Dans des hébergements d'urgence en France, des migrants à la croisée des chemins

Un migrant vérifie son téléphone alors qu'il passe du temps dans un centre de convention transformé en abri temporaire au lendemain de son évacuation d'un camp de fortune à Saint-Denis, banlieue populaire du nord de Paris. (Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
Un migrant vérifie son téléphone alors qu'il passe du temps dans un centre de convention transformé en abri temporaire au lendemain de son évacuation d'un camp de fortune à Saint-Denis, banlieue populaire du nord de Paris. (Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
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Publié le Vendredi 20 novembre 2020

Dans des hébergements d'urgence en France, des migrants à la croisée des chemins

  • Dans un autre des centres parisiens où sont hébergées des familles et des femmes isolées du camp de Saint-Denis, Halima, une Érythréenne de 29 ans, ne sera fixée sur son sort que dans un mois.
  • "J'étais en Angleterre, quatre mois. Et on m'a expulsé vers la France parce qu'on avait pris mes empreintes ici", raconte Bniar.

D'ordinaire, Bniar est un optimiste. Mais à l'abri d'un hangar parisien, cet Irakien musculeux de 28 ans, évacué en début de semaine d'un campement de migrants géant près de Paris, s'interroge: cassé par une "vie de chien", faut-il rester ou reprendre l'exil ?

Les bras croisés à côté de la table de ping-pong où plusieurs Afghans se changent les idées, le jeune homme, masque au menton, grommelle.

Bien sûr, l'espace de 8.000 mètres carré du "Paris Event Center", où se tiennent d'habitude salons et meetings, va lui offrir pour quelques semaines un toit et du répit. Mais comme nombre des 3.000 évacués du camp insalubre qui avait poussé au pied du Stade de France, près de Paris, ses derniers mois à la rue lui ont laissé un sentiment amer: il n'est pas le bienvenu en France.

"J'étais en Angleterre, quatre mois. Et on m'a expulsé vers la France parce qu'on avait pris mes empreintes ici", raconte Bniar.

"Et depuis que je suis revenu en France, il y a deux mois, j'étais sur ce camp, où c'était une vie de chien. Rien à manger, dormir dans les ordures. Pourquoi on me fait revenir si c'est pour me mettre à la rue ?"

Que ce soit en Angleterre, en Finlande ou en France, il n'a pu obtenir de titre de séjour nulle part en Europe. "Mais mon pays est en guerre ! Je ne peux pas y retourner. Alors qu'est-ce que je deviens ?", interroge-t-il.

Même quand la situation devrait être claire, l'avenir immédiat de ces migrants reste bien incertain.

C'est le cas de Saïd, un Afghan de 26 ans. Lui a obtenu depuis plusieurs mois le statut de réfugié et a trouvé un emploi en contrat à durée indéterminée comme cuisinier dans un restaurant parisien.

La loi française voudrait qu'il bénéficie d'un hébergement "mais on ne m'a jamais rien donné, on me dit toujours +Attends, il y a du monde devant toi+", raconte-t-il dans un français fluide. Avec un salaire équivalent au salaire minimum dans ce pays, il ne parvient pas non plus à se loger dans la capitale française.

"Ce n'est pas une vie" 

Du coup, lui aussi dormait sous la bretelle d'autoroute de la ville de Saint-Denis, à côté de Paris, où s'étaient déployées des centaines de tentes et où son titre de séjour lui a été volé. Bien loin du Paris de son imaginaire lorsqu'il vivait à Kaboul il y a encore deux ans. "Les parfums, la tour Eiffel...", se souvient-il dans un rire nerveux.

"Je suis fatigué de cette vie. En fait, je me bagarre avec la vie. Mais là, il ne reste que l'énergie du désespoir. Et ça ne finit jamais", se désole Saïd dans le dédale de préfabriqués blancs qui constituent les "box Covid", où les migrants dorment par quatre.

La peur du coronavirus, "ça reste secondaire par rapport aux autres problématiques de survie" pour ces personnes arrivées "épuisées", concède Justine Porte, coordinatrice du site pour le gestionnaire Coallia. "La priorité c'est +Où est-ce que je vais manger, dormir, me laver ?+". Avec, bien sûr, les démarches administratives.

Dans un autre des centres parisiens où sont hébergées des familles et des femmes isolées du camp de Saint-Denis, Halima, une Érythréenne de 29 ans, ne sera fixée sur son sort que dans un mois.

Si la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) lui octroie le statut de réfugiée en appel, elle pourra, dit-elle, enfin "retrouver espoir" deux ans après son arrivée en France. Sinon ? Elle tentera sa chance ailleurs, probablement en Angleterre.

"Ce n’est pas une vie qu'on a ici. Vous imaginez une femme, seule avec deux petits enfants dehors ? Je me suis retrouvée dans ce camp, je ne dormais même pas pour surveiller les enfants", explique-t-elle, son bébé de six mois dans les bras pendant que sa fille de 4 ans grignote une part de gâteau dans le réfectoire du centre.

"J'étais venue pour avoir une vie meilleure. J'étais venue avec beaucoup d'espoir. Il ne m'en reste plus beaucoup", résume-t-elle. D'ici à la décision de la CNDA, elle sait qu'elle et se enfants se retrouveront sûrement à la rue.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
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  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.