«Tout augmente, sauf les salaires»: les Ethiopiens face à une inflation galopante

Des personnes marchent dans une allée d'un marché de la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 23 juin 2022. (Photo par Eduardo Soteras / AFP)
Des personnes marchent dans une allée d'un marché de la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 23 juin 2022. (Photo par Eduardo Soteras / AFP)
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Publié le Dimanche 11 décembre 2022

«Tout augmente, sauf les salaires»: les Ethiopiens face à une inflation galopante

  • Economie parmi les plus dynamiques au monde durant la décennie 2010, l'Ethiopie a vu sa croissance enrayée par la pandémie de Covid-19, les calamités climatiques, le conflit au Tigré et l'onde de choc mondiale de la guerre en Ukraine
  • Le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique souffre, entre autres maux, d'une inflation galopante qui, selon les statistiques officielles, devrait dépasser 30% en moyenne annuelle en 2022, tirée par les prix alimentaires

ADDIS ABEBA : «Tous les prix augmentent, mais pas notre salaire», résume Zerihun, porteur de marchandises sur le tentaculaire marché du Merkato, à Addis Abeba. Un constat que partagent une majorité d'Ethiopiens face à une économie en crise.

Economie parmi les plus dynamiques au monde durant la décennie 2010, l'Ethiopie a vu sa croissance enrayée par la pandémie de Covid-19, les calamités climatiques, le conflit au Tigré qui a dévasté le nord du pays depuis 2020 et l'onde de choc mondiale de la guerre en Ukraine.

Le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique souffre, entre autres maux, d'une inflation galopante qui, selon les statistiques officielles, devrait dépasser 30% en moyenne annuelle en 2022 (après plus de 26% en 2021), tirée par les prix alimentaires.

«Légumes, alimentation, loyers, tout a augmenté», énumère Zerihun, 30 ans et père de deux enfants, qui charge et décharge des camions au Merkato, considéré comme le plus vaste marché à ciel ouvert d'Afrique.

«On travaille, mais le coût de la vie rend l'existence très difficile», confirme son collègue Sintayeh Tadelle, 29 ans, qui a deux fils de 12 et 6 ans et «aucune économie».

Quand on lui demande comment il s'en sort, ce costaud au verbe haut répond: «Dieu nous aide». La municipalité d'Addis Abeba aussi, qui «fournit uniforme et livres scolaires, ainsi que les repas» à la cantine: «Sans cela, je ne sais pas comment je pourrais survivre».

Les manutentionnnaires du Merkato gagnent 5 birr (8 centimes d'euro) par caisse chargée ou déchargée. Les bons jours, ils gagnent un peu plus de 5 euros.

«L'économie est ralentie, il y a moins de travail» sur le marché «et donc je gagne moins», constate Zirehun.

- «C'est moins animé» -

Encombrées d'étals ou des marchandises de toutes sortes, les rues du Merkato grouillent d'acheteurs, vendeurs, rabatteurs et tâcherons surchargés.

Mais selon les habitués de ce marché aux milliers de commerces où l'on trouve de tout - des vêtements aux matériaux de construction et machines industrielles, en passant par l'électronique et l'électroménager - l'activité a baissé.

«Dans tous les secteurs du marché, les gens disent la même chose: c'est moins animé», constate Hamat Redi, 26 ans qui vend lave-linge et téléviseurs, essentiellement chinois.

Dans son échoppe, «il y a 5-6 mois, les affaires étaient correctes, mais actuellement c'est très morose», poursuit-elle: «Avec l'inflation, les gens ne veulent pas dépenser dans des biens de luxe», que sont ses produits en Ethiopie.

Un peu plus loin, outre l'absence de clients, Sisai Desalegn se plaint du manque de dollars pour pouvoir importer ses équipements de sonorisation et panneaux solaires.

«On n'obtient pas assez de devises de la part des banques», en raison d'une pénurie qui s'est aggravée, explique ce trentenaire dont l'activité a baissé de 40% en deux ans.

«Il y a peu d'acheteurs (...) on ne fait pas de profit et on vend au prix d'achat», assure ce père de deux enfants qui, pour s'en sortir, diminue ses dépenses quotidiennes.

«C'est très difficile de faire avec ce que l'on a», souligne-t-il, «on n'arrête pas tout complètement, mais on réduit les montants ou la fréquence» de ce qui n'est pas indispensable.

- Multiples causes -

Ceux interrogés au Merkato imputent la situation économique à la guerre qui a ravagé le nord du pays pendant deux ans.

La fin des échanges avec le nord, c'est moins de camions à charger ou décharger, expliquent Zerihun et Sintayeh. Et Sisa Desalegn ne voit plus ses clients commerçants ou agriculteurs de régions du nord.

Le conflit a grevé les finances du gouvernement et durement touché des secteurs comme l'agriculture et l'industrie.

En faisant fuir investeurs et partenaires étrangers, il a aussi contribué à l'assèchement des devises d'un pays ultra-importateur.

Zerihun «espère que l'accord de paix» signé le 2 novembre entre le gouvernement et les rebelles du Tigré «va améliorer la situation».

Mais le conflit n'a fait qu'aggraver une crise déjà amorcée avec la pandémie de Covid-19. La croissance - 9,7% en moyenne entre 2010 et 2018 - avait sérieusement ralenti dès 2020 tombant à 6,1% contre 9% l'année précédente. En 2022, elle tombera sous les 4% contre 6,3% en 2021, selon le FMI.

Dans un pays rural à 75%, les aléas climatiques - notamment la sécheresse qui ravage la Corne de l'Afrique - ont aussi pesé sur l'agriculture (un tiers du PIB), contribuant à l'explosion des prix alimentaires.

Quelles que soient les raisons, «à la fin, tout cela affecte les gens aux faibles revenus comme nous», ne peut que constater Zehirun.


Les pays riches doivent 500 milliards de dollars par an de dette morale aux pays pauvres, affirme Esther Duflo

L'économiste franco-américaine et co-lauréate du prix Nobel 2019 de sciences économiques, Esther Duflo, pose lors d'une séance photo à Paris le 20 juin 2023. (Photo, AFP)
L'économiste franco-américaine et co-lauréate du prix Nobel 2019 de sciences économiques, Esther Duflo, pose lors d'une séance photo à Paris le 20 juin 2023. (Photo, AFP)
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  • Les pays du G7 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni), soit 10% de la population de la planète, émettent environ 25% du CO2 lié au système énergétique mondial
  • Esther Duflo se base sur les travaux de l'économiste américain Michael Greenstone qui, en partant d'une valeur monétaire donnée pour une année de vie et de l'effet du réchauffement climatique sur l'augmentation de la mortalité, évalue à 37 dollars le coût

PARIS: Les pays riches doivent 500 milliards de dollars par an de "dette morale" aux pays pauvres, évalue la prix Nobel d'économie Esther Duflo, qui propose de faire assumer aux pays développés la responsabilité du réchauffement climatique à travers deux taxes.

"C'est ce que j'appelle une dette morale. Ce n'est pas ce que cela coûterait de s'adapter; ce n'est pas ce que cela coûterait d'atténuer. C'est ce que nous devons", a détaillé l'économiste dans un entretien au Financial Times lundi, se basant surtout sur l'effet du réchauffement climatique sur la mortalité dans les pays pauvres.

"Il y aura des dégâts énormes", poursuit Mme Duflo qui se base une étude menée par le Global Impact Lab en 2020 ayant montré que le nombre de décès liés à la chaleur risquait de bondir dans les pays pauvres d'ici à la fin du siècle.

"Ces dégâts seront concentrés dans les pays pauvres en dehors de l'OCDE", ajoute-t-elle, pointant la responsabilité des pays riches sur le changement climatique.

Les pays du G7 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni), soit 10% de la population de la planète, émettent environ 25% du CO2 lié au système énergétique mondial, selon l'AIE.

Esther Duflo se base sur les travaux de l'économiste américain Michael Greenstone qui, en partant d'une valeur monétaire donnée pour une année de vie et de l'effet du réchauffement climatique sur l'augmentation de la mortalité, évalue à 37 dollars le coût d'une tonne de carbone. Multiplié par la quantité d'émissions annuelles attribuables à l'Europe et aux Etats-Unis, 14 milliards de tonnes de CO2 équivalent, le prix de la "dette morale" monte alors à 518 milliards, soutient Mme Duflo.

Pour la financer, elle propose d'augmenter le taux minimal d'imposition des multinationales et de taxer les grandes fortunes, deux mécanismes qui permettraient selon elle de couvrir l'enveloppe annuelle.

L'aide financière climatique due par les pays riches aux pays en développement est fixée actuellement à 100 milliards de dollars par an. La COP29, en novembre à Bakou, doit établir le nouveau montant au-delà de 2025.

Le futur objectif, crucial pour renouer la confiance entre le Nord et le Sud, restera quoi qu'il arrive très en-deçà des besoins: les pays en développement (hors Chine) ont besoin de 2.400 milliards de dollars par an d'ici 2030 pour financer leur transition et s'adapter au changement climatique, selon un calcul d'experts de l'ONU.

En parallèle, de multiples pistes sont au coeur des négociations internationales pour trouver comment combler l'écart, parmi lesquelles l'allègement de la dette des pays pauvres ou des innovations financières via de nouvelles taxes internationales.

 

 


L'Asie paye le prix fort aux aléas climatiques

Des habitants traversent les eaux de crue après avoir été évacués d’une zone inondée suite à de fortes pluies dans la ville de Qingyuan, dans la province méridionale du Guangdong en Chine. (AFP)
Des habitants traversent les eaux de crue après avoir été évacués d’une zone inondée suite à de fortes pluies dans la ville de Qingyuan, dans la province méridionale du Guangdong en Chine. (AFP)
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  • L'année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée dans le monde. Et en Asie l'impact des vagues de chaleur devient de plus en plus sévère
  • L'Asie se réchauffe plus rapidement que la moyenne mondiale, avec des températures l'année dernière de près de deux degrés Celsius supérieures à la moyenne de 1961 à 1990

GENEVE: L'Asie a été "la région du monde la plus touchée par les catastrophes" liées à la météo en 2023, inondations et tempêtes ayant fait le plus de victimes et de pertes économiques, indique l'ONU mardi.

"Le changement climatique a exacerbé la fréquence et la gravité de tels événements, impactant profondément les sociétés, les économies et, plus important encore, les vies humaines et l'environnement dans lequel nous vivons", a déclaré Celeste Saulo, directrice de l'Organisation mondiale de la météorologie (OMM) dans un communiqué.

L'année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée dans le monde. Et en Asie l'impact des vagues de chaleur devient de plus en plus sévère, souligne l'OMM, ajoutant que la fonte des glaciers -notamment dans la chaîne de l'Himalaya- menace la sécurité hydrique de la région.

En outre, l'Asie se réchauffe plus rapidement que la moyenne mondiale, avec des températures l'année dernière de près de deux degrés Celsius supérieures à la moyenne de 1961 à 1990.

"Les conclusions du rapport donnent à réfléchir", a déclaré la cheffe de l'OMM.

"De nombreux pays de la région ont connu en 2023 leur année la plus chaude jamais enregistrée, accompagnée d'une série de conditions extrêmes, allant des sécheresses et des vagues de chaleur aux inondations et aux tempêtes", souligne le rapport.

Le rapport sur l'état du climat en Asie 2023 souligne l'accélération du rythme des principaux indicateurs du changement climatique tels que la température de surface, le retrait des glaciers et l'élévation du niveau de la mer, affirmant qu'ils auraient de graves répercussions sur les sociétés, les économies et les écosystèmes de la région.


Alistithmar Capital et Ezdihar Real Estate s'associent pour lancer un fonds de développement immobilier de 293 millions de dollars

Khalid bin Abdulaziz Al-Rayes , PDG d'Investment Capital, et Abdul Mohsen bin Fawaz Al Hokair, PDG d'Izdihar Real Estate Development Co. (Fournie)
Khalid bin Abdulaziz Al-Rayes , PDG d'Investment Capital, et Abdul Mohsen bin Fawaz Al Hokair, PDG d'Izdihar Real Estate Development Co. (Fournie)
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  • 'objectif est de stimuler la croissance du capital des investisseurs immobiliers
  • e partenariat avec Ezdihar vise à poursuivre des objectifs communs dans le domaine de l'immobilier et à offrir aux investisseurs des opportunités adaptées à leurs objectifs

RIYADH : La société saoudienne Alistithmar Capital s'associe à Ezdihar Real Estate Development Co pour créer un fonds immobilier de 1,1 milliard de SR (293 millions de dollars), ce qui profitera au paysage commercial et de bureaux de Riyad.

Dans un communiqué, Alistithmar Capital, la filiale d'investissement de la Saudi Investment Bank, a annoncé que l'objectif est de stimuler la croissance du capital des investisseurs en obtenant des droits d'usufruit sur une parcelle de 103 000 m² dans les locaux de l'Université du Roi Saoud sur la route Prince Turki Al-Awwal à Riyad, afin de développer le terrain en un complexe de bureaux commerciaux générant des revenus.

Le PDG de la société, Khalid Al-Rayes, a déclaré que le partenariat avec Ezdihar vise à poursuivre des objectifs communs dans le domaine de l'immobilier et à offrir aux investisseurs des opportunités adaptées à leurs objectifs et à l'évolution du paysage immobilier.

Il a ajouté que son organisation se consacre à offrir des perspectives d'investissement de haute qualité aux investisseurs immobiliers grâce à des fonds méticuleusement structurés et adaptés aux exigences de chaque projet. Cette approche garantit des avantages maximaux et des retours sur investissement optimaux.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com