Macron veut mettre les bouchées doubles sur la réindustrialisation

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours à Lyon, le 8 mai 2023 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours à Lyon, le 8 mai 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 11 mai 2023

Macron veut mettre les bouchées doubles sur la réindustrialisation

  • Le chef de l'Etat a annoncé la couleur dans un long entretien à l'hebdomadaire Challenges: la réindustrialisation, c'est «la mère des batailles»
  • Cet investissement fait partie des annonces attendues lundi à la sixième édition du sommet «Choose France» organisée au château de Versailles

PARIS: "Crédit d'impôt industrie verte", refonte du bonus automobile: Emmanuel Macron a dévoilé jeudi sa stratégie pour "accélérer" la "réindustrialisation" de la France, appelant aussi l'Union européenne à faire "une pause réglementaire" en matière de contraintes environnementales.

Le chef de l'Etat français avait annoncé la couleur dans un entretien à Challenges: la réindustrialisation, c'est "la mère des batailles", a-t-il dit, après s'être attelé dans la douleur aux retraites, longtemps présentées comme "la mère de toutes les réformes".

"Je suis convaincu que cette bataille, on peut la gagner", a-t-il lancé jeudi à l'Elysée devant les acteurs de l'industrie française. Réindustrialiser, c'est aussi "créer du pouvoir d'achat" et "stopper le décrochage de cette France des territoires".

Alors qu'il tente de relancer son quinquennat embourbé, il a annoncé plusieurs mesures pour passer à la vitesse supérieure.

La première, dévoilée dès mercredi, vise à mettre en place des "procédures hypersimplifiées" pour "diviser par deux les délais" d'une nouvelle implantation industrielle en France, en passant de 17-18 mois aujourd'hui à neuf mois "maximum".

Pour cela, alors que le foncier industriel est rare, la banque des territoires va investir un milliard d'euros afin de "dépolluer" des friches existantes et les mettre à disposition, "prêtes à l'emploi", pour de futurs projets.

Il a aussi promis 700 millions d'euros supplémentaires pour développer des formations aux "métiers d'avenir" ou "en tension" dans l'industrie.

Riposte à Joe Biden

Emmanuel Macron a annoncé la création d'un "crédit d'impôt industrie verte" pour soutenir la production de batteries, pompes à chaleur, éoliennes ou panneaux solaires.

Il fera partie du projet de loi industrie verte, attendu mardi en Conseil des ministres, et permettra selon lui "de déclencher 20 milliards d'investissements sur le territoire national d'ici 2030".

Quant au bonus écologique à l'achat d'une voiture électrique, il sera réformé pour "prendre en compte l'empreinte carbone" de leur production et favoriser les véhicules fabriqués en Europe. En Chine, l'énergie qui permet de les produire repose encore largement sur le charbon.

Même logique pour les commandes publiques qui vont prendre en compte les critères environnementaux "pour les produits clés de la décarbonation" comme les éoliennes et les pompes à chaleur dès juillet 2024 au lieu de 2026.

Ces annonces se veulent la mise en musique française de la riposte européenne à la politique très volontariste, sinon protectionniste, établie par Joe Biden aux Etats-Unis pour soutenir l'industrie et la transition énergétique. Emmanuel Macron avait été à l'automne en première ligne pour pousser le Vieux Continent à s'armer face à cette concurrence, et face à la montée en puissance chinoise.

Le chef de l'Etat a d'ailleurs appelé l'Union européenne à faire "une pause réglementaire européenne" en matière de contraintes environnementales, estimant qu'elles étaient déjà plus strictes qu'ailleurs et qu'il fallait désormais de la "stabilité".

Mais les écologistes sont vent debout. "Les Français demandent une pause sur la mise en œuvre de la réforme des retraites. Macron leur propose une pause sur l’écologie", a taclé la secrétaire nationale d'EELV Marine Tondelier.

L'exécutif estime que sa politique depuis 2017 commence à porter ses fruits. Il met en avant les 300 créations nettes d'usines en France entre 2017 et 2022, à comparer avec 600 destructions nettes entre 2008 et 2016.

Le président prédit même le rattrapage "d'ici la fin du quinquennat" du "choc de désindustrialisation dû à la crise de 2008".

Vendredi, le chef de l'Etat poursuit la séquence. Il va visiter l'usine Aluminium Dunkerque, "plus gros producteur d'aluminium primaire d'Europe", selon l'Elysée.

Il doit aussi "officialiser de nouveaux investissements", dont l'implantation par le groupe taïwanais ProLogium d'une quatrième usine de batteries pour véhicules électriques en France, pour une entrée en production à partir de fin 2026.

Cet investissement fait partie des annonces attendues, lundi, à la sixième édition du sommet "Choose France" organisée au château de Versailles. Cette réunion annuelle lancée par Emmanuel Macron en 2018 vise à attirer les investissements étrangers.


Ukraine: Zelensky accueilli par Macron à Paris pour faire le point sur les négociations

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
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  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée
  • Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride

PARIS: Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine, a constaté un journaliste de l'AFP.

Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride, et à la veille d'une rencontre à Moscou entre l'émissaire de Donald Trump, Steve Witkoff, et le président russe Vladimir Poutine.

 


La France fixe une nouvelle doctrine d'intervention en mer contre les traversées clandestines vers l'Angleterre

Un bateau de la Gendarmerie maritime française navigue à proximité de bateaux de passeurs transportant des migrants qui tentent de traverser la Manche au large de la plage de Gravelines, dans le nord de la France, le 27 septembre 2025. (AFP)
Un bateau de la Gendarmerie maritime française navigue à proximité de bateaux de passeurs transportant des migrants qui tentent de traverser la Manche au large de la plage de Gravelines, dans le nord de la France, le 27 septembre 2025. (AFP)
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  • La France prévoit de lancer prochainement des opérations en mer pour intercepter les “taxi-boats” transportant clandestinement des migrants vers l’Angleterre
  • Cette initiative intervient après une hausse des traversées de la Manche, avec plus de 39 000 arrivées en 2025

LILLE: Après des mois de discussions, la France a annoncé vendredi qu'elle allait débuter "prochainement" des opérations visant à intercepter en mer des petits bateaux clandestins en chemin vers l'Angleterre, avant qu'ils n'embarquent des groupes de migrants.

Ce changement de doctrine engagé par Paris sous pression de Londres était en gestation depuis plusieurs mois.

Les forces de l'ordre françaises peinent à trouver la parade face aux "taxi-boats", un mode d'action des passeurs consistant à faire partir une embarcation d'un point éloigné des principales plages de départ où sont rassemblés les migrants.

Le taxi-boat s'approche ensuite du rivage et vient récupérer des passagers directement dans l'eau, avant de poursuivre sa route vers l'Angleterre.

"La Gendarmerie maritime sera bientôt en mesure d'effectuer des opérations de contrôle et d'intervention en mer, sur des embarcations soupçonnées d'être des taxi-boats", a déclaré à l'AFP la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord (Prémar), confirmant des informations du journal Le Monde.

Le quotidien évoque un document signé par le préfet maritime mais aussi ceux du Nord, de la Somme et du Pas-de-Calais.

Le ministère de l'Intérieur français n'a pas souhaité réagir.

Côté britannique, un porte-parole du gouvernement a simplement rappelé vendredi à l'AFP que Londres a "déjà travaillé à s'assurer que les autorités en France réforment leurs tactiques en mer afin qu'elles puissent intervenir dans les eaux peu profondes".

- Pas de filets à ce stade -

Actuellement, une fois une embarcation clandestine en mer, seul le dispositif de secours intervient en cas de besoin, en raison des risques que présentent ce type d'opérations, comme prévu par les conventions internationales.

Désormais, il pourra aussi y avoir des "opérations de contrôle et d'intervention (...) issues d'études menées par l'ensemble des services de l’État concernés", a précisé la Prémar. Elles "comportent des dispositions prenant en compte la primauté de la sauvegarde de la vie humaine".

Ces futures opérations de la gendarmerie maritime sont prévues en amont de l'embarquement de passagers, pour ne pas mettre leurs vies en péril, selon une source proche du dossier.

"L'ensemble des travaux sur le sujet se fait en lien avec les parquets concernés", a souligné à l'AFP la procureure de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), Cécile Gressier.

En outre, la Prémar précise que "l'emploi de filets visant à stopper le taxi-boat n'est pas envisagé à ce stade".

Cette méthode, mentionnée la semaine dernière dans la presse, avait soulevé l'indignation d'associations d'aide aux migrants et d'ONG comme Amnesty International.

Pour le professeur de droit international Thibaut Fleury-Graff, "les interceptions sont susceptibles d'être contraires au droit de quitter tout pays" inscrit dans le Pacte de l'ONU sur les droits civils et politiques, et doivent respecter "l'ensemble des droits de la personne humaine".

Les taxi-boats embarquent leurs passagers sur une ou plusieurs haltes et repartent en direction de l'Angleterre surchargés, transportant régulièrement plus de 70 candidats à l'exil dans des conditions périlleuses.

Au moins 27 migrants sont morts cette année lors de ces dangereuses tentatives de traversées de la Manche, selon un décompte de l'AFP.

Après le pire naufrage dans la Manche, qui a fait 31 morts en novembre 2021, le parquet de Paris a demandé vendredi un procès en correctionnelle pour 14 hommes, nés pour la plupart en Afghanistan et en Irak, soupçonnés d'être impliqués dans des réseaux de passeurs à l'origine du drame.

Depuis le 1er janvier, plus de 39.000 personnes sont arrivées sur les côtes anglaises à bord de petites embarcations, selon les données britanniques, soit plus que sur la totalité de 2024.

Plus de la moitié des personnes arrivées clandestinement au Royaume-Uni entre septembre 2024 et septembre 2025 sont de cinq nationalités: Érythréens (la nationalité la plus représentée), Afghans, Iraniens, Soudanais et Somaliens.

Le gouvernement travailliste britannique, sous pression de l'extrême-droite, a annoncé ce mois-ci une réforme qui durcit fortement sa politique d'asile et d'immigration, espérant ainsi décourager les arrivées irrégulières de migrants sur ces "small boats", qu'il peine à endiguer.


France: des ONG inquiètes d'une baisse de l'aide au développement

Le docteur Bertrand Chatelain (à gauche), de l'ONG Médecins du Monde (MdM), examine un réfugié lors d'une opération de maraudage dans le camp de migrants du quartier Stalingrad à Paris, le 12 juillet 2023. (AFP)
Le docteur Bertrand Chatelain (à gauche), de l'ONG Médecins du Monde (MdM), examine un réfugié lors d'une opération de maraudage dans le camp de migrants du quartier Stalingrad à Paris, le 12 juillet 2023. (AFP)
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  • Plusieurs ONG françaises alertent sur un désengagement de la France en matière d’aide au développement, dans un contexte mondial déjà marqué par une baisse générale de la solidarité internationale
  • Les organisations humanitaires redoutent des conséquences majeures pour des millions de personnes

PARIS: Plusieurs ONG françaises, dont Médecins du Monde, ont critiqué vendredi un "désengagement croissant" de Paris envers la solidarité internationale, le gouvernement entendant amputer, dans le prochain budget, l'aide au développement de 700 millions d'euros, dans un contexte international tendu.

Sandrine Simon, directrice santé et plaidoyer de Médecins du Monde, critique une décision qui va "à l'encontre des engagements" de la France dans ce secteur. Elle évoque sa "grande inquiétude" et son "incompréhension".

En France, où l'aide publique au développement a été réduite ces dernières années, les coupes envisagées dans le projet de loi de finances 2026 s'élèvent à 700 millions d'euros, pour un montant alloué de 3,7 milliards d'euros.

"A chaque fois qu'il y a ne serait-ce qu'un million d'euros qui est coupé, on sait qu'il y a des milliers, voire des millions de personnes derrière qui sont affectées", alerte Anne Bideau, directrice générale de Plan International France, rappelant une "tendance à la baisse de l'aide publique au développement un peu partout dans le monde".

"on sait que les conséquences vont être dramatiques, donc on est extrêmement inquiets", ajoute Mme Bideau auprès de l'AFP.

Début 2025, le démantèlement de l'Agence américaine pour le développement international (USAID), sous l'impulsion du président républicain Donald Trump, avait provoqué une onde de choc internationale.

Mais la fin de l'USAID avait mis en exergue une tendance de fond: le montant accordé par 32 pays riches de l'OCDE et l'Union européenne à l'aide au développement a diminué en 2024 de 7,1% (en terme réel) à 212,1 milliards de dollars, selon une estimation de l'OCDE, une première en six ans.

"On a des crises à répétition, le Soudan, Gaza etc. Il y a une augmentation des besoins et il y a une réduction de l'aide", déplore pour sa part Stéphane Doyon, de Médecins Sans Frontières, ONG qui n'est pas financée par le gouvernement français.

En France, cette coupe est justifiée "par l'effort nécessaire sur les finances publiques - et pas pour des raisons idéologiques comme aux Etats-Unis", affirme une source diplomatique à l'AFP, rappelant qu'elle n'a pas encore été votée.

"Entre la loi de finances 2024 et le projet de loi de finances 2026, on aurait une baisse de moitié de l'aide publique au développement", a calculé la Coordination Sud, qui regroupe des associations françaises de solidarité internationale.

Avec des conséquences concrètes pour les ONG qui comptent sur le soutien de l'Etat.

"Nous espérions recevoir de l'argent de l'Agence française de développement qui vient de nous annoncer qu'ils ne nous soutiendraient pas l'année prochaine", explique Sandrine Simon, de Médecins du Monde, au moment où l'ONG elle-même programme avec "un niveau d'incertitudes très important ce budget 2026, bien au-delà des années passées."

Dans le pire des scénarios, avec des coupes budgétaires massives, plus de 22 millions de personnes pourraient mourir de causes évitables d'ici à 2030, selon une étude menée par des chercheurs espagnols, brésiliens et mozambicains.