Du haut du Mont-Saint-Michel, Macron appelle les Français au dépassement

Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 06 juin 2023

Du haut du Mont-Saint-Michel, Macron appelle les Français au dépassement

  • Le Mont Saint-Michel «porte l’histoire de la construction politique de notre pays», a lancé Emmanuel Macron
  • Depuis François Mitterrand en 1983, les présidents se pressent au Mont Saint-Michel pour y porter leur message

LE MONT SAINT-MICHEL: Emmanuel Macron, célébrant lundi le millénaire de l'abbaye du Mont Saint-Michel, a appelé les Français au "dépassement" face aux défis du XXIe siècle, notamment écologiques, à l'image des épreuves du temps traversées par ce lieu emblématique d'un certain "esprit français".

Le Mont Saint-Michel "porte l’histoire de la construction politique de notre pays", a lancé le chef de l'État, égrainant la guerre de Cent ans, la Révolution, les partisans de la République embastillés là au XIXe ou encore la lutte contre les éléments naturels, à commencer par l'ensablement de la baie.

"Oui nous avons su toujours nous montrer bâtisseurs en maîtrisant le temps, l’espace, les éléments", a martelé Emmanuel Macron dans un discours aux élans volontiers lyriques.

Devant la presse, avec l'abbaye en toile de fond, il en avait déjà appelé à l'esprit de résistance" face aux "grandes transitions" qui se dessinent, rejetant tout "déclinisme, peur, angoisse ou confrontation", un message qui semblait notamment viser l'extrême droite.

"On voudrait nous faire choisir entre une prétendue identité française figée et nostalgique et une modernité qui exigerait l'effacement de pans entiers de notre passé", a-t-il déploré dans son discours.

Depuis François Mitterrand en 1983, les présidents se pressent dans ce lieu emblématique pour y porter leur message. En 2007, Nicolas Sarkozy avait choisi d'y lancer sa campagne présidentielle.

«Continuer d'avancer»

Le chef de l'État a aussi d'une certaine façon répondu par avance à la nouvelle journée de mobilisation syndicale prévue mardi contre la réforme des retraites, avant l'examen jeudi d'une proposition de loi visant à abroger le passage à la retraite à 64 ans.

"Maintenant le pays doit aussi continuer d'avancer", a-t-il lancé devant la presse, tout en se félicitant que les "choses sont plus calmes qu'elles ne l'ont été".

À la différence des déplacements qui avaient suivi l'adoption de la réforme, aucun concert de casserole n'est venu perturber cette visite.

Cinq ou six militants d'Extinction Rebellion ont bien tenté de graver un message dans le sable sur la baie et de déployer une banderole, mais ils ont été rapidement interrompus par les forces de l'ordre.

Le couple présidentiel est aussi allé à la rencontre des visiteurs à l'entrée du site. "On a un peuple qui crève la dalle", a lancé un homme.

"On a créé des emplois, il faut bien vivre de son travail, on va continuer les réformes pour ça", a répliqué le président. "Je ne lâcherai rien (…) comptez sur moi", a-t-il dit à une dame.

L'Élysée a par ailleurs annoncé une campagne pour classer davantage d'édifices cultuels des XIXe et XXe siècles en France comme monuments historiques, afin d'en faciliter la préservation, avec le possible lancement d'une souscription financière auprès des Français.

Hommage au commando Kieffer 

Sur quelques 50.000 lieux de cultes (dont 42.000 catholiques) en France, seuls 10.500 sont protégés au titre des monuments historiques, un label qui ouvre l'accès aux aides du ministère de la Culture, a fait valoir l'Élysée.

Site le plus fréquenté du pays hors Ile-de-France, le Mont-Saint-Michel a attiré l'an dernier 2,8 millions de visiteurs, dont 1,3 million pour l'abbaye.

Poursuivant son itinérance mémorielle sur la "résilience" et la résistance", Emmanuel Macron se rendra mardi dans le Calvados voisin pour lancer les préparatifs du 80e anniversaire du débarquement allié du 6 juin 1944 qui aura lieu en 2024.

À Colleville-Montgomery, il remettra - avec Léon Gautier, 100 ans, dernier Français vivant à avoir participé au débarquement - les bérets verts aux élèves qui ont réussi leur stage commando.

Sa présence se veut un hommage aux 177 Français qui débarquèrent, regroupés au sein du Commando Kieffer, au côté des 132.000 alliés.

La Première ministre Elisabeth Borne, élue du Calvados, sera aussi présente à Colleville, l'occasion pour les deux têtes de l'exécutif de s'afficher ensemble après le recadrage d'Emmanuel Macron à la cheffe du gouvernement la semaine dernière sur la stratégie à adopter face au Rassemblement national.


Les deux ex-prisonniers français disent qu'ils n'auraient «pas tenu» en Iran sans le soutien en France 

Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis mardi de prison en Iran et installés à l'ambassade de France à Téhéran, ont dit qu'ils n'auraient pu endurer une si longue détention sans la mobilisation en France pour les soutenir, a dit mercredi l'ambassadeur. (AFP)
Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis mardi de prison en Iran et installés à l'ambassade de France à Téhéran, ont dit qu'ils n'auraient pu endurer une si longue détention sans la mobilisation en France pour les soutenir, a dit mercredi l'ambassadeur. (AFP)
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  • "Ils m'ont demandé de passer un message pour dire à leurs familles, mais aussi à tous ceux qui les ont soutenus en France, que sans ce soutien, il n'auraient pas pu tenir", a dit Pierre Cochard sur la radio publique France Inter
  • "Il faut attendre le diagnostic des médecins, mais je les ai trouvés d'abord très heureux, très soulagés tous les deux, par cette libération, on le comprend après trois ans et demi de détention dans des conditions difficiles", a ajouté le diplomate

PARIS: Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis mardi de prison en Iran et installés à l'ambassade de France à Téhéran, ont dit qu'ils n'auraient pu endurer une si longue détention sans la mobilisation en France pour les soutenir, a dit mercredi l'ambassadeur.

"Ils m'ont demandé de passer un message pour dire à leurs familles, mais aussi à tous ceux qui les ont soutenus en France, que sans ce soutien, il n'auraient pas pu tenir", a dit Pierre Cochard sur la radio publique France Inter.

"Il faut attendre le diagnostic des médecins, mais je les ai trouvés d'abord très heureux, très soulagés tous les deux, par cette libération, on le comprend après trois ans et demi de détention dans des conditions difficiles", a ajouté le diplomate.

Après trois ans et demi de détention, ils ont été remis lundi aux autorités françaises à Téhéran et se trouvent actuellement à l'ambassade de France.

Pour autant, ils ne sont pas autorisés à quitter le territoire de la République islamique.

De son côté, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a souligné sur la radio privée RTL que la France n'avait "pas de certitude sur le moment où" la libération définitive de Cécile Kohler et Jacques Paris interviendrait.

"Mais nous n'allons ménager aucun effort pour obtenir leur retour en France dans les meilleurs délais", a-t-il promis.

"Ce n'est qu'une étape, et nous allons continuer à nous mobiliser sans relâche pour obtenir leur libération définitive", a-t-il ajouté, insistant par ailleurs sur la discrétion nécessaire pour "garantir le succès de ce type de manœuvre diplomatique".

"Donc nous ne révélons pas le détail de ces discussions que nous avons avec les autorités à tous les niveaux du Président de la République jusqu'à l'ambassadeur à Téhéran que je veux féliciter pour sa mobilisation", a ajouté le ministre alors que les autorités iraniennes ont évoqué dès septembre un accord sur un échange de prisonniers.

Depuis une dizaine d'années, l'Iran multiplie les arrestations de ressortissants occidentaux, notamment français, les accusant le plus souvent d'espionnage, afin de les utiliser comme monnaie d'échange pour relâcher des Iraniens emprisonnés dans des pays occidentaux ou afin d'obtenir des gages politiques.

Au moins une vingtaine d'Occidentaux seraient encore détenus, selon des sources diplomatiques.

Dans le cas de Cécile Kohler et Jacques Paris, Téhéran a rendu publique le 11 septembre la possibilité d'un accord de libération des deux Français en échange de Mahdieh Esfandiari, une Iranienne arrêtée en France en février pour avoir fait la promotion du terrorisme sur les réseaux sociaux. Son avocat français, Me Nabil Boudi, s'est réjoui de la libération Cécile Kohler et Jacques Paris, assurant que sa cliente a été "détenue injustement".

Celle-ci a été libérée sous contrôle judiciaire dans l'attente de son procès prévu en janvier.


Fin de vie: Falorni et Biétry demandent un référendum à Macron avant l'été, faute de loi

Le député Olivier Falorni, à l'origine des propositions de loi sur la fin de vie, et l'ancien journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot, ont demandé mardi à Emmanuel Macron d'organiser un référendum sur ces textes avant l'été, faute d'adoption parlementaire. (AFP)
Le député Olivier Falorni, à l'origine des propositions de loi sur la fin de vie, et l'ancien journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot, ont demandé mardi à Emmanuel Macron d'organiser un référendum sur ces textes avant l'été, faute d'adoption parlementaire. (AFP)
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  • Deux propositions de loi, une première consensuelle sur les soins palliatifs, et une autre, nettement plus sensible, sur la création d'une aide à mourir, ont été votées fin mai en première lecture à l'Assemblée
  • Plusieurs sources parlementaires ont évoqué ces dernières semaines un examen en janvier à la chambre haute, où la majorité de droite pourrait modifier les textes

BORDEAUX: Le député Olivier Falorni, à l'origine des propositions de loi sur la fin de vie, et l'ancien journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot, ont demandé mardi à Emmanuel Macron d'organiser un référendum sur ces textes avant l'été, faute d'adoption parlementaire.

Deux propositions de loi, une première consensuelle sur les soins palliatifs, et une autre, nettement plus sensible, sur la création d'une aide à mourir, ont été votées fin mai en première lecture à l'Assemblée, mais la chute du gouvernement de François Bayrou a reporté leur examen au Sénat.

Plusieurs sources parlementaires ont évoqué ces dernières semaines un examen en janvier à la chambre haute, où la majorité de droite pourrait modifier les textes, et le ministre des Relations avec le Parlement Laurent Panifous a annoncé la semaine dernière un nouveau débat à l'Assemblée en février.

"Le parcours de ce texte n'avance pas comme il le devrait. Régulièrement retardé, reporté, réinscrit puis de nouveau ajourné... Cela devient insupportable!", déplorent MM. Falorni et Biétry, dans un courrier remis mardi matin au président de la République à l'occasion d'une visite de M. Macron aux Assises de l'économie de la mer à La Rochelle, selon le député apparenté MoDem de Charente-Maritime.

"Pourtant, les malades en fin de vie, eux, n'ont pas le temps d'attendre. Vis-à-vis d'eux, cette situation de blocage est une forme d'indécence", ajoutent les deux hommes.

"C'est pour cela que, si cet enlisement se poursuivait en début d'année prochaine, nous vous demandons solennellement de consulter directement les Français par référendum avant l'été 2026 sur les textes de loi votés en mai dernier par les députés", poursuivent-il.

M. Macron avait lui-même évoqué en mai un référendum, en cas d'"enlisement" au Parlement, tout en précisant qu'il le ferait "avec beaucoup de précaution".

Il répondait alors à une interpellation de Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot, à travers une courte vidéo où la question de l'ancien patron des sports de Canal+, qui aura 82 ans mercredi, était lue par une voix de synthèse.


Le procès du cimentier français Lafarge pour financement du terrorisme s'ouvre à Paris

Après avoir ouvert l'audience, peu après 13H00 GMT, la présidente du tribunal, Isabelle Prévost-Desprez, a commencé à appeler un à un les prévenus à la barre pour leur énoncer les infractions dont ils sont accusés. (AFP)
Après avoir ouvert l'audience, peu après 13H00 GMT, la présidente du tribunal, Isabelle Prévost-Desprez, a commencé à appeler un à un les prévenus à la barre pour leur énoncer les infractions dont ils sont accusés. (AFP)
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  • Le tribunal correctionnel les jugera jusqu'au 16 décembre pour financement d'entreprises terroristes, et pour certains aussi pour non-respect de sanctions financières internationales
  • Au côté de Lafarge, avalé en 2015 par le groupe suisse Holcim, sont jugés à Paris l'ancien PDG du cimentier français Bruno Lafont, cinq ex-responsables de la chaîne opérationnelle ou de la chaîne de sûreté et deux intermédiaires syriens

PARIS: Le procès du groupe français Lafarge et de huit anciens responsables, soupçonnés d'avoir payé des groupes jihadistes, dont le groupe Etat islamique, en Syrie jusqu'en 2014 dans le but d'y maintenir l'activité d'une cimenterie, s'est ouvert mardi à Paris, une première en France pour une multinationale.

Après avoir ouvert l'audience, peu après 13H00 GMT, la présidente du tribunal, Isabelle Prévost-Desprez, a commencé à appeler un à un les prévenus à la barre pour leur énoncer les infractions dont ils sont accusés.

Le tribunal correctionnel les jugera jusqu'au 16 décembre pour financement d'entreprises terroristes, et pour certains aussi pour non-respect de sanctions financières internationales.

Au côté de Lafarge, avalé en 2015 par le groupe suisse Holcim, sont jugés à Paris l'ancien PDG du cimentier français Bruno Lafont, cinq ex-responsables de la chaîne opérationnelle ou de la chaîne de sûreté et deux intermédiaires syriens, dont l'un, visé par un mandat d'arrêt international, devrait être absent au procès.

Lafarge est soupçonné d'avoir versé en 2013 et 2014, via sa filiale syrienne Lafarge Cement Syria (LCS), plusieurs millions d'euros à des groupes rebelles jihadistes - dont certains, comme l'organisation Etat islamique (EI) et Jabhat al-Nosra, ont été classés comme "terroristes" - afin de maintenir l'activité d'une cimenterie à Jalabiya, dans le nord de la Syrie.

La société avait investi 680 millions d'euros dans ce site, dont la construction avait été achevée en 2010.

Intermédiaires 

Alors que les autres multinationales avaient quitté le pays en 2012, Lafarge n'a évacué cette année-là que ses employés de nationalité étrangère, et maintenu l'activité de ses salariés syriens jusqu'en septembre 2014, date à laquelle l'EI a pris le contrôle de l'usine.

Dans ce laps de temps, LCS aurait rémunéré des intermédiaires pour s'approvisionner en matières premières auprès de l'EI et d'autres groupes, et pour que ces derniers facilitent la circulation des employés et des marchandises.

L'information judiciaire avait été ouverte à Paris en 2017 après plusieurs révélations médiatiques et deux plaintes en 2016, une du ministère de l'Economie pour violation d'embargo et l'autre des associations Sherpa, Centre européen pour les droits constitutionnels (ECCHR) et de onze anciens salariés de LCS pour financement du terrorisme.

Le nouveau groupe issu de la fusion de 2015 - d'abord baptisé LafargeHolcim, puis renommé Holcim en 2021 -, qui a toujours pris soin de se désolidariser des faits antérieurs à cette opération, avait entretemps lancé une enquête interne.

Confiée aux cabinets d'avocats américain Baker McKenzie et français Darrois, elle avait conclu en 2017 à des "violations du code de conduite des affaires de Lafarge".

Et en octobre 2022, Lafarge SA avait plaidé coupable aux Etats-Unis d'avoir versé à l'EI et Jabhat Al-Nosra près de 6 millions de dollars et accepté d'y payer une sanction financière colossale de 778 millions de dollars.

En France, Lafarge encourt jusqu'à 1,125 million d'euros d'amende pour le financement du terrorisme. Pour la violation d'embargo, l'amende encourue est plus lourde, allant jusqu'à 10 fois le montant de l'infraction qui sera retenu in fine par la justice.

"Responsabilités des multinationales" 

Selon la défense de Bruno Lafont, qui conteste avoir été informé des paiements aux groupes terroristes, l'accord de plaider-coupable est une "atteinte criante à la présomption d'innocence, qui jette en pâture les anciens cadres de Lafarge" et avait pour objectif "de préserver les intérêts économiques d'un grand groupe".

Pour l'ex-PDG, qui "attend de pouvoir enfin défendre son honneur, et de comprendre ce qui s'est passé", le procès qui s'ouvre permettra d'"éclaircir" plusieurs "zones d'ombre du dossier", comme le rôle des services de renseignement français.

Les magistrats instructeurs ont estimé que si des remontées d'informations avaient eu lieu entre les responsables sûreté de Lafarge et les services secrets sur la situation autour du site, cela ne démontrait "absolument pas la validation par l'Etat français des pratiques de financement d'entités terroristes mises en place par Lafarge en Syrie".

Sherpa, partie civile dans le dossier, estime de son côté que ce procès est une "occasion inédite pour la justice française de se pencher sur la responsabilité des multinationales lorsqu'elles opèrent dans des zones de conflit".

Un autre volet retentissant de ce dossier est toujours à l'instruction, le groupe ayant aussi été inculpé pour complicité de crimes contre l'humanité en Syrie et en Irak.