Ukraine: la ville de Bakhmout est «pratiquement encerclée», selon le patron de Wagner

Des militaires ukrainiens marchent dans une tranchée boueuse près de Bakhmout le 2 mars 2023, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo, AFP)
Des militaires ukrainiens marchent dans une tranchée boueuse près de Bakhmout le 2 mars 2023, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 03 mars 2023

Ukraine: la ville de Bakhmout est «pratiquement encerclée», selon le patron de Wagner

  • Malgré une importance stratégique contestée par les experts, Bakhmout est devenue un symbole de la lutte pour le contrôle de la région industrielle du Donbass
  • Zelensky, qui s'était rendu sur place en décembre, avait juré de défendre cette ville-forteresse «aussi longtemps que possible»

MOSCOU: La ville de Bakhmout, épicentre des combats dans l'est de l'Ukraine, est "pratiquement encerclée" par les forces russes, a affirmé vendredi le patron du groupe paramilitaire Wagner.

"Les unités de Wagner ont pratiquement encerclé Bakhmout, il ne reste plus qu'une seule route" pour en sortir, a déclaré Evguéni Prigojine dans une vidéo publiée sur Telegram par son service de presse.

M. Prigojine, dont les hommes sont en première ligne dans cette bataille, a appelé le président ukrainien Volodymyr Zelensky à ordonner aux troupes ukrainiennes de se retirer de la ville, aujourd'hui en grande partie détruite et où les deux camps ont subi de lourdes pertes.

"Si avant nous faisions face à une armée ukrainienne professionnelle, qui combattait contre nous, aujourd'hui nous voyons de plus en plus de personnes âgées et d'enfants. Ils se battent, mais leur vie à Bakhmout est courte, un jour ou deux", a lancé M. Prigojine.

"Donnez-leur une chance de quitter la ville, elle est pratiquement encerclée", a-t-il ajouté.

La vidéo montre ensuite trois personnes, un homme âgé et deux jeunes, demandant face caméra à M. Zelensky de leur permettre de partir.

Bakhmout, symbole et enjeu politique

La bataille de Bakhmout, l'une des plus dures et des plus longues de la guerre en Ukraine, a acquis au fil des mois une valeur de symbole dépassant largement son intérêt stratégique. Cette ville dévastée est aussi au coeur de féroces rivalités internes sur la scène russe.

 

Une ville ravagée par des combats acharnés

Forte de 70.000 habitants avant l'invasion russe, Bakhmout, petite ville industrielle de l'est, a été en grande partie réduite en cendres par huit mois de terribles combats. Qualifiée "d'enfer sur terre" ou de "Verdun" par les combattants ukrainiens, elle est aujourd'hui "pratiquement encerclée" affirme le groupe paramilitaire russe Wagner, en première ligne dans cette bataille.

Tirs d'artillerie incessants de part et d'autre, avancées mètre par mètre... la bataille de Bakhmout a aussi marqué par ces vagues d'assaut des mercenaires de Wagner, "combattants zombies" comme les appellent les Ukrainiens, tombant sous les balles mais immédiatement relayés par d'autres.

Cette "boucherie" a entraîné des pertes immenses côté russe (plusieurs centaines de tués ou blessés par jour selon des sources occidentales), mais aussi côté ukrainien face au rouleau compresseur russe.

Les civils - quelques milliers restés tapis dans des caves - ont également payé un lourd tribut, ainsi que les volontaires ukrainiens ou étrangers venant les assister.

 

Quelle importance stratégique ?

Peu, concordent les analystes. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky l'avait lui même reconnu début février dans une interview au Figaro: "d'un point de vue stratégique, Bakhmout n'a pas beaucoup d'importance car les Russes ont entièrement détruit la ville avec leur artillerie", disait-il.

"La bataille de Bakhmout a absorbé des ressources humaines et matérielles massives. Cet investissement est hors de proportion comparé à l'importance de la ville", estime pour l'AFP le général australien retraité Mick Ryan, chercheur associé au CSIS (Center for strategic and international studies). "Ce n'est pas un objectif militaire de haute valeur", insiste-t-il.

Pour l'analyste militaire belge Joseph Henrotin, Bakhmout, devenue "zone de fixation pour les camps", a servi aux deux belligérants à "dégrader mutuellement leur potentiel".

"Depuis décembre, les Russes essayent d'amincir le dispositif ukrainien en les forçant à fixer des forces un peu partout et en les empêchant de se concentrer pour créer une percée. Bakhmout n'est qu'une pièce du puzzle. Sa chute ne signifie rien si les autres points tiennent", estime M. Henrotin, tout en estimant qu'elle peut malgré tout ouvrir, à terme, la voie vers Kramatorsk, la grande ville industrielle plus à l'ouest, mais encore largement protégée.

 

Importance symbolique

Au fil des mois et à mesure que la situation devenait de plus en plus dure, Bakhmout a acquis une dimension symbolique. Le président Zelensky s'était rendu en personne dans la "forteresse Bakhmout" en décembre. Côté russe, le patron de la milice Wagner, Evgueni Prigojine, en a quasiment fait un combat personnel, censé prouver la valeur de ses mercenaires.

"L'ampleur des pertes a donné à Bakhmout une importance politique", résume Mick Ryan.

"C'est un vrai symbole, tant pour les Ukrainiens que pour les Russes", abonde Thibault Fouillet, de la Fondation pour la Recherche Stratégique (FRS).

"Mais certaines choses qu'on annonçait comme des tournants définitifs dans la guerre ne le sont pas", dit-il, citant notamment le retrait russe de la région de Kharkiv (nord-est) en avril ou la reprise de Kherson (sud)  par les Ukrainiens à l'automne. "Je pense qu'on va rapidement passer à autre chose, pour basculer vers le prochain point chaud du front, c'est la caractéristique de cette guerre d'attrition", juge le chercheur.

 

Un enjeu interne russe

La prise de Bakhmout, qui constituerait la première victoire russe depuis les contre-offensives ukrainiennes de l'automne, est au coeur de la rivalité aigüe opposant le ministère de la Défense russe et le patron de Wagner, qui cherche depuis des mois à acquérir une stature politique.

Ces dernières semaines, Prigojine a fustigé "la monstrueuse bureaucratie militaire" et les "politicards", accusant même de "trahison" le chef d'état-major Valéri Guerassimov et le ministre de la Défense Sergueï Choïgou, à qui il a reproché de ne pas livrer de munitions à ses mercenaires.

La guerre en Ukraine a donné des rêves de grandeur au patron de Wagner, selon la chercheuse russe Tatiana Stanovaya du centre R.Politik.

S'il ne s'attaque pas à Poutine, "Prigojine est désormais un acteur de la scène russe, très visible". "Avec la guerre en Ukraine, il a gagné l'attention du public, et il aime ça", ajoute Mme Stanovaya.

Malgré une importance stratégique contestée par les experts, Bakhmout est devenue un symbole de la lutte pour le contrôle de la région industrielle du Donbass.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui s'était rendu sur place en décembre, avait juré de défendre cette ville-forteresse "aussi longtemps que possible".

Le commandement militaire ukrainien y avait admis mardi une situation "extrêmement tendue" face aux assauts russes.

Les forces russes ont progressé ces dernières semaines au nord et au sud de Bakhmout, coupant trois des quatre routes d'approvisionnement ukrainiennes vers la ville.

Il ne reste plus comme voie de sortie que celle menant, plus à l'ouest, vers Tchassiv Iar, au sud de laquelle les Russes essaient également de progresser.


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.