Israël: tractations et craintes après la victoire de Netanyahu

Un partisan du parti Likud se protège de la pluie avec une bannière électorale représentant son chef, l'ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu, avant un rassemblement électoral dans la ville de Migdal HaEmek, dans le nord d'Israël, le 23 octobre 2022, avant les élections de novembre. (Photo par Menahem KAHANA / AFP)
Un partisan du parti Likud se protège de la pluie avec une bannière électorale représentant son chef, l'ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu, avant un rassemblement électoral dans la ville de Migdal HaEmek, dans le nord d'Israël, le 23 octobre 2022, avant les élections de novembre. (Photo par Menahem KAHANA / AFP)
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Publié le Vendredi 04 novembre 2022

Israël: tractations et craintes après la victoire de Netanyahu

  • Avec 64 sièges, le bloc de droite mené par M. Netanyahu, déchu du pouvoir en juin 2021 après 12 ans de règne continu, est arrivé en tête des législatives de mardi
  • L'annonce, jeudi soir, des résultats des législatives, les 5e en trois ans et demi, est survenue dans un contexte de regain de violences israélo-palestiniennes

JERUSALEM: Vainqueur des législatives, Benjamin Netanyahu a lancé les tractations avec ses alliés ultra-orthodoxes et d'extrême droite en vue de former un gouvernement qui pourrait être le plus à droite de l'histoire d'Israël, suscitant des inquiétudes internationales et locales.

"Où vont-ils?" titre vendredi le Yediot Aharonot, journal le plus vendu en Israël, avec les portraits de Benjamin Netanyahu, inculpé pour corruption, et de la star montante de l'extrême droite, Itamar Ben Gvir.

Avec 64 sièges, le bloc de droite mené par M. Netanyahu, déchu du pouvoir en juin 2021 après 12 ans de règne continu, est arrivé en tête des législatives de mardi.

Son parti, le Likoud, a obtenu 32 sièges, ses alliés ultra-orthodoxes 18 et l'alliance "Sionisme religieux" 14, un record pour l'extrême droite.

"Cela va être un gouvernement sans précédent", prédit dans le Yediot Aharonot la chroniqueuse politique Sima Kadmon. "La plupart des portefeuilles importants seront entre les mains de fanatiques (...) Tout le monde sait que si seulement une fraction de ce qui a été promis est mise en oeuvre, cela va être un pays différent."

En face, le camp "anti-Netanyahu" mené par le Premier ministre sortant Yaïr Lapid (centriste) a obtenu 51 sièges.

En Israël, la montée de l'extrême droite suscite la «peur» de la minorité arabe

Star des dernières élections législatives, l'extrême droite s'apprête à faire une entrée sans précédent dans les arcanes du pouvoir en Israël avec pour but affiché de "renforcer l'identité juive" du pays au grand dam de la minorité arabe dans son viseur.

Il y a deux ans, le parti trublion de l'extrême droite Itamar Ben Gvir n'obtient que 0,42% des voix aux élections. Un an plus tard, le Premier ministre d'alors Benjamin Netanyahu pèse de son influence pour réunir M. Ben Gvir avec un autre ténor de l'extrême droite, Bezalel Smotrich, sous l'étiquette "Sionisme religieux", leur permettant de moissonner 5% des voix.

Aujourd'hui, cette liste s'est imposée comme la troisième force politique d'Israël avec près de 11% des voix, soit un demi-million de votes, un bond lié à la fois à une "droitisation" de la société et des tactiques récentes, estiment des analystes.

"Netanyahu a légitimé l'extrême droite car il avait besoin d'elle pour sa coalition, alors beaucoup d'Israéliens l'ont vue simplement comme une version plus dure de son parti le Likoud", explique à l'AFP Yossi Klein Halevi, chercheur à l'institut Shalom Hartman de Jérusalem.

"Ben Gvir a emprunté le manuel de l'extrême droite européenne, et en particulier celui de Marine Le Pen, afin de changer son image et apparaître comme une figure politique respectable et il a réussi à convaincre de nombreux électeurs qu'il était modéré", souligne M. Klein Halevi.

"Il n'y a pas de doute qu'il est un politicien talentueux (...) mais le fait d'avoir été placé dans un plus grand parti et d'avoir été endossé par Netanyahu a tout changé", renchérit Shlomo Fischer, spécialiste de la droite israélienne.

"Il y a (aussi) assurément un phénomène à long terme qui tient à ce que la société israélienne devient de plus en plus à droite et à certains égards, plus traditionnelle et plus nationaliste d'un point de vue ethnique et religieux", explique-t-il.

Ce nationalisme croît davantage en "périphérie" des grands centres, dans les "classes populaires", et se nourrit aussi du contexte sécuritaire lié au conflit israélo-palestinien, pense-t-il.

Ces élections ont en effet eu lieu sur fond d'un regain de violences et ont été les premières depuis l'embrasement généralisé dans les villes mixtes arabo-juives, à Jérusalem et en Cisjordanie occupée, sur fond de guerre à Gaza, en mai 2021.

«Entrepreneurs du dégoût»

Ce courant d'extrême droite remonte en Israël au rabbin extrémiste Meir Kahane, dont le mouvement Kach a été banni après l'assassinat en 1994 de 29 Palestiniens en train de prier à Hébron, en Cisjordanie occupée, par un de ses sympathisants, Baruch Goldstein.

Itamar Ben Gvir, qui a milité dans Kach, a longtemps eu un portrait de Goldstein dans son salon mais dit avoir pris quelques distances depuis.

Dans son ouvrage "Les émotions contre la démocratie", publié mi-octobre, la sociologue franco-israélienne Eva Illouz estime que le mouvement Kach avait cherché à recentrer le conflit entre Israéliens et Arabes "non plus sur la terre, mais sur les personnes".

"La question des compromis territoriaux a cessé d'être la question essentielle; ce qui importait désormais plus que tout c'était d'instaurer des lois empêchant dans les faits les Arabes d'intégrer la société israélienne et, a fortiori, de s'assimiler à elle", écrit-elle.

Or ce mouvement continue de vivre via des "entrepreneurs du dégoût" pour qui "la présence de non-Juifs dans le corps politique juif compromet la pureté du peuple juif dans son ensemble".

M. Ben Gvir a d'ailleurs fait campagne en taclant la présence d'un parti arabe dans la coalition sortante du centriste Yaïr Lapid.

«Peur»

La perspective de voir l'extrême droite au pouvoir inquiète des Arabes israéliens, descendants des Palestiniens restés sur leur terre à la création d'Israël en 1948 et qui représentent aujourd'hui près de 20% de la population.

"Il y a énormément de frustration à voir Netanyahu former un gouvernement avec Ben Gvir. Les gens ont peur des mesures qu'ils vont mettre en oeuvre (...) et de voir les tensions s'accentuer dans les villes mixtes", explique à l'AFP Jaafar Farah, directeur de Moussawa, une ONG de défense des droits des Arabes israéliens.

"La population se demande comment la réconciliation (entre Juifs et Arabes) sera possible. Il n'y a pas vraiment d'espoir", souligne-t-il.

En Israël, la minorité arabe compte sur des partis à la Knesset, le Parlement. Ces formations ont obtenu mardi au total environ le même nombre de voix que l'extrême droite, un demi-million, mais fait élire moins de députés en raison de divisions internes.

Pour Feda Tabouni, partisane de la formation arabe Hadash/Taal, un constat s'impose après ces élections: "Israël devient de plus en plus raciste, fasciste (...) et cela mènera à plus de violence et d'humiliation".

Compliqués

L'annonce, jeudi soir, des résultats des législatives, les 5e en trois ans et demi, est survenue dans un contexte de regain de violences israélo-palestiniennes.

L'armée israélienne a frappé dans la nuit "des sites militaires" dans la bande de Gaza après des roquettes tirées de cette enclave palestinienne vers Israël. Et jeudi quatre Palestiniens, dont un assaillant, un combattant et un adolescent, ont été tués par les forces israéliennes en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est.

L'enclave de Gaza est sous blocus israélien depuis plus de 15 ans et la Cisjordanie et Jérusalem-Est sont occupés par Israël depuis 1967.

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a exprimé jeudi sa "profonde inquiétude" face à ces violences et appelé à une désescalade.

Conformément à la loi électorale israélienne, les résultats définitifs des législatives seront transmis le 9 novembre au président Isaac Herzog, qui devra ensuite mandater officiellement le candidat ayant reçu le plus de recommandations de la part des partis pour former un gouvernement, vraisemblablement M. Netanyahu.

Ce dernier aura alors 42 jours pour former son équipe.

Selon les médias locaux, il a d'ores et déjà mandaté Yariv Levin, un de ses proches, pour entamer des pourparlers qui pourraient s'annoncer compliqués, avec la formation "Sionisme religieux" notamment.

Le chef de ce parti, Bezalel Smotrich, a indiqué vouloir le ministère de la Défense, et son n.2 Itamar Ben Gvir, celui de la Sécurité publique, deux postes clés à l'avant-scène du conflit israélo-palestinien.

Chez les ultra-orthodoxes, le chef du parti séfarade Shass, Arieh Dery, revigoré par ses onze sièges, lorgne sur les Finances ou l'Intérieur. M. Dery a été reconnu coupable de fraude fiscale en 2021 et avait auparavant été emprisonné pour corruption.

Israël: quatre ans de crise politique

Les principales étapes de la crise politique en Israël, de son début en 2018 aux élections législatives du 1er novembre, cinquième scrutin en moins de quatre ans.

Parlement sans majorité 

Après la démission en novembre 2018 du ministre de la Défense de l'époque, Avigdor Lieberman, chef du parti nationaliste Israël Beitenou (5 députés) opposé à une trêve entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza, le gouvernement Netanyahu ne dispose plus que d'une seule voix de majorité au Parlement. Un mois plus tard, celui-ci est dissous et des élections convoquées.

Aux législatives anticipées du 9 avril 2019, le Likoud (droite) de Benjamin Netanyahu, au pouvoir depuis 2009, et Kahol-Lavan (Bleu-Blanc), alliance centriste menée par l'ancien chef d'état-major de l'armée Benny Gantz, remportent le même nombre de sièges.

Fin mai, devant l'incapacité à former une coalition, le Parlement vote encore sa propre dissolution.

Netanyahu inculpé 

Le 17 septembre, le Likoud et Bleu-Blanc sont de nouveau au coude à coude à l'issue des législatives.

Le 21 novembre, M. Netanyahu est inculpé de corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires distinctes.

Le 11 décembre, après les échecs de MM. Gantz et Netanyahu à former un gouvernement, les députés votent une nouvelle fois la dissolution du Parlement.

Nouvel échec 

Le 2 mars 2020, le Likoud obtient 36 sièges et Bleu-Blanc 33 aux élections.

Le 16, le président Reuven Rivlin charge toutefois M. Gantz de former un gouvernement car il avait rallié davantage d'appuis des autres partis.

N'ayant pas réussi seul, M. Gantz forme à la surprise générale un "gouvernement d'union et d'urgence" avec Benjamin Netanyahu pour faire face à la pandémie de coronavirus.

Le 7 mai, le président charge Benjamin Netanyahu de former le gouvernement d'union, auquel le Parlement accorde sa confiance le 17 mai.

Le 23 décembre, après l'échec de ce gouvernement d'union Netanyahu/Gantz à adopter un budget d'Etat, le Parlement est à nouveau dissous.

Et de 4!

Le 23 mars 2021, le Likoud arrive en tête des nouvelles élections, suivi cette fois par la formation Yesh Atid ("Il y a un futur" en français) de son rival, le centriste Yaïr Lapid.

A la date-butoir du 5 mai, Benjamin Netanyahu échoue à former un gouvernement. Le président charge Yaïr Lapid d'essayer à son tour.

Bennett Premier ministre 

Le 30 mai, le chef de la formation de droite radicale israélienne Yamina, Naftali Bennett, annonce son intention de rejoindre le camp de Yaïr Lapid, qui parvient à réunir une coalition hétéroclite, allant de la droite à la gauche, en comprenant - fait unique - une formation arabe.

Le 13 juin, Benjamin Netanyahu, au pouvoir depuis 15 ans, dont 12 sans discontinuer, est écarté après un vote de confiance du Parlement à cette coalition inédite.

Dans un accord de rotation à la tête du gouvernement, Naftali Bennett devient Premier ministre, tandis que Yaïr Lapid prend la tête de la diplomatie.

Le 4 novembre, le Parlement adopte le budget 2021, le premier voté en trois ans. Le lendemain, le budget 2022 est adopté, une victoire-clé pour la coalition.

La coalition s'écroule 

Le 6 avril 2022, la coalition, tiraillée par des tensions internes, perd sa majorité avec le départ d'une députée du parti de M. Bennett.

Le 20 juin, MM. Bennett et Lapid annoncent la dissolution du Parlement.

Yaïr Lapid assure l'intérim du poste de Premier ministre jusqu'au scrutin fixé au 1er novembre. Naftali Bennett annonce qu'il ne se représentera pas.

Une majorité pour Netanyahu 

Benjamin Netanyahu et ses alliés de droite remportent la majorité des sièges au Parlement à l'issue des législatives du 1er novembre.

Avec 32 sièges pour le Likoud, 18 pour les partis ultra-orthodoxes et 14 pour une alliance d'extrême droite, le bloc de droite a remporté 64 sièges, sur les 120 du Parlement. En face, le bloc de Yaïr Lapid remporte 51 sièges.

"Qui est le maître!" 

Mais M. Netanyahu est conscient que propulser ces personnalités à des postes clés pourrait "endommager" ses relations à l'étranger, estime Shlomo Fischer, du Jewish People Policy Institute à Jérusalem.

"Il ne veut pas que MM. Ben Gvir et Dery mènent la danse", dit l'analyste à l'AFP. "Il est très prudent, il ne veut pas perdre sa légitimité internationale (...) Il pourrait essayer d'élargir sa coalition pour minimiser leur influence".

Alors que M. Ben Gvir multiplie les appels à faire usage de la force contre les Palestiniens et à "montrer qui est le maître" en Israël, les Etats-Unis ont dit, avant l'annonce de la victoire de M. Netanyahu, espérer que "tous les responsables israéliens continueront de partager les valeurs d'une société démocratique et porteuse de tolérance pour toute la société civile, en particulier les groupes minoritaires".

Du temps où il était Premier ministre avant 2021, M. Netanyahu s'était aliéné les alliés historiques d'Israël au sein du parti démocrate du président américain Joe Biden et avait travaillé en étroite collaboration avec l'ex-président républicain Donald Trump.

Le Royaume-Uni a lui aussi invité jeudi, avant l'annonce des résultats définitifs, "tous les partis israéliens à s'abstenir de tout langage incendiaire et à faire preuve de tolérance et de respect envers les groupes minoritaires".


Ukraine : huit morts dans des frappes, Kiev revendique la destruction d'un bombardier russe

Cette photographie distribuée publiée le 19 avril 2024 par le gouverneur du kraï de Stavropol en Russie, Vladimir Vladimirov, montre les restes d'un bombardier stratégique russe à longue portée Tu-22M3 écrasé dans un champ agricole à l'extérieur de Stavropol. (Photo, AFP)
Cette photographie distribuée publiée le 19 avril 2024 par le gouverneur du kraï de Stavropol en Russie, Vladimir Vladimirov, montre les restes d'un bombardier stratégique russe à longue portée Tu-22M3 écrasé dans un champ agricole à l'extérieur de Stavropol. (Photo, AFP)
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  • Moscou a fait état de la mort d'un membre d'équipage dans le crash d'un avion Tupolev-22M3 à la suite d'une défaillance technique, sans mentionner d'implication ukrainienne
  • La Russie bombarde quotidiennement des localités ukrainiennes et Kiev dit éprouver un manque aigu de munitions pour repousser ces attaques

KIEV: Au moins huit personnes, dont des enfants, ont été tuées dans des frappes nocturnes en Ukraine, sur la région de Dnipropetrovsk (centre-est), ont annoncé vendredi les autorités ukrainiennes qui ont revendiqué avoir pour la première fois abattu un bombardier stratégique russe.

Les ministres des Affaires étrangères des Etats du G7 ont dans le même temps pris "l'engagement" de "renforcer" les moyens de défense antiaérienne de l'Ukraine, à l'issue de leur réunion dans le sud de l'Italie. Ils ont par ailleurs exprimé leur "forte préoccupation" à propos de transferts de matériels chinois profitant selon eux à la production militaire russe.

De son côté, Moscou a fait état de la mort d'un membre d'équipage dans le crash d'un avion Tupolev-22M3 à la suite d'une "défaillance technique", sans mentionner d'implication ukrainienne. Les deux pays semblent évoquer le même appareil.

Dans le district ukrainien de Synelnykové, au sud-est de Dnipro, la capitale de la région de Dnipropetrovsk, "plus de dix maisons ont été endommagées" et "six personnes sont mortes", a déclaré le ministre ukrainien de l'Intérieur Igor Klymenko sur Telegram.

Dans la ville de Dnipro, où un immeuble d'habitation de quatre étages et d'autres "infrastructures civiles" ont été touchés, deux personnes ont péri, a-t-il ajouté, prévenant que le bilan risquait de s'alourdir.

Au moins 25 personnes ont été blessées, selon le gouverneur local.

Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba a précisé que "deux enfants", âgés de quatorze et huit ans, figuraient parmi les morts et qu'un troisième, un garçon de six ans, avait été blessé. Différents responsables avaient auparavant fait des déclarations contradictoires sur le nombre des mineurs tués et leur âge.

"Les enfants ne devraient pas être tués par des frappes aériennes dans l'Europe moderne", a lancé M. Kouleba.

Chemins de fer visés

La compagnie publique ukrainienne des chemins de fer Ukrzaliznytsia a dénoncé vendredi "un bombardement massif" de ses infrastructures à Dnipro et dans sa région, faisant état d'une employée tuée et de sept blessés.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a de nouveau appelé ses partenaires à envoyer "des systèmes de défense antiaérienne à l'Ukraine", au lieu de les laisser "stockés dans des entrepôts".

La Russie bombarde quotidiennement des localités ukrainiennes et Kiev dit éprouver un manque aigu de munitions pour repousser ces attaques, tandis que l'aide occidentale se réduit ou arrive en retard.

La Chambre américaine des représentants a annoncé qu'elle voterait samedi sur une enveloppe de 61 milliards de dollars d'aide à l'Ukraine, bloquée depuis des mois.

Au total, la Russie a tiré 22 missiles et 14 drones explosifs sur le territoire ukrainien dans la nuit de jeudi à vendredi, a souligné dans la matinée l'armée de l'air ukrainienne, affirmant avoir abattu 29 de ces engins.

Volodymyr Zelensky a dit avoir rendu visite à des soldats dans la région de Donetsk, dans l'est, où l'armée russe accentue sa pression.

Le président a expliqué avoir inspecté "la construction de fortifications", une des priorités actuelles de l'Ukraine afin de freiner les troupes de Moscou.

"Abattu" en mission de combat

Le commandant de l'armée de l'air ukrainienne Mykola Olechtchouk a affirmé vendredi que ses forces avaient, "pour la première fois", "détruit un bombardier stratégique de longue portée Tu-22M3, porteur de missiles de croisière X-22".

L'Ukraine avait déjà revendiqué la destruction d'un appareil de ce type en août mais il se trouvait au sol et non dans les airs.

Selon le renseignement militaire ukrainien (GUR), il s'agit cette fois d'un avion qui a participé aux bombardements nocturnes et "a été abattu à la suite d'une opération spéciale".

Le GUR assure que cet aéronef, qui effectuait une "mission de combat", est tombé dans la région de Stavropol, dans le sud-ouest de la Russie.

A Moscou, le ministère russe de la Défense n'a pas confirmé que des tirs ukrainiens avaient visé un avion militaire russe mais une source au sein de l'armée a déclaré à l'agence de presse d'Etat TASS qu'un bombardier supersonique Tupolev-22M3 s'était "écrasé dans la région de Stavropol après une mission de combat, en rentrant sur sa base".

L'appareil n'avait pas d'armements à son bord, a assuré cette source.

Le gouverneur de la région de Stavropol a pour sa part fait savoir qu'un Tupolev-22M3 avait fait une chute dans cette zone après un incident "technique" et qu'au moins un membre de son équipage avait perdu la vie.

"Un avion est tombé dans les champs dans le district de Krasnogvardeïski", a écrit Vladimir Vladimirov sur Telegram.

"Selon les données préliminaires, une défaillance technique est à l'origine de l'accident", a-t-il ajouté, sans donner plus de détails.

Deux autres membres de l'équipage de l'appareil ont été retrouvés vivants et les secours cherchent toujours le quatrième, a-t-il précisé.

Le district de Krasnogvardeïski se situe à quelque 300 km de la frontière ukrainienne.

 

 

 


MSF demande des «politiques dignes» face à «l'abandon» des migrants vers les États-Unis

Des migrants de différentes nationalités prient devant les agents anti-émeutes de la Garde nationale du Texas qui empêchent le passage vers leur frontière, comme vu de Ciudad Juarez, État de Chihuahua, Mexique, le 16 avril 2024. (Photo de Herika Martinez / AFP)
Des migrants de différentes nationalités prient devant les agents anti-émeutes de la Garde nationale du Texas qui empêchent le passage vers leur frontière, comme vu de Ciudad Juarez, État de Chihuahua, Mexique, le 16 avril 2024. (Photo de Herika Martinez / AFP)
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  • MSF a présenté un rapport sur «les conséquences médico-humanitaires dévastatrices» des politiques migratoires restrictives en Amérique centrale et au Mexique, ainsi qu'à la frontière sud des États-Unis
  • L'ONG relève «l'usage politique» de la situation des migrants «pour gagner des voix dans des sociétés de plus en plus hostiles face à l'étranger»

MEXICO: L'ONG Médecins sans frontière (MSF) a demandé jeudi à Mexico des "politiques migratoires dignes et sûres" face à la "désespérance et l'abandon" des migrants qui veulent se rendre aux États-Unis.

MSF a présenté un rapport sur "les conséquences médico-humanitaires dévastatrices" des politiques migratoires restrictives en Amérique centrale et au Mexique, ainsi qu'à la frontière sud des États-Unis.

L'ONG relève "l'usage politique" de la situation des migrants "pour gagner des voix dans des sociétés de plus en plus hostiles face à l'étranger", alors que des élections présidentielles ont lieu cette année au Mexique puis aux États-Unis.

"L'année (2023) a été marquée par des chiffres historiques de flux migratoire dans la région, avec plus de 520.000 personnes traversant la forêt du Darien", porte d'entrée en Amérique centrale entre la Colombie et Panama.

Dans son rapport, MSF relève "plus de 67.000 consultations en santé primaire et psychosociale entre le Honduras, le Guatemala et le Mexique en 2023", soit une hausse de 21% par rapport à 2022. Et de 36% concernant les enfants de moins de cinq ans.

Problèmes respiratoires, cutanés, diarrhée, sont les principaux troubles de santé que présentent les migrants.

"J'ai une déchirure à la jambe droite à cause de la traversée de la forêt (du Darien). Ce sont pratiquement huit pays maintenant", a témoigné un migrant vénézuélien, Moises Rojas, 58 ans, rencontré par l'AFP à Ciudad Juarez à la frontière avec les États-Unis.

"Je voyage avec ma fille. Je n'aurais jamais traversé tant de pays. Mais je suis parti car la situation de mon pays est trop critique", a-t-il ajouté.

Les problèmes de santé mentale sont également importants : "Sur quasiment 3.800 consultations au Honduras, Guatemala et au Mexique, 48% ont été principalement diagnostiqués d'un stress aigu, suivi par les cas de dépression (12%), d'anxiété (11%) et  trouble de stress post-traumatique (11%)".

MSF dénonce également "la violence physique et les enlèvements" pratiqués sur les migrants, évoquant "230 cas de violence avec 775 victimes, dont 52% de femmes et 22% d'enfants et d'adolescents".

"Au Guatemala (...) plus de 150 personnes disent être revenus du Mexique à cause des violences subies là-bas", indique MSF.

"Il est urgent que chaque État - qu'il soit d'origine, de transit ou de destination - assume ses responsabilités dans la gestion de cette crise", insiste l'association médicale humanitaire crée en 1971 en France et qui oeuvre dans plus de 70 pays.

Interrogé par l'AFP, le chef-adjoint de la mission MSF Mexique, Camilo Velez, dénonce par exemple les insuffisances de la politique migratoire américaine.

A la frontière, les migrants doivent déposer leur demande de rendez-vous d'asile sur l'application de CBP, le service américain des douanes et de la protection des frontières.

"Nous demandons que le nombre de 1.450 rendez-vous quotidiens augmente", explique-t-il avançant le chiffre de presque 500.000 personnes bloquées l'année dernière à la frontière.


Les États-Unis mettent leur veto à la candidature de la Palestine, largement soutenue, pour une adhésion complète à l'ONU

Les États-Unis mettent leur veto à la candidature de la Palestine, largement soutenue, pour une adhésion complète à l'ONU
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  • Douze membres du Conseil de sécurité ont voté en faveur de la résolution, tandis que le Royaume-Uni et la Suisse se sont abstenus
  • Le représentant du président palestinien Mahmoud Abbas a exprimé devant le Conseil le désir de son peuple de vivre dans la liberté, la sécurité et la paix, «dans un État indépendant»

NEW YORK: Les États-Unis ont mis jeudi leur veto à un projet de résolution élaboré par l'Algérie qui vise à accorder à l'État de Palestine le statut de membre à part entière de l'ONU, bloquant ainsi efficacement la reconnaissance de la Palestine en tant qu'État par le Conseil de sécurité.

Douze membres sur les quinze que compte le conseil ont voté en faveur de la résolution, le Royaume-Uni et la Suisse s'étant abstenus et les États-Unis ayant voté contre. Pour être adoptée, une résolution du conseil doit disposer d’au moins neuf votes favorables et ne recueillir aucun recours au droit de veto des cinq membres permanents du Conseil, à savoir les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, la Russie et la Chine.

Un porte-parole du département d'État américain a déclaré jeudi: «Des actions prématurées à New York, même avec les meilleures intentions du monde, ne permettront pas au peuple palestinien d'accéder au statut d'État.»

«Il existe des questions en suspens sur la capacité du candidat à remplir les critères pour être considéré comme un État. Nous exhortons depuis longtemps l'Autorité palestinienne à entreprendre les réformes nécessaires pour acquérir les critères requis pour la création d'un État.»

«Le Hamas, qui est une organisation terroriste exerçant actuellement son pouvoir et son influence à Gaza, serait partie intégrante de l'État envisagé dans cette résolution. C'est la raison pour laquelle les États-Unis voteront contre cette proposition de résolution du Conseil de sécurité.»

Robert Wood, le représentant adjoint des États-Unis à l'ONU, a également souligné que, en vertu de la législation de son pays, une reconnaissance totale par l'ONU d'un État palestinien entraînerait «l'arrêt du financement de l'ONU, ce qui lie les Américains à leur législation nationale».

Avant une précédente réunion du Conseil de sécurité au cours de ce mois, M. Wood a réaffirmé la position de longue date de Washington selon laquelle l'adhésion pleine et entière des Palestiniens aux Nations unies «est une décision qui devrait être négociée entre Israël et les Palestiniens». Il a poursuivi en ces termes: «Ces derniers doivent parvenir à un accord et c'est ainsi que l'adhésion pleine et entière devrait se concrétiser.»

Le président palestinien, Mahmoud Abbas, a présenté une demande d'adhésion à l'ONU en 2011. Elle n'a pas été examinée par le Conseil de sécurité, mais, l'année suivante, l'Assemblée générale a accordé à l'«État de Palestine» le statut plus retreint d'État observateur non membre.

Le texte concis du projet de résolution proposé par l'Algérie respectait le format habituel des résolutions du Conseil de sécurité. Il préconisait que le ce dernier, après avoir examiné la demande d'adhésion de l'État de Palestine à l'ONU, recommande à l'Assemblée générale d'admettre l'État de Palestine en tant que membre à part entière.

Le vote de jeudi est intervenu après une longue journée de débats de haut niveau dans la salle du Conseil. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a ouvert la réunion en avertissant que le Moyen-Orient était «au bord du précipice» et en appelant à «la plus grande retenue».

Il a ajouté qu'il était «grand temps de mettre fin au cycle sanglant des représailles» et «d'arrêter».

Il a réaffirmé sa condamnation de l'attaque de l'Iran contre Israël cette semaine et de celle de ce dernier contre le consulat iranien à Damas au cours de ce mois.

«À Gaza, sept mois d'opérations militaires israéliennes ont engendré un véritable enfer humanitaire», a souligné Antonio Guterres.

«Des dizaines de milliers de personnes ont été tuées. Deux millions de Palestiniens ont été confrontés à la mort, à la destruction et au refus d'une aide humanitaire vitale. Ils risquent désormais de succomber à la famine.»

«Une opération israélienne à Rafah aggraverait cette catastrophe humanitaire», a-t-il prévenu, faisant référence aux menaces des autorités israéliennes d'une offensive terrestre dans cette ville du sud de Gaza devenue le dernier refuge de plus d'un million de Palestiniens déplacés par les combats dans d'autres parties du territoire.

La fin des hostilités à Gaza contribuerait de manière significative à désamorcer les tensions croissantes dans la région, a ajouté Antonio Guterres, qui a réitéré ses appels à un cessez-le-feu humanitaire immédiat et à la libération de tous les otages détenus dans le territoire.

Ziad Abu-Amr, le représentant du président palestinien, a déclaré que son peuple aspirait à exercer son droit à l'autodétermination et à vivre dans la liberté, la sécurité et la paix «dans un État indépendant semblable aux autres pays du monde».

S'adressant directement aux États-Unis, il a ajouté: «À ceux qui soutiennent que la reconnaissance de l'État palestinien devrait résulter des négociations plutôt que d’une résolution des Nations unies, nous posons à nouveau la question: comment l'État d'Israël a-t-il été créé? Comment a-t-il été reconnu? N'est-ce pas par le biais d'une résolution des Nations unies, à savoir la résolution 181?»

«Il est grand temps pour le Conseil de sécurité d’assumer sa responsabilité historique et de rendre justice au peuple palestinien en adoptant une résolution acceptant la Palestine comme membre à part entière des Nations unies.»

Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman Safadi, a appelé le Conseil de sécurité à «accepter l'État de Palestine en tant que membre à part entière des Nations unies».

Il a ajouté: «Faites-le pour défendre la justice, pour faire triompher la paix, pour rejeter l'injustice, pour dénoncer le mensonge. Ne laissez pas l'avenir de la région entre les mains des éléments les plus extrémistes du gouvernement israélien.»

Le représentant permanent de la Russie auprès des Nations unies, Vassili Nebenzia, a affirmé: «Le minimum que nous sommes tenus de faire, au regard de tous les impératifs moraux, est de répondre à l'aspiration de la Palestine à devenir membre des Nations unies.»

«Nous sommes fermement convaincus que la reconnaissance de la Palestine, sur la base d'un statut équivalent à celui d'Israël, contribuera au règlement à long terme du conflit israélo-palestinien.»

Le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares Bueno, a déclaré que son pays avait rejoint les 139 autres nations qui ont déjà officiellement reconnu l'État de Palestine et qu'il soutenait son admission à l'ONU.

«L'Espagne reconnaîtra l'État de Palestine parce que le peuple palestinien ne peut être condamné à être un peuple de réfugiés», a-t-il lancé. «Cette démarche est également essentielle pour la paix au Moyen-Orient et bénéfique pour la sécurité d'Israël.»

«L'Espagne reconnaîtra un État palestinien parce que ce peuple a le droit à un avenir empreint d'espoir, tout comme le peuple israélien a le droit à un avenir dans la paix et la sécurité après tant de décennies de souffrance.»

Le ministre brésilien des Affaires étrangères, Mauro Vieira, a indiqué aux membres du Conseil que «le moment est venu pour la communauté internationale d'accueillir enfin l'État de Palestine, pleinement souverain et indépendant, en tant que nouveau membre des Nations unies».

L'ambassadeur de Chine aux Nations unies, Fu Cong, a appelé les membres du Conseil à «adopter une attitude responsable à la lumière de l'histoire et à voter en faveur de l'adhésion de la Palestine à la famille des Nations unies en tant que membre à part entière».

Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a fait savoir que l'adhésion de la Palestine à l'ONU en tant que membre à part entière était un «droit historique» et que le fait de ne pas l'accorder prolongerait irrémédiablement le conflit israélo-arabe.

La représentante du Royaume-Uni auprès des Nations unies, Barbara Woodward, a souligné que la reconnaissance d'un État palestinien «ne peut pas intervenir ni au début ni à la fin du processus».

Elle a ajouté: «Depuis longtemps, notre position est que nous reconnaîtrons un État palestinien au moment le plus opportun pour le processus de paix. Ce processus débutera par la résolution de la crise immédiate à Gaza».