Enseignement agricole: l'école Du Breuil et la transition écologique en trois questions

Le président français Emmanuel Macron pose pour une photo alors qu'il visite la 59e édition du Salon international de l'agriculture le jour de son inauguration à Paris, le 25 février 2023. (Photo : Christian Hartmann / Pool / AFP)
Le président français Emmanuel Macron pose pour une photo alors qu'il visite la 59e édition du Salon international de l'agriculture le jour de son inauguration à Paris, le 25 février 2023. (Photo : Christian Hartmann / Pool / AFP)
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Publié le Dimanche 26 février 2023

Enseignement agricole: l'école Du Breuil et la transition écologique en trois questions

  • Selon les établissements - publics, privés ou associatifs -, les exigences en matière de transition ne sont pas les mêmes
  • Les obligations de conversion des exploitations (à l'agriculture biologique ou à Haute valeur environnementale, HVE) et d'interdiction du glyphosate (désherbant) concernent surtout les exploitations accolées aux lycées publics

PARIS : Réforme des diplômes, conversion des exploitations agricoles à des pratiques plus durables, interdiction progressive du glyphosate: l'enseignement agricole a entamé sa transition écologique ces dernières années mais des freins persistent, selon le sociologue Joachim Benet Rivière.

Selon les établissements - publics, privés ou associatifs -, les exigences en matière de transition ne sont pas les mêmes, explique le chercheur postdoctoral à l'Ecole nationale supérieure de formation de l'enseignement agricole (ENSFEA).

Malgré des évolutions récentes dans les programmes communs, la transition écologique peine à s'y implanter face aux pratiques traditionnelles ou familiales.

Et les obligations de conversion des exploitations (à l'agriculture biologique ou à Haute valeur environnementale, HVE) et d'interdiction du glyphosate (désherbant) concernent surtout les exploitations accolées aux lycées publics.

Quel est le positionnement des élèves de l'enseignement agricole sur la transition écologique?

«On observe que ce sont plutôt les élèves qui sont d'origine non agricole qui se disent favorables à la transition agroécologique tandis que les élèves d'origine agricole y sont plus réticents, voire hostiles.

Les étudiants dans les formations supérieures et formations pour adultes y sont plus favorables, notamment dans les brevets professionnels, ouverts aux personnes en reconversion. Ces dernières sont souvent d'origine non agricole et cherchent à s'installer dans le bio. Il y a d'ailleurs plus de formations spécialisées en agriculture biologique dans le supérieur. On observe une opposition avec l'enseignement agricole technique, le bac pro, qui forme majoritairement des garçons d'origine agricole.

Enfin, les filles sont plus souvent favorables à l'agroécologie car elles sont plus souvent issues de milieux non agricoles. Elles sont en avance par rapport aux lycées agricoles sur la question du bien-être animal, qui peut cristalliser des tensions. Mais elles sont minoritaires dans les formations techniques.

De plus, les formations techniques sont maintenant minoritaires dans l'enseignement agricole par rapport aux filières dédiées aux services à la personne en milieu rural et à l'aménagement paysager. C'est aussi un lieu d'accueil d'élèves en difficulté scolaire.»

Comment ont évolué les formations ?

«Il y a des changements dans les lycées agricoles, même s'ils ne sont pas spécialisés en agriculture biologique. Les enseignants doivent proposer aux élèves des pratiques différentes (agriculture conventionnelle, raisonnée ou biologique).

Il y a une intégration effective des pratiques et des techniques qui visent à réduire l'utilisation d'intrants chimiques. L'idée c'est de ne pas imposer de pratiques aux élèves qui doivent ensuite se faire leur propre avis.

Par contre, le modèle d'agriculture le plus légitime reste souvent celui qu'ils connaissent, via leur famille.»

Quels sont les freins à l'installation des enjeux de transition dans l'enseignement agricole ?

«Il y a des changements du point de vue politique mais la réception est difficile y compris chez les enseignants. Quand on a été socialisé dans un milieu conventionnel, on va moins favoriser les pratiques d'agriculture biologique.

Il faut faire attention à ne pas tomber dans le discours +les agriculteurs sont en retard, ils ne veulent pas évoluer+. Il y a aussi un poids du syndicalisme dominant, de l'industrie agrochimique, un lobby économique et politique qui est encore plutôt hostile à l'agriculture biologique.

Le terme de transition agroécologique, souvent repris par le ministère, est aussi à interroger. On ne sait pas si ça veut dire zéro pesticide ou si c'est HVE (haute valeur environnementale), un modèle qui ne remet pas en question leur usage» (les exploitations des lycées doivent se convertir d'ici 2025 soit au bio soit être certifiées HVE, NDLR).

De l'école Du Breuil, une «nouvelle génération d'agriculteurs» arrive en ville

A genoux dans la terre, sécateurs en main, les étudiants achèvent leur toute première récolte de chou kale... à l'orée du bois de Vincennes. Ces récents reconvertis, anciens cadres ou profs, se sont lancés dans l'agriculture urbaine, mus par des convictions écologiques.

L'école Du Breuil, dix hectares de jardin aux portes de Paris, délivre depuis 2020 un rare Brevet professionnel responsable d'entreprise agricole (BPREA) centré sur l'agriculture urbaine et péri-urbaine.

Jeunes diplômés, anciens cadres ou professeurs de lycée... «Nos recrues n'ont en général aucune attache dans le monde agricole. Elles veulent se réorienter vers un métier qui a du sens, en l'occurrence une agriculture respectueuse de l'environnement», explique Romain de Swarte, responsable pédagogique du BPREA. Christèle, 53 ans, ex-prof originaire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), voudrait ouvrir une ferme entre les barres d'immeubles et la forêt de Bondy, où elle initierait les scolaires au développement durable. Charlotte Alaux, 32 ans, a quitté une grande maison d'édition pour se lancer dans la production de fleurs comestibles. Mathieu Moureu, 32 ans aussi, voudrait exploiter les «nombreux terrains en friche» de Clamart, dans les Hauts-de-Seine, sa ville d'origine.

Dans les serres de l'école, une cinquantaine d'étudiants apprend chaque année à faire pousser cresson, carottes, laitues, fraises et oignons sur de menues parcelles d'un mètre sur quatre.

Dans le jardin, en partie ouvert au public, où se croisent apprentis fermiers en salopette et promeneurs, ils récoltent cet hiver épinards, courges et choux kale.

«Ces derniers temps, on voit des aberrations écologiques toute la journée. On finit par avoir l'impression de ne plus pouvoir agir. J'ai voulu faire quelque chose à mon petit niveau, dans le secteur de l'alimentation», explique Laura Bessis, ancienne communicante de 30 ans, ciré jaune sur le dos et tarière à la main.

Du bout de cette longue tige de métal, elle prélève un échantillon de terre du potager, qu'elle fera ensuite analyser en laboratoire afin de vérifier que le sol n'est pas trop pollué pour être cultivé.

- Produits locaux -

«En ville, on peut trouver des traces de métaux lourds dans les sols, notamment à cause des constructions alentour. Ici par exemple, il y a dans certaines parcelles des résidus de mâchefer (matériau de construction, NDLR), alors on vérifie dès qu'on en cultive une nouvelle», explique Arnaud Duplat, formateur et jardinier-chef de l'école Du Breuil.

Fondée en 1867 par le préfet Haussman pour instruire les jardiniers de Paris, l'école d'horticulture ambitionne aujourd'hui de former une «nouvelle génération d'agriculteurs» capable de repenser «le modèle agricole des villes et leur dépendance alimentaire», raconte Romain de Swarte.

En France, le nombre de fermes maraichères urbaines a doublé ces dix dernières années, affirme Christine Aubry, ingénieure à l'institut AgroParisTech et enseignante du BPREA.

D'après la chercheuse, la crise sanitaire a notamment dopé les ventes de fruits et légumes via les Amap (Associations pour le maintien d'une agriculture paysanne) à des urbains de plus en plus «méfiants du système alimentaire actuel» et friands de produits dont ils connaissent la provenance.

Mais l'espace disponible étant limité en ville et proche banlieue, ces produits locaux restent rares, et donc chers.

«Pour le moment, c'est un système considéré comme assez élitiste. L'agriculture urbaine ne contribue pas encore à réduire la précarité alimentaire. Mais cela pourrait changer dans les prochaines années, si elle continue à se développer et que les fermes sont davantage subventionnées», affirme Christine Aubry.

En attendant, les futurs maraichers de l'école Du Breuil misent sur la pédagogie et le «lien social», prévoyant tous d'accueillir chez eux public scolaire et curieux.

«Au milieu des champs de betterave, c'est sûr qu'on ne croise pas grand monde. En ville c'est différent, les gens viennent poser des questions sur ce qui est cultivé, les produits utilisés», pose Arnaud Duplat. Et sourit, pointant un célèbre désherbant chimique: «A priori, pas du Roundup.»

 

 


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
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  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.