Paris doit clarifier sa position vis-à-vis de Pékin pour peser en Asie-Pacifique

Sur cette photo d'archives prise le 6 novembre 2019, le président français Emmanuel Macron marche avec le président chinois Xi Jinping lors d'une cérémonie de bienvenue au Grand Hall du Peuple à Pékin. (Photo, AFP)
Sur cette photo d'archives prise le 6 novembre 2019, le président français Emmanuel Macron marche avec le président chinois Xi Jinping lors d'une cérémonie de bienvenue au Grand Hall du Peuple à Pékin. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 04 avril 2023

Paris doit clarifier sa position vis-à-vis de Pékin pour peser en Asie-Pacifique

  • «Le centre névralgique de la planète (...) s'est largement déplacé vers la zone indo-pacifique», résume Cédric Perrin, sénateur du parti Les Républicains
  • En 2040, «l'Indo-Pacifique», qui regroupera 75% de la population mondiale, produira plus de la moitié du PIB mondial et les trois quarts des réserves de matières premières critiques

PARIS: Le président français Emmanuel Macron se rend cette semaine en Chine, acteur central de la région stratégique de l'Asie-Pacifique, où la France cherche à renforcer son influence en s'appuyant sur ses territoires d'Outremer et sa présence militaire.

Mais Paris n'a pas encore les moyens de ses ambitions et doit clarifier sa position à l'égard de Pékin pour peser de tout son poids.

Pourquoi la France a-t-elle des ambitions dans cette région ?

"Le centre névralgique de la planète (...) s'est largement déplacé vers la zone indo-pacifique", résume Cédric Perrin, sénateur du parti Les Républicains et coauteur d'un rapport sur la stratégie française dans cette région.

L'"Indo-Pacifique" est une formule largement popularisée par l'administration américaine pour faire référence à la région qui s'étend de l'Inde et de l'océan indien au sud du Pacifique, en passant par la Chine, l'Asie du Sud-Est, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

"Cette zone est le futur nouveau monde", renchérit le sénateur socialiste Rachid Temal, coauteur du rapport.

En 2040, "l'Indo-Pacifique", qui regroupera 75% de la population mondiale, produira plus de la moitié du PIB mondial et les trois quarts des réserves de matières premières critiques, selon leur étude.

Mais cette région à fort potentiel économique est sous de multiples menaces: de la prolifération nucléaire -- avec la multiplication des tirs de missiles de la Corée du Nord --, au terrorisme djihadiste en passant par la criminalité organisée, la piraterie ou encore la pêche illicite. De plus, la rivalité sino-américaine génère de nouvelles tensions voire des risques d'embrasement.

Quelle est la légitimité de la France ?

Dans cette région, les territoires français s'étendent des côtes orientales de l'Afrique aux côtes occidentales des Amériques avec notamment Mayotte, l'île de la Réunion, la Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna, la Polynésie française ou encore des territoires antarctiques et subantarctiques.

"Quelque 1,6 million de citoyens français vivent dans ces territoires" éloignés de la métropole, sans compter les Français expatriés dans les pays de la région, souligne Rachid Temal.

"On y détient la deuxième zone économique exclusive mondiale après les Etats-Unis, avec plus de 11 millions de km2", ajoute Cédric Perrin.

Sur le plan militaire, plus de 7.000 soldats français y sont stationnés, une dizaine de frégates sont opérationnelles et quelques avions assurent la surveillance de la zone.

Quel est l'objectif de la France ?

"La France entend peser de tout son poids diplomatique et stratégique dans ce vaste espace", souligne Isabelle Saint-Mézard, chercheuse au Centre Asie de l'Institut français des relations internationales (Ifri).

Car la France, "certes une puissance moyenne", estime qu'elle peut avoir une "influence globale", explique-t-elle.

Et la France veut d'autant plus faire entendre sa voix qu'en Asie-Pacifique "se joue, pour bonne partie, l'avenir du système international", ajoute-t-elle.

Face aux risques d'une nouvelle guerre froide entre la Chine et les Etats-Unis, Paris se positionne comme "alternative" à Pékin ou Washington.

La France peut-elle se démarquer des Etats-Unis ?

Au ministère des Armées, on note cependant que "la stratégie de la France de puissance d'équilibre(s) est peu compréhensible des partenaires régionaux" qui perçoivent la France comme un allié naturel des Etats-Unis.

Pour le sénateur Rachid Temal, cette stratégie manque de "lisibilité" et la France n'a pas les moyens de ses ambitions.

En outre, sa frileuse position vis-à-vis de Pékin pour préserver ses intérêts économiques n'est pas tenable. "La France doit réaffirmer une position forte et réaliste (...) vis-à-vis de la Chine notamment sur la nécessité du respect du droit international", estime ainsi Cédric Perrin.

Paris doit aussi tenir compte de la position commune de l'Union européenne ainsi que d'autres pays membres comme l'Allemagne qui compte profiter de la croissance de la zone.

Quelles conséquences pour la France ?

Au ministère des Armées, on relève qu'à force d'éviter de participer aux alliances, notamment celles initiées par les Etats-Unis pour ne pas froisser Pékin, la France se coupe non seulement des "opportunités" économiques et commerciales, mais aussi d'opportunités d'influence, contrairement à l'Allemagne ou le Royaume-Uni. Et de citer les opportunités manquées liées aux "projets d'infrastructures de Partners of the Blue Pacific", un groupe informel mené par les Etats-Unis dans la zone.

Sur le plan militaire, la même source regrette que les exercices et déploiements restent annuels et routiniers. "Non seulement, les déploiements dans la région sont rares mais encore on ne sait pas encore suffisamment les valoriser", ajoute-t-elle.

Quelles alliances possibles pour la France ?

La crise avec l'Australie, consécutive à l'affaire des contrats de sous-marins, étant terminée, la France pourrait privilégier un axe trilatéral comprenant l'Inde, un partenaire-clé et convoité.

Elle pourrait aussi renforcer ses liens avec Singapour ou encore les Philippines.

Sur le plan militaire, Jérémy Bachelier, officier de la Marine nationale actuellement détaché à l'Ifri, suggère la mise en place d'une "forme de permanence européenne dans cette région (...) avec pour objectif d'assurer la sécurité maritime dans une zone allant du Golfe de Bengale à la mer de Chine méridionale en passant par le détroit de Malacca". Car cette région est "hautement stratégique pour la préservation du flux maritime entre l'Asie et l'Europe".

L'objectif n'est pas de "cristalliser" les tensions, souligne-t-il, mais de "signaler" que l'Europe à "des intérêts prépondérants" dans la zone. Et les pays du Vieux Continent contribueraient ainsi "au maintien du dialogue et statu quo autour du problème taïwanais".


Macron fustige les «bourgeois des centres-villes» qui financent «parfois» le narcotrafic

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  • Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international"
  • La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic

PARIS: Le président Emmanuel Macron a estimé mercredi lors du Conseil des ministres que ce sont "parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants", selon des propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors de son compte-rendu.

Le chef de l'État a appuyé "l'importance d'une politique de prévention et de sensibilisation puisque, je reprends ses mots, +c'est parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants+", a précisé Maud Bregeon, ajoutant: "on ne peut pas déplorer d'un côté les morts et de l'autre continuer à consommer le soir en rentrant du travail".

Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international". La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic.

 


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).

 


Assassinat de Mehdi Kessaci: «Non, je ne me tairai pas» face au narcotrafic, dit son frère dans une tribune au Monde

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  • "Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic"
  • "On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement"

PARIS: "Non, je ne me tairai pas" face au narcotrafic, a déclaré mercredi dans une tribune publiée dans le journal Le Monde Amine Kessaci, le frère de Mehdi, abattu jeudi à Marseille par deux personnes à moto.

"Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic", a également écrit le militant écologiste de 22 ans, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme. En 2020, cette famille de six enfants avait déjà été endeuillée par l'assassinat d'un autre de ses frères, Brahim, 22 ans, dont le corps avait été retrouvé carbonisé dans un véhicule.

"On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement", a encore déclaré Amine Kessaci, qui a enterré mardi son frère Mehdi. "Voici ce que font les trafiquants : ils tentent d’annihiler toute résistance, de briser toute volonté, de tuer dans l’œuf tout embryon de révolte pour étendre leur pouvoir sur nos vies", a-t-il ajouté.

La protection policière qui lui a été accordée ne l'a pas été à ses proches, a souligné le militant écologiste de 22 ans. "Pourtant, qui ignorait que ma famille avait déjà payé un tribut de sang? Comment ne pas savoir que ma famille pouvait être touchée ?", s'est-il interrogé.

"Face à un tel ennemi, l’Etat doit prendre la mesure de ce qu'il se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée", a-t-il encore prévenu.

"Il est temps d’agir, par exemple de faire revenir les services publics dans les quartiers, de lutter contre l’échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d’œuvre soumise, de doter les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin, de renforcer, de soutenir réellement les familles de victimes du narcotrafic. Nous comptons nos morts, mais que fait l’Etat ?"

Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné jeudi à Marseille près d'une salle de concert par deux hommes à moto, activement recherchées, un "crime d'intimidation" et "un assassinat d'avertissement" pour les autorités.