La Russie combat en Ukraine pour ses «terres historiques», proclame Poutine

Le président russe Vladimir Poutine assiste à un concert patriotique dédié à la Journée du défenseur de la patrie au stade Luzhniki de Moscou le 22 février 2023. (Photo, AFP)
Le président russe Vladimir Poutine assiste à un concert patriotique dédié à la Journée du défenseur de la patrie au stade Luzhniki de Moscou le 22 février 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 23 février 2023

La Russie combat en Ukraine pour ses «terres historiques», proclame Poutine

  • «Aujourd'hui, la hiérarchie (militaire) m'a dit que des combats étaient en cours au sein de nos terres historiques pour notre peuple», a lancé M. Poutine, sur scène, devant des dizaines de milliers de ses compatriotes
  • Ce concert baptisé « Gloire aux défenseurs de la patrie» intervient à la veille de la journée du même nom et à l'avant-veille du premier anniversaire de l'offensive de la Russie contre son voisin

MOSCOU: La Russie combat actuellement en Ukraine pour ses "terres historiques", a proclamé mercredi le président russe Vladimir Poutine, pendant un grand concert patriotique au stade Loujniki à Moscou.

"Aujourd'hui, la hiérarchie (militaire) m'a dit que des combats étaient en cours au sein de nos terres historiques pour notre peuple", a lancé M. Poutine, sur scène, devant des dizaines de milliers de ses compatriotes.

Au cours de son apparition qui n'aura duré que quelques minutes, le chef de l'Etat a aussi rendu hommage aux militaires russes déployés en Ukraine qui "se battent avec héroïsme, courage et valeur : nous sommes fiers d'eux".

Il a affirmé que tous ceux qui soutenaient l'armée russe étaient "eux aussi des défenseurs de la patrie, d'une certaine façon". Il s'agit "des travailleurs médicaux, des employés du secteur de la défense, des transports (...) Vous tous, qui êtes venus aujourd'hui soutenir nos combattants".

Le concert patriotique auquel M. Poutine a brièvement participé était organisé par les autorités en soutien à l'offensive en Ukraine.

Par -15°C, le public y a agité des centaines de drapeaux russes, tandis que sur les scènes se succédaient des chants patriotiques et des discours de Russes combattant sur le front ukrainien.

Ce concert baptisé "Gloire aux défenseurs de la patrie" intervient à la veille de la journée du même nom et à l'avant-veille du premier anniversaire de l'offensive de la Russie contre son voisin.

Des enfants du Donbass ukrainien, notamment de la ville martyre de Marioupol (sud-est), sont montés sur scène, se serrant contre un militaire russe qui s'exclamait face à la foule : "Nous gagnerons !".

La Russie est accusée d'avoir kidnappé des milliers d'enfants ukrainiens des territoires qu'elle occupe, ce qu'elle dément : elle considère ces régions comme étant russes et dit avoir organisé des adoptions parfaitement légales.

Le célèbre chanteur Grigori Leps a ouvert le concert avec une chanson glorifiant la Russie, avec des images de la statue "l'appel de la mère patrie" à Volgograd, l'ex-Stalingrad, diffusées sur les écrans du stade.

Les responsables des autorités d'occupation russes de régions ukrainiennes étaient également dans l'enceinte du stade, donnant des interviews aux médias d'Etat russes.

"L'Occident est complice des crimes de guerre" ukrainiens, a ainsi lâché Denis Pouchiline, le chef séparatiste prorusse d'une "république" dans la province de Donetsk dont Moscou revendique l'annexion, avant de dénoncer une fois encore "l'idéologie nazie" du pouvoir ukrainien.

Vladimir Poutine défend sa décision d'avoir déclenché le plus grave conflit en Europe depuis 1945 en accusant Kiev d'orchestrer un "génocide" de russophones en Ukraine.

Il considère aussi les Occidentaux, qui livrent des armes à leur allié ukrainien, comme responsables de l'escalade, estimant qu'Européens et Américains livrent une guerre par procuration pour tenter d'anéantir la Russie.

Confronté à des revers d'ampleur sur le terrain, le Kremlin présente désormais l'offensive en Ukraine comme l'équivalent de la "Grande guerre patriotique" contre l'Allemagne nazie.


Il y a 75 ans, le monde signait la Déclaration universelle des droits de l'Homme

Une statue de l'ancienne Première dame Eleanor Roosevelt (Photo, AFP).
Une statue de l'ancienne Première dame Eleanor Roosevelt (Photo, AFP).
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  • L'universalisme dont elle se prévaut a été qualifié par certains pays de diktat occidental
  • Le Canadien John Peters Humphrey et le Français René Cassin en furent les principaux animateurs

PARIS: Le 10 décembre 1948, l'ONU adopte à Paris la Déclaration universelle des droits de l'Homme (DUDH), ambition humaniste mondiale affichée peu après la victoire des Alliés sur les Nazis.

C'est l'une des premières grandes réalisations de la toute nouvelle Organisation des Nations unies et la première fois qu'un caractère universel est accordé aux besoins de liberté, d'égalité et de justice.

Réunie au Palais de Chaillot, la salle applaudit longuement, debout, ce texte né de l'aspiration à un monde meilleur, après les atrocités de la Seconde Guerre mondiale, d'Auschwitz à Hiroshima.

La Déclaration, sans valeur contraignante, affirme la primauté des droits et libertés des individus sur les droits des Etats, en gravant les droits économiques, sociaux et culturels au même rang que les libertés civiles et politiques.

Les droits de l'Homme ne doivent plus être une question d'ordre intérieur, comme Hitler l'avait revendiqué pour empêcher toute ingérence étrangère, mais une question "universelle".

L'influente Eleanor Roosevelt 

Présidé par l'influente Eleanor Roosevelt, veuve du président américain Franklin Roosevelt mort en 1945, un comité de rédaction comprenant des personnalités de divers pays, a été mis sur pied en 1947, après des mois de préparation.

Le Canadien John Peters Humphrey et le Français René Cassin en furent les principaux animateurs. Les Etats membres de l'ONU ont ensuite apporté amendements et propositions à la charte proposée.

"Premier manifeste que l'humanité organisée ait jamais adopté", selon le juriste René Cassin, elle s'inspire dans ses principes de la Déclaration d'indépendance américaine de 1776 et de la Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Plusieurs femmes ont pesé dans sa rédaction. On doit notamment à Hansa Mehta, une fervente militante des droits des femmes en Inde et à l'étranger, la reformulation de l'article premier de la Déclaration "tous les hommes naissent libres et égaux" en "tous les êtres humains naissent libres et égaux".

La Déclaration est adoptée par consensus, par 48 des 58 membres, 2 étant absents (le Yémen et le Honduras) et 8 s'étant abstenus (la Biélorussie, l'Ukraine, l'URSS, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Yougoslavie ainsi que l'Arabie saoudite, qui conteste l'égalité homme-femme, et l'Afrique du Sud de l'apartheid).

A une époque où le monde était divisé entre le bloc de l'Est et celui de l'Occident, trouver un terrain d'entente fut une tâche colossale, les communistes dénonçant un excès de droits individuels et politiques au détriment des droits sociaux.

Les démocraties occidentales, de leur côté, résistaient à l'idée de traduire la déclaration en instrument juridique contraignant, redoutant qu'il ne fût utilisé contre elles par les pays colonisés. La Déclaration fut d'ailleurs citée par un certain nombre de peuples colonisés pour exiger leur autonomie.

Un fondement du droit international 

Malgré les arrière-pensées qui ont présidé à sa création, la DUDH a inspiré tous les traités internationaux de l'après-guerre et est généralement reconnue comme le fondement du droit international relatif aux droits de l'Homme.

Les conventions internationales de 1979 contre la discrimination envers les femmes, de 1984 contre la torture, de 1990 sur les droits de l'enfant, la création de la Cour Pénale internationale (CPI) en 1998 découlent directement de la DUDH. Elle a également inspiré "le droit d'ingérence" et d'assistance humanitaire.

Mais, si elle a permis certaines avancées vers "l'idéal commun à atteindre", elle n'a empêché nulle part des violations des droits reconnus fondamentaux.

Et elle n'échappe pas à la critique : l'universalisme dont elle se prévaut a été qualifié par certains pays de diktat occidental. Des résistances idéologiques, culturelles, religieuses se sont souvent manifestées dans les pays souverainistes. 


La famille de l'Iranienne Mahsa Amini empêchée de se rendre en France pour le prix Sakharov

Des Kurdes syriens se produisent près d'un portrait de Mahsa Amini, exposé à l'occasion du premier anniversaire de sa mort, lors du festival folklorique de Dabke à Rumaylan (Rmeilan) dans la province de Hasakeh, au nord-est de la Syrie, le 17 septembre 2023. (Photo par Delil Souleiman AFP)
Des Kurdes syriens se produisent près d'un portrait de Mahsa Amini, exposé à l'occasion du premier anniversaire de sa mort, lors du festival folklorique de Dabke à Rumaylan (Rmeilan) dans la province de Hasakeh, au nord-est de la Syrie, le 17 septembre 2023. (Photo par Delil Souleiman AFP)
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  • Le prix Sakharov, plus haute distinction de l'UE pour les droits humains, avait été décerné en octobre dernier par le Parlement européen à Mahsa Amini et au mouvement «Femme Vie Liberté» réprimé dans le sang par le pouvoir en Iran
  • La mort de Mahsa Amini le 16 septembre 2022, à l'âge de 22 ans, trois jours après son interpellation par la police pour un voile mal ajusté, avait entraîné des mois de manifestations de grande ampleur

PARIS : Les parents et le frère de Mahsa Amini, jeune Kurde iranienne décédée l'an dernier, qui devaient recevoir le prix Sakharov décerné à la jeune victime à titre posthume, ont été interdits de quitter le territoire iranien, a annoncé samedi à l'AFP leur avocate en France.

Ils «ont été interdits de monter à bord du vol qui devait les conduire en France pour la remise du prix Sakharov et de quitter le territoire hier à minuit alors qu'ils étaient munis d'un visa», a indiqué Me Chirinne Ardakani. «Leurs passeports ont été confisqués», a-t-elle ajouté.

Le prix Sakharov, plus haute distinction de l'UE pour les droits humains, avait été décerné en octobre dernier par le Parlement européen à Mahsa Amini et au mouvement «Femme Vie Liberté» réprimé dans le sang par le pouvoir en Iran.

La mort de Mahsa Amini le 16 septembre 2022, à l'âge de 22 ans, trois jours après son interpellation par la police pour un voile mal ajusté, avait entraîné des mois de manifestations de grande ampleur contre les dirigeants politiques et religieux iraniens, dont la répression a provoqué des centaines de morts et des milliers d'arrestations.

«Alors que le Nobel se tient au même moment, les autorités iraniennes n'ont jamais été aussi mobilisées pour éviter que les familles des victimes prennent la parole auprès de la communauté internationale», a estimé Me Ardakani.

«Le meurtre brutal de Dina Mahsa Amini a marqué un tournant», avait souligné la présidente du Parlement, Robert Metso, lors de l'annonce du prix.

«Le slogan +Femme Vie Liberté+ est devenu un cri de ralliement pour tous ceux qui défendent l'égalité, la dignité et la liberté en Iran», avait-elle ajouté.


L'envers du paradis: quand Copacabana vire au noir

Vue aérienne de la plage de Copacabana à Rio de Janeiro, Brésil, le 10 novembre 2023. (Photo Mauro Pimentel AFP)
Vue aérienne de la plage de Copacabana à Rio de Janeiro, Brésil, le 10 novembre 2023. (Photo Mauro Pimentel AFP)
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  • Un étudiant venu à Rio pour un concert de Taylor Swift tué à coups de couteau sur la plage, un homme laissé inconscient après une agression, une jeune femme violée par un sans-abri : «Copacabana est triste», lâche Thiago Nogueira, un commerçant de 42 ans
  • Cette poussée de violence, répercutée à l'envi par médias et réseaux sociaux, a engendré un phénomène nouveau: l'apparition de groupes d'auto-défense, justiciers auto-proclamés munis de battes et de poings américains

RIO DE JANEIRO : La carte postale est lacérée: Copacabana, quartier de Rio de Janeiro légendaire pour sa plage interminable et son charme nostalgique, voit son image ternie par une vague de criminalité et l'apparition de justiciers auto-proclamés.

Avec ses kiosques de plage et ses longues rues arborées aux gratte-ciel Art déco décatis, le quartier bourgeois a fait les gros titres ces dernières semaines pour de bien mauvaises raisons: un étudiant venu à Rio pour un concert de Taylor Swift tué à coups de couteau sur la plage, un homme laissé inconscient après une agression, une jeune femme violée par un sans-abri.

«Copacabana est triste», lâche Thiago Nogueira, un commerçant de 42 ans, vêtu d'un maillot noir flanqué des mots «Rio de Janeiro». «La violence est vraiment forte, et ça empire», dit-il à l'AFP.

Les derniers faits divers ont donné à beaucoup le sentiment qu'un cap avait été franchi à «Copa» et alimenté l'inquiétude alors qu'approche la haute saison, qui amène des flots de touristes du monde entier pour les fêtes de fin d'année et le carnaval en février.

Le président de HoteisRio, association du secteur hôtelier, a réclamé des sanctions plus fortes contre les agresseurs.

Cette poussée de violence, répercutée à l'envi par médias et réseaux sociaux, a engendré un phénomène nouveau: l'apparition de groupes d'auto-défense, justiciers auto-proclamés munis de battes et de poings américains.

Sur des vidéos devenues virales, on voit des bandes de jeunes hommes vêtus de noir, visage masqué, patrouillant dans la rue et bastonnant de présumés «suspects».

Dans un Brésil profondément marqué par les discriminations, les cibles de ces prétendus redresseurs de torts leur ont valu des accusations de «racisme».

«Il est facile de savoir qui est un +criminel+ pour ces groupes d'auto-défense: des hommes noirs pauvres», s'indigne le musicien et militant de la cause noire Tas MC sur X, anciennement Twitter.

- «Cordon de sécurité» -

Rio a une longue histoire de violence -- et de réponse violente à la violence.

Il y a cinq ans, le président d'alors, Michel Temer, avait déployé l'armée pour prendre en charge la sécurité dans la mégapole pendant dix mois, jugeant que le crime organisé avait pris les dimensions d'un «cancer» à Rio.

La «Cité merveilleuse», ville hôte des Jeux olympiques de 2016, est régulièrement le théâtre de batailles rangées entre trafiquants de drogue lourdement armés et police, en particulier dans les favelas.

Elle est enfin gangrenée depuis plus de vingt ans par les «milices», créées par des habitants pour combattre la délinquance dans leur quartier, et vite devenues elles-mêmes d'authentiques organisations criminelles.

Les braquages à Copacabana ont augmenté de 25% cette année par rapport à la même période de l'année dernière, et les vols de passants en pleine rue ont bondi de 56%, selon les chiffres de l'Institut public de sécurité, cités par le site d'information G1.

Face à cette flambée, les autorités ont annoncé le déploiement de 1.000 policiers et d'un «cordon de sécurité» pour protéger nuits et week-ends.

A l'occasion d'une réunion de crise jeudi, les chefs de la sécurité de Rio ont promis de rendre la police plus présente et plus visible.

Ils ont également mis en garde les résidents contre toute velléité de jouer les policiers en lieu et place de la police.

«Les membres des groupes d'auto-défense commettent des crimes en prétendant empêcher des crimes. En réalité, ce sont des criminels eux aussi», a asséné Victor Santos, le secrétaire à la sécurité de l'Etat de Rio -- un poste rétabli le mois dernier par le gouverneur de droite Claudio Castro pour lutter contre l'explosion des violences.

Mais l'exaspération des habitants est aussi nourrie par le profil des auteurs d'agressions, souvent des récidivistes, et en vient parfois à viser le fonctionnement même de la justice.

L'agresseur qui avait laissé un homme inconscient sur le trottoir après l'avoir roué de coups le 2 décembre était «bien connu des autorités, avec neuf entrées à son casier judiciaire», a reconnu une enquêtrice.