80 ans, et maintenant? Biden fête un anniversaire loin d'être seulement symbolique

Reste que désormais, Joe Biden fait son âge: ses cheveux sont plus rares, sa démarche plus raide. (AFP).
Reste que désormais, Joe Biden fait son âge: ses cheveux sont plus rares, sa démarche plus raide. (AFP).
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Publié le Samedi 19 novembre 2022

80 ans, et maintenant? Biden fête un anniversaire loin d'être seulement symbolique

  • Joe Biden accuse indéniablement ses 80 années, et il encaisse avec une résistance incontestable une charge exténuante
  • La Maison Blanche n'a jusqu'ici pas dévoilé de projet particulier de célébration, et prépare plutôt le mariage, samedi, d'une petite-fille de Joe Biden

WASHINGTON : Jamais encore un président américain en exercice n'avait soufflé 80 bougies: Joe Biden fête dimanche un anniversaire loin d'être seulement symbolique, surtout avec son intention, affichée, de se représenter en 2024.

La Maison Blanche n'a jusqu'ici pas dévoilé de projet particulier de célébration, et prépare plutôt le mariage, samedi, d'une petite-fille de Joe Biden.

L'intéressé, lui, prend le parti d'en rire. "Je n'arrive même pas à dire quel âge je vais avoir", a-t-il blagué sur la chaîne MSNBC. "Je n'arrive pas à sortir les mots de la bouche".

Aux questions désormais insistantes sur son âge et sur le manque d'enthousiasme des Américains pour une nouvelle candidature, il répond immanquablement: "Regardez-moi" à l'oeuvre.

Or, pour qui le regarde, deux constats coïncident: Joe Biden accuse indéniablement ses 80 années, et il encaisse avec une résistance incontestable une charge exténuante.

Apte

Il y a un an, un bilan médical poussé n'avait trouvé que quelques maux bénins, concluant qu'il était "apte" à remplir sa fonction.

Cet homme longiligne ne fume pas, ne boit pas, fait du sport, et n'a pas eu de souci de santé majeur depuis une opération du cerveau en 1988.

Une étude publiée en 2020 par l'université de l'Illinois le classe même parmi les "champions du vieillissement", ces personnes qui, pour des raisons socio-économiques, d'hygiène de vie et d'hérédité, vieillissent mieux que la moyenne. Les chercheurs lui attribuaient même une espérance de vie théorique de près de 97 ans...

Reste que désormais, Joe Biden fait son âge: ses cheveux sont plus rares, sa démarche plus raide.

Il s'en va souffler chaque weekend ou presque dans sa maison de famille; et sur certaines photos de famille internationales, avec d'autres dirigeants beaucoup plus jeunes tels que le président français Emmanuel Macron ou le Premier ministre canadien Justin Trudeau, le président américain a des allures de patriarche.

Les statistiques sont implacables: avec le nombre des années augmente le risque de déclin cognitif, de maladie, ou de séquelles après un accident même bénin.

Les moments de confusion et les problèmes d'élocution de cet ancien bègue sont tous répertoriés. Les républicains en font leur miel, à coups de montages vidéo et tweets assassins.

Où est Jackie?

Il y a quelques semaines, la Maison Blanche n'a pas réussi à expliquer pourquoi, pendant un discours, le président s'était adressé à une parlementaire défunte comme si elle était présente dans la salle, en demandant: "où est Jackie?"

Mais au-delà même de l'ambition personnelle de Joe Biden, une puissante dynamique politique pousse à une nouvelle candidature.

C'est en effet l'usage qu'un président américain se représente après un premier mandat. Comme par exemple Ronald Reagan, réélu en 1984 à l'âge de 73 ans, en dépit, déjà, de débats sur son âge.

La candidature d'un président en exercice "économise une primaire coûteuse et contentieuse", analyse Rachel Bitecofer, stratège démocrate, et permet une campagne plus efficace.

Pourtant, dans les sondages, une nette majorité d'Américains rejette l'idée d'une nouvelle candidature.

Une campagne "Don't run Joe"("Ne te présente pas Joe") a été lancée par une association représentant l'aile progressiste du parti démocrate, RootsAction, avec cet argument: "Un président n'est pas le roi de son parti et il n'a aucun droit automatique à la nomination".

Et la question se pose aussi de la capacité d'un président né pendant la Seconde guerre mondiale à mobiliser en 2024 les jeunes électeurs, ce même s'il a pris des initiatives qui leur sont favorables, sur la marijuana ou le financement des études.

Mais qui d'autre pour porter les couleurs du parti démocrate en 2024?

La vice-présidente Kamala Harris est peu populaire, d'autres démocrates en vue tels que le ministre des Transports Pete Buttigieg sont jugés trop inexpérimentés.

"S'il y a une candidature concurrente à celle d'un président en exercice, c'est généralement une tête brûlée, une très forte personnalité (...). Le plus évident ce serait Bernie Sanders", explique Robert Rowland, professeur de communication politique à l'université du Kansas.

Sauf que le sénateur socialiste du Vermont est lui-même "plus vieux que Biden", à 81 ans.

Biden, un optimiste dans la bataille pour «l'âme» de l'Amérique

Il se voit en général, obstiné à défaut d'être flamboyant, optimiste à défaut d'être charismatique, de la "bataille pour l'âme" tourmentée de l'Amérique: Joe Biden, 46e président des Etats-Unis, fête dimanche ses 80 ans.

Cette "bataille", il se décide à la mener en août 2017 après une parade de l'extrême droite dans les rues de Charlottesville (Virginie, sud).

Mais derrière le vocabulaire martial, et même après une campagne pleine de fureur contre Donald Trump, ce centriste acharné, indécrottable modéré, ne rêve que d'armistice.

"Aujourd'hui, ici et maintenant, prenons un nouveau départ", dit Joe Biden lors de son investiture, le 20 janvier 2021 sur les marches du Capitole. Ce même Capitole pris d'assaut, le 6 janvier, par des partisans déchaînés de l'ancien président républicain.

Joe Biden, plus vieux président jamais élu aux Etats-Unis, sait que l'Amérique est hantée par la violence: celle des inégalités sociales et raciales, celle des attaques politiques, celle des morts par overdose et des tueries par armes à feu.

Classe moyenne

Mais il répète, au risque de sonner parfois comme un disque rayé, qu'il n'a "jamais été aussi optimiste".

Une fois investi, Joe Biden ne lance pas de grande loi sur l'avortement, les armes, l'accès au droit de vote, quitte à décevoir cette jeunesse et cette communauté afro-américaine qui lui ont donné leurs voix.

Le président a une autre priorité: réveiller le rêve américain de la prospérité, du droit à la "quête du bonheur" de la Déclaration d'indépendance.

Persuadé que la démocratie se joue aussi dans les fins de mois difficiles, il veut "donner un peu d'air" et de "dignité" à la classe moyenne, à coups de lourdes dépenses sociales et de grands projets d'investissements.

Le président s'adresse à cet électorat inquiet face à la mondialisation, que Donald Trump, milliardaire né dans une famille fortunée, a su en partie séduire.

Joseph "Robinette" Biden Junior martèle qu'il est, lui, un enfant de cette fameuse "Middle class".

Irlandais

Né le 20 novembre 1942 à Scranton, Pennsylvanie (nord-est), le président américain a une lointaine ascendance française, mais préfère revendiquer ses racines irlandaises.

La famille n'est pas pauvre mais son père, entrepreneur, connaît des cahots financiers. Cela fournira à "Joey", aîné de quatre enfants, moult anecdotes pour ses discours.

Tout comme un job de maître-nageur dans un quartier à majorité noire le rendra attentif au sort des Afro-américains, qui joueront un rôle déterminant dans ses succès électoraux.

Joe Biden a coutume de plaisanter que dans son milieu, l'on devenait policier, pompier ou prêtre: "Je n'avais pas les compétences requises, alors me voilà".

Ce sera donc la politique, après des études de droit, et sans aller combattre au Vietnam - Joe Biden a bénéficié de dérogations pour poursuivre ses études, et pour raisons médicales.

Le jeune homme longiligne au large sourire devient en 1972, à 29 ans, sénateur des Etats-Unis pour le parti démocrate.

Drames

Mais un mois après l'élection, sa femme Neilia meurt dans un accident de voiture, avec leur fille encore bébé.

Leurs deux autres enfants, Beau et Hunter, sont blessés, et c'est à l'hôpital que le nouveau sénateur du Delaware prête serment. L'Amérique se souviendra de cette triste image en 2015, quand Joe Biden, ravagé de chagrin, enterre son aîné chéri Beau, mort d'un cancer du cerveau.

Ces tragédies intimes ont façonné un président qui, après une fusillade, après une catastrophe, se fait le "consolateur en chef", distribuant gestes et mots de réconfort.

Son empathie, sa bonhomie, mais aussi ses gaffes deviendront des marques de fabrique pendant ses trente-six années au Sénat, puis ses huit années comme vice-président de Barack Obama.

Il n'a ni le "cool" ni l'aisance oratoire de ce dernier, mais Joe Biden compense en obstination ce qui lui manque en charisme. Enfant, il a corrigé seul un bégaiement en récitant des poésies.

Trois fois, il part à l'assaut de la Maison Blanche. En 1988, la tentative tourne court à cause d'accusations de plagiat. La même année, il est opéré d'anévrismes au cerveau.

Obstination

Joe Biden rebondit, malgré des prises de positions controversées - dont son vote pour la guerre en Irak de 2003.

En 2008, nouvel essai, il devient vice-président.

Quand viendra son tour de choisir, il fera de Kamala Harris la première femme, et la première asiatique et afro-américaine vice-présidente.

Elu sur une promesse de retour à la normale après la pandémie et Donald Trump, Joe Biden se montre, en début de mandat, à la hauteur: l'Amérique vaccine en masse, son économie se remet à rugir, elle "est de retour" sur la scène internationale.

Le président cultive une image d'homme proche des soucis et des plaisirs ordinaires - avec une fortune personnelle se chiffrant tout de même en millions de dollars.

Joe Biden ne goûte ni le clinquant ni les dîners sophistiqués. Il aime la glace - de préférence vanille aux pépites de chocolat - et les voitures - de préférence les Corvette.

Avec sa seconde épouse Jill Biden, soutien indéfectible et mère de sa fille Ashley, il couve un clan recomposé.

Pour ses petits-enfants, il est "Pop", un grand-père affectueux. Pour son fils cadet, il se veut un père compréhensif. Passé tourmenté, anciennes addictions, Hunter Biden est une cible du camp conservateur, qui lui reproche d'avoir entretenu des relations d'affaires jugées douteuses en Ukraine et en Chine.

First Lady

Jill Biden, elle, poursuit son activité de professeure d'université, du jamais-vu pour une First Lady, tout en redonnant à la Maison Blanche l'allure d'un foyer américain parfait: un chien, un chat, une balançoire, des décorations traditionnelles pour Noël et Halloween.

Mais dès qu'il le peut, Joe Biden s'en échappe pour passer le week-end dans sa maison du Delaware. Souvent, il n'en sort que pour aller à la messe.

Ce catholique fervent - néanmoins défenseur du droit à l'avortement - trouve dans la foi un secours contre le désespoir intime et face aux cahots de la présidence, qui se succèdent à partir de l'été 2021.

Il y a d'abord un retrait chaotique d'Afghanistan, puis une poussée historique d'inflation, qui font décrocher durablement sa popularité.

La presse s'interroge de plus en plus sur son âge. La Maison Blanche publie en novembre 2021 un rapport médical détaillé, concluant que le président est "apte" à assurer ses exténuantes fonctions. Mais sa démarche est plus précautionneuse, les soucis d'élocution ressurgissent, il a des moments de confusion.

Joe Biden n'en orchestre pas moins la réponse occidentale face à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, et fait voter de gigantesques réformes, cherchant à positionner l'Amérique en chef de file des démocraties face à une Chine conquérante.

2024

Joe Biden pose ses jalons malgré un Congrès qu'il ne contrôle, les deux premières années, que d'un cheveu. Et en étant confronté à une Cour suprême ultra-conservatrice, héritage de son prédécesseur, qui dynamite en 2022 le droit constitutionnel à l'avortement.

Est-ce la déflagration provoquée par cette décision? Ou l'aversion que suscitent certains candidats radicaux, fidèles à un Donald Trump qui se prétend toujours vainqueur de la présidentielle de 2020? Toujours est-il qu'en novembre 2022, aux élections de mi-mandat, le parti républicain n'inflige pas à Joe Biden la cuisante défaite attendue.

Le président, tout ragaillardi bien qu'il ait perdu le contrôle de l'une des chambres du Congrès, assure alors: "L'avenir ne pourrait pas être plus éclatant" pour l'Amérique. Et pour lui?

Le démocrate a toujours dit avoir l'intention de se représenter en 2024, mais il se donne jusqu'à début 2023 pour décider s'il repart au combat pour sauver "l'âme" de l'Amérique. Ou au moins pour tenir cette promesse toute simple, du pur Joe Biden, faite en mars 2022 devant le Congrès américain.

"Tout ira bien", avait-t-il dit. "We are going to be okay."


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
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  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.


Canada: le libéral Mark Carney donné vainqueur après une campagne centrée sur Trump

Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
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  • Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays
  • Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti

OTTAWA: Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays.

Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens emmenés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d'annexion, ont changé la donne.

A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale dans une aréna de hockey, l'annonce des résultats a provoqué une salve d'applaudissements et des cris enthousiastes.

"Je suis si heureuse", lâche sur place Dorothy Goubault, originaire de la région des Mille Iles en Ontario. "Je suis contente car nous avons quelqu'un qui peut parler à M. Trump à son niveau. M. Trump est un homme d'affaires. M. Carney est un homme d'affaires, et je pense qu'ils peuvent tous les deux se comprendre".

Pour le ministre Steven Guilbeault, "les nombreuses attaques du président Trump sur l'économie canadienne, mais aussi sur notre souveraineté et notre identité même, ont vraiment mobilisé les Canadiens", a-t-il déclaré sur la chaine publique CBC.

Et les électeurs "ont vu que le Premier ministre Carney avait de l'expérience sur la scène mondiale".

Mark Carney n'avait pas encore pris la parole à minuit locales (04H00 GMT), tandis que se poursuivait le dépouillement.

Dans les longues files devant les bureaux de vote toute la journée, les électeurs ont souligné l'importance de ce scrutin, parlant d'élections historiques et déterminantes pour l'avenir de ce pays de 41 millions d'habitants.

- "Chaos" -

À 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l'avenir économique et souverain du pays qu'il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés.

Cet ancien gouverneur de la banque du Canada et de Grande-Bretagne n'a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle pour le Canada.

"Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays", a-t-il prévenu.

"Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump?", a-t-il expliqué pendant la campagne.

Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place.

Mais aussi de développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.

En face, le chef conservateur, qui avait promis des baisses d'impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n'a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux.

Pierre Poilievre aura aussi souffert jusqu'au bout de la proximité, de par son style et certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, selon les analystes.

Au QG des conservateurs à Ottawa, Jason Piche se dit toutefois "surpris" des résultats, "je pensais que ce serait plus serré que ça".

Un peu plus loin, Jean-Guy Bourguignon, homme d'affaires de 59 ans, se dit carrément "très triste". "Est-ce que c'est vraiment ça le pays dans lequel nous voulons vivre?", demande-t-il alors qu'il énumère les politiques des libéraux, qu'il juge liberticides.

Près de 29 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dans ce vaste pays du G7 qui s'étend sur six fuseaux horaires. Et plus de 7,3 millions de personnes avaient voté par anticipation, un record.


Ukraine: Poutine annonce une trêve du 8 au 10 mai, «tentative de «manipulation»» répond Zelensky

Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
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  • Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai
  • Son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation"

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai, à l'occasion de la commémoration de la victoire sur l'Allemagne nazie, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation".

Le président américain Donald Trump exhorte Kiev et Moscou à conclure un cessez-le-feu et un accord de paix, trois ans après le début de l'offensive russe ayant déjà fait des dizaines de milliers de morts civils et militaires.

"A partir de minuit entre le 7 et le 8 mai, et jusqu'à minuit entre le 10 et le 11 mai, la partie russe annonce un cessez-le-feu", a indiqué le Kremlin dans un communiqué. "Pendant cette période, toutes les opérations de combat seront arrêtées".

D'après la présidence russe, Vladimir Poutine a pris cette décision unilatérale "pour des raisons humanitaires" et à l'occasion des célébrations du 80e anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie.

Pour M. Zelensky, au contraire, "il y a désormais une nouvelle tentative de manipulation". "Pour une raison, a-t-il dit dans son adresse quotidienne, tout le monde doit attendre le 8 mai et ne cesser le feu qu'ensuite pour garantir le silence" lors de la parade du 9 mai sur la place Rouge à Moscou.

La Russie commémore le 9 mai cet événement dont Vladimir Poutine a fait un marqueur essentiel de la puissance retrouvée du pays. Les dirigeants d'une vingtaine de pays sont attendus pour un défilé militaire en grande pompe sur la place Rouge à Moscou.

Le Kremlin a dit considérer que l'Ukraine "devrait suivre cet exemple", tout en prévenant que les forces russes "fourniront une réponse adéquate et efficace" en cas de violation de la trêve.

Vladimir Poutine avait déjà déclaré un bref cessez-le-feu de 30 heures les 19 et 20 avril à l'occasion de Pâques. Les deux camps s'étaient ensuite accusés de l'avoir violé, même si une baisse de l'intensité des combats avait été ressentie dans plusieurs secteurs du front.

"Accroître la pression sur la Russie"

La Maison Blanche a soutenu lundi que Donald Trump souhaitait un cessez-le-feu "permanent" en Ukraine et pas seulement une trêve temporaire.

Les Etats-Unis, jusque-là le premier soutien de l'Ukraine, veulent tourner la page aussi vite que possible quitte, craint Kiev, à accepter des dispositions très favorables à Moscou.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a dit dimanche à son homologue russe, Sergueï Lavrov, qu'il était temps de mettre fin à une "guerre insensée" en Ukraine, selon un communiqué lundi.

De son côté, le président français Emmanuel Macron a affirmé que "dans les huit à dix jours prochains, nous allons accroître la pression sur la Russie", dans un entretien publié par le magazine Paris Match.

Il a estimé avoir "convaincu les Américains de la possibilité d’une escalade des menaces, et potentiellement de sanctions" contre Moscou.

Conditions maximalistes de Poutine 

La Russie maintient des conditions maximalistes concernant l'Ukraine, dont elle veut la reddition et le renoncement à rejoindre l'Otan, tout en s'assurant de pouvoir garder les territoires ukrainiens annexés.

La reconnaissance internationale de l'annexion russe de la Crimée et de quatre autres régions ukrainiennes est une condition "impérative" à la paix, a encore martelé lundi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.

La Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014, ce que la communauté internationale, Etats-Unis compris, n'a jamais reconnu.

En septembre 2022, quelques mois après le déclenchement de son assaut à grande échelle, elle a aussi revendiqué l'annexion de quatre régions ukrainiennes qu'elle occupe partiellement, celles de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia.

La Russie, qui a l'avantage sur le front, a revendiqué lundi la prise de Kamyanka, un village de la région de Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine.

La Corée du Nord a pour la première fois reconnu lundi avoir envoyé des troupes en Russie et qu'elles avaient aidé Moscou à reprendre aux Ukrainiens les zones de la région de Koursk dont ils s'étaient emparés.

Trois personnes ont par ailleurs été tuées lundi dans une attaque russe contre un village de la région de Donetsk (est), selon les services du procureur régional.