A 75 ans, la société israélienne face au défi de la fragmentation

Une vue aérienne prise le 13 avril 2023 montre le kibboutz de Yiron, au nord d'Israël, créé en 1949 à moins de deux kilomètres de la frontière libanaise, sur les ruines d'un village palestinien détruit par les forces juives pendant la guerre israélo-arabe de 1948-1949. (Photo de MENAHEM KAHANA / AFP)
Une vue aérienne prise le 13 avril 2023 montre le kibboutz de Yiron, au nord d'Israël, créé en 1949 à moins de deux kilomètres de la frontière libanaise, sur les ruines d'un village palestinien détruit par les forces juives pendant la guerre israélo-arabe de 1948-1949. (Photo de MENAHEM KAHANA / AFP)
Short Url
Publié le Mardi 02 mai 2023

A 75 ans, la société israélienne face au défi de la fragmentation

  • Le kibboutz Yiron, dans le nord, illustre en partie les mutations qui se sont opérées depuis la proclamation de l'Etat, le 14 mai 1948
  • Yiron a été fondé en 1949, à quelques kilomètres de la ligne de démarcation avec le Liban, sur les ruines d'un village palestinien détruit par les forces juives

YIRON: En 75 ans d'existence, la société israélienne a connu des transformations majeures liées à l'histoire mouvementée du pays et fait face aujourd'hui au défi d'une fragmentation croissante.

Le kibboutz Yiron, dans le nord, illustre en partie les mutations qui se sont opérées depuis la proclamation de l'Etat, le 14 mai 1948, et notamment le passage d'une société socialiste idéale voulue par certains des pères fondateurs à une société plus libérale et multiculturelle.

Villages collectivistes, les kibboutz sont indissociables de l'image d'Israël et ils "ont joué un rôle essentiel dans la construction du pays", même s'ils n'ont représenté au plus fort que 7,5% de la population juive en Israël, selon le sociologue Youval Achouch, enseignant- chercheur au Western Galilee Academic College à Acre (nord).

Yiron a été fondé en 1949, à quelques kilomètres de la ligne de démarcation avec le Liban, sur les ruines d'un village palestinien détruit par les forces juives pendant la première guerre israélo-arabe (1948-1949).

Sa création procède de la volonté des autorités de défendre les frontières du jeune Etat sorti vainqueur de ce conflit qui l'a opposé aux armées de cinq pays arabes l'ayant envahi dès le 15 mai 1948.

75 ans d'Israël: dix dates-clés

Voici dix dates-clés de l'Etat d'Israël, depuis la proclamation de son indépendance il y a 75 ans.

1948 : indépendance

L'ONU vote le 29 novembre 1947 le partage de la Palestine en deux Etats, juif et arabe.

Ce plan, rejeté par les Etats arabes, provoque une éruption de violences entre Arabes et Juifs.

Le 14 mai 1948, David Ben Gourion proclame l'indépendance de l'Etat d'Israël, après 28 ans de mandat britannique.

Le lendemain, cinq pays arabes entrent en guerre contre le nouvel Etat. Cette première guerre israélo-arabe finit en 1949 et permet à Israël d'étendre le territoire qui lui avait été imparti par les Nations unies.

Plus de 760.000 Palestiniens sont poussés à l'exode ou fuient, quelque 160.000 restent dans le nouvel Etat.

La Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, revient à la Jordanie, et la bande de Gaza à l'Egypte. Les rescapés de la Shoah immigrent massivement en Israël.
1967 : Guerre des Six-jours

En 1967, Israël déclenche les hostilités. Lors de cette troisième guerre israélo-arabe contre l'Egypte, la Syrie et la Jordanie, Israël s'empare en six jours de Jérusalem-Est, de la Cisjordanie, de Gaza, d'une partie du plateau syrien du Golan et de la péninsule égyptienne du Sinaï.

La colonisation commence dans ces territoires.

1973 : Guerre du Kippour

Six ans plus tard, pendant la fête juive du Kippour, l'Egypte et la Syrie attaquent Israël qui repousse l'assaut, au prix de pertes importantes.

1978 : paix avec l'Egypte

En 1978, le Premier ministre israélien Menahem Begin et le président égyptien Anouar al- Sadate signent à Washington les accords de Camp David, qui préfigurent la signature, le 26 mars 1979, du premier traité de paix entre un pays arabe et Israël.

L'Egypte récupère le Sinaï (ce qui sera effectif en 1982).

Le traité est dénoncé par les pays arabes et Sadate, très critiqué, est assassiné en 1981 par des islamistes.

1982 : invasion du Liban

Les Israéliens envahissent le Liban et assiègent Beyrouth en juin 1982. L'Organisation de libération de la Palestine (OLP) de Yasser Arafat doit quitter ce pays.

Les troupes israéliennes occupent le sud jusqu'en 2000.

Après l'enlèvement de soldats israéliens par le mouvement Hezbollah en 2006, Israël déclenche une offensive dévastatrice au Liban.

1993 : Accords d'Oslo

En décembre 1987, les Palestiniens déclenchent le premier soulèvement contre l'occupation israélienne, l'Intifada.

En 1993, Israël et l'OLP signent à Washington les accords d'Oslo sur l'autonomie palestinienne, scellée par une poignée de main entre Yasser Arafat et le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin.

Arafat revient triomphalement en 1994 dans les territoires palestiniens occupés après 27 ans d'exil et y établit l'Autorité palestinienne.

1995 : assassinat de Rabin

Yitzhak Rabin est assassiné à Tel-Aviv en 1995 par un extrémiste juif opposé au processus de paix.

2000 : Deuxième Intifada

Après la visite controversée en septembre 2000 sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem d'Ariel Sharon, qui était alors le chef de l'opposition de droite israélienne, la Deuxième intifada est déclenchée et va durer jusqu'en 2005.

2005 : retrait de la bande de Gaza

Israël se retire en 2005 de la bande de Gaza, sur laquelle il impose à partir de 2007 un blocus, après la prise de contrôle du mouvement islamiste armé Hamas.

Israël et le Hamas se livrent ensuite quatre guerres dans ce territoire, en 2008, 2012, 2014 et 2021.

2009 : retour de Netanyahu

Fin mars 2009, le chef du Likoud (droite) Benjamin Netanyahu - déjà à la tête du gouvernement entre 1996 et 1999 - redevient Premier ministre.

Il est inculpé de corruption dans une série d'affaires en 2019.

Chassé du pouvoir en 2021, il revient à la fin de l'année suivante à la tête du gouvernement, un des plus à droite de l'histoire d'Israël. Son projet de réforme du système judiciaire provoque à partir de janvier une mobilisation populaire inédite, les détracteurs du texte affirmant que celui-ci menace la démocratie israélienne.

Agée de 69 ans, Efrat Pieterse, née à Yiron, se souvient avec nostalgie de la "vie en collectif avec les autres enfants de (son) groupe".

Confiés à des éducateurs, les enfants "voyaient leurs parents en fin d'après-midi et regagnaient les maisons d'enfants", pour la nuit, dit-elle. "Nous étions neuf, tout le temps ensemble comme une famille".

Aujourd'hui, Yiron a bien changé: l'ancienne étable abrite une société agro-technologique, les habitations modestes et identiques ont laissé place à des pavillons bourgeois séparés par des clôtures, et les enfants y vivent avec leurs parents.

Explosion démographique

La crise économique des années 1980 et la chute du communisme en URSS ont contribué à remettre en cause le modèle coopératif des kibboutz avant que l'apparition de nouvelles valeurs individualistes et familiales n'achève de faire prendre à la majorité de ces villages un virage libéral au début du XXIe siècle, explique M. Achouch.

En 75 ans, la population d'Israël a crû plus rapidement que celle de la planète. Elle a été multipliée par 12 et compte aujourd'hui plus de 9,7 millions d'habitants, dont 7,1 millions de Juifs (soit 73,5% de l'ensemble), 2 millions d'Arabes (21%), le solde étant constitué principalement d'immigrés non juifs, selon le Bureau central des statistiques israélien.

Cette explosion démographique due à l'immigration de Juifs venus de différentes régions du monde - avec un apport massif de l'ex-Union soviétique au tournant de la décennie 1990 - et à un taux de fécondité élevé, explique aussi les profondes mutations de la société israélienne.

Passage obligé pour la jeunesse, l'armée est un facteur d'intégration et de construction de l'identité nationale, mais une grande part de la population y échappe (la quasi-totalité des juifs ultra-orthodoxes - soit 12% de la population, et de la minorité arabe).

Dans un discours ayant fait date, l'ancien président israélien, Reuven Rivlin, avait identifié en 2015 quatre "tribus" composant selon lui la société israélienne, sans jamais vraiment se mélanger.

Les trois tribus juives - laïcs, religieux nationalistes et ultra-orthodoxes - et la tribu arabe ne se fréquentent pas, n'habitent pas dans les mêmes villes, ne lisent pas les mêmes journaux, ne vont pas dans les mêmes écoles, avait-il déclaré.

«Visions différentes»

M. Rivlin ajoutait que ces différentes tribus partageaient "des visions différentes" de ce que doit être l'Etat d'Israël et que "l'ignorance mutuelle et l'absence de langage commun ne fait qu'accroître la tension, la peur, l'hostilité et la compétition" entre elles.

"La société est très fragmentée sur le plan ethnique mais aussi sur celui des classes sociales", déclare à l'AFP Sylvaine Bulle, sociologue au CNRS, spécialiste d’Israël.

Au sein mêmes des "tribus" identifiées par M. Rivlin se dessinent des clivages subtils, entre juifs séfarades et ashkénazes, nouveaux immigrants et "sabra" (nés en Israël), et, côté arabe, entre musulmans, chrétiens et druzes.

Pendant longtemps, les ashkénazes, juifs des pays d'Europe centrale et de l'Est dont sont issus les fondateurs du mouvement sioniste, "ont tenu les manettes politiques, judiciaires et économiques" du pays.

Au cours des décennies 1950 et 1960, des juifs d'Irak, du Yémen, du Maghreb, (nommés "Mizrahim" en hébreu), gagnent Israël, où ils s'installent dans des villes nouvelles.

Ils vont être "largement défavorisés par l'Etat", note Mme Bulle en faisant référence à la politique du Parti travailliste, maître incontesté de la politique israélienne jusqu'en 1977, année de la première victoire de la droite, dont ils constituent la base électorale.

"En 75 ans ce qui a changé c’est que l'élite ashkénaze est démographiquement vieillissante, elle n'est plus représentative de l'électorat et n'est plus ressentie comme légitime par les Mizrahim qui sont en quête d'ascension sociale", dit Mme Bulle.

"Ces dernières années, on observe un glissement à droite de l'opinion publique", note M. Achouch, pour qui les attentats suicide à répétition de la Seconde Intifada (le soulèvement palestinien de 2000-2005 contre l'occupation israélienne), l'échec du processus de paix, mais aussi le "noyautage du ministère de l'Education par la droite religieuse depuis des dizaines d'années" ont forgé l'identité politique des jeunes générations.

Depuis janvier, le pays est profondément divisé sur la question du projet de réforme de la justice voulu par le gouvernement, l'un des plus à droite de l'histoire d'Israël.

Ce projet que la majorité politique juge nécessaire pour rééquilibrer les pouvoirs en diminuant les prérogatives de la Cour suprême, est au contraire perçu comme une menace pour la démocratie israélienne par ses détracteurs et a suscité un des plus grands mouvements de contestation populaire qu'ait connu le pays.

«Identité israélienne»

Pour Mme Bulle, la crise actuelle autour de la réforme judiciaire reflète la fragmentation sociale du pays, mais dans le même temps, remarque-t-elle, la "mobilisation populaire", va d'une certaine façon "à l'encontre de la fragmentation extrême de la société israélienne".

En effet, juge-t-elle, ce mouvement "montre que les Israéliens dans leur ensemble restent attachés aux valeurs démocratiques, au sens de la justice, de l'éthique et de l'égalité", et en ce sens, "les gens qui se mobilisent aujourd'hui expriment une certaine nostalgie des racines socialistes d'Israël".

Mme Bulle note cependant que la minorité arabe reste en retrait de ce débat qui agite la société.

"Pour eux, la démocratie a toujours été défaillante", dit-elle, en résumant l'état d'esprit de ceux qu'elle appelle les "Palestiniens d'Israël", communément appelés "Arabes israéliens" en Israël.

Certaines "lois ont fragilisé la notion de démocratie et d'égalité entre les citoyens", relève Mme Bulle en citant celle adoptée en 2018 définissant Israël comme l'"Etat nation du peuple juif", qui a notamment fait de l'hébreu la seule langue officielle du pays, ne conférant plus à l'arabe qu'un statut "spécial".

Constatant lui aussi la fragmentation de la société, Avner Ben-Zaken, historien et président de l'Institute for Israeli Thought (IIT), centre de recherche à Tel-Aviv, estime que le système électoral, fondé sur la proportionnelle intégrale, en est en partie responsable car il favorise le clientélisme et la compétition entre les différents groupes de la société qui en viennent à se "haïr".

Pour autant, estime-t-il, "ce n'est pas la présence de ces différents groupes qui pose problème, mais la structure même de l'Etat".

En l'absence de Constitution, "on ne sait pas ce qu'est cet Etat", dit-il à l'AFP, jugeant impératif de "définir l'identité du pays comme israélienne" (et non pas seulement juive et démocratique), dans le cadre d'une Constitution, car c'est "le point commun" entre tous ces groupes.


Un an après la chute d’Assad, les Syriens affichent un fort soutien à al-Chareh

Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
Short Url
  • Un sondage révèle un optimisme croissant et un large soutien aux progrès du gouvernement après la chute d’Assad
  • L’Arabie saoudite apparaît comme le pays étranger le plus populaire, Trump reçoit également un soutien marqué

LONDRES : Alors que les Syriens ont célébré cette semaine le premier anniversaire de la chute de Bachar Al-Assad, une enquête menée dans le pays révèle un soutien massif au nouveau président et place l’Arabie saoudite comme principal partenaire international apprécié.

L’ancien président avait fui le pays le 8 décembre 2024, après une offensive éclair de l’opposition jusqu’à Damas, mettant fin à 14 ans de guerre civile.

La campagne était menée par Ahmad al-Chareh, aujourd’hui président du pays, qui s’efforce de stabiliser la Syrie et de rétablir des relations avec ses partenaires internationaux.

Ces efforts ont été salués dans un sondage récemment publié, montrant que 81 % des personnes interrogées ont confiance dans le président et 71 % dans le gouvernement national.

Les institutions clés bénéficient également d’un fort soutien : plus de 70 % pour l’armée et 62 % pour les tribunaux et le système judiciaire.

L’enquête a été menée en octobre et novembre par Arab Barometer, un réseau de recherche américain à but non lucratif.

Plus de 1 200 adultes sélectionnés aléatoirement ont été interrogés en personne à travers le pays sur une large gamme de sujets, notamment la performance du gouvernement, l’économie et la sécurité.

Le large soutien exprimé envers al-Chareh atteint un niveau enviable pour de nombreux gouvernements occidentaux, alors même que la Syrie fait face à de profondes difficultés.

Le coût de la reconstruction dépasse les 200 milliards de dollars selon la Banque mondiale, l’économie est dévastée et le pays connaît encore des épisodes de violence sectaire.

Al-Chareh s’efforce de mettre fin à l’isolement international de la Syrie, cherchant l’appui de pays de la région et obtenant un allègement des sanctions américaines.

Un soutien clé est venu d’Arabie saoudite, qui a offert une aide politique et économique. Le sondage place le Royaume comme le pays étranger le plus populaire, avec 90 % d’opinions favorables.

Le Qatar recueille lui aussi une forte popularité (plus de 80 %), suivi de la Turquie (73 %).

La majorité des personnes interrogées — 66 % — expriment également une opinion favorable envers les États-Unis, saluant la décision du président Donald Trump d’assouplir les sanctions et l’impact attendu sur leur vie quotidienne.

Après sa rencontre avec al-Chareh à Washington le mois dernier, Trump a annoncé une suspension partielle des sanctions, après en avoir déjà assoupli plusieurs volets.

Le sondage montre que 61 % des Syriens ont une opinion positive de Trump — un niveau supérieur à celui observé dans une grande partie du Moyen-Orient.

En revanche, l’enthousiasme est bien moindre concernant les efforts américains pour normaliser les relations entre la Syrie et Israël.

Seuls 14 % soutiennent cette démarche, et à peine 4 % disent avoir une opinion favorable d’Israël.

Lors du chaos provoqué par la chute d’Assad, l’armée israélienne a occupé de nouveaux territoires dans le sud de la Syrie et a mené de fréquentes attaques au cours de l’année écoulée.

Plus de 90 % des Syriens considèrent l’occupation israélienne des territoires palestiniens et les frappes contre l’Iran, le Liban et la Syrie comme des menaces critiques pour leur sécurité.

Dans Foreign Policy, Salma Al-Shami et Michael Robbins (Arab Barometer) écrivent que les résultats de l’enquête donnent des raisons d’être optimiste.

« Nous avons constaté que la population est pleine d’espoir, favorable à la démocratie et ouverte à l’aide étrangère », disent-ils. « Elle approuve et fait confiance à son gouvernement actuel. »

Mais ils notent aussi plusieurs sources d’inquiétude, notamment l’état de l’économie et la sécurité interne.

Le soutien au gouvernement chute nettement dans les régions majoritairement alaouites.

La dynastie Assad, au pouvoir pendant plus de 50 ans, était issue de la minorité alaouite, dont les membres occupaient de nombreux postes clés.

L’économie reste la principale préoccupation : seuls 17 % se disent satisfaits de sa performance, et beaucoup s’inquiètent de l’inflation, du chômage et de la pauvreté.

Quelque 86 % déclarent que leurs revenus ne couvrent pas leurs dépenses, et 65 % affirment avoir eu du mal à acheter de la nourriture le mois précédent.

La sécurité préoccupe aussi : 74 % soutiennent les efforts du gouvernement pour collecter les armes des groupes armés et 63 % considèrent l’enlèvement comme une menace critique.

À l’occasion de l’anniversaire de la chute d’Assad, lundi, al-Chareh a affirmé que le gouvernement œuvrait à construire une Syrie forte, à consolider sa stabilité et à préserver sa souveraineté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël mène une série de frappes contre le Hezbollah au Liban

Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
Short Url
  • Israël a frappé vendredi plusieurs sites du Hezbollah au sud et à l’est du Liban, ciblant notamment un camp d’entraînement de sa force d’élite al-Radwan, malgré le cessez-le-feu conclu en novembre 2024
  • Ces raids interviennent alors que l’armée libanaise doit achever le démantèlement des infrastructures militaires du Hezbollah le long de la frontière israélienne d’ici le 31 décembre

BEYROUTH: Israël a mené une série de frappes aériennes contre le sud et l'est du Liban vendredi matin, selon les médias officiels, l'armée israélienne affirmant viser des objectifs du Hezbollah pro-iranien dont un camp d'entrainement.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe islamiste libanais, Israël continue de mener des attaques régulières contre le Hezbollah, l'accusant de se réarmer.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani), les raids de vendredi, qualifiés en partie de "violents", ont visé une dizaine de lieux, certains situés à une trentaine de km de la frontière avec Israël.

Dans un communiqué, l'armée israélienne a affirmé avoir "frappé un complexe d'entrainement" de la force d'élite du Hezbollah, al-Radwan, où des membres de la formation chiite apprenaient "l'utilisation de différents types d'armes", devant servir dans "des attentats terroristes".

L'armée israélienne a également "frappé des infrastructures militaires supplémentaires du Hezbollah dans plusieurs régions du sud du Liban", a-t-elle ajouté.

L'aviation israélienne avait déjà visé certains des mêmes sites en début de semaine.

Ces frappes interviennent alors que l'armée libanaise doit achever le démantèlement le 31 décembre des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord, conformément à l'accord de cessez-le-feu.

Les zones visées vendredi se trouvent pour la plupart au nord du fleuve.

Le Hezbollah a été très affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe.


Pluies diluviennes et vents puissants ajoutent au chaos qui frappe Gaza

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
Short Url
  • A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre
  • Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza

GAZA: Pelle à la main, des Palestiniens portant des sandales en plastique et des pulls fins creusent des tranchées autour de leurs tentes dans le quartier de Zeitoun, à Gaza-ville, rempart dérisoire face aux pluies torrentielles qui s'abattent depuis des heures.

Dès mercredi soir, la tempête Byron a balayé le territoire palestinien, bordé par la mer Méditerranée, inondant les campements de fortune et ajoutant à la détresse de la population, déplacée en masse depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le 7 octobre 2023.

A Zeitoun, le campement planté au milieu des décombres a des allures cauchemardesques, sous un ciel chargé de gros nuages gris et blancs.

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes.

Accroupis sur des briques posées dans la boue, un groupe d'enfants mangent à même des faitouts en métal devant l'ouverture d'un petit abri en plastique, en regardant le ciel s'abattre sur le quartier.

"Nous ne savions pas où aller" 

A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre.

"La nuit dernière a été terrible pour nous et pour nos enfants à cause des fortes pluies et du froid, les enfants ont été trempés, les couvertures et les matelas aussi. Nous ne savions pas où aller", raconte à l'AFP Souad Mouslim, qui vit sous une tente avec sa famille.

"Donnez-nous une tente décente, des couvertures pour nos enfants, des vêtements à porter, je le jure, ils ont les pieds nus, ils n'ont pas de chaussures", implore-t-elle.

"Jusqu'à quand allons-nous rester comme ça? C'est injuste", dit-elle en élevant la voix pour couvrir le bruit des gouttes frappant la toile.

Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza.

Le territoire connait généralement un épisode de fortes pluies en fin d'automne et en hiver, mais la dévastation massive due à la guerre l'a rendu plus vulnérable.

"La situation est désespérée", résume Chourouk Mouslim, une déplacée originaire de Beit Lahia, dans le nord de Gaza, elle aussi sous une tente à al-Zawaida.

"Nous ne pouvons même pas sortir pour allumer un feu" pour cuisiner ou se chauffer, déplore-t-elle, avant d'ajouter qu'elle n'a de toutes les manières ni bois, ni gaz.

Dans ce territoire dont les frontières sont fermées, où l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante selon l'ONU, malgré l'entrée en vigueur d'une trêve le 10 octobre, les pénuries empêchent une population déjà démunie de faire face à ce nouveau problème.

Lointaine reconstruction 

Sous les tentes, les plus chanceux bâchent le sol ou le recouvrent de briques pour empêcher que le sable humide ne détrempe leurs affaires. Dans les zones où le bitume n'a pas été arraché, des bulldozers continuent de déblayer les décombres des bâtiments détruits.

Beaucoup de gens restent debout, à l'entrée des abris, plutôt que de s'asseoir une surface mouillée.

"La tempête a eu un impact grave sur la population, des bâtiments se sont effondrés et une grande partie des infrastructures étant détruite, elles ne permettent plus d'absorber cet important volume de pluie", note Mahmoud Bassal, le porte-parole de la Défense civile de Gaza.

Cette organisation, qui dispense des premiers secours sous l'autorité du Hamas, a affirmé que la tempête avait causé la mort d'une personne, écrasée par un mur ayant cédé. Elle a ajouté que ses équipes étaient intervenues après l'effondrement partiel de trois maisons durant les fortes pluies.

La Défense civile a averti les habitants restés dans des logements partiellement détruits ou fragilisés par les bombardements qu'ils se mettaient en danger.

"Les tentes, c'est inacceptable", estime M. Bassal, "ce qui doit être fourni maintenant, ce sont des abris qu'on peut déplacer, équipés de panneaux solaires, avec deux pièces, une salle de bain et toutes les installations nécessaires pour les habitants. Seulement à ce moment-là, la reconstruction pourra commencer".