Manifestations et critiques internationales après la condamnation du maire d'Istanbul

Les partisans du maire d'Istanbul, Ekrem Imamoglu, brandissent des drapeaux alors qu'ils se rassemblent devant la municipalité métropolitaine d'Istanbul lors d'une manifestation, le 14 décembre 2022. (Photo, AFP)
Les partisans du maire d'Istanbul, Ekrem Imamoglu, brandissent des drapeaux alors qu'ils se rassemblent devant la municipalité métropolitaine d'Istanbul lors d'une manifestation, le 14 décembre 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 20 juin 2023

Manifestations et critiques internationales après la condamnation du maire d'Istanbul

Les partisans du maire d'Istanbul, Ekrem Imamoglu, brandissent des drapeaux alors qu'ils se rassemblent devant la municipalité métropolitaine d'Istanbul lors d'une manifestation, le 14 décembre 2022. (Photo, AFP)
  • Ekrem Imamoglu, condamné mercredi à deux ans et sept mois de prison et à la suspension de ses activités politiques pour une durée équivalente, s'est adressé à la foule compacte, massée sous la pluie, devant le siège de la municipalité
  • Kemal Kilicdaroglu, patron du CHP, considéré comme le probable candidat commun de l'opposition, a dénoncé «un coup porté à la nation par la justice» et promis de «ne pas céder d'un millimètre».

ISTANBUL: La condamnation du maire d'Istanbul, rival potentiel du président Recep Tayyip Erdogan pour les élections de 2023, a provoqué des manifestations de l'opposition turque et des critiques internationales, Washington en tête. 

Plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont réunies jeudi à Istanbul en présence de tous les leaders de l'opposition turque pour soutenir Ekrem Imamoglu, condamné la veille à deux ans et sept mois de prison et à la suspension de ses activités politiques pour une durée équivalente. 

Sous la pluie, M. Imamoglu, 52 ans et également membre du CHP, la principale formation de l'opposition et étoile montante de la vie politique turque, s'est adressé à la foule compacte massée devant le siège de la municipalité. 

"Ils ont effacé vos votes!" a-t-il lancé devant une marée de drapeaux rouges de la Turquie. "Ce n'est pas mon procès mais le procès de la justice et de l'équité", a insisté l'élu, assurant n'avoir "absolument pas peur de cette décision illégitime". 

"Je n'ai pas de juges pour me protéger mais j'ai 16 millions de Stambouliotes et notre nation derrière moi", a-t-il enchainé, avant de conclure "Tout ira bien!" - le slogan de sa campagne victorieuse pour la mairie en 2019. 

C'est la première fois que les six partis d'opposition se retrouvent ainsi en meeting public depuis le lancement de leur plateforme commune pour affronter le président Recep Tayyip Erdogan lors des élections présidentielles et parlementaires en 2023. 

Kemal Kilicdaroglu, patron du CHP, considéré comme le probable candidat commun de l'opposition, a dénoncé "un coup porté à la nation par la justice" et promis de "ne pas céder d'un millimètre". 

Un rassemblement de plusieurs centaines de personnes, selon la presse turque, s'est tenu simultanément à Trabzon (nord-est), la ville natale du maire sur la Mer noire. 

M. Imamoglu est lui aussi vu comme un candidat sérieux pour l'opposition, après avoir ravi la plus riche et la principale ville de Turquie au parti de M. Erdogan, l'AKP, en mai 2919. 

Il était accusé d'avoir "insulté" les membres du collège électoral - traités "d'idiots" - qui avaient invalidé sa victoire, avant qu'un nouveau scrutin ne le confirme avec éclat trois mois plus tard. 

Condamnation « disproportionnée » 

L'édile, qui a assuré n'avoir fait que "retourner" l'insulte au ministre de l'Intérieur qui avait, selon lui, employé ce terme, a annoncé son intention de faire appel. 

M. Erdogan, au pouvoir depuis près de 20 ans, a annoncé sa candidature à sa propre succession au printemps prochain, dans le contexte d'une sévère crise économique et d'une inflation de plus de 84%. 

Le président ne s'est pas exprimé, mais le chef du parti nationaliste MHP, Devlet Bahçeli, membre de la coalition au pouvoir, a indiqué "que tout le monde doit respecter une décision de justice, qu'elle lui plaise ou non". 

Un sondage de l'institut Metropoll montrait cependant jeudi que, même auprès des sympathisants AKP, le jugement contre M. Imamoglu ne convainc pas: 28% d'entre eux y voyant "une affaire politique" contre 22% un réel procès pour diffamation. 

La condamnation du maire a suscité une vague de réprobation internationale, les Etats-Unis se disant jeudi "profondément inquiets et déçus par le verdict de la justice turque". 

"Nous exhortons le gouvernement à cesser les poursuites pénales en justice pour +insulte+ et à respecter les droits et les libertés des citoyens turcs, notamment en garantissant un environnement propice au débat public", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price, dans un communiqué. 

Berlin a pour sa part évoqué "un coup dur pour la démocratie", la France exhortant la Turquie "à inverser de toute urgence les tendances négatives à l'œuvre en matière d'Etat de droit, de démocratie et de respect des droits fondamentaux" et l'Union européenne jugeant la condamnation "disproportionnée". 

Sur Twitter, Marc Pierini, spécialiste de la Turquie à l'Institut Carnegie-Europe, à Bruxelles, estime que "si ce verdict n'est pas renversé en appel, la crédibilité du scrutin sera gravement entamée".


Israël devant la CIJ pour se défendre d'accusations de « génocide »

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
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  • Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah
  • Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante"

LA HAYE: Israël va répondre vendredi devant la plus haute juridiction de l'ONU aux allégations de l'Afrique du Sud selon lesquelles il aurait intensifié une campagne "génocidaire" avec son opération militaire à Rafah.

Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, essentielle selon Israël pour éliminer les militants du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante".

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui a juré d'anéantir le Hamas, est déterminé à lancer une offensive terrestre d'envergure à Rafah, où sont retranchés selon lui les derniers bataillons du mouvement islamiste palestinien.

Israël a annoncé jeudi que son armée allait "intensifier" ses opérations au sol à Rafah, malgré les mises en garde internationales contre une offensive d'envergure dans cette ville surpeuplée du territoire palestinien.

Les avocats de Pretoria ont déclaré jeudi devant la CIJ que "le génocide" commis par Israël "a atteint un niveau horrible", évoquant notamment des fosses communes, des actes de torture et un blocage de l'aide humanitaire.

"L’Afrique du Sud avait espéré, lors de notre dernière comparution devant cette cour, mettre un terme à ce processus génocidaire afin de préserver la Palestine et son peuple", a déclaré Vusimuzi Madonsela, le représentant de Pretoria.

"Au lieu de cela, le génocide d'Israël s’est poursuivi à un rythme soutenu et vient d’atteindre un nouveau et horrible niveau", a-t-il ajouté.

Nouvelles mesures 

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza.

Mais la cour n'est pas allée jusqu'à ordonner un cessez-le-feu. Or pour Pretoria, l'évolution de la situation sur le terrain – notamment l'opération à Rafah – nécessite une nouvelle ordonnance de la CIJ.

L'opération israélienne à Rafah "est la dernière étape de la destruction de Gaza et de son peuple palestinien", a déclaré Vaughan Lowe, un avocat de l'Afrique du Sud.

"C'est Rafah qui a amené l'Afrique du Sud devant la cour. Mais ce sont tous les Palestiniens en tant que groupe national, ethnique et racial qui ont besoin de la protection contre le génocide que la cour peut ordonner", a-t-il ajouté.

Les ordonnances de la CIJ, qui tranche les différends entre Etats, sont juridiquement contraignantes mais elle n'a aucun moyen de les faire respecter.

Pretoria demande à la CIJ trois nouvelles mesures d'urgence en attendant qu'elle se prononce sur le fond de l'affaire, l'accusation selon laquelle Israël viole la Convention des Nations unies sur le génocide de 1948.

L'Afrique du Sud souhaite que la cour ordonne à Israël de cesser "immédiatement" toutes les opérations militaires à Gaza, y compris à Rafah, de permettre l'accès humanitaire et de rendre compte des mesures prises dans l'exécution de ces ordonnances.


Plus d'un tiers des zones humides de Méditerranée menacées par la montée des eaux

Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
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  • Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux,
  • Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris"

PARIS: Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique.

Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux, plus de la moitié d'entre elles dans le monde pourraient disparaître sous les eaux d'ici 2100, ont déjà montré de précédentes études.

Cette nouvelle étude, parue dans la revue Conservation Biology, a modélisé les futurs risques de submersion en fonction des différents scénarios du Giec (le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU) sur 938 sites côtiers du pourtour méditerranéen.

Elle révèle que 34,4% de ces sites, soit 320 zones humides côtières, sont menacées de disparition d'ici à 2100 par la hausse du niveau de la mer, même dans les scénarios climatiques les plus optimistes (avec un réchauffement de +1,8 degré).

Dans les scénarios pessimistes (jusqu'à +4,4 degrés), ce chiffre pourrait monter à 495, soit plus de la moitié.

Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris", indique un communiqué du Museum national d'histoire naturelle, qui a participé à l'étude avec l'Institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes de la Tour du Valat.

Parmi ces zones menacées, figurent entre 54,1% et 60,7% de sites d'importance internationale pour les oiseaux d'eau, comme les flamants roses, les avocettes élégantes ou le canard chipeau, notamment lors de la période d'hivernage ou de nidification. Ces oiseaux ne disposant pas d'habitat alternatif, ces menaces pourraient "affecter négativement" leur nombre et les écosystèmes qui y sont associés.

"Ces chiffres sont sans doute sous-estimés", notent les auteurs de l'étude, soulignant que de nombreuses zones côtières, notamment en Espagne, n'ont pas été incluses et que d'autres menaces (érosion côtière, salinisation, surtourisme...) n'ont pas été prises en compte.

Pour toutes ces raisons, ils recommandent "la mise en place urgente de mesures d'adaptation" dans ces sites, comme la construction de digues mais surtout, plus efficaces à long terme, la mise en place de solutions fondées sur la nature (fixation de dunes avec de la végétation) ou encore une extension des aires protégées pour lutter notamment contre une urbanisation non maitrisée.


Inde: l'opposition fustige Modi et ses propos anti-musulmans

Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
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  • M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019
  • Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril

NEW DELHI: L'opposition indienne a accusé jeudi le Premier ministre Narendra Modi de tenir des propos stigmatisant les musulmans et alimentant, en plein processus électoral, les tensions sectaires dans la plus grande démocratie du monde, constitutionnellement laïque.

M. Modi déploie "son jeu habituel consistant à diviser les hindous et les musulmans", a déclaré jeudi P. Chidambaram, ancien ministre des Finances et membre influent du Congrès, principal parti d'opposition,

"Le monde observe et analyse les déclarations du Premier ministre indien, qui ne sont pas à la gloire de l'Inde", a-t-il ajouté.

M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

Agé de 73 ans et encore très populaire dans l'ensemble du pays, le Premier ministre brigue un troisième mandat à la tête du pays.

Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril et se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.

M. Modi a présenté mardi sa candidature au siège de député de Varanasi (Bénarès), cité sacrée de l'hindouisme, dans l'Etat de l'Uttar Pradesh (nord), qu'il occupe depuis une décennie.

L'opposition et les défenseurs des droits accusent M. Modi de favoriser les hindous, majoritaires dans le pays, au détriment d'importantes minorités, dont 210 millions d'Indiens musulmans, inquiètes pour leur avenir.

M. Modi a récemment suscité l'indignation dans les rangs de l'opposition en accusant le Congrès de vouloir distribuer la "richesse nationale" aux "infiltrés", "à ceux qui ont le plus d'enfants", désignant ainsi la communauté musulmane.

L'opposition a saisi les autorités électorales qui n'ont pas sanctionné le Premier ministre. L'Inde est constitutionnellement laïque et son code électoral interdit toute campagne fondée sur des "sentiments communautaires".

Dans un entretien mardi sur la chaîne d'information continue News18, le chef du gouvernement s'est défendu d'alimenter et d'exploiter tout clivage entre hindous et musulmans.

Discrimination 

"Le jour où je commencerai à parler des hindous-musulmans sera celui où je perdrai ma capacité à mener une vie publique", a-t-il affirmé en hindi.

Le lendemain, en plein rassemblement électoral, Narendra Modi accusait le Congrès d'orchestrer un "jihad par le vote" pour que les musulmans se prononcent contre lui.

Au début de la semaine, Madhavi Latha, actrice et candidate du BJP à Hyderabad (sud), s'est autorisée, dans un bureau de vote, à vérifier que la carte électorale de musulmanes correspondait à leur identité, exigeant qu'elles ôtent leur voile.

La police de la ville a ouvert une enquête sur l'incident.

Au total, 968 millions d'Indiens sont appelés à élire les 543 membres de la chambre basse, soit plus que la population totale des Etats-Unis, de l'Union européenne et de la Russie réunis.