Au Soudan en plein chaos, des suspects de crimes contre l'Humanité en fuite

Des colporteurs proposent des collations à vendre aux personnes à bord d'un bus de passagers à l'aire de repos de Multaga près de Ganetti dans l'État du Nord du Soudan (Photo, AFP).
Des colporteurs proposent des collations à vendre aux personnes à bord d'un bus de passagers à l'aire de repos de Multaga près de Ganetti dans l'État du Nord du Soudan (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 27 avril 2023

Au Soudan en plein chaos, des suspects de crimes contre l'Humanité en fuite

  • Mercredi, les affrontements ont continué dans la capitale où des avions de chasse de l'armée ont survolé la banlieue nord
  • La périphérie est de Khartoum a été la cible de frappes aériennes et des affrontements à la mitrailleuse ont eu lieu dans la périphérie sud

KHARTOUM: Un ancien responsable de la dictature au Soudan soupçonné de crimes contre l'Humanité s'est évadé de prison en compagnie d'ex-collaborateurs à Khartoum, où de nouveaux combats entre l'armée et les paramilitaires mettent en péril le fragile cessez-le-feu.

Mercredi, les affrontements ont continué dans la capitale où des avions de chasse de l'armée ont survolé la banlieue nord, essuyant les tirs des paramilitaires, ont raconté des témoins à l'AFP.

La périphérie est de Khartoum a été la cible de frappes aériennes et des affrontements à la mitrailleuse ont eu lieu dans la périphérie sud, où se trouve une maison du dirigeant des paramilitaires, selon d'autres témoins.

Le chef de la mission de l'ONU au Soudan, Volker Perthes, resté dans le pays, s'est dit mercredi "profondément préoccupé par les récentes informations faisant état de violences tribales à El-Geneina", la capitale du Darfour-Ouest, incluant "des attaques contre les civils, des pillages et des distributions d'armes".

Malgré l'annonce d'un cessez-le-feu conclu sous l'égide des Etats-Unis, les combats meurtriers n'ont pas cessé depuis le 15 avril entre les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo et l'armée régulière du général Abdel Fattah al-Burhane.

Mercredi, l'armée a annoncé "l'envoi d'un représentant à Juba", la capitale du Sud-Soudan voisin, pour des pourparlers "à l'initiative de l’IGAD", bloc régional est-africain, avec un représentant des paramilitaires.

Ils visent, d'après un communiqué des forces armées, à la "prolongation de 72 heures de la trêve" alors que celle en cours, qui a globalement été peu respectée, doit prendre fin jeudi soir. Les FSR de leur côté n'ont pas fait état de ces discussions.

Alliés lors du coup d'Etat d'octobre 2021, les deux généraux Burhane et Daglo se livrent une guerre sans merci qui a fait 512 morts et 4 193 blessés, selon un bilan communiqué mercredi par le ministère soudanais de la Santé.

Ce putsch a mis fin à la transition démocratique qui a suivi la chute du dictateur Omar el-Béchir, déchu en 2019 sous la pression de la rue et emprisonné après trente ans de pouvoir.

Profitant d'une situation chaotique, un personnage important du régime de Béchir, Ahmed Haroun, a annoncé mardi s'être évadé de la prison de Kober à Khartoum, avec d'autres hauts responsables de la dictature islamo-militaire.

Attaques de civils

"Nous sommes restés en détention à Kober pendant neuf jours (...) et nous avons désormais la responsabilité de notre protection" dans un autre lieu, a affirmé M. Haroun dans une allocution diffusée sur une chaîne de télévision soudanaise.

Béchir, qui était lui aussi détenu dans la prison de Kober, a été selon l'armée transféré avant le début des combats dans un hôpital où il se trouvait toujours mercredi "sous la garde de la police judiciaire".

L'ex-dictateur est recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour "crimes de guerre" et "crimes contre l'Humanité" au Darfour, dans l'ouest du Soudan, comme M. Haroun.

Le bureau du procureur de la CPI a indiqué suivre de près les événements, observant que les informations sur les personnes incarcérées à Kober n'avaient pas été "confirmées de manière indépendante".

L'émissaire de l'ONU a déclaré que les belligérants "attaquaient des zones densément peuplées sans se soucier des civils, des hôpitaux, ni même des véhicules transportant les blessés et les malades".

L'Union africaine a mis en garde mercredi contre un "risque de déflagration régionale et d'internationalisation du conflit".

Quelque "6 000 personnes de différentes nationalités ont traversé" la frontière avec l'Ethiopie, a déclaré un responsable soudanais du poste-frontière de Gallabat (est).

Plusieurs dizaines de milliers de personnes sont déjà arrivées dans les pays frontaliers du Soudan, selon l'ONU qui craint un exode massif et estime qu'au total, 270 000 personnes pourraient fuir au Tchad et au Soudan du Sud.

"Le plus difficile, c'est le bruit des bombardements et des avions de chasse qui survolent notre maison. Cela a terrifié les enfants", témoigne Safa Abu Taher, rapatrié avec sa famille en Jordanie.

«Ramener l'ancien régime»

Un bateau transportant 1 687 civils originaires de plus d'une cinquantaine de pays est arrivé mercredi en Arabie saoudite.

245 ressortissants français et étrangers évacués par avion par les autorités françaises ont atterri près de Paris et le gouvernement du Royaume-Uni a annoncé avoir évacué plus de 300 personnes, en majorité britanniques.

Ceux qui ne peuvent pas quitter Khartoum, une ville de plus de cinq millions d'habitants, tentent de survivre privés d'eau et d'électricité, soumis aux pénuries de nourriture et aux coupures téléphoniques et d'internet.

Selon le syndicat des médecins, près des trois quarts des hôpitaux sont hors service au Soudan. A Khartoum, plus de 60% des centres médicaux sont fermés, a annoncé mercredi l'Organisation mondiale de la santé.

L'OMS a ajouté qu'une "évaluation approfondie des risques" sanitaires était en cours après la prise par l'un des deux camps d'un "laboratoire public" de Khartoum, qui renferme des agents pathogènes de la rougeole, du choléra et de la poliomyélite.

Aux yeux de Dame Rosalind Marsden, ancienne ambassadrice britannique et ex-représentante spéciale de l'Union européenne pour le Soudan, "ce à quoi nous assistons est une lutte de pouvoir entre deux généraux, mais il s'agit également d'une tentative de faire dérailler la transition démocratique du Soudan et de ramener le pays sous le contrôle de l'ancien régime".


La coalition arabe met en garde contre toute action militaire compromettant la désescalade au Yémen

Des membres yéménites des tribus Sabahiha de Lahj lors d'un rassemblement pour manifester leur soutien au Conseil de transition du Sud (STC) dans la ville portuaire côtière d'Aden, le 14 décembre 2025. (AFP)
Des membres yéménites des tribus Sabahiha de Lahj lors d'un rassemblement pour manifester leur soutien au Conseil de transition du Sud (STC) dans la ville portuaire côtière d'Aden, le 14 décembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le porte-parole de la coalition, le général de division Turki Al-Maliki, a indiqué que cet avertissement fait suite à une demande du Conseil présidentiel yéménite pour prendre des mesures urgentes

DUBAÏ : La coalition arabe soutenant le gouvernement yéménite internationalement reconnu a averti samedi que tout mouvement militaire compromettant les efforts de désescalade serait traité immédiatement afin de protéger les civils, a rapporté l’Agence de presse saoudienne.

Le porte-parole de la coalition, le général de division Turki Al-Maliki, a déclaré que cet avertissement fait suite à une demande du Conseil présidentiel yéménite visant à prendre des mesures urgentes pour protéger les civils dans le gouvernorat de Hadramout, face à ce qu’il a qualifié de graves violations humanitaires commises par des groupes affiliés au Conseil de transition du Sud (CTS).

Le communiqué précise que ces mesures s’inscrivent dans le cadre des efforts conjoints et continus de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis pour réduire les tensions, faciliter le retrait des forces, remettre les camps militaires et permettre aux autorités locales d’exercer leurs fonctions.

Al-Maliki a réaffirmé le soutien de la coalition au gouvernement yéménite internationalement reconnu et a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue et à privilégier des solutions pacifiques, selon l’agence.

Le CTS a chassé ce mois-ci le gouvernement internationalement reconnu de son siège à Aden, tout en revendiquant un contrôle étendu sur le sud du pays.

L’Arabie saoudite a appelé les forces du CTS à se retirer des zones qu’elles ont prises plus tôt en décembre dans les provinces orientales de Hadramout et d’Al-Mahra.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les Émirats arabes unis saluent les efforts de l’Arabie saoudite pour soutenir la stabilité au Yémen

Les Émirats arabes unis ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen. (WAM)
Les Émirats arabes unis ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen. (WAM)
Short Url
  • Les Émirats arabes unis ont salué le rôle constructif du Royaume dans la promotion des intérêts du peuple yéménite

DUBAÏ : Les Émirats arabes unis ont salué vendredi les efforts de l’Arabie saoudite pour soutenir la sécurité et la stabilité au Yémen, a rapporté l’agence de presse officielle WAM.

Dans un communiqué, les Émirats ont loué le rôle constructif du Royaume dans la promotion des intérêts du peuple yéménite et dans le soutien de leurs aspirations légitimes à la stabilité et à la prospérité.

Les Émirats ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen, en soulignant leur appui aux efforts contribuant à la sécurité et à la prospérité régionales.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Liban adopte le projet de loi sur le gap financier malgré l’opposition du Hezbollah et des Forces libanaises

Le Premier ministre libanais Nawaf Salam s'exprimant lors d'une conférence de presse après une réunion du Conseil des ministres à Beyrouth, le 26 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre libanais Nawaf Salam s'exprimant lors d'une conférence de presse après une réunion du Conseil des ministres à Beyrouth, le 26 décembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le texte vise à trancher le sort de milliards de dollars de dépôts bloqués et devenus inaccessibles pour les citoyens libanais depuis l’effondrement financier du pays

BEYROUTH : Le Conseil des ministres libanais a approuvé vendredi un projet de loi controversé visant à encadrer la relance financière et à restituer les dépôts bancaires gelés aux citoyens. Cette décision est perçue comme une étape clé dans les réformes économiques longtemps retardées et exigées par le Fonds monétaire international (FMI).

Le texte a été adopté par 13 voix pour et neuf contre, à l’issue de discussions marathon autour du projet de loi dit du « gap financier » ou de récupération des dépôts, bloqué depuis des années après l’éclatement de la crise bancaire en 2019. Les ministres de la Culture et des Affaires étrangères étaient absents de la séance.

La législation vise à déterminer le sort de milliards de dollars de dépôts devenus inaccessibles pour les Libanais durant l’effondrement financier du pays.

Le projet a été rejeté par trois ministres des Forces libanaises, trois ministres du Hezbollah et du mouvement Amal, ainsi que par la ministre de la Jeunesse et des Sports, Nora Bayrakdarian, le ministre des Télécommunications, Charles Al-Hajj, et le ministre de la Justice, Adel Nassar.

Le ministre des Finances, Yassin Jaber, a rompu avec ses alliés du Hezbollah et d’Amal en votant en faveur du texte. Il a justifié sa position par « l’intérêt financier suprême du Liban et ses engagements envers le FMI et la communauté internationale ».

Le projet de loi a suscité une vive colère parmi les déposants, qui rejettent toute tentative de leur faire porter la responsabilité de l’effondrement financier. Il a également provoqué de fortes critiques de l’Association des banques et de plusieurs blocs parlementaires, alimentant les craintes d’une bataille politique intense au Parlement, à l’approche des élections prévues dans six mois.

Le Premier ministre Nawaf Salam a confirmé que le Conseil des ministres avait approuvé le texte et l’avait transmis au Parlement pour débat et amendements avant son adoption définitive. Cherchant à apaiser les inquiétudes de l’opinion publique, il a souligné que la loi prévoit des audits judiciaires et des mécanismes de reddition des comptes.

« Les déposants dont les comptes sont inférieurs à 100 000 dollars seront intégralement remboursés, avec intérêts et sans aucune décote », a déclaré Salam. « Les grands déposants percevront également leurs premiers 100 000 dollars en totalité, le reste étant converti en obligations négociables garanties par les actifs de la Banque centrale, estimés à environ 50 milliards de dollars. »

Il a ajouté que les détenteurs d’obligations recevront un premier versement de 2 % après l’achèvement de la première tranche de remboursements.

La loi comprend également une clause de responsabilité pénale. « Toute personne ayant transféré illégalement des fonds à l’étranger ou bénéficié de profits injustifiés sera sanctionnée par une amende de 30 % », a indiqué Salam.

Il a insisté sur le fait que les réserves d’or du Liban resteront intactes. « Une disposition claire réaffirme la loi de 1986 interdisant la vente ou la mise en gage de l’or sans l’approbation du Parlement », a-t-il déclaré, balayant les spéculations sur une utilisation de ces réserves pour couvrir les pertes financières.

Reconnaissant que la loi n’est pas parfaite, Salam l’a néanmoins qualifiée de « pas équitable vers la restitution des droits ».

« La crédibilité du secteur bancaire a été gravement entamée. Cette loi vise à la restaurer en valorisant les actifs, en recapitalisant les banques et en mettant fin à la dépendance dangereuse du Liban à l’économie du cash », a-t-il expliqué. « Chaque jour de retard érode davantage les droits des citoyens. »

Si l’Association des banques n’a pas publié de réaction immédiate après le vote, elle avait auparavant affirmé, lors des discussions, que la loi détruirait les dépôts restants. Les représentants du secteur estiment que les banques auraient du mal à réunir plus de 20 milliards de dollars pour financer la première tranche de remboursements, accusant l’État de se dédouaner de ses responsabilités tout en accordant de facto une amnistie à des décennies de mauvaise gestion financière et de corruption.

Le sort du texte repose désormais sur le Parlement, où les rivalités politiques à l’approche des élections de 2025 pourraient compliquer ou retarder son adoption.

Le secteur bancaire libanais est au cœur de l’effondrement économique du pays, avec des contrôles informels des capitaux privant les déposants de leurs économies et une confiance en chute libre dans les institutions de l’État. Les donateurs internationaux, dont le FMI, conditionnent toute aide financière à des réformes profondes du secteur. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com