L'acteur franco-tunisien Adam Bessa revient sur son rôle dans le film primé «Harka»

Le succès de Bessa est d'autant plus remarquable quand on connaît son histoire (Photo, AFP).
Le succès de Bessa est d'autant plus remarquable quand on connaît son histoire (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 21 janvier 2023

L'acteur franco-tunisien Adam Bessa revient sur son rôle dans le film primé «Harka»

  • «C'est déchirant, mais c'est la vérité», affirme Adam Bessa
  • Acteur autodidacte, Bessa a été le seul représentant du film au Festival international du film de la mer Rouge

DUBAÏ: «Votre devoir en tant qu'artiste est d'être la voix des gens qui n'ont pas de voix», a révèle l'acteur franco-tunisien Adam Bessa. «La réalité du monde est assez simple. Vous avez de l'argent, vous existez. Vous n'avez pas d'argent, vous n'existez pas.»

Bessa parle de «Harka», le percutant premier film narratif du réalisateur Lotfy Nathan. Ce film a eu un impact émotionnel et physique sur Bessa, qui a vécu avec des trafiquants d'essence à la frontière avec la Libye et s'est isolé du monde extérieur pour se préparer à son rôle de vendeur de rue tunisien pauvre.

«Il faut essayer de montrer la beauté, l'importance, la lutte», ajoute-t-il. «Le film peut-être une comédie, montrant à quel point les gens sont drôles. Il peut aussi être un drame, montrant la réalité de la vie des gens. C'est juste votre devoir d'être la voix de ceux qui n'en ont pas.»

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«Harka» est le premier film percutant du réalisateur Lotfy Nathan (Photo, Fournie).

La performance extraordinaire de Bessa dans «Harka», présenté en première au Moyen-Orient et en Afrique du Nord au Festival international du film de la mer Rouge, a été largement saluée. En mai, il a remporté le prix de la meilleure interprétation au festival dans la section «Un certain regard de Cannes» (partagé avec Vicky Krieps pour le film «Corsage») et, le mois dernier, il a reçu le prix du meilleur acteur du festival international du film de la Mer Rouge à Djeddah.

Travaillant en étroite collaboration avec Nathan, qui a remporté le prix du meilleur réalisateur du festival de la mer Rouge, Bessa a passé la plupart des quatre mois à préparer le rôle d'Ali, un jeune homme qui vend de l'essence au marché noir dans les rues de Sidi Bouzid.

Après la mort de son père, Ali se retrouve non seulement chargé des dettes de son père, mais aussi du bien-être de ses deux sœurs. Risquant sa vie pour acheter de l'essence à la frontière libyenne afin de joindre les deux bouts, il est néanmoins contraint de remettre la majeure partie de ses gains à la police sous forme d'extorsion.

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C'est un film qui a fait payer un lourd tribut émotionnel et physique à Bessa (Photo, Fournie).

«Nous savions que nous devions prendre le temps de nous préparer, alors nous avons parlé du scénario et du personnage, puis je suis allé en Tunisie pendant peut-être trois semaines», explique Bessa, qui est née à Paris de parents tunisiens. «Je me suis isolé et j'ai commencé à me mettre dans la peau du personnage du film. Puis j'ai passé deux semaines sur place avec les contrebandiers. J'ai passé du temps avec eux, je suis allé en Libye, j'ai vraiment vécu avec eux et ensuite, pendant le tournage, je n'ai jamais cessé d'être Ali, car pour moi, il était très difficile de me déconnecter. Il est si spécial et si complexe et il vibre sur quelque chose de très spécial, donc, pour moi, c'était la façon dont il fallait faire.»

Inspiré de l'histoire vraie de Mohamed Bouazizi, dont l'auto-immolation a déclenché la révolution de jasmin en Tunisie et le printemps arabe, le film n'apporte aucune réponse et certainement pas de remède. L'existence d'Ali est dure et bouleversante, bien que pendant une grande partie du film, la performance de Bessa soit remarquablement contenue. Il est souvent silencieux, ou parle avec un minimum de mots. Lorsque nous rencontrons Ali pour la première fois, il siphonne de l'essence d'un bidon à l'autre et mène une existence solitaire sur un chantier de construction abandonné.  

Seul le visage de Bessa laisse deviner le désespoir intérieur du personnage. Lorsqu'il atteint le point de rupture, bien plus tard dans le film, c'est une scène puissante et inconfortable à regarder. La colère de Bessa, jusque-là contenue, explose avec une férocité inquiétante.

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 Bessa est née à Paris de parents tunisiens (Photo, Fournie).

«Mentalement, c'était difficile», admet l’acteur autodidacte Bessa. «Vous vous mettez en avant et là où la curiosité vous mène, vous y allez. Et des personnages comme Ali, vivent avec vous pour toujours. Parce que c'est bouleversant. Peut-être que c'est bouleversant parce que c'est comme ça que le monde fonctionne. Chaque jour, les choses qui arrivent à Ali arrivent quelque part et c'est un fardeau pour chacun d'entre nous de l'admettre. Parce qu'autant que nous vivons nos vies, nous sommes tous connectés. Alors c'est difficile à accepter, ça fait mal au cœur et c'est parfois déprimant. Mais c'est la vérité.»

Acteur autodidacte, Bessa a été le seul représentant du film au Festival international du film de la mer Rouge, réalisant des interviews avec patience et humilité et assistant aux deux projections du film. Il a également été classé parmi les étoiles arabes de demain par Screen Daily, aux côtés de l'écrivaine et réalisatrice marocaine Sofia Alaoui et de la Libanaise Dania Bdeir.  

Le succès de Bessa est d'autant plus remarquable si l'on considère son parcours. Il a commencé à jouer dans «Les Bienheureux» de la réalisatrice algérienne Sofia Djama alors qu'il travaillait comme pêcheur dans le sud de la France.   

«Ce n'est pas si facile, vous savez», souligne-il. «Je voulais être footballeur, ça n'a pas été le cas. J'ai étudié le droit, ça ne m'a pas plu. Puis j'ai commencé à travailler. J'étais passionné par le cinéma et j'ai essayé de me lancer dans le métier, mais c'était très compliqué, alors j'ai arrêté d'essayer et je suis allé travailler comme agent immobilier. Vous gagnez votre vie et, tout à coup, vous avez une opportunité. Pour moi, cette opportunité était le film de Sofia Djama.»

Un ami de Bessa lui a dit qu'il y avait un appel à casting pour «Les Bienheureux», alors il a envoyé une cassette et a fini par rencontrer la réalisatrice à Paris. Il ne s'est jamais retourné depuis.  

 «Pour la plupart des gens, il y a un certain chemin. Mais tant d'histoires ne suivent pas un chemin déterminé. Si vous êtes passionné par quelque chose et que vous n'écoutez pas vraiment ce que tout le monde vous dit de faire et que vous suivez simplement ce que vous voulez faire, votre route devient bizarre et étroite et les gens se disent: ‘Oh, quel parcours’. Mais je crois que tout le monde aurait un drôle de parcours en suivant simplement son cœur. Si vous suivez ce que vous aimez et ce qui vous inspire, votre route devient exceptionnelle», a indiqué Bessa.

Il a ensuite joué dans le film «Mosul», réalisé par Matthew Michael Carnahan, qui suit une unité de police irakienne pendant la bataille pour libérer la ville de Daech et reprendra bientôt son rôle de Yaz Kahn dans le film «Extraction 2» de Netflix aux côtés de Chris Hemsworth. Il jouera également dans le film «Motherhood» de la réalisatrice tuniso-canadiennne Meryam Joobeur, dont la sortie est prévue cette année.

«L'idée claire reste toujours de suivre mon instinct», dévoile Bessa à propos des réalisateurs avec lesquels il travaille. «C'est comme ça que j'ai traversé la vie, que j'ai grandi et que je suis là où je suis maintenant. Je suis mon instinct. Bonne histoire, bon réalisateur, peu importe le nom. Je ne me fie pas aux noms, je ne me fie pas à l’hyper médiatisation, je me fie aux sentiments. Si les gens m'inspirent, je travaille avec eux. Si je sens qu'on peut aboutir à un résultat formidable ensemble, je le fais. Si je ne le sens pas, je ne le fais pas. Même si vous échouez, mais qu’il s’agit de votre propre choix, vous n'avez pas l'impression d'échouer, vous avez l'impression de vivre votre vie. Quand vous écoutez les autres et que vous échouez, vous avez des regrets et je déteste les regrets.»

Quelle est la suite? Encore plus de films, certes. Mais peut-être la réalisation un jour?

«Absolument, pourquoi pas?», répond-il. «Pas maintenant, mais peut-être dans l'avenir. C'est une question d'histoires. Il ne s'agit pas de faire des choses parce qu'il faut cocher des cases. Peut-être que je vais créer une marque, peut-être que je vais faire autre chose. Peut-être que j'éditerai des livres. Je ne sais pas ce que je ferai. C'est ce qui m'inspire. C'est comme ça que je travaille. J'entends des histoires, j'entends des gens, donc si j'ai une idée ou si je rencontre quelqu'un qui me propose une histoire que j'aime et qui me convient, je le ferai. Il s’agit d’une question de personnes et du bon moment — faire ce qui convient.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Au-delà du couscous, l'essor de la gastronomie maghrébine à Paris

«"On assiste depuis quelques années à un phénomène nouveau, porté par une nouvelle génération de restaurateurs qui reprend en main cette gastronomie maghrébine en la faisant découvrir à une clientèle qui ne la voyait qu’à travers le couscous», analyse Patrick Rambourg, historien spécialiste de la gastronomie.
«"On assiste depuis quelques années à un phénomène nouveau, porté par une nouvelle génération de restaurateurs qui reprend en main cette gastronomie maghrébine en la faisant découvrir à une clientèle qui ne la voyait qu’à travers le couscous», analyse Patrick Rambourg, historien spécialiste de la gastronomie.
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  • Si les restaurants maghrébins sont «depuis la fin du XIXe siècle» implantés dans la capitale française, l'arrivée de nouvelles tables attirant principalement une clientèle de bureau est assez récente
  • Ouverte en 2018, la cantine Tounsia, située dans le Xe arrondissement, permet de déguster «une cuisine qui est avant tout familiale», précise la fondatrice

PARIS: Rfissa, rechta, chakhchoukha... Au menu d'une nouvelle génération de restaurants maghrébins à Paris, couscous et tajines sont à l'honneur, désormais accompagnés d'une multitude d'autres plats moins connus pour faire découvrir la cuisine maghrébine dans toute sa richesse.

Alors qu’elle travaillait dans la communication, Katia Barek, 42 ans, a pris la décision d'ouvrir en 2021, en plein centre de Paris, Majouja, une cantine algérienne qui sert uniquement le midi, pour faire découvrir "la cuisine de (son) enfance".

"Je fais partie d’une génération qui a un peu eu honte de sa cuisine, parce qu’on disait +ça sent les épices+, etc. Mais aujourd’hui, je suis fière de m'être réappropriée ma culture, de vendre dans le IXe arrondissement les sfenj (beignets) que ma mère cuisinait les dimanches après-midi", se félicite Katia Barek, dont le restaurant porte le surnom donné à sa mère.

"Notre cuisine fait partie de notre patrimoine, c’est un héritage qu’on nous a légué dans nos familles, c’est important de la mettre en valeur", renchérit Mustapha Khalis, 52 ans, qui a fondé la cantine Gamila en 2020, un restaurant marocain présent dans trois arrondissements.

Si les restaurants maghrébins sont "depuis la fin du XIXe siècle" implantés dans la capitale française, l'arrivée de nouvelles tables attirant principalement une clientèle de bureau est assez récente, affirme à l'AFP Patrick Rambourg, historien spécialiste de la gastronomie.

«Phénomène nouveau»

"On assiste depuis quelques années à un phénomène nouveau, porté par une nouvelle génération de restaurateurs qui reprend en main cette gastronomie maghrébine en la faisant découvrir à une clientèle qui ne la voyait qu’à travers le couscous", analyse-t-il.

"Évidemment, à la carte, on va avoir l’incontournable couscous", confirme Katia Barek, "mais on va aussi avoir des plats traditionnels moins connus comme +rechta+ (pâtes traditionnelles), et même des plats qu’on revisite, comme les +mhadjeb+ (galettes) qu’on farcit avec des épinards et de la feta".

Ouverte en 2018, la cantine Tounsia, située dans le Xe arrondissement, permet elle aussi de déguster "une cuisine qui est avant tout familiale", précise la fondatrice Siwar Damak, 34 ans. Et extrêmement variée. Des grillades de dorade aux sandwichs de la street food tunisienne, en passant par le surprenant couscous au poulpe – emblématique de Sfax, ville portuaire de l’est tunisien dont la fondatrice est originaire -, le restaurant met à l’honneur la "spécificité des plats tunisiens".

"Ma mère a personnellement formé le cuisinier pour que le couscous au poulpe du restaurant soit exactement le même que celui de la maison", insiste-t-elle.

Sur Instagram 

"On souhaite permettre à nos clients de ressentir des odeurs, des saveurs de chez eux", souligne encore Katia Barek, dont le restaurant est décoré avec des "clins d'oeil à (ses) racines", comme les tamis à couscous de sa mère.

"Je ne veux pas non plus tomber dans le folklore", avance la fondatrice de Majouja, "comme l’image qu’on a de ce qu’on appelait les +restos orientaux+, avec les +youyous+ en versant le thé et tout ce genre de choses".

Définissant son restaurant comme "tradi et trendy", elle assure une forte présence sur les réseaux sociaux et compte plus de 45 000 abonnés sur Instagram.

Ambition partagée par Mustapha Khalis, lui aussi très actif en ligne. Il souhaite faire de la cantine Gamila "davantage une destination qu’un simple restaurant", en y mettant en avant l’artisanat marocain lors d’expositions qui y sont organisées.

"Même si le métier de restaurateur est difficile, il y a de la place" pour créer encore d'autres tables, affirme Mustapha Khalis. "On a une cuisine très riche et très variée, c’est à nous de la mettre en valeur en allant au-delà des grands classiques que tout le monde connaît".


L’IMA lance pour la première fois le «Prix du design du monde arabe»

L’IMA lance pour la première fois le «Prix du design du monde arabe». (Photo: www.imarabe.org)
L’IMA lance pour la première fois le «Prix du design du monde arabe». (Photo: www.imarabe.org)
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  • Ce prix est l’une des rares récompenses françaises distinguant la création design arabe dans le but de rendre mieux visible le dynamisme et la créativité de cette pratique dans le monde arabe
  • Les lauréats recevront leur prix lors d’une cérémonie à l'Institut du monde arabe (IMA) le 6 septembre 2023 dans le cadre de la Paris Design Week

PARIS: La première édition du « Prix du design du monde arabe » est dédiée à la promotion du projet d’un jeune designer de la nationalité de l'un des pays de la Ligue arabe et d’une entreprise de design dont la production est développée dans l’un des pays de la Ligue arabe, ayant été créé dans les trois dernières années (entre le 1er septembre 2021 et le 31 août 2023).

Ce prix est l’une des rares récompenses françaises distinguant la création design arabe dans le but de rendre mieux visible le dynamisme et la créativité de cette pratique dans le monde arabe.

Mettre en lumière les cultures arabes dans leur richesse et leur diversité en France, telle est la volonté du fondateur du prix

Les lauréats recevront leur prix lors d’une cérémonie à l'Institut du monde arabe (IMA) le 6 septembre 2023 dans le cadre de la Paris Design Week.

Ce nouveau prix s’inscrit dans la lignée des engagements de l’IMA en faveur des enjeux d’interculturalité, et dans leur volonté de les mettre à la portée du plus grand nombre.

Il est également l’occasion de célébrer une figure confirmée du design arabe. Une/des mention.s spéciale.s et/ou d’autres catégories pourront être envisagées selon la nature et la qualité des projets proposés.

Un jury prestigieux, présidé par India Mahdavi, accompagné respectivement d’un expert et d’un entrepreneur du design, François Leblanc di Cicilia et Ismaïl Tazi, distinguera la création design arabe dans 2 catégories : « Talent émergent » et « Talent entrepreneurial ».


A New York, des dissidents chinois ouvrent l'unique musée au monde sur Tiananmen

Des visiteurs arrivent pour l'ouverture du pavillon de protestation de Hong Kong et du nouveau musée commémoratif de Tiananmen du 4 juin à New York, le 2 juin 2023, avant le 34e anniversaire de la répression, en 1989, des manifestations en faveur de la démocratie autour de la place Tiananmen à Pékin. (Photo, AFP)
Des visiteurs arrivent pour l'ouverture du pavillon de protestation de Hong Kong et du nouveau musée commémoratif de Tiananmen du 4 juin à New York, le 2 juin 2023, avant le 34e anniversaire de la répression, en 1989, des manifestations en faveur de la démocratie autour de la place Tiananmen à Pékin. (Photo, AFP)
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  • Dans un minuscule espace de bureaux d'un immeuble sans charme du centre de Manhattan, sont exposées photos, vidéos, coupures de presse, affiches, lettres et banderoles sur ce soulèvement démocratique historique que Pékin a réprimé dans le sang
  • Des organisations de défense des droits humains assurent que les victimes se comptent par milliers

NEW YORK: Des dissidents chinois du mouvement de Tiananmen à Pékin en 1989 ont ouvert vendredi à New York l'unique musée au monde du "souvenir" des "rêves démocratiques du peuple chinois", à deux jours du 34e anniversaire de la "répression brutale" de ce soulèvement.

"Les événements de 1989 ont eu un impact sur la Chine mais aussi sur le monde entier. Au moment où l'on se rend compte de la menace que représente le régime (du président chinois) Xi Jinping sur la civilisation, nous devons commémorer (le 4 juin) 1989", a lancé devant la presse Wang Dan, fondateur de ce petit musée-mémorial new-yorkais et qui fut l'une des grandes figures du mouvement étudiant de la place Tiananmen.

Dans un minuscule espace de bureaux d'un immeuble sans charme du centre de Manhattan, sont exposées photos, vidéos, coupures de presse, affiches, lettres et banderoles sur ce soulèvement démocratique historique que Pékin a réprimé dans le sang, avec au moins 1 000 manifestants pacifiques tués.

Des organisations de défense des droits humains assurent que les victimes se comptent par milliers.

"Nous devons commémorer ceux qui ont sacrifié leur vie et nous souvenir des rêves démocratiques du peuple chinois à l'époque", a exhorté Wang Dan, qui a fait des années de prison en Chine avant d'être accueilli en 1998 aux Etats-Unis et d'y faire une thèse d'histoire à Harvard.

Mais "même aux Etats-Unis, on sent la pression et les menaces du régime chinois", a-t-il confié à l'AFP.

Pour ce dissident, "les événements de 1989 sont liés au passé mais aussi au présent et à l'avenir" et il a réclamé que l'on se "souvienne du vrai visage du parti communiste chinois" de 1989 et d'aujourd'hui.

Nombre d'opposants chinois et de responsables politiques américains se sont exprimés lors d'une cérémonie d'inauguration du musée, unique exposition permanente au monde sur Tiananmen après la fermeture en 2021 d'un musée à Hong Kong.

De fait, l'effervescence artistique qui accompagnait chaque année à Hong Kong la commémoration de Tiananmen a quasiment disparu sous le joug des autorités pro-Pékin.

Pendant plus de 30 ans, des dizaines de milliers de personnes se sont réunies chaque 4 juin dans le parc Victoria à Hong Kong - rétrocédé par Londres à Pékin en 1997 - pour une veillée aux chandelles.

Mais depuis que la Chine a imposé en 2020 une loi sur la sécurité nationale, les autorités locales ont mis fin à ces rassemblements, criminalisé l'essentiel de la dissidence et étouffé le mouvement démocratique.

«Il y a une Histoire»

A New York, un groupe d'étudiants chinois vivant aux Etats-Unis s'est joint à une marche vendredi soir à travers Manhattan entre le nouveau musée sur Tiananmen et le consulat général de Chine.

Certains portaient des masques et des lunettes de soleil pour éviter d'être reconnus et de mettre en danger leurs familles restées en Chine, a constaté l'AFP.

Yuge Shi a jugé "très important" de pouvoir manifester. "Vous savez, le gouvernement chinois a tué un très grand nombre de personnes en 1989, et il ne veut pas que les gens s'en souviennent. C'est pourquoi, chaque année, nous devons nous tenir ici et dire à tous les peuples du monde qu'il y a une Histoire", dit-il à l'AFP.

"Près de 40 ans se sont écoulés entre les manifestations des 'Papiers blancs' (de fin 2022, ndlr) et celles de la place Tiananmen, et pourtant nous sommes toujours dirigés par le même gouvernement dont la nature n'a pas changé d'un iota", confie à l'AFP une manifestante qui n'a accepté de donner que son seul prénom, Shawn, pour des raisons de sécurité.

Fin novembre 2022, un rare mouvement d'hostilité envers le régime du président Xi Jinping et sa politique de "zéro Covid" draconienne avait secoué la Chine. Nombre de manifestants agitaient alors des feuilles de papier vierge pour symboliser la censure.

Au cours de cette mobilisation sans précédent depuis les manifestations pro-démocratie de 1989, les protestataires exigeaient l'arrêt des dures restrictions sanitaires contre le Covid-19 et réclamaient davantage de libertés, un mois après la reconduction de Xi Jinping à la tête du pays.