  • Lors de la cérémonie, le chef des Gardiens de la Révolution, le général Hossein Salami, a appelé «un nombre limité des jeunes trompés» par l'ennemi à mettre fin aux «émeutes»

TEHERAN : Les manifestations déclenchées par la mort de Mahsa Amini se sont répandues samedi dans des universités à travers l'Iran, alors même que le commandant des puissants Gardiens de la Révolution a appelé les protestataires à ne plus descendre dans la rue.

L'Iran est secouée par une vague de contestation depuis la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, décédée trois jours après son arrestation à Téhéran par la police des mœurs qui lui reprochait d'avoir enfreint le code vestimentaire strict de la République islamique, imposant notamment le port du voile pour les femmes.

Au slogan initial de "femmes, vie, liberté" se sont ajoutés, au fil de manifestations pourtant durement réprimées, des mots d'ordre ouvertement dirigés contre la République islamique fondée en 1979.

"Mort au dictateur", ont scandé samedi encore des manifestants lors d'une cérémonie marquant la fin du deuil traditionnel de 40 jours de l'un des leurs, Mohsen Mohammadi, 28 ans, à Divandarreh (Kurdistan), selon des groupes de défense des droits humains. Blessé d'une balle, il est mort à son arrivée le 19 septembre à l'hôpital Kowsar.

Vendredi soir, les forces de sécurité ont tiré contre un rassemblement devant ce même hôpital, venu "protéger" un protestataire "blessé" que les autorités cherchaient à arrêter, a indiqué sur Twitter le groupe de défense des droits humains Hengaw basé en Norvège, publiant la photo d'un homme sur une civière.

Manifestations d'étudiants

Selon la même source, les forces de sécurité ont ensuite "tiré contre un dortoir pour étudiants en médecine", non loin de l'hôpital Kowsar, à Sanandaj, chef-lieu de la province du Kurdistan.

Une vidéo vérifiée par l'AFP montre des dizaines de policiers arriver à bord de motocycles avant d'ouvrir le feu contre la résidence universitaire de l'Université des sciences médicales du Kurdistan.

Samedi, début de la semaine de travail en Iran, des étudiants ont manifesté notamment sur les campus de Téhéran, de Kerman (sud-est) et de la ville de Kermanshah (nord-ouest), selon des vidéos largement partagées sur les réseaux sociaux.

Selon Hengaw, les forces de sécurité ont tiré contre une manifestation d'étudiantes à Kermanshah et deux manifestantes se trouvent dans un état critique.

"La honte, la honte", ont crié des étudiants alors qu'ils se heurtaient au personnel de sécurité d'une université d'Ahvaz (sud-ouest), dans des images publiées par la chaîne de médias sociaux 1500tasvir.

Les forces de sécurité ont ouvert le feu et tiré des gaz lacrymogènes sur un rassemblement d'étudiants dans la ville de Sanandaj, selon l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo.

Les nouvelles manifestations ont eu lieu alors même que le général Hossein Salami, le chef des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique, a clamé lors de funérailles : "Aujourd'hui est la fin des émeutes, ne descendez plus dans la rue".

Il s'exprimait devant une foule en deuil rassemblée à Chiraz pour les funérailles des victimes d'une attaque revendiquée par le groupe jihadiste Etat islamique (EI) qui a fait 15 morts mercredi dans un sanctuaire chiite de cette ville du sud du pays.

Lors des funérailles, des slogans ont été scandés contre les "émeutes", en allusion aux manifestations déclenchées par la mort de Mahsa Amini.

Procès

La répression des protestations depuis mi-septembre a fait au moins 160 morts, dont une vingtaine d'enfants, selon l'IHR.

Par ailleurs, 93 personnes ont été tuées fin septembre dans des manifestations distinctes dans la ville de Zahedan (sud-est), d'après cette ONG.

Vendredi, des manifestants à Zahedan ont essuyé des tirs à l'arme automatique après la prière hebdomadaire, selon l'ONG Human Rights Activists News Agency (HRANA), basée aux Etats-Unis.

Au moins 20 membres des forces de sécurité ont été tués lors des manifestations liées à la mort de Mahsa Amini et huit autres lors des protestations à Zahedan, selon un bilan compilé par l'AFP.

Vendredi, le directeur d'IHR, Mahmood Amiry-Moghaddam, a exhorté l'ONU à "accroître la pression diplomatique sur l'Iran et à mettre en place un mécanisme d'enquête pour juger les responsables" de la répression.

Les dirigeants iraniens quant à eux ont continué de pointer du doigt les "ennemis" de l'Iran.

Le ministère des Renseignements et les Gardiens de la Révolution ont accusé vendredi la CIA, l'agence de renseignement américaine, et ses "alliés de Grande-Bretagne, d'Israël et de l'Arabie saoudite" de "comploter" contre la République islamique.

Le procès de cinq personnes, accusées de crimes passibles de la peine capitale, liés aux "récentes émeutes", s'est ouvert samedi à Téhéran, a annoncé l'agence de l'Autorité judiciaire.

Mercredi, la justice avait annoncé avoir inculpé dans nombreuses provinces du pays, plus de mille individus liés aux manifestations.

 

Protestations en Iran: ouverture du procès d'accusés menacés d'exécution

Le procès de cinq personnes, accusées de crimes passibles de la peine capitale, liés aux manifestations qui secouent l'Iran depuis six semaines, s'est ouvert samedi à Téhéran, a annoncé l'agence de l'Autorité judiciaire.

"La première audience d'un certain nombre d'accusés des récentes émeutes s'est ouvert dans la matinée au sein du tribunal révolutionnaire de Téhéran présidé par le juge Abolghassem Salavati", a indiqué samedi l'agence, Mizan Online.

L'Iran est le théâtre de manifestations -- qualifiées d'émeutes par les autorités -- depuis la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans décédée trois jours après son arrestation à Téhéran par la police des mœurs. Cette dernière lui reprochait d'avoir enfreint le code vestimentaire strict du pays, imposant notamment le port du voile en public.

Des dizaines de personnes, principalement des manifestants mais aussi des membres des forces de sécurité, ont été tuées lors des manifestations. Des centaines d'autres, dont des femmes, ont été arrêtées.


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.