Au Havre, Le Pen fête «la nation» et fustige Macron

Marine Le Pen a pointé dimanche «le rejet de la personne» et «du projet» du chef de l'État lors d'un discours au Havre, mais en mettant en garde contre «le désordre et le chaos». (AFP)
Marine Le Pen a pointé dimanche «le rejet de la personne» et «du projet» du chef de l'État lors d'un discours au Havre, mais en mettant en garde contre «le désordre et le chaos». (AFP)
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Publié le Lundi 01 mai 2023

Au Havre, Le Pen fête «la nation» et fustige Macron

  • Devant 1 500 militants, il s'agissait pour Le Pen de «poser les jalons de l'après-Macron», selon son entourage, avec «un discours de présidente» pour tracer «les grandes visions»
  • Quant à la présidentielle de 2027, elle a usé devant des journalistes lundi d'une étonnante double négation: «Je suis candidate tant que je n'ai pas décidé de ne pas l'être»

LE HAVRE: "La cause de nos maux tient en un nom: Macron!" Marine Le Pen a pointé dimanche "le rejet de la personne" et "du projet" du chef de l'État lors d'un discours au Havre, mais en mettant en garde contre "le désordre et le chaos".

Devant 1.500 militants, il s'agissait pour la patronne de l'extrême droite française de "poser les jalons de l'après-Macron", selon son entourage, avec "un discours de présidente" pour tracer "les grandes visions".

C'est pourtant principalement à la macronie que s'en est pris Marine Le Pen, selon elle représentée par des "dirigeants désinvoltes et indifférents", "coupés du peuple et des réalités, (qui) envisagent l'exercice du pouvoir comme une épreuve de force avec le pays, un bras de fer permanent avec les citoyens".

Or, cette "intransigeance aveugle (...) n'est pas la marque de la fermeté", mais celle "du raidissement (et) de la fébrilité", appuie-t-elle, en déplorant que "d'une réforme contestée, il ait amené le pays à une crise institutionnelle".

«Écologie punitive»

Au moment où s'élançaient partout en France les cortèges du 1er-Mai à l'appel des syndicats et partis de gauche, la patronne des 88 députés RN à l'Assemblée entend tenir sa ligne de crête d'opposition à la réforme mais tout en distances avec le mouvement social.

"Ne remplacez jamais votre bulletin de vote par une casserole", avait exhorté à l'heure de l'apéritif le vice-président du parti, Sébastien Chenu.

Et si, selon Marine Le Pen, Emmanuel Macron "se trompe lorsqu'il croit que l'usure peut être une stratégie", il ne faudrait pas pour autant "que son entêtement puéril fasse basculer le pays dans le désordre et le chaos".

Reste que Marine Le Pen pointe "le rejet de la personne" du chef de l'État et "le rejet de son projet d'expropriation, de dépossession et de déconstruction par le démantèlement du pacte social dont la réforme des retraites est l'illustration".

Elle évoque les "transitions": "démographique", avec selon elle "projet de submersion migratoire"; "civilisationnelle", vue comme "celle qui instille le +wokisme+"; mais aussi la transition "écologique". Mais, prévient-elle, "la révolution prétendument écologique que l'on nous vend n'est pas une balade au milieu des fleurs, mais un saut dans les orties de l'écologie punitive".

Jeanne d'Arc 

Avec son banquet militant, baptisé "fête de la nation", le RN entendait renouer avec son traditionnel événement du 1er-Mai, désormais expurgé de la référence à Jeanne d'Arc (à peine évoquée au détour d'une phrase) mais tourné vers la "paix sociale" et le travail.

Marine Le Pen a néanmoins assuré à la presse que, sur le chemin du retour vers Paris, elle passerait à Rouen déposer une gerbe en l'honneur de "la pucelle".

Le Havre? "Une terre ouvrière", justifie Marine Le Pen, en feignant d'oublier que la cité portuaire est dirigée par Édouard Philippe - donné à touche-touche avec elle dans les intentions de vote à la prochaine présidentielle - autant qu'elle fut une place forte de la gauche et demeure un bastion syndical.

"Le bastion de la résistance, la vraie, il est ici: c'est nous", a répondu Jordan Bardella.

Plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées à quelques kilomètres du raout lepéniste, sans confrontation ni incident, à l'appel de syndicats et de partis de gauche.

Il s'agissait de doubler le traditionnel défilé du 1er-Mai d'un avertissement: "un certain nombre de personnes font l’erreur de penser que le RN pourra être une alternative en France", met en garde Luc Sauvage, secrétaire général de l’Union locale havraise de la CFDT.

Mais pour le nouveau président du RN, qui devrait prendre à nouveau la tête de liste aux Européennes avec l'objectif d'"arriver en tête", "l'ère Macron va s'achever et le temps des patriotes est venu".

Quant à la présidentielle de 2027, la fille de Jean-Marie Le Pen a usé devant des journalistes lundi d'une étonnante double négation: "Je suis candidate tant que je n'ai pas décidé de ne pas l'être".


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).

 


Assassinat de Mehdi Kessaci: «Non, je ne me tairai pas» face au narcotrafic, dit son frère dans une tribune au Monde

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  • "Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic"
  • "On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement"

PARIS: "Non, je ne me tairai pas" face au narcotrafic, a déclaré mercredi dans une tribune publiée dans le journal Le Monde Amine Kessaci, le frère de Mehdi, abattu jeudi à Marseille par deux personnes à moto.

"Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic", a également écrit le militant écologiste de 22 ans, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme. En 2020, cette famille de six enfants avait déjà été endeuillée par l'assassinat d'un autre de ses frères, Brahim, 22 ans, dont le corps avait été retrouvé carbonisé dans un véhicule.

"On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement", a encore déclaré Amine Kessaci, qui a enterré mardi son frère Mehdi. "Voici ce que font les trafiquants : ils tentent d’annihiler toute résistance, de briser toute volonté, de tuer dans l’œuf tout embryon de révolte pour étendre leur pouvoir sur nos vies", a-t-il ajouté.

La protection policière qui lui a été accordée ne l'a pas été à ses proches, a souligné le militant écologiste de 22 ans. "Pourtant, qui ignorait que ma famille avait déjà payé un tribut de sang? Comment ne pas savoir que ma famille pouvait être touchée ?", s'est-il interrogé.

"Face à un tel ennemi, l’Etat doit prendre la mesure de ce qu'il se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée", a-t-il encore prévenu.

"Il est temps d’agir, par exemple de faire revenir les services publics dans les quartiers, de lutter contre l’échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d’œuvre soumise, de doter les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin, de renforcer, de soutenir réellement les familles de victimes du narcotrafic. Nous comptons nos morts, mais que fait l’Etat ?"

Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné jeudi à Marseille près d'une salle de concert par deux hommes à moto, activement recherchées, un "crime d'intimidation" et "un assassinat d'avertissement" pour les autorités.


Accord UE-Mercosur: semaines décisives à Bruxelles, la France risque l'isolement

Des agriculteurs et des membres de la Fédération nationale bovine manifestent près de l'ambassade du Brésil à Paris le 9 juillet 2025 pour montrer leur opposition à un éventuel accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et le Marché commun du Sud (MERCOSUR). (AFP)
Des agriculteurs et des membres de la Fédération nationale bovine manifestent près de l'ambassade du Brésil à Paris le 9 juillet 2025 pour montrer leur opposition à un éventuel accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et le Marché commun du Sud (MERCOSUR). (AFP)
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  • La Commission européenne vise à obtenir le feu vert des États membres pour l’accord commercial UE-Mercosur d’ici le 20 décembre, malgré l’opposition française et des agriculteurs inquiets
  • La ratification finale dépendra du Parlement européen, où le vote pourrait être serré, avec une opposition notable de l’extrême gauche, de l’extrême droite et de nombreux députés français et polonais

BRUXELLES: La Commission européenne veut agir vite. Elle se donne jusqu'au 20 décembre pour obtenir le feu vert des États européens sur l'accord commercial avec les pays latino-américains du Mercosur, que la France aura du mal à bloquer.

Le vote des Vingt-Sept, à la majorité qualifiée, pourrait même intervenir début décembre, selon une source au sein de la Commission.

Les agriculteurs européens sont toujours vent debout contre cet accord qu'ils jugent "inacceptable" et voient comme une menace directe pour des filières comme la viande et le sucre.

Mais Bruxelles estime avoir fait ce qu'il fallait pour les rassurer et... amadouer Paris.

La Commission a annoncé en septembre des mesures de sauvegarde renforcées pour les produits agricoles les plus sensibles, promettant une intervention en cas de déstabilisation du marché.

Les diplomates des pays européens devraient d'ailleurs approuver cette clause de sauvegarde ce mercredi.

Elle "sera efficace pour résoudre les problèmes", martèle le commissaire européen à l'Agriculture Christophe Hansen.

Ce Luxembourgeois insiste au passage sur les "opportunités" que représente ce traité de libre-échange avec l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay et le Paraguay pour les exportations européennes de vins et de produits laitiers. "Nous avons besoin d'exporter", a-t-il souligné après une réunion avec les ministres de l'Agriculture lundi.

Ce rendez-vous à Bruxelles a permis à chacun de réaffirmer ses positions.

Dans le camp des thuriféraires de l'accord, l'Allemagne et l'Espagne appellent à soutenir les exportateurs européens, notamment industriels, au moment où l'UE souffre sur le plan économique.

Ils jugent indispensables de diversifier les partenariats commerciaux depuis l'imposition de taxes douanières dans les États-Unis de Donald Trump.

"Je pense que l'accord avec le Mercosur progresse et qu'il sera ratifié. Nous espérons qu'il pourra entrer en vigueur au début de l'année prochaine", a déclaré le ministre espagnol Luis Planas.

La valse-hésitation des Français commence d'ailleurs à irriter à Bruxelles.

"Plutôt positif" lors d'un déplacement au Brésil, le président Emmanuel Macron avait semblé faire un pas en avant en faveur de l'accord, avant de rétropédaler après le tollé provoqué par ses propos parmi les agriculteurs français comme dans la classe politique.

Depuis, Paris assure que ce traité n'est toujours pas acceptable en l'état et fixe ses conditions.

- Un Parlement européen divisé -

La France voudrait des "mesures miroirs" pour que tous les pesticides interdits dans l'Union européenne "soient véritablement interdits dans les productions issues des pays du Mercosur", a dit la ministre Annie Genevard.

Paris réclame aussi des contrôles plus efficaces pour garantir que les produits importés respectent les normes européennes.

Dans un exercice d'équilibriste, le Premier ministre Sébastien Lecornu a répété l'opposition de la France à l'accord, mais "il ne faut pas qu’on se mente entre nous. Il y a bien des filières françaises qui vont bénéficier du Mercosur. On ne les entend pas beaucoup pour être honnête", a-t-il relevé lundi.

La France semble avoir compris qu'elle aurait du mal à bâtir une coalition suffisamment large pour s'opposer à l'accord, l'Italie penchant plutôt en faveur du traité désormais.

En attendant, Paris multiplie les échanges avec Bruxelles afin d'obtenir des concessions.

Les Français espèrent un geste sur les "limites maximales de résidus" (LMR) de pesticides autorisés, via un texte sur la sécurité alimentaire que doit présenter la Commission mi-décembre.

Sur l'accord en tant que tel, Bruxelles n'a pas l'intention de modifier sa copie en dépit des critiques. Tout juste est-il évoqué d'éventuelles communications ou échanges de lettres pour rassurer une dernière fois les récalcitrants comme la Pologne et la Hongrie.

L'Union européenne vise un feu vert des pays européens avant le sommet du Mercosur du 20 décembre au Brésil.

Mais la ratification devra ensuite passer par un vote du Parlement européen, où la partie pourrait s'avérer serrée.

"Ca ne va pas être facile. L'extrême gauche et l'extrême droite voteront" contre l'accord et dans les autres camps, "tous les Français et la plupart des Polonais" seront contre également, indique une source parlementaire, qui compte 300 opposants potentiels sur un total de 720 élus.

Environ 150 eurodéputés ont déjà appelé le Parlement à se tourner vers la Cour de justice de l'Union européenne pour contester ce traité. Un vote sur ce point pourrait avoir lieu en plénière dans les semaines qui viennent.