Suspens autour du futur de la modération des contenus sur le Twitter de Musk

Le compte Twitter suspendu de l'ancien président américain Donald Trump est affiché sur un téléphone portable (Photo, AFP).
Le compte Twitter suspendu de l'ancien président américain Donald Trump est affiché sur un téléphone portable (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 03 novembre 2022

Suspens autour du futur de la modération des contenus sur le Twitter de Musk

  • Elon Musk a écarté l'hypothèse que Donald Trump revienne sur Twitter à quelques jours d'élections cruciales aux Etats-Unis
  • Il a relayé une théorie du complot sur l'agression du mari de Nancy Pelosi, la cheffe des démocrates au Congrès

SAN FRANCISCO: Tensions et anxiété règnent dans les échanges entre Elon Musk, le nouveau propriétaire de Twitter, et de nombreux utilisateurs soucieux de comprendre comment il compte donner corps à sa vision de la liberté d'expression sur l'influente plateforme.

Mercredi, le multimilliardaire a assuré que les comptes ayant été suspendus du réseau social ne seraient pas restaurés avant "quelques semaines", le temps de mettre en place un "processus clair".

Il a ainsi écarté l'hypothèse que Donald Trump revienne sur Twitter à quelques jours d'élections cruciales aux Etats-Unis.

L'ancien président américain avait été évincé de la plateforme peu après l'assaut du Capitole en janvier 2021, accusé d'avoir appelé ses partisans à la violence.

Il a depuis affirmé qu'il ne reviendrait jamais sur Twitter après avoir lancé son propre réseau, Truth Social, à l'audience confidentielle. Mais beaucoup estiment qu'il sera tenté de retrouver ses dizaines de millions d'abonnés sur la plateforme qui était au cœur de sa communication politique.

Or Elon Musk avait estimé en mai que ce bannissement constituait "une décision mauvaise moralement et insensée à l'extrême".

L'entrepreneur libertarien défend une vision absolutiste de la liberté d'expression, sa motivation ultime pour cette acquisition à 44 milliards de dollars de la "place publique mondiale".

Depuis jeudi, il souffle le chaud et le froid autour de la mise en pratique, promettant aux uns que le réseau ne deviendra pas invivable, et aux autres que les comptes "suspendus pour des raisons mineures ou douteuses seront libérés de la prison de Twitter".

Signaux mitigés
Elon Musk veut former un conseil de modération des contenus, composé "de représentants aux opinions très divergentes". Il a aussi affirmé avoir discuté avec plusieurs responsables d'associations de défense des droits des minorités sur "comment Twitter continuerait à lutter contre la haine et le harcèlement, et à appliquer son règlement sur l'intégrité des élections".

Mais le "standardiste de la hot line de Twitter", comme il s'est rebaptisé dans son profil, ne semble satisfaire personne.

"Il envoie des signaux mitigés", constate Suzanne Nossel, la directrice de Pen America, une association de défense de la liberté d'expression. "Il est en train de se rendre compte que (la tâche) est plus ardue qu'il ne semble à première vue".

Un collectif de près de 50 associations de défense de la démocratie ou de lutte contre la désinformation a exhorté les 20 plus gros annonceurs sur Twitter (dont Coca-Cola, Google et Disney) à menacer Elon Musk de cesser toute publicité sur le réseau si jamais il "liquidait" la modération de contenus.

General Motors a déjà annoncé suspendre temporairement ses dépenses sur la plateforme.

Plusieurs ONG de défense des minorités, craignant un regain d'abus (harcèlement, racisme, désinformation), appellent de leur côté le nouveau patron à mieux policer l'application.

Pour certains ultra conservateurs, au contraire, la libéralisation ne va pas assez vite. L'éditorialiste Benny Johnson demande ainsi à Elon Musk de licencier des cadres de Twitter qui ont "censuré" certains sujets, s'il veut "restaurer la confiance du public" dans le réseau.

"Être attaqué aussi bien par la gauche que par la droite est un bon signe", a plaisanté le fantasque dirigeant.

Désinformation
"Je pense qu'il est convaincu que les discours des conservateurs sont censurés sur Twitter, alors que les études prouvent que ce n'est pas le cas", remarque Suzanne Nossel.

Elle espère qu'il va revenir sur cette fausse hypothèse et comprendre "pourquoi nous accordons de la valeur à la liberté d'expression", comme la capacité de dialoguer, de persuader et de faire émerger les meilleures idées.

"Quand une place publique d'idée est noyée sous la désinformation, qu'on ne peut plus faire la part du vrai et du faux et que les gens se détachent parce qu'ils ne trouvent pas d'informations valables... alors les bénéfices de la liberté d'expression disparaissent", élabore-t-elle.

Sur le papier, Elon Musk semble en accord avec cette vision.

"Notre but est de faire de Twitter la source d'information la plus fiable sur Terre, quelle que soit l'affiliation politique", a-t-il déclaré mercredi, vantant les mérites de "Birdwatch", un programme de Twitter qui permet d'adosser à des messages disputés du contexte rédigé par des contributeurs indépendants.

La Maison Blanche a ainsi retiré mercredi un tweet qui vantait la hausse des retraites grâce à Joe Biden, alors que la note de contexte rappelait le rôle joué par une loi de 1972 sur les pensions.

Mais dimanche, Elon Musk a relayé une théorie du complot sur l'agression du mari de Nancy Pelosi, la cheffe des démocrates au Congrès. Il a lui-même supprimé son tweet par la suite.


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Short Url
  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Short Url
  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
Short Url
  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".