Des millions d'Ukrainiens toujours privés de courant après des frappes russes

Cette photographie prise mercredi montre la ville d'Odessa, dans le sud de l'Ukraine, lors de pannes de courant, à la suite d'attaques russes. (Photo, AFP)
Cette photographie prise mercredi montre la ville d'Odessa, dans le sud de l'Ukraine, lors de pannes de courant, à la suite d'attaques russes. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 24 novembre 2022

Des millions d'Ukrainiens toujours privés de courant après des frappes russes

Cette photographie prise mercredi montre la ville d'Odessa, dans le sud de l'Ukraine, lors de pannes de courant, à la suite d'attaques russes. (Photo, AFP)
  • A Kiev, frappée par une pluie glaciale qui tombait sur la neige, environ 70% de la population restait privée de courant jeudi matin, selon la mairie
  • Moscou a annoncé jeudi avoir distribué des passeports russes à plus de 80 000 habitants de ces quatre territoires ukrainiens, faisant d'eux des «citoyens de la Fédération de Russie»

KIEV: L'Ukraine, notamment sa capitale Kiev, était largement privée d'électricité et d'eau courante jeudi, au lendemain de nouvelles frappes massives de la Russie visant spécifiquement l'infrastructure énergétique, une stratégie qualifiée de "crimes de guerre" par les alliés occidentaux au moment où l'hiver s'installe. 

Neuf mois jour pour jour après le début de l'invasion russe, des millions d'Ukrainiens passeront la journée sans électricité et dans le froid. 

A Kiev, frappée par une pluie glaciale qui tombait sur la neige, environ 70% de la population restait privée de courant jeudi matin, selon la mairie. 

L'approvisionnement en eau a été rétabli en début d'après-midi, selon la mairie, alors que les températures dépassaient à peine zéro degrés. 

De son côté, le ministère russe de la Défense a affirmé que ses bombardements n'avaient pas visé Kiev, accusant la défense antiaérienne ukrainienne d'être responsable des dommages dans la capitale. 

A Kharkiv, deuxième ville du pays à la frontière avec la Russie, "des problèmes d'approvisionnement d'électricité" perduraient, a notamment indiqué dans la matinée le gouverneur Oleg Synegoubov. 

Le reste de l'Ukraine était également largement affecté par les coupures mais la reconnexion des infrastructures critiques au réseau se poursuivait graduellement. 

La présidence ukrainienne a annoncé l'ouverture de quelque 4 000 de points de chauffage à travers le pays. 

« Crime contre l'humanité » 

"Ce ciblage systématique de la population à l'approche de l'hiver traduit une volonté claire de la Russie de faire souffrir le peuple ukrainien, de le priver d'eau, de chauffage et d'électricité pour saper sa résilience", a déclaré la diplomatie française. "Ces actes constituent à l’évidence des crimes de guerre", a-t-elle ajouté dans un communiqué. 

Intervenant par visioconférence devant le Conseil de Sécurité de l'ONU, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dénoncé pour sa part mercredi un "crime contre l'humanité" car "avec des températures en dessous de zéro, plusieurs millions de gens (se retrouvent) sans fourniture d'énergie, sans chauffage et sans eau". 

Les trois centrales nucléaires sous contrôle de Kiev ont pu être reconnectées et devaient dans la soirée de nouveau alimenter les foyers privés de courant, mais aussi les systèmes de distribution d'eau. 

Ces centrales avaient été déconnectées par leur système de protection automatique à la suite des frappes russes. 

"S'il n'y a pas de nouvelles frappes, nous allons pouvoir réduire considérablement le manque (d'électricité) dans le système énergétique d'ici la fin de la journée", a estimé le ministre de l'Energie, Guerman Galouchtchenko, qualifiant la situation de toujours "difficile". 

Selon le ministère de l'Energie, ces frappes ont laissé mercredi sans électricité "la grande majorité des consommateurs" du pays qui comptait environ 40 millions d'habitants avant le début de l'invasion russe le 24 février. 

La Russie a tiré mercredi environ 70 missiles de croisière sur l'Ukraine, dont 51 ont été abattus, selon Kiev. Ces frappes ont visé des infrastructures énergétiques clé, déjà endommagées par plusieurs vagues de bombardements de ce type. 

Au total "huit installations énergétiques" ont été touchées, a dit le procureur général ukrainien Andriï Kostine, ajoutant que dix personnes avaient été tuées et 50 autres blessés. 

Le renseignement militaire de l'Ukraine a estimé jeudi sur Telegram que la Russie avait "besoin d'environ une semaine" pour préparer une nouvelle frappe massive. 

Confrontée à des revers militaires en série qui l'ont forcée cet automne à d'humiliantes retraites dans le nord-est et le sud de l'Ukraine, la Russie a opté mi-octobre pour des bombardements des installations énergétiques de son voisin, au moment où l'hiver s'installe. 

Varsovie propose ses Patriot 

Dans ce contexte, le ministre polonais de la Défense a proposé que l'Allemagne transfère à l'Ukraine le système de défense anti-aérienne Patriot qu'elle a offert à la Pologne après qu'un missile a fait deux morts sur son territoire la semaine dernière lors d'une vague de frappes russes. 

"Cela permettra de protéger l'Ukraine contre de nouvelles pertes et des coupures d'électricité, et renforcera la sécurité à notre frontière orientale", a déclaré mercredi soir Mariusz Blaszczak sur Twitter. 

La Russie a pour sa part intimé à l'Ukraine de céder à ses revendications. 

"La direction  de l'Ukraine (...) a la possibilité de régler la situation en satisfaisant toutes les exigences de la partie russe, et de mettre fin aux possibles souffrances de la population civile", a répété jeudi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov. 

La Russie justifie sa guerre par la nécessité de "dénazifier" et de "démilitariser" l'Ukraine qu'elle accuse de réprimer les populations russophones. Moscou a aussi revendiqué fin septembre l'annexion de quatre régions ukrainiennes qui sont sous contrôle russe partiel. 

Moscou a annoncé jeudi avoir distribué des passeports russes à plus de 80 000 habitants de ces quatre territoires ukrainiens, faisant d'eux des "citoyens de la Fédération de Russie". 

Le procureur général d'Ukraine a de son côté indiqué que depuis la reconquête le 11 novembre du nord de la région de Kherson, "neuf sites de torture ont été découverts" ainsi que "les corps de 432 civils tués", sans détailler les causes de ces décès. 

Autre conséquence directe des frappes russes, la Moldavie, déjà en proie à d'importants problèmes énergétiques causés par la guerre en Ukraine, a également été mercredi la victime de pannes d'électricité massives. La situation s'était largement normalisée jeudi. 

Le ministère moldave des Affaires étrangères a annoncé jeudi la convocation de l'ambassadeur russe pour protester contre ces "bombardements brutaux" qui "ont des conséquences dramatiques" en Moldavie, ex-république soviétique voisine de l'Ukraine et dirigée par un gouvernement pro-occidental. 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.