Privée de RT et Sputnik par l'UE, la Russie poursuit sa guerre de l'information

Le président russe Vladimir Poutine assiste à une cérémonie marquant le 75e anniversaire de l'Agence fédérale médico-biologique à Moscou le 9 novembre 2022. (Photo de Sergei BOBYLYOV / SPUTNIK / AFP)
Le président russe Vladimir Poutine assiste à une cérémonie marquant le 75e anniversaire de l'Agence fédérale médico-biologique à Moscou le 9 novembre 2022. (Photo de Sergei BOBYLYOV / SPUTNIK / AFP)
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Publié le Jeudi 10 novembre 2022

Privée de RT et Sputnik par l'UE, la Russie poursuit sa guerre de l'information

  • «Depuis le début de l'invasion russe en Ukraine et le blocage de RT et Sputnik, il y a une recomposition de l'outil informationnel et d'influence russe à l'étranger»
  • Depuis longtemps, la stratégie «consiste à créer de la confusion en mélangeant du vrai et du faux, en n'hésitant pas à travestir la réalité et en créant des explications simples à des problèmes complexes»

PARIS: Privés des médias RT et Sputnik, bannis par l'UE après l'invasion de l'Ukraine, Moscou n'a pas renoncé à la guerre de l'information sur le Vieux Continent et ailleurs, jouant des failles d'internet et de relais de circonstance, à grand renfort du carnet de chèque.

Une fois n'est pas coutume, l'homme d'affaires russe Evguéni Prigojine, fondateur du groupe de mercenaires Wagner et réputé proche de Vladimir Poutine, s'est vanté lundi de mener des opérations de manipulation en pleine campagne pour les élections de mi-mandat aux Etats- Unis, après des années de dénégations.

"La bataille des narratifs continue, non seulement en Occident, mais aussi en Amérique Latine et en Afrique où le Kremlin est très efficace dans la propagation de ses récits et de sa propagande", explique à l'AFP Katarina Klingova, chercheuse pour le think-tank Globsec, basé à Bratislava.

En Europe, l'ONG belge EU DisinfoLab, spécialisée dans la lutte contre la désinformation, a signalé mi-septembre une opération d'influence très sophistiquée – lancée en mai 2022 et toujours en cours – consistant à créer des dizaines de sites clones d'authentiques médias (dont Bild, 20minutes, Ansa, The Guardian ou RBC Ukraine) en vue de diffuser de faux articles, vidéos et sondages.

Le tout relayé par "des réseaux de pages ou de faux comptes Facebook", et une campagne de publicité sur le réseau social pour un montant avoisinant les 105.000 dollars, affirme l'ONG.

Contournement

S'il reste difficile d'attribuer cette opération à un acteur en particulier, "beaucoup d'éléments pointent en direction d'une implication d'acteurs basés en Russie", affirme EU DisinfoLab, décrivant des narrations toutes "alignées avec la propagande russe".

Début juillet, une porte-parole du gouvernement bulgare a pour sa part accusé la Russie de payer jusqu'à 2.000 euros par mois des personnalités publiques, hommes politiques ou journalistes, pour défendre les intérêts du Kremlin dans le pays.

Dès le mois de mars, l'Union européenne a banni les médias RT et Sputnik, sans parvenir à les empêcher de diffuser du contenu. Ils jouent pour cela avec les interstices d'internet: création de nouveaux noms de domaines, sites miroirs ou en apparence indépendants, reproduisant mot pour mot des contenus de RT, comme l'a récemment relevé l'Institut pour le dialogue stratégique, établi à Londres.

Ils restent en outre accessibles via un simple VPN (réseau privé virtuel) ou sur des plateformes vidéo en ligne, telles qu'Odysee ou Rumble, où l'absence assumée de modération fait la part belle aux théories du complot, radicales et anti-système.

Signalées récemment aux autorités françaises, à qui ce contournement avait manifestement échappé, Odysee et Rumble ont cessé fin octobre de diffuser en France les contenus de RT et Sputnik. Mais ailleurs en Europe, la diffusion se poursuit, a constaté l'AFP.

Ces deux médias ne sont "que la pointe de l'iceberg. Il y a pléthore d'outils et d'acteurs utilisés par le Kremlin dans ses opérations d'influence – de sa vaste machine médiatique aux agences de presse, les ambassades et ses représentants dans le monde entier, les usines à trolls, les hackers, l'Eglise orthodoxe, diverses ONG, etc.", détaille Katarina Klingova.

Semer la confusion

"Depuis le début de l'invasion russe en Ukraine et le blocage de RT et Sputnik, il y a une recomposition de l'outil informationnel et d'influence russe à l'étranger" autour notamment d'une large galaxie de chaînes Telegram, de blogs, de comptes Twitter, Facebook et autres, explique à l'AFP Kevin Limonier, chercheur sur le cyberespace russophone.

"Ce blocage est en outre arrivé trop tard. Ces médias ont réussi à créer des réseaux extrêmement complexes de diffusion de narratifs qui ne dépendent plus nécessairement de l'Etat russe. L'influence russe s'est banalisée et enracinée, notamment au sein d'un certain nombre de cercles anti-systèmes, gilets jaunes, anti-vaccins, etc...".

Depuis longtemps, la stratégie "consiste à créer de la confusion en mélangeant du vrai et du faux, en n'hésitant pas à travestir la réalité et en créant des explications simples à des problèmes complexes", ajoute-t-il.

Elle vise aussi à attiser tensions et faiblesses. Certains observateurs anticipent ainsi des campagnes informationnelles autour des thèmes de l'énergie et du chauffage à l'approche de l'hiver, qui risquent de mettre à rude épreuve le soutien européen vis-à-vis de l'Ukraine en cas de rationnements d'électricité.

"L'arme informationnelle reste un outil à bas coût, comparée aux armes conventionnelles, et peut avoir un impact potentiellement fort. Par exemple dans le cadre d'élections, si vous êtes capables d'influer sur des dirigeants politiques potentiellement désireux de stopper l'aide à l'Ukraine", pointe auprès de l'AFP Brian Liston, analyste chez Recorded Future, société américaine spécialisée en cybersécurité.


L’ancien Premier ministre australien à Netanyahu : « Restez en dehors de notre politique »

L'ancien Premier ministre australien Malcolm Turnbull s'entretient avec Channel 4 News au Royaume-Uni. (Capture d'écran)
L'ancien Premier ministre australien Malcolm Turnbull s'entretient avec Channel 4 News au Royaume-Uni. (Capture d'écran)
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  • Turnbull s’en prend au Premier ministre israélien dans une interview sur Channel 4
  • Les tentatives de Netanyahu de lier le massacre de Bondi à la politique sur la Palestine jugées « contre-productives »

​​​​​​LONDRES : L’ancien Premier ministre australien Malcolm Turnbull a demandé à Benjamin Netanyahu de « rester en dehors de notre politique » après que le dirigeant israélien a établi un lien entre la reconnaissance de la Palestine et la fusillade de masse survenue à Bondi Beach.

Quinze personnes ont été tuées lorsqu’un père et son fils ont ouvert le feu sur des participants célébrant la fête juive de Hanoukka dimanche soir.

Netanyahu a affirmé que la décision de l’Australie de reconnaître l’État palestinien plus tôt cette année avait « jeté de l’huile sur le feu de l’antisémitisme » dans les semaines précédant l’attaque.

Interrogé sur ces propos lors du journal de Channel 4 News au Royaume-Uni, Turnbull a déclaré : « Je dirais respectueusement à “Bibi” Netanyahu : s’il vous plaît, restez en dehors de notre politique.

« Tenir ce type de discours n’aide en rien… et ce n’est pas approprié. »

Turnbull a soutenu la décision du gouvernement de l’actuel Premier ministre australien Anthony Albanese de reconnaître l’État palestinien en août — aux côtés de nombreux autres pays occidentaux — alors que la pression internationale s’intensifiait face à la guerre à Gaza.

Dans un discours prononcé après l’attaque de Bondi, Netanyahu a déclaré : « Il y a quelques mois, j’ai écrit au Premier ministre australien pour lui dire que sa politique jetait de l’huile sur le feu de l’antisémitisme. »

Il a ajouté : « L’antisémitisme est un cancer qui se propage lorsque les dirigeants se taisent. »

Turnbull a rappelé que la grande majorité des pays du monde reconnaissaient la Palestine comme un État et soutenaient une solution à deux États au conflit.

Il a souligné que l’Australie était une société multiculturelle très prospère qui ne pouvait permettre l’importation de conflits étrangers.

« Nous devons veiller à ce que les guerres du Moyen-Orient ou d’ailleurs ne soient pas menées ici », a-t-il déclaré.
« Chercher à les relier, comme l’a fait Netanyahu, n’est pas utile et va exactement à l’encontre de ce que nous voulons accomplir. »

Albanese a également rejeté les propos de Netanyahu lorsqu’on lui a demandé s’il existait un lien entre sa politique sur la Palestine et l’attaque de Bondi.

« L’écrasante majorité du monde considère qu’une solution à deux États est la voie à suivre au Moyen-Orient », a-t-il déclaré aux médias.

« C’est un moment d’unité nationale où nous devons nous rassembler… Nous devons entourer les membres de la communauté juive qui traversent une période extraordinairement difficile. »

Albanese s’est rendu à l’hôpital pour rendre visite à l’homme salué comme un héros pour avoir désarmé l’un des assaillants.

Ahmed Al-Ahmed, commerçant arrivé en Australie depuis la Syrie en 2006, est en convalescence après avoir maîtrisé le tireur.

Albanese a déclaré mardi que les assaillants, Sajid Akram et son fils Naveed, étaient animés par l’idéologie de Daesh.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Attentat de Sydney: le Premier ministre australien rend visite au «héros» de la plage de Bondi

Le Premier ministre australien Anthony Albanese a rendu visite mardi à l'hôpital au "héros" de la plage de Bondi, Ahmed al Ahmed, qui a interrompu la fusillade la plus meurtrière que le pays ait connu depuis des décennies. (AFP)
Le Premier ministre australien Anthony Albanese a rendu visite mardi à l'hôpital au "héros" de la plage de Bondi, Ahmed al Ahmed, qui a interrompu la fusillade la plus meurtrière que le pays ait connu depuis des décennies. (AFP)
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  • Des images montrent Ahmed al Ahmed, un vendeur de fruits, se glisser entre des voitures garées pendant la fusillade, avant d'arracher son fusil à l'un des assaillants
  • Il a rapidement été salué en "héros" par les dirigeants australiens et étrangers, d'Anthony Albanese à Donald Trump

SYDNEY: Le Premier ministre australien Anthony Albanese a rendu visite mardi à l'hôpital au "héros" de la plage de Bondi, Ahmed al Ahmed, qui a interrompu la fusillade la plus meurtrière que le pays ait connu depuis des décennies.

Dimanche soir, alors qu'une foule était rassemblée sur cette plage de Sydney pour la fête juive de Hanouka, un père et son fils ont ouvert le feu pendant une dizaine de minutes, tuant 15 personnes et en blessant 42 autres.

Des images montrent Ahmed al Ahmed, un vendeur de fruits, se glisser entre des voitures garées pendant la fusillade, avant d'arracher son fusil à l'un des assaillants. Il a rapidement été salué en "héros" par les dirigeants australiens et étrangers, d'Anthony Albanese à Donald Trump.

"Il allait s'acheter un café et s’est retrouvé face à des gens qui se faisaient tirer dessus", raconte M. Albanese après une visite au chevet de M. Ahmed.

"Il a décidé d'agir, et son courage est une source d’inspiration pour tous les Australiens."

L'homme a été touché plusieurs fois à l'épaule après s'être battu avec l'un des assaillants. M. Albanese rapporte qu'il devra "subir une nouvelle intervention chirurgicale" mercredi.

"Au moment où nous avons été témoins d'actes maléfiques, il brille comme un exemple de la force de l'humanité", a salué le Premier ministre. "Nous sommes un pays courageux. Ahmed al Ahmed incarne ce que notre pays a de meilleur."

Alité, des tubes dans le nez, M. Ahmed a brièvement remercié en arabe les personnes le soutenant, dans une vidéo qui circule sur les réseaux sociaux mardi matin.

"J'apprécie les efforts de chacun (...). Puisse Allah vous récompenser et vous accorder le bien être", a-t-il déclaré, selon une traduction (en anglais) fournie par la chaîne publique turque TRT World.

Ce père de deux enfants, originaire de Syrie, vit en Australie depuis plus de 10 ans, selon les médias locaux.

Sa mère a déclaré lundi au média australien ABC qu'elle n'avait cessé de "culpabiliser et de pleurer" lorsqu'elle a reçu l'appel lui annonçant que son fils avait été blessé par balle dans "un accident". "Nous prions pour que Dieu le sauve", dit-elle.

Une collecte de fonds en ligne a récolté plus de 1,9 million de dollars australiens (1,1 million d'euros) de dons pour couvrir les frais médicaux de M. Ahmed.


La CPI rejette un appel d'Israël contestant sa compétence

La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. (AFP)
La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. (AFP)
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  • Dans un document de 44 pages publié lundi, les juges ont maintenu leur décision d'enquêter sur des faits survenus dans le territoire palestinien après l'attaque meurtrière du 7 octobre 2023, perpétrée contre Israël par le groupe militant palestinien Hamas
  • Le porte-parole de la diplomatie israélienne Oren Marmorstein a indiqué, dans un message sur X, rejeter la décision, accusant la CPI de "politisation" et de "mépris flagrant des droits souverains des Etats non parties"

LA HAYE: La Cour pénale internationale a rejeté lundi une demande en appel d'Israël qui contestait sa compétence pour enquêter sur des crimes présumés dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre contre le Hamas.

La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant.

Ils sont soupçonnés de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Gaza. Famine, meurtre et persécution font partie des chefs d'accusation.

Dans un document de 44 pages publié lundi, les juges ont maintenu leur décision d'enquêter sur des faits survenus dans le territoire palestinien après l'attaque meurtrière du 7 octobre 2023, perpétrée contre Israël par le groupe militant palestinien Hamas.

Le porte-parole de la diplomatie israélienne Oren Marmorstein a indiqué, dans un message sur X, rejeter la décision, accusant la CPI de "politisation" et de "mépris flagrant des droits souverains des Etats non parties".

La Cour examine actuellement une autre contestation israélienne de sa compétence, en plus d'une demande de récusation du procureur Karim Khan.

Elle a dit non en juillet à une demande d'Israël de rejet des mandats d'arrêts, ainsi qu'à l'appel de cette décision en octobre.

Créée en 2002, la CPI poursuit des individus accusés des pires atrocités tels que les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le génocide.

Israël n'adhère pas au traité de Rome ayant institué la CPI, ce qui ne les empêche pas d'introduire des contestations juridiques auprès de la Cour.

La Cour avait déjà statué en 2021 que sa compétence territoriale s'étendait à Gaza.

Les accusations de génocide commis par Israël envers les Palestiniens dans la bande de Gaza se sont multipliées depuis le début de la guerre, le 7 octobre 2023, après l'attaque du Hamas contre Israël ayant coûté la vie à 1.221 personnes côté israélien, principalement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.

Les représailles israéliennes à Gaza ont depuis fait plus de 70.000 morts, selon les chiffres du ministère de la Santé du territoire palestinien contrôlé par le Hamas, que l'ONU considère comme fiables.

Sous fortes pressions américaines, une trêve fragile est en vigueur depuis le 10 octobre.