La proposition de loi «sécurité globale»: et maintenant, la crise politique

Le ministre français de l'Intérieur, Gerald Darmanin, attend avant de participer au journal télévisé du soir de France 2 à Paris, le 26 novembre 2020.  (THOMAS COEX / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur, Gerald Darmanin, attend avant de participer au journal télévisé du soir de France 2 à Paris, le 26 novembre 2020. (THOMAS COEX / AFP)
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Publié le Vendredi 27 novembre 2020

La proposition de loi «sécurité globale»: et maintenant, la crise politique

  • Alors que les discussions étaient déjà tendues, la succession d'affaires de violences policières, lors d'une opération d'évacuation de migrants ou d'une interpellation qui a viré au tabassage d'un producteur de musique ont achevé d'électriser le débat
  • «Ces images déshonorent notre République», a dénoncé vendredi la ministre déléguée à l'Egalité, Elisabeth Moreno

D'abord resté à prudente distance, Emmanuel Macron doit désormais désamorcer «la crise de l'article 24» de la proposition de loi «sécurité globale» qui en quelques jours est parvenue à braquer la majorité, fragiliser la solidarité gouvernementale et opposer le Premier ministre au président de l'Assemblée nationale.

Alors que les discussions étaient déjà tendues, la succession d'affaires de violences policières, lors d'une opération d'évacuation de migrants ou d'une interpellation qui a viré au tabassage d'un producteur de musique ont achevé d'électriser le débat.

Se tenant à l'écart jusque-là, le président de la République s'est dit vendredi «très choqué» par les images du tabassage. Il a reçu jeudi son ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, indéfectible soutien de l'article 24, qui prévoie de pénaliser la diffusion malveillante d'images de policiers et gendarmes. 

De cette entrevue a germé une idée, dont la paternité revient, à tout le moins officiellement, à M. Darmanin: faire «réécrire» l'article par une «commission» indépendante.

Validée, puis annoncée par Matignon, la décision d'apaisement a au contraire mis le feu aux poudres. Au point que, vendredi, deux des plus hauts personnages de l'Etat, le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand, un très proche de M. Macron, et celui du Sénat, Gérard Larcher (LR), ont exprimé leur «opposition» à cette commission - irritation relayée dans toute la majorité, d'abord par le chef des députés LREM Christophe Castaner.

Résultat, Jean Castex a dû promettre, vendredi, dans un courrier adressé aux protestataires, que la commission ne serait finalement pas chargée de réécrire le texte, qui «ne saurait relever que du Parlement». M. Castaner lui en a donné acte, en estimant que le rôle des chambres était «réaffirmé et respecté».

L'épisode a, quoi qu'il en soit, encore amplifié la crise politique née d'une disposition contestée de la proposition de loi sur la «sécurité globale», déjà critiquée par une partie de la majorité pour sa rédaction floue et finalement votée, après réécriture, en première lecture par l'Assemblée nationale.

La colère des journalistes et des défenseurs des libertés publiques, qui jugent la disposition liberticide, ne s'est pas calmée malgré les promesses du gouvernement de défendre de la liberté.

Le souvenir du CPE 

Les doutes gagnent une partie de l'exécutif: jeudi soir, le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti s'est dit «scandalisé par ces images» de violence policière et a reconnu que, sans elles, «on n'aurait pas connu cette affaire. «Il faut filmer», a-t-il conclu, sans commenter l'article 24, dont la constitutionnalité-même est mise en doute par nombre de juristes.

«Ces images déshonorent notre République», a dénoncé vendredi la ministre déléguée à l'Egalité, Elisabeth Moreno.

M. Macron doit-il désormais intervenir pour empêcher un enlisement politique ? «Vite, il faut que Dieu parle ? Après on dit qu'il se mêle de tout, c'est sans fin», rejette une source au sein de la majorité. Selon un cadre macroniste, «au nom de la séparation des pouvoirs», le chef de l'Etat ne souhaite pas s'exprimer sur un texte d'origine parlementaire.

Reste que les crises sont multiples: d'abord, il s'agit de trouver une porte de sortie à l'article 24 contre lequel un nouveau rassemblement est prévu samedi à Paris.

Le futur projet de loi contre les séparatismes - cette fois à l'initiative du gouvernement - pourrait reprendre l'idée d'une protection face à la diffusion malveillante d'images, étendue à tous les fonctionnaires, permettant ainsi d'enterrer à peu de frais la disposition de «sécurité globale».

«Parfois, renoncer est plus sage que s'obstiner», glisse le député LREM Hugues Renson, en convoquant le souvenir de la crise du CPE de 2006.

Ensuite, il s'agit pour le chef de l'Etat de retrouver le «en même temps» conjugant fermeté régalienne incarnée par M. Darmanin et lutte contre les violences policières. Mais la tête du préfet de police, Didier Lallement, réclamée à voix haute par des députés LREM, est toujours ardemment défendue par le locataire de Beauvau.

Enfin, la question de l'autorité de M. Castex est à nouveau convoquée. «Je pense que Gérald Darmanin profite de la faiblesse du Premier ministre», estime un député LREM qui regrette que M. Macron donne «le sentiment qu'il ne s'intéresse pas» aux parlementaires de la majorité.


Colère agricole en France: Macron reçoit les syndicats, des blocages persistent

Des tracteurs lors d'une manifestation organisée par le syndicat agricole Coordination Rurale près du Mont-Saint-Michel, dans le nord-ouest de la France, le 18 décembre 2025. (AFP)
Des tracteurs lors d'une manifestation organisée par le syndicat agricole Coordination Rurale près du Mont-Saint-Michel, dans le nord-ouest de la France, le 18 décembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron a reçu les syndicats agricoles, opposés à l’accord UE-Mercosur, dans un contexte de forte colère liée aux crises sanitaires, notamment la dermatose bovine
  • Les blocages routiers se poursuivent dans le Sud-Ouest, alors que de nouveaux cas de la maladie sont confirmés et que la mobilisation agricole se prolonge

PARIS: Le président français Emmanuel Macron a reçu mardi les syndicats agricoles pour parler de l'accord UE-Mercosur, auquel ils sont opposés, tandis que des axes routiers sont toujours bloqués pour protester contre le traitement par les autorités de l'épizootie de dermatose bovine.

"L'objet du rendez-vous, c'était d'essayer d'éteindre un peu le feu qui est partout dans les campagnes", a souligné Stéphane Galais, porte-parole national de la Confédération paysanne - un syndicat classé à gauche -, à la sortie de la rencontre, ajoutant qu'il fallait pour cela "des mesures structurelles fortes".

Les syndicats disent avoir par ailleurs rappelé au chef de l'Etat "l'extrême tension" et la "colère" du monde agricole et que des réponses étaient attendues "dès les premiers jours de janvier" sur le Mercosur mais aussi sur les crises sanitaires, au premier rang desquelles la dermatose bovine et la grippe aviaire.

C'était la première rencontre entre le chef de l'Etat et les syndicats agricoles depuis début décembre et l'amorce de la crise qui secoue l'élevage français, face à la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

C'était aussi la première depuis l'annonce, jeudi dernier, du report a priori au 12 janvier de la signature du traité décrié entre l'UE et des pays du Mercosur.

Cet accord faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui inquiète les filières concernées, lesquelles affirment que ces produits ne respectent pas les mêmes normes que les produits européens.

L'accord permettrait en revanche aux Européens d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Amérique du Sud.

Sur le terrain, la mobilisation a connu un léger regain mardi (53 actions mobilisant 1.600 personnes, selon le ministère de l'Intérieur) par rapport à lundi (35 actions mobilisant 1.200 personnes), mais elle reste nettement inférieure à celle de la semaine dernière (110 actions jeudi).

Certains agriculteurs sont mobilisés depuis plus de 10 jours, notamment contre l'abattage total des troupeaux dans lesquels des cas de DNC sont détectés dans le Sud-Ouest.

Mardi, le ministère de l'Agriculture a confirmé un nouveau cas de la maladie en Haute-Garonne, portant le bilan total à 115 foyers enregistrés depuis juin en France. Ce dernier troupeau concerné a été abattu.

Dans le Sud-Ouest, des blocages d'autoroute étaient notamment maintenus sur l'A63 près de Bordeaux ou sur l'A64 au sud de Toulouse ou près de Bayonne.

Au sud de Bordeaux, les manifestants de la branche locale du syndicat Coordination rurale - classé à droite - ont dit vouloir organiser un réveillon et une messe de Noël mercredi soir sur leur barrage, à l'instar des agriculteurs mobilisés près de Toulouse.


Mercosur: les syndicats rencontrent Macron à l'Elysée, la dermatose en toile de fond

Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron reçoit les syndicats agricoles, opposés à l’accord UE-Mercosur, dont la signature a été reportée, mais les tensions restent fortes malgré les concessions évoquées par le gouvernement
  • La rencontre se déroule sur fond de crise sanitaire liée à la dermatose bovine et de blocages agricoles persistants, avec une remobilisation annoncée début janvier

PARIS: Emmanuel Macron reçoit mardi après-midi les syndicats agricoles pour parler de l'accord UE-Mercosur auquel ils sont opposés mais le sujet de la dermatose bovine sera difficile à éviter au regard des blocages routiers qui persistent sur le terrain.

La FNSEA, les Jeunes agriculteurs (JA), la Coordination rurale et la Confédération paysanne sont reçus à 16H30, ont-ils annoncé à l'AFP.

C'est la première rencontre entre le chef de l'Etat et les syndicats depuis début décembre et l'amorce de la crise qui secoue l'élevage français, face à la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

C'est aussi la première depuis l'annonce jeudi dernier du report de la signature du traité décrié entre l'UE et des pays du Mercosur, après une mobilisation de plusieurs milliers d'agriculteurs avec leurs tracteurs à Bruxelles.

Cet accord faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui alarme les filières concernées qui affirment que ces produits ne respectent pas les mêmes normes, notamment environnementales et sanitaires, que les produits européens.

Il permettrait en revanche aux Européens d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Amérique du Sud.

Emmanuel Macron s'était félicité du report de la signature, demandant que les "avancées" réclamées par la France, mais aussi l'Italie, se concrétisent afin que "le texte change de nature".

Les syndicats agricoles sont remontés depuis des mois et demandaient au président de prendre clairement position, après que celui-ci eut déclaré en novembre être "plutôt positif" quant à la possibilité d'accepter l'accord.

Emmanuel Macron avait rencontré des représentants de différents syndicats à Toulouse mi-novembre, des manifestations ayant changé le programme d'un déplacement qui devait être consacré aux réseaux sociaux et au spatial.

- "Mercosur = NON" -

"Le message de la FNSEA au Président de la République restera inchangé, ferme et clair: Mercosur = NON", a indiqué mardi le syndicat dominant dans une déclaration à l'AFP. Son président Arnaud Rousseau fera une déclaration à la presse à l'issue. Il avait déjà rencontré le président mi-novembre.

La Coordination rurale et la Confédération paysanne, fer de lance de la contestation de la gestion de la dermatose par l'Etat et opposants historiques au traité UE-Mercosur, ont ensuite confirmé à l'AFP leur venue.

Pour ces deux syndicats, c'est la première rencontre entre le président et des représentants nationaux depuis le dernier Salon de l'agriculture.

Plusieurs sources diplomatiques ont indiqué que la nouvelle échéance visée pour la signature était désormais le 12 janvier au Paraguay.

"Nous ne nous contentons pas de nous opposer à cet accord. En l'état, nous obtenons des concessions inédites au bénéfice de nos agriculteurs, que cet accord soit signé ou qu'il ne le soit pas", a déclaré lors des questions au gouvernement mardi Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, citant des "mesures miroir pour garantir la réciprocité", des "contrôles douaniers" et des clauses de sauvegarde annoncées en septembre par la Commission européenne.

Les agriculteurs français ont déjà prévenu qu'ils se remobiliseraient début janvier, jugeant ces réponses insuffisantes.

Mais certains sont mobilisés depuis plus de 10 jours sur le terrain, notamment contre la stratégie gouvernementale pour lutter contre la dermatose bovine dans le Sud-Ouest, mais aussi ponctuellement plus au nord, contre le Mercosur et les autres crises qui pèsent sur le monde agricole.

En Gironde, la Coordination rurale (CR33) a annoncé organiser un "réveillon de Noël façon auberge espagnole" sur l'A63 au sud de Bordeaux.

"Le côté festif, ça permet de durer plus longtemps", résume à l'AFP Jean-Paul Ayres, porte-parole de la CR33, alors qu'un terrain de moto-cross a été improvisé sur le terre-plein central de l'autoroute.

Les bureaux centraux des syndicats se sont bien gardés d'appeler à lever les blocages, laissant les sections locales décider et appelant simplement au "repos" de leurs troupes et à une "trêve" pour certains pour mieux reprendre en janvier si nécessaire.

La mobilisation des agriculteurs a connu un léger regain lundi (35 actions mobilisant 1.200 personnes) par rapport à dimanche (23 actions), mais elle est nettement en baisse comparée à la semaine dernière (110 actions jeudi, 93 vendredi).


Vol au Louvre: une grille de protection installée sur la fenêtre empruntée par les cambrioleurs

Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
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  • Une grille de protection a été installée sur la porte-fenêtre du Louvre utilisée lors du vol spectaculaire de bijoux du 19 octobre, dont le butin de 88 millions d’euros reste introuvable
  • Le musée renforce sa sécurité après de vives critiques : grilles supplémentaires, dispositifs anti-intrusion et vidéosurveillance accrue prévue d’ici 2026

PARIS: Une grille de protection a été installée mardi matin sur la porte-fenêtre du musée du Louvre à Paris, empruntée par les cambrioleurs lors du spectaculaire vol de bijoux du 19 octobre, a constaté un journaliste de l'AFP.

Le 19 octobre, quatre malfaiteurs ont réussi à approcher le bâtiment en camion-élévateur et à hisser deux d'entre eux jusqu'à cette fenêtre menant à la galerie d'Apollon, qui donne sur les quais de Seine, grâce à une nacelle.

Ils ont dérobé huit joyaux de la Couronne de France. Le butin, estimé à 88  millions d'euros, reste introuvable.

Depuis le cambriolage, la sécurité du musée le plus visité au monde se retrouve au cœur des critiques, le braquage ayant révélé une série de défaillances.

La grille de protection "est l'une des mesures d'urgence décidées après le vol ", a précisé mardi à l'AFP Francis Steinbock, administrateur général adjoint du musée.

Des "réflexions" sont en cours concernant la "sécurisation sur les autres fenêtres", a ajouté le responsable.

La présidente du Louvre, Laurence des Cars, avait assuré la semaine dernière devant les sénateurs français qu'une grille serait reposée "avant Noël". Elle avait précisé que la précédente avait été retirée en 2003-2004, lors d'importants travaux de restauration.

Autre chantier majeur: le renforcement de la vidéosurveillance sur les façades du palais. "Nous avons annoncé un dispositif d'une centaine de caméras positionnées autour du palais. Le marché a été signé et l'installation pourra débuter tout au long de l'année 2026 ", a précisé Francis Steinbock.

La semaine dernière, le Louvre avait également annoncé l'achèvement de la mise en place de dispositifs anti-intrusion autour du musée.

Du 15 au 18 décembre, les agents du Louvre étaient en grève pour réclamer de meilleures conditions de travail et des moyens supplémentaires pour la sécurité. Le mobilisation a été levée vendredi, mais les négociations se poursuivent entre les syndicats et le ministère de la Culture pour répondre aux inquiétudes des agents.