Pelé et la politique n'ont pas toujours fait bon ménage

Pelé a été ministre très actif, qui a beaucoup oeuvré pour la modernisation du football brésilien et la garantie des droits des footballeurs vis-à-vis de leurs clubs (Photo, AFP)
Pelé a été ministre très actif, qui a beaucoup oeuvré pour la modernisation du football brésilien et la garantie des droits des footballeurs vis-à-vis de leurs clubs (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 30 décembre 2022

Pelé et la politique n'ont pas toujours fait bon ménage

  • Quand le « Roi» était au sommet de son art, après son troisième titre mondial décroché au Mexique en 1970, les militaires au pouvoir n'ont pas manqué l'occasion d'utiliser son aura à des fins politiques
  • «Il avait un comportement de Noir soumis, qui accepte tout, qui ne conteste rien», raille Paulo Cézar Caju, son coéquipier lors du titre de 1970

RIO DE JANEIRO: Pelé était le "Roi" incontesté balle au pied, mais le Brésilien était loin de faire l'unanimité quand il entrait sur le terrain de la politique, essuyant de nombreuses critiques sur son absence d'engagement contre la dictature et le racisme.

Interrogé sur les années de plomb du régime militaire (1964-1985) au Brésil dans le documentaire sur sa vie lancé par Netflix en 2021, le triple champion du monde avait répondu: "Pour moi, du moins, ça n'a absolument rien changé (...) Le football a continué de la même façon".

Dans ce même documentaire, Paulo César Vasconcellos, l'une des figues du journalisme sportif brésilien, souligne que Pelé "avait accepté le régime, qui le traitait bien parce qu'il savait à quel point il était important". L'éternel numéro 10 "se caractérisait par son absence de prise de position politique".

Quand le "Roi" était au sommet de son art, après son troisième titre mondial décroché au Mexique en 1970, les militaires au pouvoir n'ont pas manqué l'occasion d'utiliser son aura à des fins politiques.

De nombreuses photos le montrent très proche du dictateur Emílio Garrastazu Médici, le général le plus "ligne dure" du régime qui a torturé des centaines d'opposants, avec un lourd bilan d'au moins 434 morts ou disparus. On voit Pelé souriant, lui donnant l'accolade, ou brandissant le trophée de la Coupe du Monde à ses côtés.

"Il avait un comportement de Noir soumis, qui accepte tout, qui ne conteste rien", raille Paulo Cézar Caju, son coéquipier lors du titre de 1970.

«Socialiste»

Mais d'autres photos, plus surprenantes, sont réapparues sur les réseaux sociaux ces derniers jours, quand les nouvelles de la dégradation de son état de santé faisaient le tour du monde.

On y voit un Pelé fringant, coiffé d'un élégant chapeau gris et surtout vêtu d'un maillot jaune sur lequel est écrit en grosses lettres "Diretas já" (élections directes maintenant), le slogan du mouvement réclamant la fin de la dictature et l'élection présidentielle au suffrage universel direct.

Ce cliché, datant de 1984, a fait la couverture du magazine brésilien sportif de référence Placar, avec pour titre: "Pelé de cabeça nova". En traduction littérale, une "nouvelle tête pour Pelé", une nouvelle mentalité.

Autre épisode méconnu de la vie du "Roi" dans les années 80: en 1989, lors d'une conférence de presse, Pelé annonçait qu'il pourrait se présenter à la présidentielle de 1994 et se disait "socialiste".

Il n'a finalement pas été candidat, mais est devenu ministre des Sports du président de centre droit Fernando Henrique Cardoso de 1995 à 1998.

Un ministre très actif, qui a beaucoup oeuvré pour la modernisation du football brésilien et la garantie des droits des footballeurs vis-à-vis de leurs clubs, ce qui lui aurait valu selon les médias locaux, les foudres du tout puissant président de la Fifa de l'époque, son compatriote Joao Havelange.

«Il m'a fait aimer le Brésil»

Pelé, première superstar noire du Brésil, a aussi souvent été critiqué pour son manque d'engagement dans la lutte antiraciste.

"On me traitait de singe, de nègre, mais je m'en fichais (...) Je préfère donner l'exemple à ma famille, à mes fans. C'est mon combat", a-t-il dit dans un entretien cité en 2020 par El Pais.

"Je suis absolument certain que j'ai beaucoup plus aidé le Brésil avec mon football et ma façon de vivre que de nombreuses personnes qui gagnent leur vie en faisant de la politique", a-t-il lancé dans le documentaire sur Netflix, rappelant notamment qu'il a dédié son millième but aux enfants qui souffraient de la faim au Brésil, en 1969.

Si certains lui reprochent de ne pas avoir condamné plus fermement le racisme, d'autres estiment que le seul fait de voir un homme noir exceller à ce point dans son domaine était un motif d'immense fierté et d'espoir.

"Pelé est la première personne qui m'a fait aimer le Brésil. Voir un homme brésilien, comme moi, être indiscutablement le meilleur dans ce qu'il faisait m'a fait penser que, malgré tout, on pouvait croire en quelque chose", a tweeté après sa mort Silvio Almeida, un des plus éminents intellectuels noirs du pays et futur ministre des Droits humains du président élu de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.