Enseignement agricole: l'école Du Breuil et la transition écologique en trois questions

Le président français Emmanuel Macron pose pour une photo alors qu'il visite la 59e édition du Salon international de l'agriculture le jour de son inauguration à Paris, le 25 février 2023. (Photo : Christian Hartmann / Pool / AFP)
Le président français Emmanuel Macron pose pour une photo alors qu'il visite la 59e édition du Salon international de l'agriculture le jour de son inauguration à Paris, le 25 février 2023. (Photo : Christian Hartmann / Pool / AFP)
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Publié le Dimanche 26 février 2023

Enseignement agricole: l'école Du Breuil et la transition écologique en trois questions

  • Selon les établissements - publics, privés ou associatifs -, les exigences en matière de transition ne sont pas les mêmes
  • Les obligations de conversion des exploitations (à l'agriculture biologique ou à Haute valeur environnementale, HVE) et d'interdiction du glyphosate (désherbant) concernent surtout les exploitations accolées aux lycées publics

PARIS : Réforme des diplômes, conversion des exploitations agricoles à des pratiques plus durables, interdiction progressive du glyphosate: l'enseignement agricole a entamé sa transition écologique ces dernières années mais des freins persistent, selon le sociologue Joachim Benet Rivière.

Selon les établissements - publics, privés ou associatifs -, les exigences en matière de transition ne sont pas les mêmes, explique le chercheur postdoctoral à l'Ecole nationale supérieure de formation de l'enseignement agricole (ENSFEA).

Malgré des évolutions récentes dans les programmes communs, la transition écologique peine à s'y implanter face aux pratiques traditionnelles ou familiales.

Et les obligations de conversion des exploitations (à l'agriculture biologique ou à Haute valeur environnementale, HVE) et d'interdiction du glyphosate (désherbant) concernent surtout les exploitations accolées aux lycées publics.

Quel est le positionnement des élèves de l'enseignement agricole sur la transition écologique?

«On observe que ce sont plutôt les élèves qui sont d'origine non agricole qui se disent favorables à la transition agroécologique tandis que les élèves d'origine agricole y sont plus réticents, voire hostiles.

Les étudiants dans les formations supérieures et formations pour adultes y sont plus favorables, notamment dans les brevets professionnels, ouverts aux personnes en reconversion. Ces dernières sont souvent d'origine non agricole et cherchent à s'installer dans le bio. Il y a d'ailleurs plus de formations spécialisées en agriculture biologique dans le supérieur. On observe une opposition avec l'enseignement agricole technique, le bac pro, qui forme majoritairement des garçons d'origine agricole.

Enfin, les filles sont plus souvent favorables à l'agroécologie car elles sont plus souvent issues de milieux non agricoles. Elles sont en avance par rapport aux lycées agricoles sur la question du bien-être animal, qui peut cristalliser des tensions. Mais elles sont minoritaires dans les formations techniques.

De plus, les formations techniques sont maintenant minoritaires dans l'enseignement agricole par rapport aux filières dédiées aux services à la personne en milieu rural et à l'aménagement paysager. C'est aussi un lieu d'accueil d'élèves en difficulté scolaire.»

Comment ont évolué les formations ?

«Il y a des changements dans les lycées agricoles, même s'ils ne sont pas spécialisés en agriculture biologique. Les enseignants doivent proposer aux élèves des pratiques différentes (agriculture conventionnelle, raisonnée ou biologique).

Il y a une intégration effective des pratiques et des techniques qui visent à réduire l'utilisation d'intrants chimiques. L'idée c'est de ne pas imposer de pratiques aux élèves qui doivent ensuite se faire leur propre avis.

Par contre, le modèle d'agriculture le plus légitime reste souvent celui qu'ils connaissent, via leur famille.»

Quels sont les freins à l'installation des enjeux de transition dans l'enseignement agricole ?

«Il y a des changements du point de vue politique mais la réception est difficile y compris chez les enseignants. Quand on a été socialisé dans un milieu conventionnel, on va moins favoriser les pratiques d'agriculture biologique.

Il faut faire attention à ne pas tomber dans le discours +les agriculteurs sont en retard, ils ne veulent pas évoluer+. Il y a aussi un poids du syndicalisme dominant, de l'industrie agrochimique, un lobby économique et politique qui est encore plutôt hostile à l'agriculture biologique.

Le terme de transition agroécologique, souvent repris par le ministère, est aussi à interroger. On ne sait pas si ça veut dire zéro pesticide ou si c'est HVE (haute valeur environnementale), un modèle qui ne remet pas en question leur usage» (les exploitations des lycées doivent se convertir d'ici 2025 soit au bio soit être certifiées HVE, NDLR).

De l'école Du Breuil, une «nouvelle génération d'agriculteurs» arrive en ville

A genoux dans la terre, sécateurs en main, les étudiants achèvent leur toute première récolte de chou kale... à l'orée du bois de Vincennes. Ces récents reconvertis, anciens cadres ou profs, se sont lancés dans l'agriculture urbaine, mus par des convictions écologiques.

L'école Du Breuil, dix hectares de jardin aux portes de Paris, délivre depuis 2020 un rare Brevet professionnel responsable d'entreprise agricole (BPREA) centré sur l'agriculture urbaine et péri-urbaine.

Jeunes diplômés, anciens cadres ou professeurs de lycée... «Nos recrues n'ont en général aucune attache dans le monde agricole. Elles veulent se réorienter vers un métier qui a du sens, en l'occurrence une agriculture respectueuse de l'environnement», explique Romain de Swarte, responsable pédagogique du BPREA. Christèle, 53 ans, ex-prof originaire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), voudrait ouvrir une ferme entre les barres d'immeubles et la forêt de Bondy, où elle initierait les scolaires au développement durable. Charlotte Alaux, 32 ans, a quitté une grande maison d'édition pour se lancer dans la production de fleurs comestibles. Mathieu Moureu, 32 ans aussi, voudrait exploiter les «nombreux terrains en friche» de Clamart, dans les Hauts-de-Seine, sa ville d'origine.

Dans les serres de l'école, une cinquantaine d'étudiants apprend chaque année à faire pousser cresson, carottes, laitues, fraises et oignons sur de menues parcelles d'un mètre sur quatre.

Dans le jardin, en partie ouvert au public, où se croisent apprentis fermiers en salopette et promeneurs, ils récoltent cet hiver épinards, courges et choux kale.

«Ces derniers temps, on voit des aberrations écologiques toute la journée. On finit par avoir l'impression de ne plus pouvoir agir. J'ai voulu faire quelque chose à mon petit niveau, dans le secteur de l'alimentation», explique Laura Bessis, ancienne communicante de 30 ans, ciré jaune sur le dos et tarière à la main.

Du bout de cette longue tige de métal, elle prélève un échantillon de terre du potager, qu'elle fera ensuite analyser en laboratoire afin de vérifier que le sol n'est pas trop pollué pour être cultivé.

- Produits locaux -

«En ville, on peut trouver des traces de métaux lourds dans les sols, notamment à cause des constructions alentour. Ici par exemple, il y a dans certaines parcelles des résidus de mâchefer (matériau de construction, NDLR), alors on vérifie dès qu'on en cultive une nouvelle», explique Arnaud Duplat, formateur et jardinier-chef de l'école Du Breuil.

Fondée en 1867 par le préfet Haussman pour instruire les jardiniers de Paris, l'école d'horticulture ambitionne aujourd'hui de former une «nouvelle génération d'agriculteurs» capable de repenser «le modèle agricole des villes et leur dépendance alimentaire», raconte Romain de Swarte.

En France, le nombre de fermes maraichères urbaines a doublé ces dix dernières années, affirme Christine Aubry, ingénieure à l'institut AgroParisTech et enseignante du BPREA.

D'après la chercheuse, la crise sanitaire a notamment dopé les ventes de fruits et légumes via les Amap (Associations pour le maintien d'une agriculture paysanne) à des urbains de plus en plus «méfiants du système alimentaire actuel» et friands de produits dont ils connaissent la provenance.

Mais l'espace disponible étant limité en ville et proche banlieue, ces produits locaux restent rares, et donc chers.

«Pour le moment, c'est un système considéré comme assez élitiste. L'agriculture urbaine ne contribue pas encore à réduire la précarité alimentaire. Mais cela pourrait changer dans les prochaines années, si elle continue à se développer et que les fermes sont davantage subventionnées», affirme Christine Aubry.

En attendant, les futurs maraichers de l'école Du Breuil misent sur la pédagogie et le «lien social», prévoyant tous d'accueillir chez eux public scolaire et curieux.

«Au milieu des champs de betterave, c'est sûr qu'on ne croise pas grand monde. En ville c'est différent, les gens viennent poser des questions sur ce qui est cultivé, les produits utilisés», pose Arnaud Duplat. Et sourit, pointant un célèbre désherbant chimique: «A priori, pas du Roundup.»

 

 


Reconnaissance de la Palestine par la France: normalisation du drapeau palestinien dans l’espace publique français?

Quelques jours avant la date historique, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a appelé les maires de France à hisser le drapeau palestinien sur le fronton de leurs mairies le 22 septembre. Pour le leader de gauche, l’initiative vise à donner un écho visible à la reconnaissance française de la Palestine, mais elle a aussitôt déclenché une tempête. (AFP)
Quelques jours avant la date historique, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a appelé les maires de France à hisser le drapeau palestinien sur le fronton de leurs mairies le 22 septembre. Pour le leader de gauche, l’initiative vise à donner un écho visible à la reconnaissance française de la Palestine, mais elle a aussitôt déclenché une tempête. (AFP)
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  • Quelques jours avant la date historique, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a appelé les maires de France à hisser le drapeau palestinien sur le fronton de leurs mairies le 22 septembre
  • Pour le leader de gauche, l’initiative vise à donner un écho visible à la reconnaissance française de la Palestine, mais elle a aussitôt déclenché une tempête

PARIS: Le 22 septembre 2025 restera comme une date symbolique de la diplomatie française : celle de la reconnaissance officielle de l’État palestinien.
Il est pourtant évident que cette reconnaissance, qui aura lieu dans le cadre d’une conférence internationale initiée par la France et l’Arabie saoudite, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, ne fait pas l’unanimité en France.

Ce geste, applaudi par une partie de la classe politique, toutes tendances confondues, a donné lieu à une bataille politico-juridique inattendue autour de la possibilité, ou non, de faire flotter le drapeau palestinien sur les mairies et dans l’espace public.

Quelques jours avant la date historique, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a appelé les maires de France à hisser le drapeau palestinien sur le fronton de leurs mairies le 22 septembre.
Pour le leader de gauche, l’initiative vise à donner un écho visible à la reconnaissance française de la Palestine, mais elle a aussitôt déclenché une tempête.

L’indignation a été immédiate, dans certains milieux de droite comme de gauche, ainsi qu’au sein d’une partie de la communauté juive, ce geste étant perçu comme une provocation dans un contexte de tensions sociales et de recrudescence des actes antimusulmans d’une part, et antisémites d’autre part.

Cette controverse se nourrit d’un vide législatif, car le pavoisement des édifices publics n’est pas strictement encadré par la loi.
Selon un ancien conseiller au ministère de l’Intérieur interrogé par Arab News en français, l’usage républicain veut que les mairies arborent en permanence le drapeau français, et souvent le drapeau européen, mais aucune loi n’interdit en théorie d’y ajouter d’autres bannières.
Néanmoins, en 2005, le Conseil d’État avait fixé une limite, stipulant qu’il est interdit d’apposer sur les bâtiments publics des symboles exprimant des opinions politiques, religieuses ou philosophiques.

Cette jurisprudence a conduit plusieurs tribunaux administratifs, ces derniers mois, à ordonner aux mairies de Gennevilliers, Saint-Denis ou Besançon de retirer le drapeau palestinien hissé sur leur parvis.

Le ministre de l’Intérieur démissionnaire, Bruno Retailleau (personnalité de la droite républicaine), s’est saisi de ce principe de neutralité pour recadrer le patron des socialistes : « La justice a récemment ordonné à plusieurs reprises le retrait de drapeaux palestiniens », a-t-il rappelé, estimant qu’un tel geste violerait la neutralité des services publics.

Cette interprétation a immédiatement suscité des protestations et des accusations d’injustice. Ainsi, le maire communiste de Gennevilliers, Patrice Leclerc, a dénoncé un « deux poids, deux mesures ».
« Le drapeau israélien a flotté des mois durant sur plusieurs mairies, comme Antony ou Nice, sans réaction de l’État », s’est-il indigné, ajoutant que « dès qu’il s’agit du drapeau palestinien, les préfets attaquent en justice ».

Il est en effet avéré que la justice a longtemps toléré les drapeaux israéliens hissés en solidarité avec les otages détenus à Gaza. Ce n’est qu’en juin dernier que le tribunal de Nice a finalement ordonné leur retrait, jugeant que ce pavoisement constituait, par sa durée, un soutien politique explicite à Israël.

Le cas de l’Ukraine complique encore davantage la donne : depuis l’invasion russe, de nombreuses mairies ont hissé le drapeau ukrainien, et en décembre 2024, le tribunal administratif de Versailles a validé ce geste, y voyant « une marque de solidarité et non un message politique ».
C’est précisément cette interprétation qu’Olivier Faure a invoquée pour défendre le drapeau palestinien.

Toutefois, pour l’ancien conseiller au ministère de l’Intérieur, des nuances s’imposent. Brandir un drapeau étranger dans la rue relève de la liberté d’expression, à condition que ce geste ne trouble pas l’ordre public — auquel cas la justice est en droit de l’interdire. Mais la difficulté à qualifier le geste est plus grande lorsque ce drapeau est hissé sur un bâtiment public, censé incarner la neutralité de l’État.

La date du 22 septembre, qui coïncide cette année avec le Nouvel An juif, a aussi nourri la polémique, notamment sur les réseaux sociaux. Faure a répondu aux critiques en soulignant que « tant que vous penserez que vous ne pouvez fêter le Nouvel An juif et l’an 1 d’un État palestinien, vous ne sèmerez que la haine ».

Au-delà de la question juridique, le débat autour du drapeau palestinien révèle l’extrême sensibilité du conflit israélo-palestinien dans la société française.
Dans un pays qui accueille à la fois la plus grande communauté juive au monde après l’Argentine (environ 600 000 personnes) et une importante communauté issue de l’immigration arabe et musulmane, les symboles prennent une valeur explosive.

Là où certains voient une simple expression de solidarité internationale, d’autres redoutent un signe de partialité, voire une menace pour la cohésion nationale.

La reconnaissance de l’État palestinien par la France vise à redonner un élan diplomatique à la solution à deux États, après l’adoption à l’ONU de la « Déclaration de New York » portée par Paris et Riyad. Mais sur le plan intérieur, elle se traduit par une crispation politique et sociale, et d’autres polémiques à venir.


Financement libyen: la longue protestation d'innocence de Nicolas Sarkozy

L'ancien président français Nicolas Sarkozy arrive à l'audience de son procès pour financement illégal de sa campagne par la Libye lors de sa candidature à l'élection présidentielle de 2007, au tribunal de Paris, à Paris, le 25 mars 2025. (AFP)
L'ancien président français Nicolas Sarkozy arrive à l'audience de son procès pour financement illégal de sa campagne par la Libye lors de sa candidature à l'élection présidentielle de 2007, au tribunal de Paris, à Paris, le 25 mars 2025. (AFP)
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  • Nicolas Sarkozy clame son innocence depuis 15 ans dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007
  • Le parquet a requis 7 ans de prison pour corruption passive et financement illégal ; l’ancien président dénonce un dossier « vide » et l’absence de preuves, à quelques jours du verdict attendu le 25 septembre

PARIS: Dans des interviews, des communiqués, face aux enquêteurs: durant près de quinze ans, Nicolas Sarkozy n'a cessé de clamer son innocence dans l'affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.

Dans ce qu'il présente comme un complot ourdi par le clan Kadhafi pour lui faire payer son rôle déterminant dans sa chute à l'automne 2011, l'ancien président attend son jugement le 25 septembre. Le parquet national financier (PNF) a requis sept ans de prison, notamment pour corruption passive et financement illégal de campagne électorale.

Le temps des accusations

Le 12 mars 2012, un an après les accusations portées par le clan Kadhafi, Nicolas Sarkozy est questionné à la télévision, en pleine campagne présidentielle, sur des révélations de Mediapart: "C'est grotesque et je suis désolé que sur une grande chaîne comme TF1, on doive m'interroger sur les déclarations de M. Kadhafi ou de son fils."

Entre les deux tours, Nicolas Sarkozy dénonce "une infamie". "Quand je pense qu'il y a des journalistes qui osent donner du crédit au fils Kadhafi et aux services secrets de M. Kadhafi", réagit sur Canal + celui qui est encore président. "Vous croyez vraiment qu'avec ce que j'ai fait à M. Kadhafi, il m'a fait un virement ? Pourquoi pas un chèque endossé ?"

Le 20 mars 2014, dans le Figaro, il sort du silence observé depuis sa défaite de 2012: "Sans l'ombre d'une preuve et contre toute évidence, me voici accusé d'avoir fait financer ma campagne de 2007 par M. Kadhafi." Le 2 octobre, en meeting à Troyes, il assure des militants UMP de sa probité, et ajoute: "Ca commence à me chauffer dans le bas du dos."

Le retour politique parasité

En octobre 2016, candidat à la primaire de la droite, Nicolas Sarkozy répond au Monde et à RFI sur l'affaire libyenne: "Mais combien de temps allez-vous vous rouler dans le caniveau ?". "On ne peut pas à la fois me reprocher d'avoir conduit au départ du colonel Kadhafi (...), et en même temps de m'accuser de... quoi ? C'est grotesque." Mi-novembre, il oppose sa colère froide à une question lors d'un débat entre candidats de la primaire sur France TV: "Quelle indignité. Nous sommes sur le service public. Vous n'avez pas honte?".

Le temps des enquêteurs

Lors de sa mise en examen en mars 2018, Nicolas Sarkozy dit aux juges être conscient que "les faits dont on (le) suspecte sont graves". "Mais (...) si c'est une manipulation du dictateur Kadhafi ou de sa bande, (...) alors je demande aux magistrats que vous êtes de mesurer la profondeur, la gravité, la violence de l'injustice qui me serait faite." "J'ai déjà beaucoup payé pour cette affaire", "j'ai perdu l'élection présidentielle de 2012 à 1,5%", "depuis le 11 mars 2011, je vis l'enfer de cette calomnie."

Sur TF1, il dénonce encore l'absence de preuves: "il n'y a que la haine, la boue, la médiocrité, la malveillance et la calomnie." "Si jamais on m'avait dit qu'un jour j'aurais des ennuis à cause de Kadhafi, je me serais dit +Mais vous fumez monsieur+", dit encore l'ancien président.

Au printemps 2023, le parquet national financier demande son renvoi en correctionnelle. Nicolas Sarkozy tweete: "Je suis un combattant, la vérité finira par triompher." Il accorde aussi un entretien au Figaro: "Le dossier est vide." "Si on dit que je suis malhonnête, il faut le prouver", poursuit-il en septembre sur BFMTV.

Le procès

"Dix années de calomnie, 48 heures de garde à vue, 60 heures d'interrogatoire", énumère-t-il au début de son procès en janvier 2025. Et finalement, "on a trouvé quoi ? Rien", "pas un centime libyen", tranche-t-il, "lassé de (se) défendre d'un financement sans que personne ne me mette une preuve sous le nez". "Je dois rester bien sûr posé, calme, respectueux, mais quand même, y a un moment c'est fort quoi ! Les innocents ont le droit de s'indigner !"

Après les réquisitions, il fustige dans un communiqué "la fausseté et la violence des accusations", "l'outrance de la peine réclamée" et "la faiblesse des charges alléguées." "Je démontrerai mon innocence, ça prendra le temps qu'il faudra, mais on y arrivera", promet-il dans un entretien au Parisien.


Etat palestinien: la France au défi de transformer le symbole en actes

Face à la fuite en avant d'Israël à Gaza, l'élan suscité par la France en faveur d'une reconnaissance d'un Etat palestinien est un succès diplomatique, mais des défis majeurs demeurent pour l'imposer concrètement. (AFP)
Face à la fuite en avant d'Israël à Gaza, l'élan suscité par la France en faveur d'une reconnaissance d'un Etat palestinien est un succès diplomatique, mais des défis majeurs demeurent pour l'imposer concrètement. (AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron a choisi une chaîne israélienne pour tenter de convaincre que cette reconnaissance, qui sera officialisée lundi à New York à l'assemblée générale des Nations unies, fait partie d'un vaste plan de paix
  • Pour les diplomates français, la dimension politique de la reconnaissance a pour l'heure "éclipsé" d'autres éléments de la feuille de route portée par la France et l'Arabie saoudite à l'ONU

PARIS: Face à la fuite en avant d'Israël à Gaza, l'élan suscité par la France en faveur d'une reconnaissance d'un Etat palestinien est un succès diplomatique, mais des défis majeurs demeurent pour l'imposer concrètement.

Le président français Emmanuel Macron a choisi une chaîne israélienne pour tenter de convaincre que cette reconnaissance, qui sera officialisée lundi à New York à l'assemblée générale des Nations unies, fait partie d'un vaste plan de paix qui doit à la fois mettre fin au désastre humanitaire à Gaza et assurer la sécurité d'Israël en isolant le groupe islamiste Hamas, auteur des attaques du 7 octobre 2023.

Pour les diplomates français, la dimension politique de la reconnaissance a pour l'heure "éclipsé" d'autres éléments de la feuille de route portée par la France et l'Arabie saoudite à l'ONU et endossée par une centaine de pays et d'organisations internationales, dont la Ligue arabe, mais pas par les Etats-Unis.

Outre la reconnaissance - point sur lequel la France doit être suivie par le Royaume-Uni -, ce projet comprend en effet la libération des otages encore aux mains du Hamas et la démilitarisation du groupe islamiste, deux conditions posées par le gouvernement israélien lui-même pour arrêter le conflit.

Mais le moyen d'y parvenir reste flou.

L'ambassadeur des Etats-Unis en France Charles Kushner a ainsi ouvertement questionné l'initiative française jeudi. "Ouvrez un navigateur et recherchez des images d''armes du Hamas'. La France accordera-t-elle d'abord la reconnaissance, puis attendra-t-elle le désarmement du Hamas?", a-t-il lancé sur X.

Sanctions? 

Reconnaître un Etat palestinien "est la meilleure manière d'isoler le Hamas", a défendu jeudi Emmanuel Macron sur la chaîne israélienne 12, disant vouloir "travailler" avec le Premier ministre israélien Benjanmin Netanyahu.

Cette initiative n'est pas un simple événement, c'est "un processus de maturation progressive associant les pays occidentaux et les pays arabes au sein de groupes de travail qui vont faire converger les visions des uns et des autres pour nourrir cette déclaration", a expliqué son ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot à des journalistes.

"Qu'Emmanuel Macron entraîne d'autres pays dans son sillage, c'est formidable. Mais si cette déclaration n'est pas accompagnée de sanctions immédiates à l'égard d'Israël, pour avoir un impact sur le terrain, c'est +Kalam fadi+, +des mots pour rien+ comme on dit en arabe", estime Agnès Levallois, maîtresse de conférence à la Fondation pour la recherche stratégique à Paris.

Il n'y a plus de temps à perdre alors que "le carnage continue à Gaza", souligne cette spécialiste du Moyen-Orient, en référence aux dizaines de milliers de morts et la catastrophe humanitaire dans le petit territoire en proie à la famine, selon l'ONU.

Pour la représentante de la Palestine en France, Hala Abou Hassira, la conférence de lundi est "un moment important qui porte l'espoir" de concrétiser la solution à deux Etats.

Mais elle prône aussi "des sanctions concrètes, telles qu'un embargo sur les armes à Israël, une rupture des relations avec Israël qui inclut l'arrêt total de l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël".

Jusqu'à présent, les propositions de sanctions européennes, ciblant notamment les importations agricoles israéliennes, se sont heurtées à la réticence de certains Etats membres comme la Hongrie.

L'atout saoudien 

"Si on regarde l'ensemble, la reconnaissance est la seule chose qu'on puisse faire", estime Gérard Araud, ancien ambassadeur de France en Israël et aux Etats-Unis. Il prédit néanmoins un échec de l'initiative car le Premier ministre israélien, pour l'heure soutenu par le président américain Donald Trump, ne veut pas d'un État palestinien.

La feuille de route franco-saoudienne prévoit en outre que le futur Etat palestinien soit gouverné par une Autorité Palestinienne modernisée et réformée.

Pour David Khalfa, cofondateur du centre de recherches Atlantic Middle East Forum, si l'initiative est "pleine de bonnes intentions", "elle se heurte à un double obstacle: la réalité d'un système politique palestinien verrouillé de l'intérieur par la corruption et la concentration des pouvoirs entre les mains d'un dirigeant affaibli qui refuse de céder la place, mais aussi le rejet israélien massif, partagé par la coalition au pouvoir comme par l'opposition".

A court terme, rien ne va bouger sur le terrain, concède Bertrand Besancenot, ancien ambassadeur de France au Qatar et en Arabie saoudite.

Mais il reste convaincu que le choix de la France "de travailler main dans la main avec l'Arabie saoudite" va payer à long terme.

Car c'est "aujourd'hui le seul pays qui peut inciter le président Trump à exercer les pressions nécessaires sur Netanyahu pour que soit prise en compte la revendication légitime du peuple palestinien", dit-il.