Les Thaïlandais aux urnes, l'opposition espère déloger l'armée du pouvoir

La candidate au titre de premier ministre du Pheu Thai, Paetongtarn Shinawatra, fille de l'ancien premier ministre Thaksin Shinawatra, s'exprime lors d'un grand rassemblement en vue des prochaines élections, à Bangkok (Thaïlande), le 12 mai 2023. (REUTERS)
La candidate au titre de premier ministre du Pheu Thai, Paetongtarn Shinawatra, fille de l'ancien premier ministre Thaksin Shinawatra, s'exprime lors d'un grand rassemblement en vue des prochaines élections, à Bangkok (Thaïlande), le 12 mai 2023. (REUTERS)
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Publié le Dimanche 14 mai 2023

Les Thaïlandais aux urnes, l'opposition espère déloger l'armée du pouvoir

  • Le principal parti d'opposition, Pheu Thai, mené par la fille de l'ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, espère tourner la page d'une quasi-décennie de domination par l'armée et ses alliés, incarnée par le Premier ministre sortant Prayut Chan-O-Cha
  • Mais le système électoral complexe offre au candidat proche des militaires une avance confortable, qui pourrait atténuer l'ampleur de l'alternance attendue, voire ouvrir une nouvelle période d'instabilité

BANGKOK : Les Thaïlandais ont commencé dimanche à voter à l'occasion des premières élections législatives depuis les manifestations pro-démocratie de 2020, sur fond de rejet du gouvernement conservateur pro-armée, donné perdant dans les sondages face à l'opposition progressiste.

Les analystes anticipent un taux de participation élevé, qui fait écho au changement souhaité par une partie de la population, dans un contexte de croissance en berne et de recul des libertés fondamentales.

Le principal parti d'opposition, Pheu Thai, mené par la fille de l'ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, espère tourner la page d'une quasi-décennie de domination par l'armée et ses alliés, incarnée par le Premier ministre sortant Prayut Chan-O-Cha (69 ans).

Mais le système électoral complexe offre au candidat proche des militaires une avance confortable, qui pourrait atténuer l'ampleur de l'alternance attendue, voire ouvrir une nouvelle période d'instabilité.

Un scénario qui permettrait aux militaires de se maintenir au pouvoir reste également envisageable, dans un royaume habitué aux interventions de l'armée et de la justice dans le processus démocratique.

«Raz-de-marée électoral»

Les principaux candidats se sont rendus aux urnes dans la capitale Bangkok dans la matinée, après l'ouverture des bureaux de vote à 08h00 (01h00 GMT).

L'ex-général Prayut a appelé les électeurs à se déplacer en masse, disant espérer un "taux de participation aussi élevé que possible".

Arrivé au pouvoir à la suite d'un coup d'Etat en 2014 puis légitimé en 2019 par des législatives controversées, le dirigeant aborde le scrutin en position de faiblesse, face au camp pro-démocratie conduit par Paetongtarn Shinawatra, 36 ans, la favorite du vote sous la bannière rouge de Pheu Thai.

Elle a fait campagne sur le thème du "raz-de-marée électoral", rendu indispensable pour accéder au pouvoir.

Le mouvement associé à sa richissime famille a besoin de 376 sièges, sur les 500 de l'Assemblée nationale, pour contre-balancer l'influence des 250 sénateurs nommés par l'armée.

Alors qu'il suffit au camp pro-armée de 126 députés pour s'assurer une majorité au vote du Premier ministre, choisi par les deux chambres.

Candidate star, Paetongtarn Shinawatra capitalise sur la popularité de son père Thaksin Shinawatra, Premier ministre de 2001 à 2006, qui vit en exil pour échapper à une condamnation pour corruption.

La figure charismatique de Thaksin, milliardaire érigé en idole par les milieux ruraux du Nord et du Nord-Est qui ont profité de ses politiques sociales pionnières, polarise la vie politique thaïlandaise depuis plus de 20 ans, entre ses soutiens ("les Rouges") et ses adversaires conservateurs alignés sur l'armée ("les Jaunes").

Clash générationnel

Thaksin, comme Yingluck Shinawatra, la tante de Paetongtarn, ont été délogés du pouvoir par un coup d'Etat militaire, respectivement en 2006 et 2014.

Le scrutin de dimanche est le premier d'envergure nationale à se tenir depuis les manifestations massives pro-démocratie de 2020, qui ont réclamé une refonte en profondeur de la monarchie, un sujet tabou en Thaïlande où le roi Maha Vajiralongkorn jouit d'un statut de quasi-divinité.

Ces contestations, qui ont baissé d'intensité sous l'effet de la pandémie de Covid-19 et de la répression des autorités, ont néanmoins nourri le dynamisme de Move Forward ("Aller de l'avant"), l'autre grande force de l'opposition.

Le parti, autoproclamé porte-voix de la nouvelle génération, défend une réforme du controversé article réprimant la lèse-majesté, détourné pour étouffer toute voix dissidente, selon ses détracteurs.

Son leader, le télégénique Pita Limjaroenrat (42 ans), passé par Harvard, s'attend à une participation "historique", a-t-il lancé au moment de voter.

"Les plus jeunes générations accordent maintenant de l'importance à leurs droits et ils vont sortir voter", a assuré le candidat.

Mais ses positions jugées radicales alimentent les rumeurs de dissolution du parti après le scrutin, comme l'a été son ancêtre Future Forward ("En avant l'avenir") après sa percée en 2019.

Sous la bannière du parti de la Nation thaïlandaise unie (UTN), Prayut Chan-O-Cha se veut de son côté le rempart face aux idées réformistes et vante son expérience, gage de stabilité.

"J'ai beaucoup d'espoirs parce qu'il y a une forte compétition entre beaucoup de candidats talentueux, par rapport aux élections dans le passé", a estimé un électeur dans la capitale, Pakorn Adulpan, 85 ans.


La Corée du Nord affirme que tout nouveau comité de surveillance des sanctions est voué à l'échec

L'ambassadeur de la Corée du Nord auprès des Nations Unies, Kim Song, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale des Nations Unies après que la Chine et la Russie ont opposé leur veto à de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord au Conseil de sécurité de l'ONU, au siège de l'ONU à New York, New York, États-Unis, le 8 juin. , 2022 (Photo, Reuters).
L'ambassadeur de la Corée du Nord auprès des Nations Unies, Kim Song, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale des Nations Unies après que la Chine et la Russie ont opposé leur veto à de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord au Conseil de sécurité de l'ONU, au siège de l'ONU à New York, New York, États-Unis, le 8 juin. , 2022 (Photo, Reuters).
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  • La Corée du Nord est soumise depuis 2006 à des sanctions du Conseil de sécurité de l'ONU liées à son programme nucléaire
  • Séoul et Washington affirment que Pyongyang envoie des armes à la Russie, possiblement en échange d'une aide technique

SEOUL: Les efforts visant à mettre en place un nouveau comité d'experts pour surveiller l'application des sanctions internationales visant la Corée du Nord sont voués à l'échec, a déclaré son ambassadeur à l'ONU dans des propos rapportés par un média d'Etat dimanche.

"Les forces hostiles pourraient installer (un) deuxième et (un) troisième comités d'experts à l'avenir mais ils sont tous destinés à connaître l'autodestruction", a lancé l'ambassadeur Kim Song dans un communiqué en langue anglaise diffusé par l'agence de presse officielle KCNA.

En mars, la Russie a mis son veto au Conseil de sécurité de l'ONU à un projet de résolution prolongeant d'un an le mandat du comité d'experts chargé de surveiller l'application des sanctions des Nations Unies visant Pyongyang.

Cette dissolution est un "jugement historique à l'encontre d'une organisation illégale et fomenteuse de complots (...) en vue d'éliminer le droit à l'existence d'un Etat souverain", selon Kim Song.

La Corée du Nord est soumise depuis 2006 à des sanctions du Conseil de sécurité de l'ONU liées à son programme nucléaire, renforcées plusieurs fois en 2016 et 2017. Depuis 2019, la Russie et la Chine, mettant notamment en avant la situation humanitaire en Corée du Nord, réclament l'allègement de ces sanctions, qui n'ont pas de date de fin.

Armes 

N'ayant pas obtenu gain de cause, Moscou a pris pour cible le comité d'experts chargé de surveiller l'application de ces mesures, comité dont les rapports font référence.

Séoul et Washington affirment que Pyongyang envoie des armes à la Russie, possiblement en échange d'une aide technique pour son programme de satellites espions.

Lors d'une visite en Corée du Sud en avril, l'ambassadrice des Etats-Unis à l'ONU, Linda Thomas-Greenfield, a souligné l'importance de garantir l'application des sanctions en Corée du Nord.

D'après l'ambassadrice, Washington travaille avec Séoul, Tokyo et d'autres capitales à trouver "des moyens créatifs" pour reprendre la surveillance des sanctions.

En 2023, la Corée du Nord a conduit un nombre record d'essais de missiles en dépit des sanctions. L'année précédente, Pyongyang a déclaré son statut de puissance nucléaire "irréversible".


Attaque au couteau en Australie, un adolescent de 16 ans «radicalisé» abattu par la police

La police pense que l'adolescent a envoyé des messages à des membres de la communauté musulmane qui ont immédiatement prévenu la police (Photo, AFP).
La police pense que l'adolescent a envoyé des messages à des membres de la communauté musulmane qui ont immédiatement prévenu la police (Photo, AFP).
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  • L'homme «d'âge mûr» blessé par un unique coup de couteau lors de l'attaque se trouve dans un état «grave» mais stable
  • Deux jours après cette attaque dans un centre commercial, un évêque d'une église assyrienne avait également été poignardé

SYDNEY: Un adolescent de 16 ans "radicalisé" et atteint de troubles mentaux a été abattu samedi soir par la police dans la banlieue de Perth, dans l'ouest de l'Australie, après avoir blessé une personne lors d'une attaque au couteau, ont rapporté les autorités dimanche.

L'adolescent, armé d'un couteau, "s'est précipité" sur les forces de l'ordre et a été mortellement touché par le tir d'un agent, a indiqué le Premier ministre de l'Etat d'Australie-Occidentale Roger Cook lors d'une conférence de presse.

"Il y a des indications selon lesquelles il s'était radicalisé en ligne. Mais je tiens à rassurer la population, à ce stade il semble qu'il ait agi seul", a déclaré M. Cook.

La police a reçu un appel samedi soir de la part d'un homme avertissant qu'il allait commettre "des actes de violence" mais sans donner son nom ni sa localisation, a fait part aux journalistes le responsable de la police de l'Etat, Col Blanch.

Quelques minutes plus tard, a-t-il ajouté, la police a reçu un appel d'urgence pour les avertir qu'un "homme avec un couteau courait" au niveau d'un parking de Willetton, dans la banlieue sud de Perth.

L'individu était armé d'un couteau de cuisine de 30 centimètres de long et d'après des images d'une caméra-piéton de la police, l'adolescent a refusé de le poser à terre comme le demandaient les forces de l'ordre, a indiqué M. Blanch.

Les agents ont tiré au moyen de deux pistolets à impulsion électrique mais "aucun des deux n'a eu totalement l'effet escompté", a-t-il relaté.

"L'homme a continué à avancer vers (un agent) muni d'une arme à feu qui a tiré un seul coup et mortellement blessé" l'individu, a raconté le responsable de la police. L'adolescent est décédé à l'hôpital plus tard dans la nuit.

«Radicalisation en ligne»

L'homme "d'âge mûr" blessé par un unique coup de couteau lors de l'attaque se trouve dans un état "grave" mais stable, a dit le responsable policier.

La police pense que l'adolescent a envoyé des messages à des membres de la communauté musulmane qui ont immédiatement prévenu la police, a-t-il expliqué sans divulguer d'informations sur leur contenu.

L'adolescent avait "des problèmes de santé mentale mais aussi des problèmes de radicalisation en ligne", d'après la même source.

Ces dernières années, l'assaillant était suivi dans le cadre d'un programme de lutte contre la violence et l'extrémisme.

"Il ne s'agit pas d'une approche fondée sur la dimension criminelle, c'est un programme visant à aider des individus qui expriment des idéologies préoccupantes pour notre communauté", a expliqué M. Blanch.

Le Premier ministre australien Anthony Albanese a expliqué avoir été tenu au courant des faits par la police et les services de renseignement selon qui il n'y a pas de "menace en cours".

"Nous sommes une nation attachée à la paix et il n'y a pas de place pour l'extrémisme violent en Australie", a écrit M. Albanese sur les réseaux sociaux.

Les crimes violents sont rares en Australie, mais cet incident survient moins d'un mois après une autre attaque au couteau qui a fait six morts dans un centre commercial de Sydney (sud-est).

L'auteur de cette attaque, Joel Cauchi, un homme de 40 ans souffrant de troubles mentaux, avait été abattu par la police. Ses parents ont indiqué que leur fils a été diagnostiqué schizophrène à l'âge de 17 ans, puis qu'il a quitté leur domicile du Queensland (nord-est) et abandonné son traitement.

Deux jours après cette attaque dans un centre commercial, un évêque d'une église assyrienne avait également été poignardé lors d'un sermon diffusé en direct dans une église de Sydney. La victime a survécu à ses blessures. Un adolescent de 16 ans a depuis été inculpé d'"acte terroriste".


Comme un «air de révolution» en Hongrie face au système Orban

Ervin Nagy lors d'un entretien avec l'AFP à Budapest, en Hongrie (Photo, AFP).
Ervin Nagy lors d'un entretien avec l'AFP à Budapest, en Hongrie (Photo, AFP).
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  • Jamais depuis le retour au pouvoir de Viktor Orban en 2010, la Hongrie n'avait connu pareil mouvement de contestation
  • Sans se laisser abattre, Peter Magyar a entamé depuis plusieurs semaines une tournée en province afin d'y récolter des voix

DEBRECEN: Acteur en vue en Hongrie, Ervin Nagy a délaissé les planches et studios de tournage pour battre le pavé. Comme des milliers d'autres, il est saisi par la fièvre Magyar, du nom de ce dissident qui défie Viktor Orban.

Dimanche, il participera à un grand rassemblement dans la ville de Debrecen (est), bastion du parti Fidesz du Premier ministre nationaliste, à un mois des élections européennes.

Depuis l'irruption en février sur la scène politique de Peter Magyar, ex-haut fonctionnaire entré en rébellion, le comédien de 47 ans s'est lancé à ses côtés dans ce combat "pour un renouveau" du pays d'Europe centrale.

Il a même mis à disposition son camion à plateau d'où le tribun s'est adressé à la foule un soir, de manière spontanée.

"Nous n'avions pas le temps de trouver un podium", raconte Ervin Nagy à l'AFP. "Il flottait comme un air de la révolution de 1956", s'enflamme-t-il, en allusion au soulèvement de la Hongrie contre la mainmise soviétique.

«Galvanisés»

Jamais depuis le retour au pouvoir de Viktor Orban en 2010, la Hongrie n'avait connu pareil mouvement de contestation, de l'avis des experts, qui évoquent un défi sans précédent pour le dirigeant.

Après le scandale provoqué par la grâce accordée à un homme condamné dans une affaire de pédocriminalité, Peter Magyar a su capitaliser sur la colère pour drainer des dizaines de milliers de personnes dans les rues de Budapest.

"Apathiques et frustrés" par un pouvoir indéboulonnable, "ils ont été soudainement galvanisés par l'arrivée de cet homme sensé et téméraire", lance l'acteur.

S'il a adhéré par le passé à la cause des enseignants, il n'avait pas d'ambitions politiques jusqu'à ce que Peter Magyar le contacte. "Il m'a convaincu en une heure", se souvient-il.

En trois mois à peine, cette nouvelle figure de l'opposition a évincé les partis existants, avec son discours conservateur pourfendant la corruption qui ruine à ses yeux le pays.

Son mouvement Tisza (Respect et liberté), qui se veut "ni à gauche ni à droite", est désormais crédité de 25% d'intentions de vote auprès des électeurs sûrs de leur choix, selon un récent sondage réalisé par l'institut Median auprès de 1.000 personnes en vue du scrutin européen du 9 juin.

Sa force, pour ses partisans: connaître le système de l'intérieur. Longtemps diplomate à Bruxelles, le charismatique avocat de 43 ans a aussi partagé pendant des années la vie de Judit Varga, ancienne ministre de la Justice, avec laquelle il a eu trois enfants.

«Mini-dictature»

Si Viktor Orban balaie l'arrivée de ce concurrent d'un revers de la main, son parti "se démène pour tuer dans l'oeuf" cette vague de contestation, décrypte pour l'AFP l'analyste Zoltan Lakner.

Des affiches le taxant de "serviteur de Bruxelles" ont fleuri dans le pays, tandis que les journaux pro-gouvernementaux ont publié des dizaines d'articles pour salir sa réputation, d'accusations de violences conjugales - qu'il nie fermement - à des remarques sur ses "lunettes de soleil de femme".

Une nouvelle autorité de surveillance, créée pour prévenir "les interférences étrangères" dans le processus électoral, a également lancé une enquête à son encontre.

"Si Magyar parvient à unir les électeurs de l'opposition", aujourd'hui fragmentée en plusieurs partis sans envergure, il pourrait alors présenter un réel danger pour le pouvoir, estime le politologue.

Même si d'autres jugent le mouvement éphémère et incapable de déstabiliser la solide assise construite par le Premier ministre, qui a progressivement mis au pas les contre-pouvoirs en 14 ans et installé une redoutable propagande selon l'Union européenne, l'ONU et l'OSCE.

Sans se laisser abattre, Peter Magyar a entamé depuis plusieurs semaines une tournée en province afin d'y récolter des voix, son passage à Debrecen lui permettant tester sa popularité.

Sur scène, il sera entouré de plusieurs célébrités hongroises "suffisamment courageuses" pour s'afficher à ses côtés, souligne Ervin Nagy, qui affirme avoir été "placé sur une liste noire" pour avoir osé un jour critiquer un membre du Fidesz.

La Hongrie est devenue "une sorte de mini-dictature", assène-t-il. "Ils ne vous battent pas à mort, mais si vous vous élevez contre les autorités, il y aura des conséquences".