Comment les nouvelles technologies de l'ARNm font progresser la recherche d'un vaccin contre le cancer

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Publié le Vendredi 28 avril 2023

Comment les nouvelles technologies de l'ARNm font progresser la recherche d'un vaccin contre le cancer

  • Le rapport d'impact de l'Institut de l'initiative pour les investissements d'avenir met en lumière les développements prometteurs en matière de vaccins individualisés pour les patients atteints de cancer
  • Grâce à l'élan de la pandémie de la Covid-19, la même technologie vaccinale est actuellement utilisée dans des expériences de lutte contre les tumeurs

DJEDDAH: Cancer, un mot qui peut détruire la vie d’une personne. Un mot si écrasant qu’il suscite l'incrédulité, le choc, la peur, la colère et qu'il peut briser l'esprit d'une personne et de son entourage. La recherche médicale a aidé les scientifiques à mettre au point des méthodes pour empêcher le cancer de se métastaser, mais grâce à la dynamique de la pandémie de la Covid-19, de nouvelles recherches prometteuses pourraient permettre de mettre un terme à la bataille contre le cancer.

Un récent rapport publié par l'Institut de l'initiative pour les investissements d'avenir (FII), intitulé «La fin de la tumeur: Comment l'humanité peut se débarrasser du cancer», a mis en lumière la façon dont la technologie de l'ARNm (ARN messager) s'avère être un adversaire prometteur dans la lutte contre le cancer. En produisant des vaccins individualisés pour les patients atteints de cancer, la technologie de l'ARNm, autrefois considérée comme absurde par la communauté scientifique, commence à attirer l'attention des scientifiques qui débutent l’exploitation de son potentiel grâce à la livraison rapide, il y a trois ans, du premier vaccin contre la Covid-19 à base d'ARNm au monde.

«C'est l'un des meilleurs exemples de l'impact positif que les nouvelles technologies peuvent avoir sur l'humanité. Dans ce rapport, nous avons essayé de déterminer comment la réussite de l'ARNm pourrait se poursuivre», a déclaré Richard Attais, directeur général de l'Institut FII, à Arab News.

Le rôle de l'ARNm est simple: il consiste à transporter l'information sur les protéines de l'ADN du noyau de la cellule au cytoplasme (intérieur gélatineux) de la cellule. Pour les vaccins, cela se fait en introduisant un segment d'ARNm qui correspond à une protéine virale, généralement un minuscule morceau d'une protéine qui se trouve sur la membrane extérieure du virus.

Cette technologie n'est pas nouvelle. Lors des premières expériences, la transmission de messages à la cible visée était jugée instable et volatile. Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui.

Les conclusions du rapport examinent la manière dont la technologie peut être utilisée, ainsi que les défis posés par les études sur les thérapies anticancéreuses et les vaccins et, enfin, les propositions possibles des auteurs.

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Image d'illustration, Shutterstock.

Revenons à 2020: les scientifiques ont découvert une substance pour apprivoiser le messager instable en utilisant chimiquement la graisse. Appelées «nanoparticules lipidiques», elles forment une couche stable et protectrice autour de l'ARNm et libèrent le message dès qu'un corps étranger pénètre dans l'organisme humain, comme ce fut le cas pour les infections par la Covid-19. Ensuite, l'ARNm tue les protéines du virus en construisant une protéine spécifique à un virus, apprenant ainsi au système immunitaire comment se comporter lorsqu'il est exposé à une menace potentielle.

«En tirant parti des connaissances que nous avons acquises sur l'utilisation de la technologie de l'ARNm au cours du développement du vaccin contres la Covid-19, nous avons la possibilité de relever les défis de l'égalité et de l'équité aujourd'hui, alors que nous envisageons la distribution future d'un vaccin potentiel contre le cancer. Cela est un défi pour l'humanité», a expliqué à Arab News Safiye Kucukkaraca, directrice de THINK, l’Institut FII.

Comment cela pourrait-il servir à lutter contre le cancer?

Toutes les cellules contiennent des protéines, notamment les cellules cancéreuses. Un article publié en 2017 par Ugur Sahin, cofondateur de BioNTech dans la revue Nature, intitulé «Personalized RNA Mutanome Vaccines Mobilize Poly-Specific Therapeutic Immunity Against Cancer» («Les vaccins personnalisés à ARN mutanome mobilisent une immunité thérapeutique polyspécifique contre le  cancer») , indique que les scientifiques ont été en mesure de concevoir et de fabriquer un vaccin unique pour chaque patient atteint de mélanome. Les résultats ont été prometteurs, puisque le taux de métastases du cancer a été considérablement réduit après le début de la vaccination.

La seule différence est que dans la Covid-19, l'ARNm peut protéger des milliards de personnes avec un seul vaccin.

Les cellules cancéreuses sont uniques à chaque patient; elles ont chacune une empreinte génétique unique. La difficulté réside dans la fabrication du vaccin, puisque des vaccins ARNm personnalisés doivent être mis au point pour chaque patient. Le processus nécessite la recherche d’une protéine commune à ces cellules cancéreuses, la construction d’un brin d’ARNm qui produit la même protéine, la création d’un vaccin unique, puis la vaccination du patient avec l’ARNm. Le système immunitaire produirait ainsi des anticorps pour combattre la protéine et les cellules tumorales du cancer.

La mise au point d'un vaccin distinct pour chaque tumeur n'est possible que grâce au développement d'une technologie fiable et rapide de décodage du matériel génétique, une méthode actuellement testée dans plusieurs laboratoires médicaux à travers le monde.

La rapidité était essentielle pour lutter contre la Covid-19, comme ce fut le cas pour Moderna et BioNTech, deux des premières entreprises à développer le vaccin. La rapidité sera tout aussi cruciale pour lutter contre les cas individuels de cancer. Une fois la structure ciblée identifiée, l'effort requis pour produire un ARNm spécifique pour cette cible est relativement mineur.

Plusieurs technologies de vaccins anticancéreux sont déjà utilisées chez les patients atteints de cancer. Elles sont conçues pour stimuler le système immunitaire de diverses manières pour qu'il attaque les cellules tumorales. Les principales formes sont les vaccins à base de protéines/peptides, les vaccins à base d'ADN ou d'ARN, la thérapie par cellules dendritiques, la thérapie par cellules T et la thérapie par cellules CAR-T, qui sont toutes des options thérapeutiques très innovantes.

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Le PDG de BioNtech, Ugur Sahin, prend la parole lors d'une conférence de presse conjointe avec sa femme, cofondatrice et médecin-chef de BioNTech Ozlem Tureci (Photo,AFP)..

Le rapport a indiqué que plusieurs études cliniques, souvent combinées à d'autres thérapies anticancéreuses, sont actuellement en cours, notamment sur des patients atteints de mélanome à un stade avancé, de cancer du poumon à un stade avancé et de gliome cérébral (tumeurs qui se propagent dans le cerveau), pour n'en citer que quelques-uns. Plusieurs découvertes publiées ont montré des résultats prometteurs, tandis que d'autres sont encore à venir.

Le rapport a ainsi souligné l'évolutivité de la technologie, ajoutant qu'il faudra probablement encore au moins cinq ans avant que le premier vaccin ARNm contre le cancer ne soit approuvé. Même si le chemin semble encore long, il existe un espoir de développer «une nouvelle arme efficace».

 

Toutefois, le chemin à parcourir est long et semé d'embûches.

Selon le Dr Niels Halama, professeur d'immunothérapie translationnelle au Centre allemand de recherche sur le cancer à Heidelberg, «les cellules tumorales ont développé un certain nombre de mécanismes très divers pour se protéger».

Dans le rapport, Il a constaté que certaines tumeurs se développent sans que le système immunitaire ne puisse les détecter ou les arrêter, ce qui soulève la question de savoir si les vaccins suffisent à inverser le processus de détection, ajoutant que plusieurs études cliniques en cours pourraient apporter des éclaircissements à ce sujet.

Halama a également remarqué que certains cancers, tels que le mélanome ou le cancer du poumon, peuvent bien répondre à l'immunothérapie.

«Un grand nombre de patients répondent au traitement et nous savons que la tumeur permet aux cellules du système immunitaire de pénétrer dans le microenvironnement tumoral. Donc, si on utilise une thérapie qui active le système immunitaire de la bonne manière, ont peut tuer la tumeur», a-t-il précisé, ajoutant qu'il semble possible que les vaccins puissent modifier le système de réponse pour d'autres cancers comme le cancer du pancréas ou le cancer du sein qui ne peuvent pas être traités par immunothérapie.

Bien que de nombreuses questions restent sans réponse, Halama a indiqué que grâce aux vaccins contre la Covid-19, les structures de traitement, de conditionnement et de transfert de l'ARNm vers l'individu se sont améliorées, contrairement à ce qui était le cas auparavant, les molécules étant connues pour avoir une durée de vie courte et se dégrader rapidement.

 

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Des chercheurs testent les procédures de fabrication de l'ARN messager (ARNm) du vaccin contre la Covid-19 sur un nouveau site de fabrication de la société allemande BioNTech, le 27 mars 2021 à Marburg, en Allemagne (Photo, Thomas Lohnes/AFP).

Un autre défi mis en évidence dans le rapport est celui du risque.

«La vaccination antitumorale est une thérapie très bien tolérée, avec peu ou presque pas d'effets secondaires. Mais il est possible que cela change en combinaison avec d'autres thérapies, parce que certaines d'entre elles affaiblissent ou même suractivent le système immunitaire», a signalé Halama.

De nombreuses études sont en cours dans le monde entier pour tester des vaccins contre un large éventail de cancers, du cancer du poumon au mélanome, répertoriées dans une base de données internationale, ClinicalTrials.gov, qui couvre une grande variété de cancers.

Pour les scientifiques et les chercheurs, le défi de sélectionner le type de cancer sur lequel utiliser la thérapie vaccinale, le stade du cancer, les mécanismes que les tumeurs utilisent pour «se cacher du système immunitaire», les candidats appropriés, l'état de santé général du patient et les propriétés que doit avoir une structure cible pour être prise en considération est énorme en raison de la nature imprévisible de certains cancers et des réactions ultérieures à diverses formes de thérapies.

Dans les pays industrialisés, une part importante des cancers est imputable à des risques environnementaux et professionnels évitables, ce qui pose un autre problème.

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Un employé de laboratoire au travail à la société de biotechnologie Transgene, qui développe un vaccin néo-antigène contre le cancer, à Illkirch-Graffenstaden, en France (Photo, AFP). 

Le rapport indique clairement que les vaccins ne constituent pas un remède miracle; en fait, il s'agit simplement d'un «outil dans une grande boîte à outils», car ils doivent être intégrés dans un plan thérapeutique global, en tenant compte de la manière dont ils peuvent être utilisés parallèlement à d'autres méthodes telles que la chirurgie, la chimiothérapie, la radiothérapie et d'autres immunothérapies.

Bien que les thérapies anticancéreuses soient de plus en plus efficaces, des recherches novatrices supplémentaires sont encore nécessaires, car si les chercheurs s'accordent à dire que la technologie des vaccins à ARNm a un potentiel énorme, elle n'en est encore qu'à ses débuts «en termes de mise en œuvre concrète».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Frappes ukrainiennes sur les raffineries et forte demande: en Russie, l'essence devient chère

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
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  • Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde
  • A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro)

MOSCOU: "Doucement mais sûrement": Oleg fait le plein d'essence à Moscou et vitupère contre la hausse des prix nourrie par une demande accrue et les frappes ukrainiennes contre les infrastructures pétrolières, secteur clé de l'économie russe que les Occidentaux veulent sanctionner.

"Tout le monde l'a remarqué", tonne Oleg, retraité de 62 ans: les prix des carburants vont crescendo à la pompe. Au 1er septembre, l'essence au détail coûtait 6,7% de plus que fin 2024, selon Rosstat, l'agence nationale des statistiques.

Ce renchérissement s'inscrit dans un contexte de hausse générale des prix, avec une inflation annuelle qui a été de 8,14% en août, à l'heure où la Russie intensifie l'offensive qu'elle a lancée en 2022 en Ukraine.

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg.

Et depuis le début de l'été, les réseaux sociaux sont saturés de vidéos montrant des files d'attente devant les stations-service de l'Extrême-Orient russe, en Crimée - région que la Russie a annexée au détriment de Kiev en 2014 -, et dans certaines régions du sud proches de l'Ukraine, pour cause de pénurie.

Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde.

Raffineries frappées 

A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro). Ce prix, qui reste bien inférieur à ceux affichés dans de nombreux pays européens, surprend le consommateur russe, habitué à ne pas payer cher l'essence et au revenu moyen moindre.

Artiom, un Moscovite qui ne souhaite pas donner son nom de famille, observe cette augmentation "depuis le début de l'année". "Pour des personnes ordinaires, 300 ou 400 roubles en plus par plein (3 à 4 euros, ndlr), cela commence à être sensible", dit-il.

Sur le site Gazeta.ru, Igor Iouchkov, analyste au Fonds national de sécurité énergétique, met en avant l'augmentation d'"environ 16%" du droit d'accise (impôt indirect) depuis le 1er janvier et la baisse de subsides versés aux compagnies pétrolières.

Car, comme l'explique à l'AFP Sergueï Teriochkine, expert en questions énergétiques, "plus les subventions sont faibles, plus la rentabilité est faible", ce qui pousse les pétroliers à "répercuter" ces pertes sur les prix au détail.

La demande a, elle, été dopée par les départs en vacances et les engins agricoles.

Restent - surtout - les frappes contre les raffineries et dépôts de pétrole que l'Ukraine a multipliées afin de toucher Moscou au portefeuille et d'entraver sa capacité à financer son offensive.

"Les frappes ont ciblé de grandes raffineries dans la partie européenne de la Russie", notamment dans les régions de Samara, Riazan, Volgograd et Rostov, énumère Alexandre Kots, journaliste russe spécialiste des questions militaires, sur Telegram.

"Ce n'est rien!" 

L'une de ces attaques, à la mi-août, a touché la raffinerie de Syzran, dans la région de Samara, selon l'état-major ukrainien. Le complexe se trouve à plus de 800 km de la frontière ukrainienne. Il est présenté par Kiev comme le "plus important du système Rosneft", géant russe des hydrocarbures.

Moscou n'a pas quantifié l'impact de ces frappes, mais dans le journal Kommersant, l'analyste Maxime Diatchenko parle d'une baisse de la production "de près de 10%" depuis le début de l'année.

"C'est rien!", assure Alexandre, un homme d'affaires moscovite, après avoir rempli le réservoir de sa berline allemande. "Une frappe, deux frappes, trois frappes, ça n'est rien pour le marché en général ou pour les prix".

"Le pays a besoin d'argent. L'augmentation du prix de l'essence, c'est une façon d'augmenter le revenu de l'Etat", estime de son côté Vladimir, un Moscovite de 50 ans.

Pour tenter de stabiliser la situation, Moscou a prolongé une interdiction d'"exporter de l’essence pour les automobiles" jusque fin octobre.

La Russie reste par ailleurs un exportateur majeur de pétrole brut, des exportations que les Occidentaux entendent étouffer pour tarir une des principales sources de financement de l'offensive russe en Ukraine, pays qui compte l'Union européenne comme principale alliée.