Deux ans après l’explosion du port de Beyrouth, la Maison bleue renaît de ses cendres

En raison de sa proximité avec le port, la Maison bleue fait partie des maisons patrimoniales qui ont été les plus touchées par l’explosion meurtrière du 4 août 2020. (Photo : fournie)
En raison de sa proximité avec le port, la Maison bleue fait partie des maisons patrimoniales qui ont été les plus touchées par l’explosion meurtrière du 4 août 2020. (Photo : fournie)
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Publié le Mercredi 02 novembre 2022

Deux ans après l’explosion du port de Beyrouth, la Maison bleue renaît de ses cendres

  • Surnommé «la Maison bleue» en raison de sa couleur bleu vif, le bâtiment de trois étages fait partie d’un tronçon de bord de mer résidentiel construit entre 1860 et 1920
  • En raison de sa proximité avec le port, la Maison bleue fait partie des maisons patrimoniales qui ont été les plus touchées par l’explosion meurtrière du 4 août 2020

BEYROUTH : Surnommé «la Maison bleue» en raison de sa couleur bleu vif, le bâtiment de trois étages fait partie d’un tronçon de bord de mer résidentiel construit entre 1860 et 1920.

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La Maison Bleue en 1890. (Photo : fournie)

Jusqu’aux années 1960, la mer venait caresser les dalles de plus d’une vingtaine de bâtiments patrimoniaux du littoral d’origine avant que le béton ne remplace l’eau pour ériger le troisième bassin du port de Beyrouth. Par son architecture et sa couleur, elle est un point de repère au milieu des édifices modernes érigés autour d’elle, le long de l’avenue portuaire, au cours de ces quarante dernières années.  

En raison de sa proximité avec le port, la Maison bleue fait partie des maisons patrimoniales qui ont été les plus touchées par l’explosion meurtrière du 4 août 2020. En effet, le drame n'a pas épargné ce qui restait du passé glorieux de la capitale libanaise. Plus de six cent cinquante bâtiments historiques ont été endommagés. Certains datent de la période ottomane, d’autres font partie du patrimoine moderne de la ville (1930-1970). Selon la Direction générale des antiquités, pas moins de quatre-vingts bâtiments menaçaient de s’effondrer au lendemain de l’explosion. 

C’est dans ce contexte que de nombreuses initiatives ont vu le jour, au lendemain de l’explosion, dont la Beirut Heritage Initiative (BHI), un collectif indépendant et inclusif lancé par des experts et des architectes en faveur de la restauration du patrimoine bâti et culturel de Beyrouth. Cette initiative vise à fédérer les compétences et l’engagement de tous les acteurs concernés au sein d’une action unifiée, performante et transparente. L’objectif, qui s’inscrit dans l’opération de reconstruction globale de Beyrouth, est de sauver le patrimoine architectural, matériel et immatériel de la capitale libanaise. 

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Le gouvernement ayant montré peu d’intérêt à réhabiliter les bâtiments patrimoniaux détruits, les restaurations ont en grande partie reposé sur des initiatives privées - dont la Beirut Heritage Initiative (BHI). (Photo : fournie)

Le gouvernement ayant montré peu d’intérêt à réhabiliter les bâtiments patrimoniaux détruits, les restaurations ont en grande partie reposé sur des initiatives privées. C’est dans ce cadre que la BHI a approché la fondation Honor-Frost (HFF), une organisation caritative d'archéologie maritime, en 2020, pour collaborer à la restauration de la Maison bleue. Après un appel à projets, les travaux ont commencé en novembre 2021, confiés à la société ACE, sous la supervision de Joe Kallas. Ce dernier est un architecte restaurateur spécialisé dans la documentation 3D des monuments et des sites historiques. Il était soutenu par District Solutions, Awaida for Construction and Engineering, et l’architecte Yasmine el-Majzoub, de l'équipe BHI. 

«La Beirut Heritage Initiative (BHI) a été fondée par des architectes, des experts du patrimoine et des militants qui souhaitaient collecter des fonds pour les bâtiments du patrimoine touchés par l'explosion», explique l'architecte Joy Kanaan, qui travaille pour la BHI, à Arab News en français. «À la fin de l’année 2020, nous avons contacté la fondation Honor-Frost et nous leur avons proposé plusieurs bâtiments qui se trouvaient autrefois sur le rivage – ils avaient donc un lien avec la mer – afin d’obtenir un financement pour la rénovation des édifices et la HFF a sélectionné l'un des deux bâtiments que nous avions proposés», précise-t-elle. Vu l’ampleur des dégâts de la structure, de la façade et des intérieurs dévastés, les travaux sont considérables. Toiture, façade, structure, planchers, dalles, électricité: tout doit être refait. 

Un lieu historique pour abriter le bureau de la fondation Honor-Frost 

«La regrettée Honor Frost a été l'une des pionnières de l'archéologie marine et elle avait un lien particulier avec le Liban. Il est donc normal que l'association ait désormais un bureau à Beyrouth. Le pays a été un site d'exploration clé pour Frost à partir de 1957, quand elle a terminé sa formation avec Frédéric Dumas, le partenaire de plongée de Jacques-Yves Cousteau», déclare Claude Doumit, membre du conseil d’administration de la HFF. Un travail qui a conduit Honor Frost dans les anciens ports de Byblos, Sidon et Tyr, où elle a recherché et documenté les paysages côtiers, l'archéologie portuaire, les processus de formation des sites et les ancres. 

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«Les travaux de restauration sont maintenant terminés. La prochaine phase, selon l'équipe BHI, consiste à meubler la maison en vue de son occupation, au printemps 2023», explique Yasmine el-Majzoub, l’architecte qui a supervisé les travaux pour la BHI. (Photo : Justice Chalfoun). 

Après son décès, la fondation qui porte son nom est lancée. Elle investit plus de 3,3 millions de dollars (1 dollar = 1,01 euro) dans des projets libanais. Parmi ces derniers, citons la création d'un cours d'archéologie sous-marine – le premier du genre – à l'Université américaine de Beyrouth, l'octroi de bourses et du projet du port de Beyrouth, ainsi qu’une étude de la zone portuaire qui offre un aperçu important du paysage culturel maritime de la ville. «Aujourd’hui, la mission que nous nous sommes fixée se poursuit avec la restauration de la Maison bleue», explique Claude Doumit.  

«Cette dernière a été choisie comme le point central du travail de la HFF principalement pour sa position dominante sur l'ancien littoral. Mais elle fournit également un bureau approprié pour l'association caritative au Liban, qui servira à la fois d'espace de travail et d'espace d'exposition occasionnel», précise-t-elle. «Le propriétaire de l'immeuble et sa famille retourneront désormais au dernier étage de la Maison bleue, tandis que la fondation Honor-Frost occupera le premier étage»

Les travaux de restauration comprennent la réinstallation d'un ensemble de trois arches qui formaient la principale baie vitrée donnant sur le port. 

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«Le propriétaire de l'immeuble et sa famille retourneront désormais au dernier étage de la Maison bleue, tandis que la fondation Honor-Frost occupera le premier étage». (Photo : fournie)

«Notre équipe a également rétabli la conception originale de la façade en réutilisant les matériaux trouvés sur place et en employant des techniques artisanales traditionnelles pour préserver l'identité du bâtiment. Parmi les points forts des travaux de restauration figurent les fenêtres, qui ont été rénovées ou reconstruites si nécessaire en bois de cèdre libanais. Des archives historiques ont été consultées pour recréer le design original. Quant aux peintures murales, restées cachées pendant des décennies, elles sont travaillées dans un délicat pochoir bleu. Ces derniers ont été découverts et restaurés dans les halls centraux des premier et deuxième étages», indique Yasmine el-Majzoub, l’architecte qui a supervisé les travaux pour la BHI. 

«Les travaux de restauration sont maintenant terminés. La prochaine phase, consiste à meubler la maison en vue de son occupation, au printemps 2023», ajoute l’architecte. «Nous avons également choisi du mobilier artisanal des marchés aux puces et collaboré avec l’ONG Minjara pour les chambres à coucher en bois », précise-t-elle. «Nous espérons que ce projet de restauration encouragera davantage de personnes à visiter la maison une fois le bureau ouvert parce qu il y aura des expositions et à apprécier le patrimoine», conclut Yasmine el-Majzoub. 


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com