«Pas nos amis»: en Arménie, la frustration grandit face à la Russie

Un pont décoré de drapeaux de l'Arménie et de la région séparatiste du Haut-Karabakh à Erevan, le 7 octobre 2020. (AFP).
Un pont décoré de drapeaux de l'Arménie et de la région séparatiste du Haut-Karabakh à Erevan, le 7 octobre 2020. (AFP).
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Publié le Dimanche 16 avril 2023

«Pas nos amis»: en Arménie, la frustration grandit face à la Russie

  • L'Arménie, une ex-république soviétique du Caucase de 3 millions d'habitants, dépend de la protection militaire et économique de Moscou
  • A la suite d'un cessez-le-feu parrainé par Moscou, l'Arménie a dû céder des territoires à l'Azerbaïdjan et des soldats de maintien de la paix russes ont été déployés, ceux-là mêmes qui sont aujourd'hui accusés d'inaction

EREVAN : Dans une rue animée d'Erevan, la capitale arménienne, Artour Sargsyan s'en prend à la Russie, qu'il juge être une alliée peu fiable, une opinion de plus en plus répandue dans ce pays, partenaire de longue date de Moscou.

L'invasion russe de l'Ukraine en février 2022 a provoqué la consternation chez les alliés traditionnels de la Russie. En Arménie, à ce choc s'est ajouté l'incapacité de Moscou à mettre fin au blocus azerbaïdjanais de l'enclave disputée du Nagorny-Karabakh, qui dure depuis des mois.

"Je rêve du jour où l'Arménie quittera l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) et la sphère d'influence russe", lance aujourd'hui Artour Sargsyan, en référence à l'alliance militaire régionale menée par Moscou.

Ce philologue de 26 ans reproche à la Russie et à l'OTSC de "ne pas avoir aidé l'Arménie dans une période très difficile", alors que le blocus azerbaïdjanais du Nagorny-Karabakh a provoqué des pénuries et coupures de courant.

L'Arménie, une ex-république soviétique du Caucase de 3 millions d'habitants, dépend de la protection militaire et économique de Moscou. Le pays accueille une base militaire russe et une vague d'exilés russes y ont émigré depuis un an pour fuir la guerre et la mobilisation décrétée par Vladimir Poutine.

Aujourd'hui, de plus en plus d'Arméniens appellent à chercher de nouveaux partenaires à l'étranger pour faire face à la pression de l'Azerbaïdjan, avec lequel Erevan a mené deux guerres dont la plus récente, en 2020, a abouti à une déroute militaire arménienne.

A la suite d'un cessez-le-feu parrainé par Moscou, l'Arménie a dû céder des territoires à l'Azerbaïdjan et des soldats de maintien de la paix russes ont été déployés, ceux-là mêmes qui sont aujourd'hui accusés d'inaction.

"L'Arménie est un petit pays et elle doit rejoindre un bloc occidental, une alliance où elle recevra une aide réelle. Nous devrions quitter l'OTSC. Ils ne nous aident pas, ils ne sont pas nos amis", estime Arpine Madaryan, un professeur d'anglais de 42 ans.

Pragmatisme

La colère arménienne envers son allié russe s'était déjà affichée en janvier, lorsque Erevan a refusé d'accueillir des exercices de l'OTSC, sans pour autant aller jusqu'à quitter l'alliance.

Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian s'est lui plaint de "problèmes" avec les soldats de la paix russes, se tournant vers la communauté internationale pour tenter de lever le blocus azerbaïdjanais du Nagorny-Karabakh.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, des dizaines de milliers de Russes ont trouvé refuge en Arménie. Si les Arméniens sont bien disposés envers eux, c'est l'attitude envers le pouvoir à Moscou qui est en train de changer.

"La confiance envers la Russie est à un niveau historiquement bas en Arménie", souligne le politologue Viguen Hakobyan, qui note une "déception si profonde qu'elle pourrait nourrir un sentiment antirusse avec le temps".

Selon lui, la majorité des élites arméniennes sont aujourd'hui hostiles à la Russie.

L'avenir diplomatique de l'Arménie n'est pour autant pas clair et, de l'avis de beaucoup d'experts, elle ne peut pas se permettre de quitter l'orbite russe.

Au Nagorny-Karabakh, l'enclave sous blocus azerbaïdjanais, peuplée majoritairement d'Arméniens,  les habitants ont des avis partagés sur les soldats de la paix russes, qui demeurent la seule protection face aux troupes de Bakou.

"Les soldats de la paix russes dissuadent les Azerbaïdjanais qui veulent tuer tous les Arméniens et nous expulser de nos maisons", déclare à l'AFP un habitant du Karabakh âgé de 56 ans, sous couvert d'anonymat.

"Mais quand un village entier et d'importantes positions militaires sont pris par les forces azerbaïdjanaises du jour au lendemain, nous commençons à douter de l'intégrité des Russes", ajoute-t-il.

Les accrochages entre forces arméniennes et azerbaïdjanaises restent fréquents. Mardi, sept militaires ont été tués à la frontière entre les deux pays.

Selon l'analyste russe indépendant  Konstantin Kalachev, la réticence de Moscou à agir est liée à la volonté de ne pas courroucer la Turquie, protectrice de l'Azerbaïdjan.

"Moscou s'est abstenue de prendre parti dans le conflit pour des raisons pragmatiques", explique-t-il auprès de l'AFP.

"L'Arménie n'a de toute façon nulle part où aller", résume-t-il.


L'Inde cherche à porter la voix du « Sud global » entre le G7 et le Brics

Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
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  • L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.
  • « Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

PARIS : Invitée du G7 qui débute dimanche, mais aussi membre fondateur des Brics, l'Inde souhaite porter la voix du « Sud global », se posant en « passerelle » entre les différents acteurs de la scène internationale, affirme son ministre des Affaires étrangères dans un entretien à l'AFP.

L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.

« Nous avons été un pays invité depuis plusieurs années et je pense que ça a été bénéfique pour le G7 », déclare à l'AFP Subrahmanyam Jaishankar depuis Paris, où il a clos samedi une visite en France, se félicitant d'avoir « la capacité de travailler avec différents pays sans qu'aucune relation ne soit exclusive ». 

Avec une population en passe de devenir la quatrième économie mondiale, l'Inde est l'un des pays les plus peuplés du globe. Elle siège à la table de nombreuses organisations, avec les Occidentaux au G7 ou au sein du « Quad » (Dialogue quadrilatéral pour la sécurité, avec les États-Unis, le Japon, l'Australie), mais aussi avec la Chine, la Russie et l'Iran au sein des Brics et du Groupe de Coopération de Shangaï.

« Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

Ancienne colonie britannique, indépendante depuis 1947, l'Inde se pose, avec le Brésil, en héraut du « Sud global », qui réunit « des pays qui ont été victimes de l'ordre mondial ces dernières années, ces derniers siècles ». 

« Dans les pays du Sud, il existe un fort ressentiment face aux inégalités de l'ordre international, une volonté de le changer, et nous en faisons pleinement partie », explique le ministre en poste depuis 2019.

« Aujourd'hui, pour des pays comme les nôtres, il est important de nous exprimer, de mener, de faire sentir notre présence. »

Cette voix passe aussi par les BRICS, devenue « l'une des principales plateformes de rassemblement pour les pays non occidentaux », dont les chefs d'État se réuniront en juillet.

Partisan de « négociations directes » pour résoudre la guerre entre l'Ukraine et la Russie, qui a frappé durement les pays du Sud, M. Jaishankar affiche son scepticisme face aux politiques de sanctions occidentales : « Ça n'a pas vraiment marché jusqu'à présent, non ? » 

Partenaire commercial et allié politique de la Russie, l'Inde pourrait se retrouver exposée en cas de sanctions contre Moscou.

« L'économie mondiale est sous tension. Plus on ajoute des facteurs de tensions, plus les difficultés seront grandes. »

Dans l'ordre mondial actuel, l'Inde doit composer avec la « discontinuité » posée par Donald Trump.

Des négociations en cours sur le sujet ont « bien avancé ».L'Inde doit également chercher « un équilibre » avec la Chine. 

Pékin soutient Islamabad, que New Delhi accuse de soutenir les activités de « terroristes » islamistes sur son sol.

Le 22 avril, une attaque au Cachemire indien a déclenché une confrontation militaire de quatre jours entre les deux pays, la plus grave depuis 1999. Narendra Modi a promis une « riposte ferme » à toute nouvelle attaque « terroriste », renforçant le spectre d'une escalade entre les deux puissances nucléaires.

« En 2008, la ville de Mumbai a été attaquée (plusieurs attentats jihadistes ont fait 166 morts) et nous avons commis l'erreur de ne pas réagir avec fermeté. Nous sommes déterminés à ne pas répéter ces erreurs. Si des terroristes pénètrent en Inde depuis et grâce au soutien d'un pays voisin, nous les poursuivrons et nous les châtierons ».

Mais l'Inde n'a jamais envisagé de recourir à l'arme nucléaire, assure-t-il : « Ces inquiétudes émanaient de personnes mal informées ».

 


Israël appelle les Iraniens à évacuer les zones proches de sites militaires

Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
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  • L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».
  • Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones.

JERUSALEM : Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré dimanche dans un communiqué de son bureau avoir ordonné à l'armée israélienne d'émettre des avis d'évacuation à l'intention des habitants de Téhéran vivant à proximité de sites militaires.

Après cet ordre, l'armée israélienne a appelé les Iraniens à évacuer les zones « à proximité d'installations militaires » dans un communiqué publié sur le réseau social X en persan et en arabe.

L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».

Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones, contrairement aux communiqués de l'armée israélienne adressés aux Palestiniens de la bande de Gaza, où elle est en guerre contre le mouvement islamiste Hamas.

Cette décision fait partie d'un plan « visant à faire pression sur le régime » en créant des déplacements de population, a déclaré à l'AFP une source sécuritaire israélienne.


La Russie s'apprête à construire la première centrale nucléaire du Kazakhstan

Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
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  • « Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.
  • Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne.

ALMATY, KAZAKHSTAN : Le géant russe du nucléaire Rosatom sera le principal constructeur de la première centrale nucléaire du Kazakhstan, ont annoncé samedi les autorités de ce pays d'Asie centrale, premier producteur mondial d'uranium, un chantier que convoitaient la France, la Chine et la Corée du Sud.

« Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.

Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne, mais souffre d'un manque cruel d'électricité pour sa consommation intérieure.

L'agence kazakhe dit désormais « étudier la question de l'obtention de financements publics à l'exportation aux dépens de la Fédération de Russie, conformément aux propositions de Rosatom ». 

Rosatom a salué la décision kazakhe dans un communiqué et promis « la construction d'une centrale nucléaire selon le projet le plus avancé et le plus efficace au monde, basé sur des technologies russes ».

« Les réacteurs VVER-1200 de troisième génération combinent des solutions techniques éprouvées avec les systèmes de protection active et passive les plus récents. Ces derniers ont été développés en stricte conformité avec les normes internationales de sécurité », a ajouté la société.

Rosatom (Russie), China National Nuclear Corporation (Chine), EDF (France) et Korea Hydro & Nuclear Power (Corée du Sud) faisaient partie des quatre entreprises pressenties.

L'agence ajoute qu'elle « continuera à travailler avec des partenaires étrangers pour former un consortium international efficace », sans donner plus de précisions. 

Ce projet de consortium international, qui n'a jamais été spécifié, s'inscrit dans la volonté du dirigeant kazakh Kassym-Jomart Tokaïev de maintenir de bonnes relations avec les grandes puissances.

Moscou, puissance historique en Asie centrale, a ainsi remporté cet appel d'offres aux dépens de la Chine, désormais incontournable dans la région. Cette annonce intervient quelques jours avant la venue du président chinois Xi Jinping au Kazakhstan pour un sommet « Asie centrale-Chine ».

La centrale, dont la construction a été validée lors d'un référendum sans surprise à l'automne, doit être bâtie près du village abandonné d'Ulken, dans le sud du pays, sur les bords du lac Balkhach, le deuxième plus grand d'Asie centrale.

En Ouzbékistan voisin, le géant russe Rosatom va construire une petite centrale nucléaire et a proposé au Kirghizistan un projet similaire.