Les opérations israéliennes en Cisjordanie «menacent sérieusement la solution à deux États»

L'Autorité palestinienne a protesté contre les restrictions croissantes imposées au développement palestinien dans les zones de la Cisjordanie contrôlées par Israël (Photo, Reuters).
L'Autorité palestinienne a protesté contre les restrictions croissantes imposées au développement palestinien dans les zones de la Cisjordanie contrôlées par Israël (Photo, Reuters).
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Publié le Jeudi 22 décembre 2022

Les opérations israéliennes en Cisjordanie «menacent sérieusement la solution à deux États»

  • L'UE est invitée à imposer des sanctions à Israël et à annuler les accords commerciaux conclus avec ce pays en réaction à la destruction de projets palestiniens
  • Les Palestiniens ont exprimé leurs craintes quant au nouveau gouvernement israélien de droite, dirigé par le Premier ministre, Benjamin Netanyahou

RAMALLAH: L'Autorité palestinienne a protesté contre les restrictions croissantes imposées au développement palestinien dans les zones de la Cisjordanie sous contrôle israélien, connues sous le nom de zone C – en plus d'autres limitations à travers le territoire.

Elle a appelé la communauté internationale à intervenir et à mettre fin aux mesures israéliennes, car elles menacent sérieusement la solution à deux États.

La zone C, administrée par Israël, couvre plus de 60% de la Cisjordanie.

L'AP a accusé Israël de mener une guerre visant la région en démolissant des maisons, étendant les colonies, confisquant des terres par divers moyens et à différentes fins de colonisation et militaires, et empêchant les Palestiniens de les récupérer et d'y construire des maisons.

La protestation est intervenue alors qu'un document récent affirmait que l'UE renforçait son soutien à la présence palestinienne dans la zone C, ce qui a suscité une réaction de colère de la part des Israéliens.

Les Palestiniens ont exprimé leurs craintes de voir le nouveau gouvernement israélien de droite dirigé par le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, et les membres du Cabinet Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich, annexer la zone C à Israël, comme l'a menacé Smotrich à plusieurs reprises.

Israël a déjà un contrôle presque total sur l'application de la loi, la planification et la construction dans la zone C, et les colonies israéliennes et les zones d'entraînement militaire y sont concentrées.

On estime que 300 000 Palestiniens vivent dans la zone C dans 530 communautés résidentielles, dont 241 situées entièrement ou partiellement à l'intérieur de la zone, l'un des résultats directs de l'accord intérimaire israélo-palestinien sur la Cisjordanie et la bande de Gaza (Oslo II) signé le 28 septembre 1995.

L'accord prévoit la division temporaire de la Cisjordanie dans le cadre d'une phase transitoire de cinq ans, au cours de laquelle la zone C passe sous contrôle israélien.

La zone entière, avec la présence de l'armée israélienne, comprend des colonies, des routes de contournement et des zones frontalières. Au même moment, la zone C était censée passer du contrôle israélien au contrôle palestinien, mais cela ne s'est pas produit.

Ibrahim Melhem, le porte-parole de l'AP, a déclaré à Arab News qu'Israël ne devait pas confisquer les terres palestiniennes à des fins de colonisation.

L'AP ne reconnaît pas les divisions administratives israéliennes des terres palestiniennes, a-t-il souligné, en ajoutant que les États-Unis, l'UE et l'ONU se sont opposés aux mesures israéliennes de confiscation et d'appropriation des terres palestiniennes dans la zone C, qui compromettent la solution à deux États.

Melhem a souligné que l'AP a adopté une stratégie visant à renforcer l’implantation des Palestiniens de la zone C en soutenant les agriculteurs de diverses manières.

«Le ministère palestinien de l'Agriculture fournit des tracteurs, des serres, des équipements agricoles, des engrais et des réservoirs d'eau aux agriculteurs de ces régions, mais les autorités israéliennes viennent le lendemain et les détruisent, ce qui entrave les efforts de développement de l'Autorité palestinienne», a déclaré Melhem à Arab News.

Le porte-parole de l'AP n'a pas caché son inquiétude quant aux mesures plus strictes qui pourraient être prises par le prochain gouvernement dirigé par Netanyahou.

La zone C est riche en ressources naturelles, notamment en sources d'eau et en réserves naturelles, et contient la plupart des terres agricoles et des pâturages palestiniens.

En plus des sites archéologiques, tous les grands projets palestiniens nécessitent des travaux dans la zone C.

Elle comprend environ 385 900 colons israéliens et environ 300 000 Palestiniens.

Les réglementations israéliennes en matière de planification et de zonage dans la zone C interdisent la construction palestinienne dans environ 70% de la zone, et rendent presque impossible l'obtention de permis dans les 30% restants.

Moustafa Barghouti, secrétaire général du parti de l'initiative nationale, a déclaré à Arab News qu'il était inquiet de la possibilité que le prochain gouvernement israélien annexe les terres restantes de la Cisjordanie, éliminant ainsi la possibilité d'un État palestinien indépendant.

Il a exhorté l'AP à considérer la zone C en Cisjordanie comme une «zone prioritaire» et à déployer davantage d'efforts afin de renforcer la fermeté de ses résidents.

Barghouti, qui dirige également le Comité palestinien de secours médical actif dans la zone C depuis deux décennies, a ajouté que «le travail dans la zone C est considéré comme l'une des formes de développement résistant.»

Il a exhorté l'UE à imposer des sanctions à Israël et à annuler les accords commerciaux avec ce pays en réponse à sa destruction des projets financés par Bruxelles dans la zone C.

Chadi Othmane, porte-parole de l'UE dans les Territoires palestiniens, a déclaré à Arab News que l'UE avait financé et mis en œuvre plusieurs projets et aides humanitaires et de développement dans la zone C, qui, selon le droit international, est une terre palestinienne occupée.

La politique de l'UE «est basée sur la poursuite du financement et de la mise en œuvre de ces projets, aujourd'hui et à l'avenir», a-t-il signalé à Arab News.

Il a ajouté que le soutien européen «se poursuit, et nous travaillerons dans la zone C comme faisant partie de la Cisjordanie... et tous les pays de l'UE sont d'accord sur cette position.»

Othmane a affirmé que le soutien européen apporté aux projets palestiniens dans la zone C au cours des trois dernières années s'élevait à 30 millions d'euros (31,9 millions de dollars).

Le porte-parole de l'UE s'est dit préoccupé par la destruction par l'armée israélienne de projets financés par l'UE dans la zone C en Cisjordanie, et a confirmé que l'UE a toujours discuté de cette question avec les autorités israéliennes.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.