Wagner au Mali offre des angles d'attaque aux djihadistes

Si la majorité des 860 civils tués au Mali au premier semestre 2022 ont été victimes des groupes djihadistes, 344, soit 40 %, ont péri lors d'opérations de l'armée, selon l'ONU (Photo, AFP).
Si la majorité des 860 civils tués au Mali au premier semestre 2022 ont été victimes des groupes djihadistes, 344, soit 40 %, ont péri lors d'opérations de l'armée, selon l'ONU (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 10 novembre 2022

Wagner au Mali offre des angles d'attaque aux djihadistes

  • Poussée vers la sortie par les colonels au pouvoir depuis août 2020, la France a achevé le 15 août 2022 son retrait du Mali
  • Parallèlement, les autorités maliennes se sont tournées vers la Russie, et plus particulièrement, selon les pays occidentaux notamment, vers Wagner

DAKAR: Depuis le retrait de l'armée française du Mali, Wagner est devenu la cible étrangère privilégiée de la communication des groupes djihadistes, qui exploitent à fond les exactions envers les civils imputées au groupe paramilitaire russe, selon des experts.

Poussée vers la sortie par les colonels au pouvoir depuis août 2020, la France a achevé le 15 août 2022 son retrait du Mali, plus de neuf ans après le lancement de son intervention contre les groupes djihadistes dans ce pays du Sahel.

Parallèlement, les autorités maliennes se sont tournées vers la Russie, et plus particulièrement, selon les pays occidentaux notamment, vers Wagner. Bamako dément, reconnaissant uniquement le soutien d'"instructeurs" militaires russes.

Mais c'est bien Wagner que le "Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans" (Jnim en arabe), principale coalition affiliée à Al-Qaïda au Sahel, cite nommément ces derniers mois en tête d'affiche de ses communiqués.

"Les opérations de Wagner sont surtout localisées dans le centre du Mali et ciblent principalement la communauté peule, dont le Jnim se présente comme le protecteur. Donc dans cette dynamique, Wagner est vraiment un ennemi du Jnim", explique Héni Nsaibia, chercheur au sein du Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled), spécialisé dans la collecte des données relatives aux conflits.

"Il y a eu beaucoup d'affrontements du Jnim avec les forces armées maliennes et Wagner qui opèrent conjointement", précise-t-il.

"D'une certaine manière, Wagner a remplacé la France comme force étrangère dans le théâtre du conflit, même si les djihadistes ne traitent pas Wagner de 'Croisés' comme les troupes françaises, mais plutôt de mercenaires ou de 'milice criminelle'", dit-il.

«Guerre ethnique»

Le Jnim s'est targué fin octobre d'avoir, grâce à une embuscade dans la région de Bandiagara (centre) contre "l'armée malienne, les mercenaires de Wagner et des miliciens progouvernementaux en guerre ethnique contre les musulmans", restitué à leurs propriétaires le bétail que ceux-ci leur avaient enlevé selon lui.

Depuis des années, "les groupes djihadistes se présentent comme les défenseurs des populations contre l'armée et ses supplétifs qui, selon eux, ne font que tuer les civils", observe Boubacar Haïdara, chercheur au Bonn International Centre For Conflict Studies (BICCS).

Le recours à cet "alibi pour justifier la violence qu'ils exercent", selon lui, leur est facilité par "l'arrivée d'éléments russes", coïncidant avec "des informations sur des exactions de civils qui se répètent et de plus en plus mortelles".

Si la majorité des 860 civils tués au Mali au premier semestre 2022 ont été victimes des groupes djihadistes, 344, soit 40 %, ont péri lors d'opérations de l'armée, selon l'ONU.

"La population juge par rapport aux exactions commises sur les civils", prévient Binta Sidibé Gascon, vice-présidente de l'observatoire Kisal, qui défend les intérêts des populations pastorales. "Or, depuis l'arrivée de Wagner, notamment avec ce qu'il s'est passé à Moura nous assistons à une augmentation exponentielle des victimes civiles".

Quelque 300 civils ont été massacrés en mars dans cette localité du centre par des soldats maliens associés à des combattants étrangers, peut-être russes, selon Human Rights Watch (HRW). L'armée malienne dément, affirmant avoir "neutralisé" plus de 200 djihadistes.

Le principal chef du Jnim dans la région, le prédicateur peul Amadou Koufa, a incriminé Wagner et l'armée malienne dans une rare vidéo en juin, assurant que parmi les tués de Moura ne figuraient "qu'une trentaine de combattants", les autres étant "des innocents".

"Ce qui va accélérer la prise de conscience", estime la responsable de Kisal, "c'est que face à toutes ces exactions sur des civils, aucune reconquête du territoire n'est effective et malheureusement la situation empire : augmentation des déplacés, écoles fermées, crise humanitaire..."

Néanmoins, Boubacar Haïdara constate que "beaucoup parmi la population ne croient pas du tout que ce sont des civils qui sont tués", et se montrent réceptifs au discours officiel de l'armée rejetant "des calomnies françaises pour dénigrer les forces maliennes alors qu'elles +sont en train de faire plus que Barkhane n'a pu faire en neuf ans+".

Faire appel à Wagner s'est révélé un "très mauvais choix" pour les autorités maliennes, avec "une augmentation d'environ 30% des actes terroristes" sur les six derniers mois, a affirmé fin octobre la sous-secrétaire d'Etat américaine Victoria Nuland.

En revanche, Niagalé Bagayoko, présidente de l'African Security Sector Network (ASSN), considère que "si le gouvernement malien attendait un appui de Wagner en matière de guerre informationnelle, de ce point de vue il peut être satisfait des résultats".

"Sur le territoire malien très largement, en tout cas au niveau de la capitale et des réseaux sociaux", poursuit-elle, "ils ont gagné la bataille de l'opinion contre tous les partenaires occidentaux".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.