La Turquie dans le collimateur des sanctions US pour son achat du S-400

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Publié le Samedi 05 décembre 2020

La Turquie dans le collimateur des sanctions US pour son achat du S-400

  • Le président du comité exécutif de l'industrie de la défense turc, Ismail Demir, pourrait être sanctionné pour avoir supervisé l'achat du S-400
  • Les experts estiment que la Turquie sera touchée par les nouvelles sanctions qui auraient dû être prises auparavant

ANKARA: La loi d’autorisation de la défense nationale américaine a désigné jeudi l’achat controversé par la Turquie d’un système de défense de fabrication russe comme une transaction qui requiert l’imposition de sanctions dans les 30 jours.

Les experts estiment que la Turquie sera touchée par les nouvelles sanctions qui auraient dû être prises auparavant suite à l’accord des membres de la Chambre et de la commission des services armés du Sénat sur le projet de loi de défense également connue par la loi des 740 milliards de dollars, qui devrait être adopté au Congrès ce mois-ci.

Après la réticence de plusieurs mois du président américain sortant Donald Trump à agir, le Congrès devrait maintenant lancer le processus et tenir la Turquie responsable de l'achat du système S-400 en obligeant la Maison Blanche à signer le document de 4517 pages avant que Trump quitte ses fonctions le 20 janvier.

Le projet de loi sur la défense, dans les 30 jours suivant son entrée en vigueur, oblige le président à imposer au moins cinq des 12 sanctions énumérées dans la loi contre les adversaires de l’Amérique par les sanctions (LCAAPS) «à l'égard de chaque personne sciemment engagée dans l'acquisition», y compris l'interdiction des transactions bancaires et immobilières aux États-Unis, le refus de visas américains et l'obligation des prêteurs américains de refuser des prêts à toute entreprise sanctionnée.

Dans le but d’empêcher les pays de faire des affaires avec le secteur de la défense russe, le président du comité exécutif de l'industrie de la défense turc, Ismail Demir pourrait également être sanctionné pour avoir supervisé l'achat du S-400.

Les sanctions devraient en outre peser sur l'équilibre déjà fragile d'une économie turque qui tente de faire face à une récession chronique, des taux d'inflation élevés et des réserves de change épuisées dans un contexte de bas record de la lire contre les devises étrangères.

 «L'une des pires options de la liste de ces sanctions serait l'imposition de sanctions sur l'exportation des produits et technologies de défense de la Turquie, ce qui nuirait gravement à l'industrie de la défense turque», a déclaré à Arab News, Emre Caliskan, chercheur au Centre de la politique étrangère au Royaume-Uni.

En vertu de la LCAAPS, le président américain peut ordonner au gouvernement de ne délivrer aucune licence spécifique et de n'accorder aucune autre autorisation ou autorité spécifique pour exporter des biens ou des technologies à la personne sanctionnée et toute autre loi qui nécessite l'examen et l'approbation préalables du gouvernement comme condition pour l'exportation ou la réexportation de biens ou de services.

«Tandis que les entreprises turques comptent beaucoup sur les pays occidentaux pour certains composants primordiaux, y compris les moteurs, les capteurs optiques et les systèmes de caméra pour l'assemblage des drones, toute sanction éventuelle aurait un impact direct sur les ambitions de la Turquie d'exporter ses produits de défense», a affirmé Caliskan.

La Turquie doit fournir des garanties qu'elle ne possède plus le système de défense russe sur son territoire ou que ce dispositif n’est encore pas opérationnel pour que les sanctions soient levées une fois qu'elles sont imposées.

«Incroyablement fier d'avoir contribué à l'inclusion d'une disposition dans la loi sur l'autorisation de la défense nationale (LADN) pour faire ce que Trump a refusé de faire: déterminer officiellement au nom du gouvernement américain que la Turquie a pris livraison des systèmes de défense russes les S-400 et sera inévitablement sanctionnée en vertu de la loi existante, », a tweeté le sénateur Bob Menendez.

Mais la Turquie n'a pas abandonné le S-400. Elle a quand même testé le système le 16 octobre dans la ville côtière de Sinop sur la mer Noire malgré les mises en garde des États-Unis.

La Turquie considère que la question de la S-400 est une affaire de souveraineté. «Nous ne sommes pas un pays tribal, nous sommes la Turquie», a déclaré le mois dernier le président turc Recep Tayyip Erdogan au sujet de la demande des États-Unis de suspendre les S-400.

«Toute cette rude épreuve est le point culminant du refus de Trump de se conformer à la loi», a souligné Aaron Stein, directeur de la recherche à l'Institut de recherche sur la politique étrangère, à Arab News. «Le Congrès en a assez et a cherché à lier les mains du président. Trump peut simplement ignorer la loi, encore une fois, mais actuellement, c'est un canard boiteux. Il va tout, de toute façon, quitter la maison blanche le 20 janvier et le président élu Joe Biden héritera de ce problème. Quoi qu'il en soit, je ne crois pas que le résultat soit mis en doute: des sanctions seront forcément imposées aux turcs pour l'achat des S-400».

Stein a de plus souligné que la Turquie ferait ce qu'elle a toujours fait; blâmer les autres et prétendre qu'il s'agit d'un refus de vente des missiles Patriot de fabrication américaine ou même suggérer que le problème pourrait être résolu avec un groupe de travail technique.

«Ce moment est clairement sombre, puisqu’il ne peut pas être résolu très facilement et que la Turquie enverra un signal qu’elle est prête à faire des compromis. À ce jour, cela ne s’est pas produit. Mais sans compromis, l'administration Biden ne pourra sans doute pas plaider en faveur de la levée des sanctions», a-t-il ajouté.

La responsabilité de signer le projet de loi appartient à l'administration Trump, autrement, il sera, sans faute, signé par Biden.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Liban: le chef de l'Etat demande à l'armée de «s'opposer à toute incursion israélienne»

Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
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  • Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens"
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BERYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit.

Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens".

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".


Liban: incursion israélienne dans un village frontalier, un employé municipal tué

Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
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  • En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BEYROUTH: Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien.

En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".

L'armée israélienne a confirmé avoir mené cette incursion, affirmant qu'elle intervenait dans le cadre de ses "activités visant à détruire une infrastructure terroriste" du Hezbollah.

Elle a ajouté que l'unité avait "repéré un suspect à l'intérieur du bâtiment" de la municipalité et ouvert le feu après avoir identifié "une menace directe" sur les soldats.

L'incident "fait l'objet d'une enquête", selon l'armée.

Dans un autre village frontalier, Adaissé, une unité israélienne a dynamité un bâtiment servant à abriter des cérémonies religieuses, selon l'Ani.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Mardi, le porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Jeremy Laurence, a indiqué que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour qu'il livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.

Le mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, qui regroupe outre le Liban et Israël, les Etats-Unis, la France et l'ONU, s'est réuni mercredi dans la localité frontalière de Naqoura, qui abrite le quartier général des forces de l'ONU.

L'émissaire américaine Morgan Ortagus a déclaré au cours de la réunion que "l'armée libanaise doit à présent exécuter entièrement son plan" visant à "placer toutes les armes sous le contrôle de l'Etat d'ici la fin de l'année".


Soudan: l'ONU appelle à mettre un terme au siège d'El-Facher après une tuerie dans une maternité

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  • Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée"
  • Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités"

PORT-SOUDAN: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé jeudi à mettre un terme à l'"escalade militaire" au Soudan, après le meurtre de plus de 460 personnes dans une maternité à El-Facher, ville clé prise par les forces paramilitaires.

Les informations se multiplient sur des exactions massives depuis que les Forces de soutien rapide (FSR, paramilitaires) ont pris dimanche, après 18 mois de siège, cette dernière grande ville qui échappait à leur contrôle dans la vaste région du Darfour, où "les massacres continuent" selon des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université Yale.

Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée".

Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités".

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'est dite "consternée par les informations faisant état du meurtre tragique de plus de 460 patients et accompagnateurs à la maternité saoudienne d'El-Facher". Selon l'institution, cette maternité était le seul hôpital encore partiellement opérationnel dans la ville.

Après la prise d'El-Facher à leurs rivaux, l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, les FSR contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan couvrant le tiers du pays.

Les communications satellite restent coupées -sauf pour les FSR qui contrôlent le réseau Starlink-, les accès d'El-Facher restent bloqués malgré les appels à ouvrir des corridors humanitaires. Dans ce contexte, il est extrêmement compliqué de joindre des sources locales indépendantes.

Maîtres du Darfour 

"Plus de 2.000 civils ont été tués au cours de l'invasion de la milice (des FSR) à El-Facher, ciblant les mosquées et les volontaires du Croissant-Rouge", a pour sa part affirmé Mona Nour Al-Daem, chargée de l'aide humanitaire au gouvernement pro-armée.

A El-Facher, le comité de résistance local, qui documente les exactions depuis le début du conflit, a rapporté mercredi soir avoir entendu des tirs dans l'ouest de la ville, "où quelques soldats restants combattent avec (...) ténacité".

Depuis dimanche, plus de 36.000 personnes ont fui les violences, majoritairement vers la périphérie d'El-Facher et vers Tawila, cité située à 70 km plus à l'ouest et qui était déjà la plus importante zone d'accueil du Soudan, selon l'ONU, avec plus de 650.000 déplacés.

De rares images de l'AFP en provenance de Tawila montrent des déplacés portant leurs affaires sur leur dos ou sur leur tête. Certains montent des tentes, d'autres, parfois blessés, sont assis dans des conditions précaires.

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a alerté sur le "risque croissant d'atrocités motivées par des considérations ethniques" en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres et les viols des milices arabes Janjawid, dont sont issues les FSR, contre les tribus locales Massalit, Four ou Zaghawa.

"Unité" 

Les FSR, qui ont installé au Darfour une administration parallèle, contrôlent désormais l'ouest du Soudan et certaines parties du sud, avec leurs alliés. L'armée contrôle le nord, l'est et le centre du troisième plus vaste pays d'Afrique, ravagé par plus de deux ans de guerre.

Des experts craignent une nouvelle partition du Soudan, après l'indépendance du Soudan du Sud en 2011. Mais le chef des FSR a affirmé mercredi que la prise complète du Darfour par ses forces favoriserait "l'unité" du pays.

"La libération d'El-Facher est une opportunité pour l'unité du Soudan et nous disons : l'unité du Soudan par la paix ou par la guerre", a déclaré M. Daglo mercredi.

Les pourparlers menés depuis plusieurs mois par le groupe dit du "Quad", qui réunit les Etats-Unis, l'Egypte, les Emirats arabes Unis et l'Arabie saoudite, sont restés dans l'impasse, selon un responsable proche des négociations.

Leurs propositions de trêve se heurtent, selon lui, "à l'obstructionnisme continu" du pouvoir de M. Burhane, qui a refusé en septembre une proposition prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.