Inondations meurtrières : comme «la fin du monde» dans l'est de la RDC

Cette photographie aérienne prise le 6 mai 2023 montre un glissement de terrain qui a englouti le village de Nyamukubi, dans l'est de la République démocratique du Congo. (AFP)
Cette photographie aérienne prise le 6 mai 2023 montre un glissement de terrain qui a englouti le village de Nyamukubi, dans l'est de la République démocratique du Congo. (AFP)
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Publié le Dimanche 07 mai 2023

Inondations meurtrières : comme «la fin du monde» dans l'est de la RDC

  • L'eau boueuse a tout balayé, semant la mort et la désolation à Nyamukubi, un des villages dévastés jeudi par des inondations qui ont fait environ 400 morts dans le Sud-Kiv
  • Au pied des collines verdoyantes du territoire de Kalehe sur la rive ouest du lac Kivu frontalier du Rwanda, un paysage désertique de boue et de pierres a pris possession de tout un quartier

NYAMUKUBI: L'eau boueuse a tout balayé, semant la mort et la désolation à Nyamukubi, un des villages dévastés jeudi par des inondations qui ont fait environ 400 morts dans le Sud-Kivu dans l'est de la République démocratique du Congo, selon un bilan encore provisoire dimanche.

"On dirait la fin du monde. Je cherche mes parents et mes enfants", se désole Gentille Ndagijimana, les larmes aux yeux.

À 27 ans, Gentille et sa famille sont originaires de Masisi dans la province voisine du Nord-Kivu. Ils ont fui les combats entre l'armée congolaise et les rebelles du M23 en janvier et trouvé refuge ici.

Elle a perdu ses deux enfants, ses deux soeurs et ses parents. Son mari, blessé, est à l'hôpital. "Je n'ai plus de famille et je n'ai pas de champ. Maintenant je dois chercher où dormir...", continue tristement la jeune femme.

Au pied des collines verdoyantes du territoire de Kalehe sur la rive ouest du lac Kivu frontalier du Rwanda, un paysage désertique de boue et de pierres a pris possession de tout un quartier. Il y avait là des maisons d'habitation, un marché, deux écoles, un centre de santé, une salle polyvalente, un entrepôt. Il n'en reste rien.

Jeudi soir, sous l'effet d'une forte pluie, les rivières Nyamukubi et Chishova ont débordé et tout emporté sur leur passage.

"Je suis motard. J'étais rentré du travail, j'ai déposé ma moto à la maison et je suis sorti voir des amis. A mon retour, ma maison, ma moto et les membres de ma famille avaient disparu", témoigne auprès de l'AFP Roger Bahavu, père de sept enfants.

Tous sont morts, leur mère aussi, et leur grand-mère. "Sur onze personnes dans la famille, nous ne restons qu'à deux", lâche tristement le père de famille, qui espère retrouver les corps des siens.

"Il y a beaucoup de corps, nous sommes débordés", s'alarme Isaac Habamungu, un agent de la Croix-Rouge locale.

L'administrateur du territoire chiffrait samedi à 203 le nombre de corps retrouvés. Dimanche, il en évoquait au moins 394, dont 120 découverts flottant sur le lac au niveau de l'île d'Idjwi, les autres ayant été trouvés à Nyamukubi et dans le village voisin de Bushushu.

Appel à l'aide 

"Nous pensons que beaucoup de corps ont échoué dans le lac... On se demande comment on va s'en sortir", ajoute Isaac. "Nous n'avons pas de sacs mortuaires, il n’y a pas de financement pour ce que nous faisons", dit-il.

Les équipes, poursuit-il, creusent à la recherche des cadavres "avec les mains et quelques pelles". Elles enroulent les corps dans des couvertures ou des draps avant de les inhumer dans des fosses communes.

Sur la rive du lac flottent des morceaux de bois, des tôles, des meubles et d'autres matériaux charriés par les rivières en furie. Sur des maisons englouties, des jeunes essaient de récupérer ce qui peut encore l'être : des tôles, des structures métalliques, des planches...

La Croix-Rouge et l'administration poursuivent l'enregistrement des familles qui ont perdu les leurs, ainsi que des sinistrés.

Le chef du village, Marcel Mubona, s'attend à encore plus de morts. Cela va "empirer", dit-il, alors qu'il vient d'apprendre la mort d'un jeune qui avait été hospitalisé.

Terminus de tous les malades et blessés, le seul établissement de santé opérationnel dans la zone est une institution privée, l'"hôpital pour la promotion de la santé mère et enfant" qui, débordé lui aussi, doit faire face au manque de médicaments, de personnel soignant et de lits.

"On attend la réaction du gouvernement, pour nous aider à acheminer" les cas les plus graves vers de plus grands hôpitaux, et pour "nous fournir des médicaments afin de nous occuper des autres", demande le Dr Bauma Ngola, médecin directeur de l'hôpital.

Assise sur son lit, désespérée, le visage tuméfié, souffrant de graves blessures au pied, une jeune femme pense qu'elle est "en train de mourir".

"Mes blessures et mon corps sont en train de gonfler, ils disent que ma jambe doit être coupée", déclare-t-elle. A côté d'elle, son fils de 10 ans, dont les blessures lui font de plus en plus mal, attend lui aussi qu'on s'occupe de lui.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.