Macron sème le trouble parmi ses alliés avec des propos sur Taïwan

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux étudiants de l'université Sun Yat-sen à Guangzhou, le 7 avril 2023. (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux étudiants de l'université Sun Yat-sen à Guangzhou, le 7 avril 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 11 avril 2023

Macron sème le trouble parmi ses alliés avec des propos sur Taïwan

  • «La pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes» sur la question de Taïwan «et nous adapter au rythme américain et à une surréaction chinoise», a déclaré Emmanuel Macron
  • Aux Etats-Unis, la Maison Blanche avait cherché lundi à dédramatiser la polémique, estimant que les Etats-Unis entretenaient une «relation bilatérale formidable» avec la France

PARIS: Le président français Emmanuel Macron était mardi sous le feu des critiques des deux côtés de l'Atlantique après ses propos appelant l'Union européenne à ne pas être "suiviste" des Etats-Unis ou de la Chine sur la question de Taïwan.

De retour d'un voyage en Chine, le dirigeant français a déclaré au site américain Politico et au quotidien économique français Les Echos que l'Europe ne devrait pas s'aligner sur les États-Unis ou sur la Chine en cas de conflit à propos de Taïwan.

"La pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes" sur la question de Taïwan "et nous adapter au rythme américain et à une surréaction chinoise", a déclaré Emmanuel Macron.

L'Elysée met notamment en avant la nécessité d'une "Europe souveraine" et "d'une autonomie stratégique". Les propos du président reflètent également la volonté de ne pas jeter de l'huile sur le feu face à une possible escalade entre la Chine et les États-Unis.

Nombre d'analystes et politiciens en Europe et aux États-Unis s'interrogent sur l'opportunité de ces propos au moment où Washington assure la sécurité de l'Europe en soutenant politiquement, militairement et financièrement l'Ukraine et alors même qu'un conflit entre les deux premières puissances mondiales sur Taïwan auraient des répercussions pour les Européens.

"La politique de #Macron conduit l'Europe dans une impasse géopolitique", a estimé le député allemand conservateur Norbert Röttgen sur Twitter, soulignant que cela ne conduisait pas à la souveraineté mais à l'isolement. "L'Europe doit devenir plus indépendante, non pas contre les États-Unis mais en partenariat avec nos alliés transatlantiques. Un ordre mondial façonné par #Xi n'est pas dans l'intérêt de l'Europe !", selon lui.

Metin Hakverdi, un député allemand du parti social-démocrate d’Olaf Scholz, estime dans le journal Tagesspiegel qu'il s'agit d'une "grave erreur" que l’Occident se laisse diviser dans sa position vis-à-vis de Pékin. "Cela affaiblit la communauté de valeurs occidentales".

Aux Etats-Unis, la Maison Blanche avait cherché lundi à dédramatiser la polémique, estimant que les Etats-Unis entretenaient une "relation bilatérale formidable" avec la France.

Mais le sénateur républicain Marco Rubio a publié une vidéo suggérant que Washington devrait repenser ses propres priorités : "Si Macron parle au nom de toute l'Europe, et leur position est que maintenant, ils ne vont pas choisir leur camp entre les États-Unis et la Chine sur Taïwan, peut-être devrions-nous pas non plus prendre parti. . .  et (les laissez) gérer l'Ukraine".

«Fiasco»

Pour les experts, les propos du président français sont "inopportuns" alors qu'Emmanuel Macron a déjà eu des prises de positions irritantes pour certains de ses alliés, comme son diagnostic de "mort cérébrale" de l'Otan en 2019 et plus récemment sa volonté de ne pas "humilier" la Russie lorsque la guerre russe en Ukraine se terminera.

"C'est inopportun et contradictoire car s'il y a une crise dans le détroit de Taïwan les intérêts de la France et de l'Union européenne seront immédiatement affectés", affirme à l'AFP Marc Julienne, chercheur à l'Institut français des relations internationales (Ifri). "La question du détroit de Taiwan est justement notre affaire".

Pour Antoine Bondaz, spécialiste de la Chine à la Fondation pour la recherche stratégique, un groupe de réflexion basé à Paris, "en termes de communication, c'est un fiasco" car Emmanuel Macron laisse entendre que Washington est responsable des tensions autour de Taiwan plutôt que la Chine.

De tels propos pourraient laisser Pékin penser que la France, voire l'Europe, n'interviendrait pas si la Chine envahissait et prenait le contrôle de Taïwan, estime l'expert. "Cela affaiblit la dissuasion".

«Voix singulière»

Face au tollé, l'Elysée a défendu la posture du président : L'Europe "doit pouvoir faire entendre sa voix singulière". Le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire, a estimé sur la radio Europe 1 qu'Emmanuel Macron avait "parfaitement raison de réclamer l'indépendance et la souveraineté européenne comme il le fait depuis 2017".

Ancien conseiller d'Emmanuel Macron, Stéphane Séjourné a appelé sur la radio France Inter à ne pas "caricaturer les propos" du président, soulignant que ce dernier souhaitait que l'Europe et la France puissent jouer "un rôle de désescalade". "Et dans ce cadre-là, évidement, nos alliés sont les Américains", a-t-il assuré.

Mais pour Marc Julienne, "le risque est que Macron ait porté atteinte ou égratigné cette unité européenne en construction".

Pour James Laurenceson, directeur de l'Institut des relations Australie-Chine à l'UTS, cité par la chaîne publique australienne SBS, le président français a mal choisi son moment mais n'a fait "qu'énoncer une réalité" : la probabilité d'un conflit entre Pékin et Washington. "C'est franchement un point de vue que partage le gouvernement australien".


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».